ARCHIVÉ - Ordonnance CRTC 2000-653

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Ordonnance CRTC 2000-653

Ottawa, le 14 juillet 2000
Le Conseil rejette l'abstention relative aux services d'accès au réseau numérique

Référence : 8640-C12-04/00 et 8640-S1-06/98

Le Conseil rejette les demandes d'abstention relatives à la réglementation des services d'accès au réseau numérique présentées par les grandes compagnies de téléphone titulaires. Bien qu'un marché concurrentiel soit en train de s'implanter pour ces services, le Conseil estime que l'abstention serait prématurée, puisque ces services sont une composante de réseau essentielle pour les concurrents.

1.

Cette décision répond à deux demandes distinctes d'abstention de réglementation de la fourniture de services d'accès au réseau numérique (ARN) dans certains emplacements, conformément à l'article 34 de la Loi sur les télécommunications. Les deux demandes ont été déposées le 15 décembre 1998.

2.

BC TEL, Bell Canada et TELUS Communications Inc. (TCI), ont conjointement demandé que le Conseil s'abstienne d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi concernant les services d'ARN haut débit, dans certains de leurs centres de commutation situés à Toronto, Ottawa, Montréal, Québec, Calgary et Vancouver. Cette demande vise les services d'ARN de largeurs de bande DS-0, DS-1 et DS-3, plusieurs éléments de divers Tarifs des montages spéciaux (TMS) et de futurs services de la même catégorie.

3.

NBTel Inc. et Maritime Tel & Tel Limited (MTT) ont demandé au Conseil de s'abstenir d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 25, 27(1), 29 et 31 de la Loi concernant l'ARN fourni par NBTel dans ses territoires d'exploitation et par MTT dans la municipalité régionale de Halifax. La demande concerne les services d'ARN de largeurs de bande DS-0, 128 Kbps DS-1 fractionnel, DS-1, DS-3, 10 Mbps, 100 Mbps et 155 Mbps, les services vidéo de transmission locale et de futurs services de la même catégorie.

4.

Le 12 mars 1999, le Conseil a publié l'avis public Télécom CRTC 99-7 intitulé Abstention relative à des services d'accès au réseau numérique, dans lequel il établissait la procédure d'examen des deux demandes, incluant les étapes relatives aux demandes de renseignements, aux observations des intervenantes et aux répliques des requérantes.

Les requérantes soutiennent que la concurrence dans les services d'ARN justifie une abstention

5.

Conformément au cadre d'abstention établi dans la décision Télécom CRTC 94-19 du 16 septembre 1994 intitulée Examen du cadre de réglementation, les requérantes ont déposé les renseignements suivants, en vue de prouver que le marché des services d'ARN est suffisamment concurrentiel pour justifier une abstention de réglementation.

Définition du marché pertinent des produits

6.

Les composantes du service d'ARN servent une vaste gamme de services d'accès aux données, y compris la commutation par paquets, le relais de trame et les services locaux et interurbains réservés. Les vitesses de 10 Mbps ou supérieures servent généralement de soutiens aux services en mode de transfert asynchrone (MTA). Les clients qui exploitent plus d'un emplacement utilisent l'ARN à haut débit pour interconnecter leurs réseaux locaux (RL) et leurs réseaux étendus (RE).

7.

Aux fins de la présente demande, les requérantes ont décrit les services d'ARN comme suit :

[Traduction] Fournir à un abonné une capacité de transmission numérique réservée de point à point ou multipoint, d'une largeur de bande DS-0 ou supérieure, entre les locaux de l'abonné et le central ou le point de présence (PDP) d'une entreprise de télécommunications dans le même centre de commutation, afin de transmettre toutes sortes de données.

Les services d'ARN incluent aussi toute composante de services de répartition des voies ou de lien, qui pourrait être nécessaire pour raccorder l'installation de transmission d'accès au central ou au PDP.

8.

Les requérantes ont déclaré que leur demande d'abstention ne vise pas l'accès au réseau à faible débit (analogique ou de largeur de bande inférieure à DS-0) utilisé par les petites compagnies d'industries comme la télémétrie et la surveillance des systèmes de sécurité.

9.

Selon elles, si un service d'ARN est raccordé à un commutateur de central ou à tout autre « appareil de transmission exclu », défini à l'article 2 (1) de la Loi, et si cet appareil remplit des fonctions comme la commutation, l'acheminement et/ou l'assemblage /désassemblage de paquets, par définition ces fonctions ne font pas partie du service d'ARN. Les capacités, comme les services locaux, qui sont fournies au central ou au PDP de l'entreprise par des appareils de transmission exclus ne correspondent pas à des services d'ARN, définis dans la demande.

