Avis Public CRTC 90-89

Ottawa, le 20 septembre 1990

POLITIQUE EN MATIERE DE RADIOTÉLÉDIFFUSION AUTOCHTONE

Documents connexes : "Les années 1980: Décennie de la pluralité" (Rapport du Comité sur l'extension du service aux petites localités éloignées et à celles du Nord, juillet 1980); l'avis public CRTC 1985-274 du 19 décembre 1985 intitulé "La radiotélédiffusion autochtone dans le Nord"; l'avis public CRTC 1986-75 du 27 mars 1986 intitulé "Comité d'action du CRTC concernant la radiotélédiffusion autochtone dans le Nord"; l'avis public CRTC 1989-53 du 26 mai 1989 intitulé "Examen de la radiotélédiffusion autochtone dans le Nord: Appel d'observations"; et l'avis public CRTC 1990-12 du 2 février 1990 intitulé "Examen de la radiotélédiffusion autochtone - Un projet de politique".

Historique

À la suite d'une série d'audiences publiques tenues à l'automne 1985, le Conseil a publié l'avis public CRTC 1985-274 intitulé "La radiotélédiffusion autochtone dans le Nord" dans lequel il traitait d'un certain nombre de questions touchant la distribution des services de radio et de télévision autochtones. Cet énoncé de politique reposait sur les principes contenus dans le Rapport du Comité sur l'extension du service aux petites localités éloignées et à celles du Nord (le Rapport Therrien), et, ensemble, ils ont constitué la base de la politique du Conseil. Dans l'avis public CRTC 1989-53 intitulé "Examen de la radiotélédiffusion autochtone dans le Nord: Appel d'observations", le Conseil a annoncé qu'il comptait mettre à jour sa démarche de réglementation à l'égard de la radiotélédiffusion autochtone de manière à tenir compte de l'évolution du rôle de cet important segment du système de radiodiffusion ainsi qu'à articuler et à clarifier les objectifs spécifiques s'y rattachant.

C'est en s'appuyant sur les renseignements recueillis suite à cet appel d'observations que le Conseil a publié l'avis public CRTC 1990-12 daté du 2 février 1990 et intitulé "Examen de la radiotélédiffusion autochtone - Un projet de politique". Dans cet avis, le Conseil a énoncé sa position à l'égard de ce qui constituerait des définitions pertinentes et applicables d'entreprise autochtone, d'émission autochtone et de musique autochtone. Il a proposé des classes de licence pour les stations de radio communautaire autochtone et il a défini le cadre des activités de publicité et des Promesses de réalisation. De plus, il a traité du développement de la musique autochtone et du règlement des différends entre les radiotélédiffuseurs autochtones et conventionnels. En dernier lieu, il a indiqué qu'il ne voulait plus mettre l'accent sur "le Nord" comme dans l'ancienne politique, mais encourager la poursuite du développement de la radiotélédiffusion autochtone dans toutes les régions du pays.

La date limite du 2 avril 1990 pour le dépôt des observations du public a été prolongée jusqu'au 1er juin 1990 pour donner suffisamment de temps aux radiotélédiffuseurs autochtones de modifier leurs mémoires de manière à tenir compte des conséquences des réductions du financement que le gouvernement fédéral leur accorde, lesquelles résultaient de son budget de février.

Cadre de réglementation à l'égard de la radiotélédiffusion autochtone

1. Rôle et objectifs

La radiotélédiffusion autochtone au Canada a commencé dans les années 60, mais son développement a été lent jusqu'à l'établissement par le gouvernement fédéral, en 1983, du Programme d'accès des autochtones du Nord à la radiotélédiffusion (PAANR).

Aujourd'hui, 13 sociétés de communications autochtones régionales financées par le PAANR emploient plus de 380 personnes et ensemble, elles produisent une moyenne hebdomadaire de 315 heures de radio et de 12 heures de télévision. En outre, des douzaines de stations de radio communautaire ont été établies pour distribuer les émissions réseau des sociétés régionales tout en offrant un service complémentaire local.

Il est clair que le PAANR contribue maintenant dans une large mesure à faciliter la dispense de précieux services de radiotélédiffusion aux auditoires autochtones. Ces services jouent donc un rôle semblable à celui d'autres services publics comme la SRC, puisqu'ils offrent un premier service, souvent en langues autochtones, dont on avait grand besoin et que le secteur privé ne fournit pas.

Cependant, parce qu'ils dépendent des deniers publics, les radiotélédiffuseurs autochtones sont particulièrement affectés par le programme de restrictions du gouvernement. Les récentes compressions budgétaires ont entraîné l'élimination du Programme des communications sociales des autochtones qui appuyait la radio communautaire, la radio de piste et la presse autochtone. En même temps, le budget du PAANR a été réduit de 16 p. 100. Ces mesures ont eu comme effet global de réduire sensiblement les budgets d'exploitation des 13 sociétés du PAANR, jusqu'à 25 p. 100 dans certains cas. Ainsi, certains radiotélédiffuseurs autochtones n'ont pas d'autre choix que de chercher à obtenir des recettes publicitaires et, par conséquent, d'intensifier leur orientation commerciale.

De l'avis du Conseil, il est essentiel que les radiotélédiffuseurs autochtones reçoivent suffisamment de fonds pour s'acquitter de leurs responsabilités. De plus, les radiotélédiffuseurs autochtones doivent tenir compte des pressions que l'adoption d'une orientation commerciale exercera nécessairement sur leurs émissions et leurs ressources.

L'avènement de la technologie des satellites a eu un effet très marqué sur les localités éloignées et isolées à cause de l'importation massive des services de radiotélédiffusion du Sud. De ce fait, les radiotélédiffuseurs autochtones ont pour principal rôle de répondre aux besoins culturels et linguistiques spécifiques de leurs auditoires, tout en créant un environnement propice à l'épanouissement des artistes, musiciens, auteurs et producteurs autochtones. C'est de cette façon qu'ils peuvent apporter un élément de diversité qui sera le contrepoids et le complément des sources de programmation non autochtone. Pour sa part, le Conseil estime essentiel que le cadre de réglementation dans lequel les radiotélédiffuseurs autochtones évoluent demeure souple et adaptable aux circonstances diverses de chaque région. Le cadre doit tenir compte des besoins particuliers des auditoires autochtones et demeurer simplifié pour minimiser le fardeau de réglementation.

Le Conseil reconnaît que, sous réserve des grands objectifs du CRTC et des exigences statutaires, ce sont les radiotélédiffuseurs autochtones qui sont les mieux placés pour déterminer les besoins de leurs auditoires et y répondre.

2. Définitions

Dans son projet de politique, le Conseil a proposé des définitions pour les expressions entreprise autochtone, émission autochtone et musique autochtone.

Dans certains mémoires, il a été proposé que, pour clarifier les définitions, le Conseil précise le sens du mot "native" dans la version anglaise.

Dans la version anglaise de ses avis publics et décisions, le Conseil a utilisé indifféremment les termes "native" et "aboriginal", sachant que pour les radiotélédiffuseurs autochtones eux-mêmes, c'est une question de préférence. Le français n'utilise qu'un seul mot pour rendre l'un ou l'autre.

Selon le Conseil, la définition de "native" devrait correspondre à celle de "aboriginal" donnée dans la Constitution canadienne; c'est-à-dire "aboriginal peoples of Canada includes the Indian, Inuit and Métis peoples of Canada."

2.1 Définition d'une entreprise autochtone

Il n'existe pas actuellement de classe de licence propre aux radiotélédiffuseurs autochtones. Dans son projet de politique, le Conseil a proposé une définition d'entreprise autochtone qui en résume brièvement le mandat.

Même si dans la plupart des mémoires, on a appuyé la définition proposée, les radiotélédiffuseurs commerciaux et l'Association canadienne des radiodiffuseurs (l'ACR) ont recommandé qu'elle traite spécifiquement de la préservation des langues et des cultures autochtones. L'ACR a proposé que la programmation soit [TRADUCTION] "sensiblement distincte ...ayant au moins une exigence minimale à l'égard des émissions en langue autochtone."

Le Conseil considère qu'il faudrait modifier la définition d'entreprise autochtone de manière à inclure la conservation et le développement des cultures autochtones et, lorsque c'est possible, la préservation des langues ancestrales, comme des aspects essentiels du rôle que ces stations joueront. À ce propos, il fait remarquer que dans certaines régions du pays, on ne parle presque plus la langue autochtone dans certains segments de la population.