Le marché géographique pertinent

10.

Les requérantes ont proposé le centre de commutation comme unité géographique logique, pour l'abstention de réglementation des services d'ARN.

Preuves des requérantes sur la concurrence dans la fourniture de services d'ARN

11.

Les requérantes ont fait valoir que la fourniture de services d'ARN à haut débit est fortement concurrentielle, dans la majorité des marchés commerciaux urbains du Canada. Elles ont soumis des preuves détaillées provenant de sources accessibles au public. Bell Canada a également déposé une étude intitulée High Fiber Diet: A Review of Metropolitan Bandwidth Availability in Canada, publiée par le Yankee Group, Canadian Market Strategies Report, vol. 3, no 21, octobre 1999, et qui résume l'ampleur de la concurrence au niveau des installations, dans les centres visés, à l'ouest du Nouveau-Brunswick.

12.

TCI a fourni des données ville par ville, qui précisaient aussi l'expansion des fournisseurs de services d'ARN à haut débit, dans chaque région. Selon ces données, au moins 15 % des immeubles ont accès au service dans les zones urbaines étudiées. Elles montraient l'expansion de la fibre optique à Vancouver, Calgary, Toronto, Ottawa-Hull et Montréal.

13.

Dans sa demande, MTT a fait remarquer que Fundy Communications Inc. possède un réseau intra-urbain capable de fournir des services d'ARN à 98 % des emplacements commerciaux desservis par NBTel. MTT a ajouté que Fundy pouvait fournir des services d'ARN à 98 % des clients commerciaux de Halifax.

Nouveaux concurrents

14.

Toujours selon le rapport du groupe Yankee, il existe d'autres fournisseurs concurrents de services d'ARN à haut débit. Ceux-ci incluent entre autres, Bell Intrigna (une alliance entre Bell Canada et MTS Communications Inc.) conçue pour fournir des services locaux, interurbains, Internet et de données dans l'Ouest canadien, et Bell Nexxia, qui a déjà construit un réseau à fibres pour l'interconnexion de Vancouver, Edmonton et Calgary. Le rapport indique aussi que les compagnies de services publics sont des partenaires très attrayants pour les futures constructions à fibres, compte tenu de leur accès aux droits de passage et de leurs installations répondant aux besoins en communications internes.

Les requérantes soutiennent que les obstacles à l'entrée sur le marché ne sont pas insurmontables

15.

Les requérantes ont fait valoir que dans le marché de l'ARN basé sur les installations à haut débit, le nombre croissant de concurrents qui construisent des réseaux prouve qu'il n'y a pas de barrières importantes à l'entrée sur le marché. De plus, diverses décisions du Conseil assurent l'interconnexion et l'interfonctionnalité des réseaux, l'accès non discriminatoire aux structures de soutènement des entreprises réglementées et la disponibilité des services d'entreprises réglementées à des fins de revente. Elles ont ajouté que la disponibilité de produits sans fil de 15 GHz et 38 GHz et des affectations de spectre, permet aux nouveaux venus, dans beaucoup de cas, d'élargir leurs installations intra-urbaines à haut débit, sans avoir à s'assurer de droits de passage.

Les requérantes font valoir que les clients peuvent facilement changer de fournisseur

16.

Les requérantes ont fait valoir que les interfaces de réseau normalisées assurent une compatibilité et une interfonctionnalité suffisantes pour qu'un client puisse changer de fournisseur d'ARN, sans devoir acheter de l'équipement neuf, payer des frais significatifs, ou subir une longue période d'immobilisation.

17.

Selon elles, pour le client, les principaux coûts de changement de fournisseur de services d'ARN sont les frais d'installation. Or, ces derniers semblent insignifiants comparés au total des coûts des services, mais en plus, le fournisseur y renonce souvent pour attirer la clientèle. Les requérantes ont également soutenu que si les obligations contractuelles entraînent généralement une pénalité pour résiliation hâtive d'un contrat de fourniture de services d'ARN, les fournisseurs assument fréquemment les frais de résiliation, pour encourager les clients à changer de fournisseur.

18.

Les requérantes ont ajouté que les clients de services d'ARN connaissent généralement les tarifs des divers fournisseurs sur le marché. De plus, beaucoup de gros clients d'affaires choisissent de concevoir et de gérer leurs propres réseaux, plutôt que de se fier uniquement à l'expertise d'un fournisseur de services.