Voici la définition révisée d'entreprise autochtone:

Entreprise autochtone : Se distingue par sa propriété, sa programmation et son auditoire cible. Elle est possédée et contrôlée par un organisme sans but lucratif dont la structure prévoit que le conseil d'administration est formé à même la population autochtone de la région  desservie. Qu'elle soit dans une langue canadienne autochtone ou dans l'une ou l'autre des langues officielles ou les deux, la programmation doit néanmoins s'adresser spécifiquement à la population autochtone et tenir compte des intérêts et des besoins particuliers des auditoires autochtones que l'entreprise est autorisée à desservir. Celle-ci a pour rôle distinct d'encourager l'épanouissement des cultures autochtones et, lorsque c'est possible, la préservation des langues ancestrales.

Le Conseil compte modifier ses formules de demande de licence et de renouvellement de manière à inclure, comme nouvelle catégorie, celle d'entreprise autochtone.

Le Conseil encourage la participation des autochtones dans tous les secteurs du système de radiodiffusion, y compris le secteur commercial. La définition ci-dessus reflète la réalité actuelle, à savoir que les entreprises de radiotélédiffusion autochtone sont confinées, pour la plupart, à des activités sans but lucratif reflétant, dans une large mesure, le financement par le gouvernement et le fait que la majorité des radiotélédiffuseurs autochtones se trouvent dans des régions isolées ne pouvant pas soutenir des entreprises commerciales viables. Lorsque des Canadiens autochtones voudront obtenir des licences en vue d'exploiter une entreprise commerciale, ils devront respecter les mêmes obligations et combler les mêmes attentes que les autres radiotélédiffuseurs commerciaux.

2.2 Définition d'une émission autochtone

Dans son projet de politique, le Conseil a défini comme suit une émission autochtone :

Émission autochtone: Une émission, peu importe la langue utilisée, s'adressant spécifiquement à un auditoire autochtone distinct, ou une émission portant sur un aspect de la vie, sur les intérêts ou sur la culture des autochtones du Canada.

Cette définition n'inclut pas de contingentement de l'utilisation de la langue ou de la musique non autochtones. De plus, elle reconnaît que la radiotélédiffusion d'émissions autochtones ne devrait pas être réservée aux radiotélédiffuseurs autochtones, et qu'il ne faudrait pas empêcher les non-autochtones de faire des émissions intéressant les autochtones.

L'ACR et des représentants du secteur privé de la radio ont exprimé des réserves au sujet de la définition proposée. Même s'il n'est plus raisonnable selon l'ACR de définir une émission autochtone uniquement en fonction de la langue parlée ou de la musique jouée, la définition est trop vaste et elle a proposé d'y ajouter que chaque émission doit respecter un seul critère, notamment qu'elle serve [TRADUCTION] "d'instrument de valorisation et de préservation de la culture du peuple autochtone canadien".

Le Conseil souligne que ce principe est déjà inclus dans la définition d'une entreprise autochtone. Il estime en outre qu'il pourrait être trop lourd et souvent inopportun de l'appliquer à chacune des émissions. Par exemple, il serait déraisonnable d'exiger ou de s'attendre que les bulletins de nouvelles diffusés par une station de radio autochtone servent d'instrument de préservation de la culture autochtone.

Le Conseil a donc décidé d'adopter telle quelle la première définition d'une émission autochtone qu'il a proposée dans son projet de politique.

2.3 Définition de la musique autochtone

Le Conseil avait proposé d'adapter la formule MAPP pour les fins de déterminer l'admissibilité des pièces musicales comme musique autochtone canadienne. En quantifiant la musique autochtone canadienne diffusée par une titulaire, il voulait contrôler les efforts de celle-ci à l'égard du développement des talents canadiens ainsi que de l'augmentation subséquente des enregistrements et de la diffusion de cette musique.

Dans son projet de politique, le Conseil a noté la grande pénurie d'enregistrements musicaux autochtones et il a déclaré qu'il n'était ni possible ni souhaitable d'imposer un contingentement à ce stade-ci.

La réponse des radiotélédiffuseurs autochtones au projet de définition de la musique autochtone a été généralement négative. En effet, cette définition est superflue, selon eux, en l'absence d'exigences de diffusion. Ils ont également soutenu énergiquement que, parce que la musique autochtone n'est pas limitée par des frontières politiques, une définition devrait nécessairement comprendre toute la musique amérindienne en Amérique du Nord. L'Inuit Broadcasting Corporation a souligné que, pour ses propres fins, la musique inuit est la musique qui émane des peuples autochtones de toute la région circumpolaire, y compris l'Alaska, le Groenland et l'URSS.

Compte tenu de ces arguments, le Conseil a décidé de ne pas proposer pour l'instant de définition précise de la musique autochtone. Toutefois, comme il l'a noté ci-dessous, il croit fermement que les radiotélédiffuseurs autochtones doivent jouer efficacement un rôle de premier plan dans le développement et la mise en valeur en ondes des artistes musicaux autochtones. Ce facteur comptera beaucoup lors de l'évaluation de la Promesse de réalisation des titulaires ainsi que lors des renouvellements subséquents.

Le Conseil félicite la SRC pour les efforts déployés au chapitre du développement des talents autochtones et il est heureux de souligner qu'elle compte mettre ses enregistrements autochtones à la disposition des radiotélédiffuseurs autochtones.

3. Types de stations autochtones

La radiotélédiffusion autochtone est surtout concentrée dans des stations de radio communautaire se trouvant dans des petites localités éloignées. Le Conseil fait remarquer qu'en 1988, plus de 100 stations de radio communautaire autochtone étaient en ondes, et que plus des deux tiers recevaient et retransmettaient des émissions de radio en langue autochtone produites par les réseaux régionaux financés par le PAANR.

L'implantation des services de télévision autochtone a été plus lente et, à ce jour, les émissions produites par les réseaux de télévision autochtone sont distribuées soit par la SRC, soit par TVOntario.

Le Conseil a proposé que les réseaux de radio et de télévision autochtones soient tenus de remplir la même formule de demande que les réseaux conventionnels.

Dans le cas des stations de radio autochtone, il en a établi deux types.

Type A: Une station de radio autochtone est une station de type A si, lors de l'attribution ou du renouvellement de la licence, aucune autre licence de radio MA ou MF commerciale autorisant l'exploitation d'une station dans la totalité ou une partie du même marché n'est en vigueur.

Type B: Une station de radio autochtone est une station de type B si, lors de l'attribution ou du renouvellement de la licence, au moins une licence de radio MA ou MF commerciale autorisant l'exploitation d'une station dans la totalité ou une partie du même marché est en vigueur.

Actuellement, toutes les stations de radio autochtone utilisent des fréquences MF. Les nouvelles entreprises autochtones qui désirent utiliser la bande MA doivent accepter un mandat et fonctionner dans un cadre semblable à celui des stations MF.

Le Conseil rappelle aux titulaires qu'elles sont assujetties aux exigences énoncées dans le Règlement de 1986 sur la radio et le Règlement de 1987 sur la télédiffusion, y compris les dispositions relatives aux registres et aux rubans-témoins.

En réponse aux suggestions, le Conseil peut être disposé à accorder un statut de type A aux petites stations de radio autochtone de faible puissance lesquelles, même si elles sont situées dans le périmètre de rayonnement d'une station commerciale urbaine adjacente, n'entrent pas en concurrence directe dans ce marché. Chaque cas serait étudié individuellement. Dans le projet de politique, il n'était pas question d'un cadre de réglementation pour les stations de télévision autochtone, aucune n'étant exploitée actuellement. Lorsque le Conseil en autorisera, les stations pourraient se voir accorder le statut de "station périphérique" telle que définie dans le Règlement de 1987 sur la télédiffusion. Chaque station aurait ainsi une certaine souplesse à l'égard des émissions canadiennes, des registres et enregistrements ainsi que du matériel publicitaire.

4. Promesse de réalisation

Le Conseil a proposé que tous les réseaux de télévision et de radio autochtones et toutes les stations de radio autochtone de type B soient tenus de déposer une Promesse de réalisation dans le cadre d'une demande de licence ou de renouvellement de licence. Comme la vaste majorité, et de loin, des entreprises autochtones feront partie de la catégorie des stations de radio autochtone de type A, elles ne seront pas assujetties à cette exigence.