Les requérantes estiment qu'il y a de la rivalité dans le marché

19.

Les requérantes ont soutenu que le nombre imposant de clients importants desservis par d'autres fournisseurs d'ARN confirme l'existence d'une grande rivalité dans le marché. Elles ont ajouté que, selon leur service des ventes, les prix des concurrents sont souvent de 15 à 40 % inférieurs à leurs propres taux tarifés, facturés pour des services d'ARN similaires. La rivalité se reflète aussi dans le processus d'appel d'offres auquel recourent maintenant de nombreux clients, pour choisir un fournisseur de service d'ARN.

20.

BC TEL, Bell Canada et TCI ont fait valoir qu'en raison de la guerre des prix dans les régions urbaines, elles ont cherché à rendre leurs services d'ARN tarifés plus concurrentiels, en déposant des demandes de structures tarifaires par bande pour certaines régions. NBTel et MTT ont demandé à plusieurs reprises la réduction ou la restructuration des taux tarifés de certains services d'ARN, afin de rendre ces services plus attrayants pour la clientèle.

Opinions des requérantes sur le plafonnement des prix

21.

Les requérantes ont fait valoir que l'impact de l'abstention de réglementation de l'ARN sur le régime de plafonnement des prix peut être réglé de façon satisfaisante, du point de vue opérationnel. Elles ont souligné que les services d'ARN en place sont inclus dans le sous-ensemble « autres services plafonnés », tel que défini dans ladécision Télécom CRTC 97-9 du 1er mai 1997 intitulée Réglementation par plafonnement des prix et questions connexes. Puisque la décision 97-9 n'a placé aucun service concurrentiel ou faisant l'objet d'une abstention dans un sous-ensemble de services plafonnés, les requérantes estiment que si le Conseil s'abstient de réglementer les services d'ARN, il serait approprié d'enlever les emplacements ayant fait l'objet d'une abstention du sous-ensemble des « autres services plafonnés ». Elles ont fait valoir qu'en situation de concurrence, les règles du marché suffisent amplement à rendre le plafonnement des prix inutile pour le service en cause. Les requérantes ont affirmé pouvoir diviser un service ou une classe de services en catégories de services plafonnés et non plafonnés en fonction de l'emplacement.

22.

De plus, les requérantes ont fait valoir qu'en retirant de la catégorie des services plafonnés les services d'ARN ayant fait l'objet d'une abstention, on empêcherait toute création d'interfinancement découlant d'une augmentation des prix des services d'ARN n'ayant pas fait l'objet d'une abstention et d'une réduction simultanées du prix des services d'ARN ayant fait l'objet d'une abstention. La contrainte du prix plafond applicable au sous-ensemble « autres services plafonnés » élimine toute possibilité d'interfinancement.

Les concurrents prétendent que le marché n'est pas concurrentiel

23.

Le 13 août 1999, AT&T Canada Corp. et AT&T Canada Telecom Services (collectivement, AT&T Canada), Call-Net Enterprises Inc. Fundy Cable Ltd. et Shaw FiberLink Ltd. (collectivement, Shaw/Fundy) et Vidéotron Télécom ltée (collectivement, les « intervenantes ») ont déposé des observations.

24.

Selon chaque intervenante, il serait prématuré de s'abstenir de réglementer la fourniture par les requérantes de services d'ARN, puisque les installations concurrentielles pour les services d'ARN viennent à peine de voir le jour.

25.

Les intervenantes ont fait valoir que, dans bien des cas, les services d'ARN des requérantes constituent une installation goulot essentielle indispensable aux concurrents, pour offrir une vaste gamme de services à la clientèle.

26.

Call-Net a fait valoir que si le Conseil estime que la concurrence justifie une abstention, il devrait conserver les pouvoirs que lui confèrent les articles 27(2) et 27(4) de la Loi au regard de la préférence indue et de la discrimination injuste, ainsi que l'article 24 de la Loi au regard des conditions de service et de la protection des renseignements confidentiels.

Positions des concurrents sur la définition du marché pertinent

27.

Call-Net a déclaré qu'elle approuvait les définitions de marché géographique et de marché des produits, proposées par les requérantes.

28.

Shaw/Fundy ont fait valoir que le marché géographique au Nouveau-Brunswick est établi entre les circonscriptions et non à la grandeur de la province. Shaw/Fundy ont aussi soutenu qu'il y a en réalité trois marchés de produits séparés aux fins de l'abstention relative aux services d'ARN : entre les immeubles, entre les immeubles et le central, et entre les immeubles et le central utilisé par d'autres entreprises.