Le Conseil a également noté que la radiotélédiffusion autochtone en est encore au stade de développement, et qu'un financement instable et un fort roulement de personnel pourraient rendre plus difficile la pleine conformité à une Promesse de réalisation. Il a donc proposé que, pour l'instant, celle-ci ne soit pas imposée comme condition de licence.

Même si dans la plupart des mémoires, on est d'accord avec cette approche, on craint que les politiques du Conseil ne soient inapplicables si la Promesse de réalisation ne fait pas l'objet d'une condition de licence. D'une part, le Conseil reconnaît que sans cette condition de licence, ses politiques, qui visent à atteindre les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion, pourraient être ignorées par certains radiotélédiffuseurs. D'autre part, il croit en être arrivé à un cadre de politique réaliste grâce à la bonne volonté et à la collaboration de toutes les parties visées, et il ne désire pas imposer d'obligations à moins qu'elles ne soient justifiées. Il a donc décidé de ne pas imposer pour l'instant, dans la licence, de condition de conformité importante à la Promesse de réalisation. Toutefois, il continuera d'imposer les conditions de licence habituelles concernant la publicité, l'exigence de 30 % en matière de contenu canadien qui s'applique aux stations radiophoniques ainsi que le respect des codes de l'industrie relatifs aux stéréotypes sexuels et à la publicité destinée aux enfants.

Dans certains mémoires, on a demandé des précisions au sujet des cas où une station autochtone de type B est la principale source du réseau. Comme deux licences distinctes seraient exigées, une pour la station et une pour le réseau, il est clair que les Promesses de réalisation seraient identiques, à moins que ne soit prévu un signal double pour permettre la diffusion d'une programmation différente à chaque entreprise.

Lorsqu'il a décrit les éléments de la Promesse de réalisation, le Conseil a proposé que celle-ci comprenne la grille-horaire et les politiques de programmation projetées par la titulaire ainsi que l'engagement de cette dernière à l'égard du développement et de la mise en valeur en ondes des talents autochtones. La Promesse devrait aussi inclure une description de la façon dont la titulaire tient compte, dans la programmation proposée, des besoins et des préférences de l'auditoire cible ainsi que les mesures qu'elle a prises pour veiller à ce que ces émissions favorisent la mise en valeur des langues et des cultures autochtones. Les titulaires seront tenues de préciser les heures d'exploitation proposées, les langues dans lesquelles la programmation sera diffusée, le temps devant être consacré aux différents genres d'émissions et formules musicales (pour la radio), les politiques en matière de publicité ainsi que les engagements concernant la présentation, la promotion et le développement des talents autochtones.

Le Conseil entend élaborer une Promesse de réalisation propre aux radiodiffuseurs autochtones fondée sur les critères susmentionnés.

5. Publicité

Au début, la plupart des sociétés de communications financées par le PAANR n'envisageaient pas la nécessité d'obtenir des recettes publicitaires. Cependant, les niveaux de financement ayant été gelés en 1987, puis sensiblement réduits en 1990, la plupart des radiotélédiffuseurs autochtones sont maintenant d'avis que, pour continuer d'offrir à leurs auditeurs un niveau de service acceptable, ils doivent pouvoir diversifier leurs sources de financement.

Par ailleurs, les radiotélédiffuseurs privés ont fait valoir que les stations de radio autochtone financées par le gouvernement ne devraient pas être autorisées à livrer une concurrence au chapitre des recettes publicitaires limitées des marchés qu'ils desservent. L'ACR a proposé que les demandes des radiotélédiffuseurs autochtones en ce sens soient examinées individuellement.

Dans son projet de politique, le Conseil a déclaré que:

 il n'est pas justifié d'imposer des limites ou des distinctions de publicité aux radiodiffuseurs autochtones. Il est d'accord avec la majorité des mémoires qui préconisent qu'on traite les stations de radio communautaire autochtone de la même manière que d'autres titulaires de licence de radio communautaire. Il propose donc que les stations de radio communautaire autochtone de type A soient autorisées à diffuser jusqu'à 250 minutes de publicité par jour et jusqu'à 1 500 minutes par semaine, pour les stations qui diffusent entre 6 heures et minuit sept jours par semaine, autrement 20 % du temps de radiodiffusion total d'une station. Les stations de radio communautaire autochtone de type B seront autorisées à diffuser une moyenne horaire de quatre minutes de publicité par jour, et au plus six minutes par heure. Ces restrictions seront imposées comme condition de licence à chaque station de radio communautaire autochtone. Le Règlement de 1986 sur la radio n'impose pas aux réseaux de restrictions en matière de publicité.

Dans le cas des stations de radio autochtone de type A, le Conseil a décidé de retirer toutes les restrictions de publicité parce qu'il n'y a pas d'autres stations commerciales dans ces marchés, et que le potentiel publicitaire est si limité que le maximum de 250 minutes par jour est bien supérieur à ce que ces marchés peuvent soutenir.

Les stations de radio autochtones de type B demeureront assujetties aux limites soulignées dans le projet de politique qui permet une moyenne de quatre minutes de publicité par heure par jour, et un maximum de six minutes dans une période d'une heure.

Le Conseil a reçu une demande d'une station de radio autochtone de type B visant à s'affilier à un service réseau privé de musique country et à obtenir l'autorisation de vendre de la publicité dans le cadre de ce service. Il estime que ces demandes devraient faire l'objet d'observations du public ainsi que d'un examen individuel.

Dans un certain nombre de mémoires, les radiotélédiffuseurs autochtones ont dit craindre que la limite de quatre minutes en moyenne par heure de publicité pour les stations de radio de type B ne constitue une sérieuse restriction puisque les annonces publicitaires sont souvent traduites de l'anglais ou du français pour être rediffusées en langues ou en dialectes autochtones. Ainsi, une annonce diffusée en anglais et dans trois langues autochtones doit être comptée quatre fois, ce qui signifie, selon les radiotélédiffuseurs, que le contingentement publicitaire permis s'en trouverait rapidement épuisé. Ils ont ajouté que les versions traduites peuvent prendre 50 p. 100 plus de temps que la version anglaise originale en raison de la structure grammaticale de certaines langues autochtones. Le Conseil convient que, dans cette situation unique, les restrictions proposées à l'égard de la publicité imposeraient des restrictions injustes aux radiotélédiffuseurs autochtones et qu'elles pourraient décourager la diffusion d'annonces publicitaires dans toutes les langues appropriées.

Le Conseil a donc décidé que seules les versions originales des annonces publicitaires en anglais, en français ou dans une langue autochtone devraient être calculées pour les fins de la limite de quatre minutes en moyenne par heure de publicité. Les versions des annonces traduites en langues autochtones ne seront pas comptées.

Les stations et réseaux de télévision autochtone seront tenus de respecter les restrictions de publicité énoncées dans le Règlement de 1987 sur la télédiffusion, qui permet jusqu'à 12 minutes par heure de publicité.

Actuellement, aucun télédiffuseur autochtone n'exploite son propre système de distribution. Seuls quelques réseaux radiophoniques autochtones le font. En fait, la majorité ont conclu des arrangements d'accès avec la SRC ou TVOntario.

Au cours des dernières années, des discussions ont eu lieu avec la SRC pour déterminer si elle modifierait les ententes d'accès avec les radiotélédiffuseurs autochtones pour leur permettre de se livrer à des activités de publicité.

La SRC a indiqué qu'elle est maintenant disposée à accepter que les télédiffuseurs autochtones utilisent ses installations de distribution pour vendre des annonces publicitaires dans le cadre des émissions d'accès autochtones, à la condition qu'ils respectent les lignes directrices de la SRC à cet égard et qu'ils obtiennent la couverture d'assurance nécessaire. La Société a ajouté qu'elle serait disposée à les aider à obtenir des tarifs de groupe pour cette couverture.

Pour ce qui est de la radio, la SRC a indiqué qu'elle ne serait pas disposée à changer sa politique interdisant la publicité dans les émissions d'accès autochtones.

TVOntario distribue les émissions de radio et de télévision de la Wawatay Native Communications Society du nord de l'Ontario. Elle a fait valoir que ses ententes actuelles d'accès n'interdisent pas la publicité et que [TRADUCTION] "la décision de faire ou non de la publicité reviendrait à la Wawatay. La Wawatay et le Conseil départageraient l'autorité pour ce faire." Le Conseil est heureux de constater que TVOntario n'interdit pas actuellement la publicité dans les émissions d'accès autochtones.