Les concurrents mettent en doute la preuve relative à la part de marché des requérantes

29.

Les intervenantes ont fait valoir que les requérantes n'ont pas réussi à prouver que leur part de marché des services d'ARN ait été sensiblement érodée.

30.

Call-Net a fait valoir que l'information fournie par les requérantes sur la taille des réseaux des concurrents, mesurée en milles de route ou de fibre optique, a plus ou moins d'importance puisque les requérantes n'ont pas précisé la taille relative de leurs propres réseaux.

31.

AT&T Canada et Vidéotron ont déclaré qu'un indice important du pouvoir des requérantes est leur accès au marché potentiel, lequel est beaucoup plus grand que celui des concurrents. Les deux compagnies soulignent que, d'après les réponses aux demandes de renseignements, la majorité des requérantes ont accès à tous les immeubles visés par leurs centres de commutation respectifs, tandis que les concurrents n'ont accès qu'à une très faible proportion des immeubles.

32.

Les intervenantes ont fait valoir que les requérantes ont exagéré l'ampleur de la concurrence des prix et qu'elles n'ont pas produit de preuve convaincante au sujet des rabais offerts par les concurrents. Vidéotron a déclaré que, contrairement aux affirmations de Bell Canada, elle n'offre pas de services d'ARN à des prix de 50 % inférieurs à ceux de Bell Canada.

33.

Shaw/Fundy ont soutenu qu'un examen des tarifs d'ARN pour lesquels les requérantes demandent une abstention n'indique pas de rivalité des prix, parce que, dans bon nombre de cas, les tarifs n'ont pas été réduits depuis leur dépôt initial. Dans d'autres cas, les réductions ont été uniquement sélectives.

Les concurrents soutiennent qu'il reste des obstacles importants à l'entrée dans le marché

34.

Les intervenantes ont soutenu qu'il reste des obstacles majeurs à leur entrée dans le marché, et que ceux-ci limitent l'expansion de leurs installations et de leur accès à la clientèle (p. ex., l'accès aux droits de passage, l'accès aux immeubles, l'accès au câblage intérieur et à la co-implantation).

35.

Elles ont fait valoir que l'accès aux droits de passage municipaux est un obstacle majeur à l'entrée et que les requérantes, en raison de leur position historique, ont déjà les droits de passage requis. AT&T Canada et Vidéotron ont aussi fait valoir que dans de nombreux cas, les requérantes peuvent utiliser leurs installations existantes pour fournir des services d'ARN de largeurs de bande DS-0 et DS-1, alors que les concurrents doivent construire les installations.

36.

Shaw/Fundy et Vidéotron ont fait valoir que l'accès aux structures de soutènement est un obstacle important à l'expansion de réseaux concurrentiels. Non seulement est-il difficile pour les concurrents de construire des structures de soutènement, mais ils doivent en plus demander l'accès aux structures de soutènement des requérantes, ce qui entraîne des retards et ralentit l'expansion de leur clientèle.

37.

Shaw/Fundy ont déclaré que pour de nombreux concurrents, comme les entreprises de services intercirconscriptions (ESI), la co-implantation est la seule option aux contrats de services d'ARN. Cependant, la co-implantation n'est pas un substitut efficace pour les raisons suivantes :

a) la co-implantation n'est pas rentable (Shaw a dû payer plus de 200 000 $ pour un seul emplacement de co-implantation);
b) les délais sont longs et les différends qui surviennent souvent retardent la co-implantation encore davantage; et
c) il y a un manque de disponibilité général de co-implantation, puisque le nombre de centraux ayant des contrats de co-implantation est nettement inférieur aux besoins en centraux des ESI, à des fins d'interconnexion.

Les concurrents comptent sur les installations d'ARN des requérantes

38.

Les intervenantes ont déclaré que l'ARN est une part essentielle de leur processus de production et que dans de nombreux cas, elles doivent largement compter sur les services d'ARN fournis par les requérantes. Elles ont fait remarquer que, d'après les réponses aux demandes de renseignements, Bell Canada retire environ 40 % de ses revenus d'ARN de clients qui sont en fait des concurrents dans les services interurbains et locaux. Selon les intervenantes, la proportion de revenus d'ARN provenant des abonnés qui sont des concurrents pour les autres requérantes est semblable pour MTT à 30 %, NBTel, 11 %, BC TEL, 39 % et TCI, 41 %. Les concurrents s'en remettent encore plus aux services d'ARN de largeur de bande DS-3 des requérantes. Il ressort des réponses aux demandes de renseignements que 87 % des revenus ARN de BC TEL et 95 % de ceux de TCI dans les centres de commutation applicables proviennent d'entreprises, de revendeurs et de fournisseurs de services Internet. De plus, 100 % des DS-3 de NBTel sont fournis à d'autres entreprises et plus de 80 % de l'accès DS-3 de Bell Canada sont vendus à des entreprises dans la moitié des centres de commutation applicables.