Dans l'avis public CRTC 1990-12, le Conseil a qualifié par erreur l'activité de financement d'entreprise de TVOntario de recettes de commandite et il regrette cette interprétation erronée.

6. Différends avec les radiotélédiffuseurs privés

Des stations de radio privées de Whitehorse et de Yellowknife se sont dites préoccupées par le fait que, dans leurs localités, les radiotélédiffuseurs autochtones aient érodé sensiblement l'auditoire en diffusant du country ou du rock conventionnel. À leur avis, les stations autochtones ne devraient pas être autorisées à livrer une concurrence au chapitre des recettes publicitaires. Selon certains mémoires, toutefois, c'est aux radiotélédiffuseurs privés qu'il devrait incomber de justifier les prétentions de préjudice financier causé par les radiotélédiffuseurs autochtones.

Le Conseil estime qu'en limitant l'activité publicitaire des stations autochtones de type B à une moyenne de 4 minutes par heure d'annonces publicitaires (dans leur version originale), il offre une protection satisfaisante aux stations commerciales privées. Le cadre de réglementation global, y compris l'obligation qui est faite aux réseaux radiophoniques et aux stations autochtones de type B de déposer une Promesse de réalisation, garantit aussi que la programmation de ces entreprises s'adresse spécifiquement à la population autochtone.

Toute autre plainte sera assujettie au processus habituel de règlement des plaintes du Conseil, et au processus d'intervention lors du renouvellement des licences.

7. Distribution

Chacun des 13 réseaux régionaux financés par le PAANR doit desservir une grande région géographique, comme la région arctique du Québec, tout le Yukon, le nord de l'Ontario, ainsi de suite. Sans la technologie de transmission par satellite, seul un petit nombre de ces services régionaux pourrait exister.

La SRC joue un rôle de premier plan en donnant accès à ses installations de distribution aux réseaux autochtones de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, du Québec et des Territoires du Nord-Ouest. TVOntario distribue par satellite les services de radio et de télévision de la Wawatay Native Communications Society en Ontario. À l'heure actuelle, Les Communications par satellite canadien Inc. (la Cancom) fournissent gratuitement des sous-porteuses de radiodiffusion sonore aux réseaux radiophoniques autochtones dans les régions du Yukon et du delta du MacKenzie, et elles en fourniront deux autres en vertu de la décision la plus récente portant sur le renouvellement de la licence (décision CRTC 90-92). En Colombie-Britannique, des stations commerciales privées ont contribué à la distribution de services radiophoniques autochtones en donnant du temps d'antenne gratuit.

Le Conseil reconnaît les contributions importantes des diverses parties qui, ces dernières années, ont fourni aux radiotélédiffuseurs autochtones l'accès à leurs installations de distribution. Notamment, la participation de la SRC dans la promotion et l'aide des radiotélédiffuseurs autochtones remonte aux premiers jours de la Société dans l'Arctique, et dans une large mesure, elle a suscité chez les peuples autochtones le désir d'établir leurs propres services de radiotélédiffusion.

Dans son mémoire, la SRC a affirmé qu'elle-même et d'autres radiotélédiffuseurs s'occupant de la distribution d'émissions autochtones devraient continuer d'accorder du temps d'accès, et elle a recommandé que le Conseil maintienne son Comité d'accès pour résoudre les différends en matière d'accès et d'inscription
à l'horaire.

En dernier lieu, le Conseil est heureux de souligner que le Ministre des Communications a annoncé le 9 mai 1990 l'engagement du gouvernement d'établir un transpondeur de satellite exclusif pour le Nord, appelé TVNC. Celui-ci allégera les pressions qui s'exercent actuellement sur le service surchargé de télévision du Nord de la SRC et permettra aux télédiffuseurs autochtones de réaliser un rêve de longue date, soit d'exercer un contrôle sur la distribution de leurs services.

8. Conclusion

Cet examen de la radiotélédiffusion autochtone a commencé en 1988 par une étude confiée à la firme Greg Smith and Associates et qui a été suivie par deux appels d'observations distincts. Le Conseil désire remercier tous ceux qui ont contribué à cet examen et il se réjouit de l'esprit constructif et d'entraide dans lequel cette politique a été élaborée.

Le Secrétaire général
Alain-F. Desfossés

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