39.

Les intervenantes ont fait valoir que, puisque les principaux clients des services d'ARN des requérantes sont également leurs concurrents, une abstention permettrait aux requérantes de facturer leurs services d'ARN plus chers aux concurrents qu'à leurs propres clients commerciaux finals; ainsi les concurrents seraient évincés du marché.

Les concurrents doutent que les clients puissent changer facilement de fournisseur

40.

Les intervenantes ont soutenu que, contrairement aux affirmations des requérantes, il est relativement coûteux pour les clients de changer de fournisseur de services d'ARN. Elles ont notamment souligné que les lourdes pénalités pour résiliation hâtive prévues dans les tarifs d'ARN des requérantes (en particulier les contrats à long terme) découragent fortement les clients de changer de fournisseur. Elles constituent donc des obstacles importants à l'entrée de concurrents. Shaw/Fundy ont fait valoir que les pénalités associées à la résiliation d'un contrat avec les requérantes constituent le coût le plus important de changement de fournisseur. Call-Net a déclaré que les frais de pénalité équivalent à la moitié du solde des frais mensuels pour la période contractuelle non expirée et doivent être payés lors de la résiliation du contrat. Call-Net a ajouté que les frais d'installation empêchent souvent les clients de changer de fournisseur de services d'ARN, étant donné que les coûts peuvent être importants par rapport au coût total du service.

Réponse des requérantes aux questions soulevées par les intervenantes

41.

Bell Canada, NBTel et MTT (collectivement), et BC TEL et TCI (collectivement) ont déposé leurs répliques aux questions soulevées par les intervenantes.

42.

Les requérantes ont soutenu que la position de Shaw/Fundy selon laquelle il existerait trois marchés pertinents de produits d'ARN est erronée parce que :

  • il n'y a aucune différence entre les services d'ARN fournis aux entreprises et ceux fournis aux clients commerciaux;

  • définir le marché pertinent en termes d'utilisation de l'installation d'ARN, plutôt que de l'installation elle-même, ne réglerait pas les problèmes concernant l'emprise sur le marché, puisque c'est le contrôle de l'installation qui détermine cette emprise; et

  • « entre des bâtiments » n'est pas un marché distinct puisque technologiquement, tous les ARN doivent être raccordés au central (p. ex., même si un client désire recevoir l'ARN entre deux bâtiments, il doit obtenir deux ARN, chacun d'eux étant raccordé au central).

43.

NBTel/MTT ont fait valoir que pour une abstention au Nouveau-Brunswick, la portée du marché géographique ARN pertinent est provinciale, en particulier parce que c'est le réseau de distribution par fibres interurbain et intra-urbain de Fundy acheminant les services qui détermine les besoins en ARN.

44.

Les requérantes ont fait valoir que les renseignements sur les parts de marché ne sont tout simplement pas disponibles. Elles n'ont aucun moyen d'estimer les parts de marché parce qu'elles ne disposent pas des données nécessaires sur l'activité des concurrents, la part de marché de chacun ou la taille de l'ensemble du marché.

45.

Les requérantes ont ajouté que selon les critères relatifs à l'abstention adoptés par le Conseil dans la décision 94-19, une importante part de marché n'est pas nécessairement synonyme d'emprise sur le marché. En effet, une part de marché importante signifie simplement que le Conseil doit examiner d'autres éléments de preuve (p. ex., disponibilité de substituts, facilité d'entrée de concurrents) pour déterminer si un marché est suffisamment concurrentiel pour justifier qu'il s'abstienne de le réglementer.

46.

Les requérantes ont soutenu qu'il n'est pas nécessaire que les concurrents aient un accès général à tous les clients de services d'ARN pour créer une véritable concurrence. Elles ont fait observer que dans la décision 94-19, le Conseil a reconnu que, la concurrence s'exerçant en bordure du marché, il n'est pas nécessaire que les concurrents en couvrent l'ensemble.

47.

NBTel/MTT ont fait savoir que d'autres installations générales dans toute la circonscription ne sont pas une attente raisonnable puisque l'ARN est un circuit réservé, fourni sur demande seulement. Il existe actuellement de nombreuses circonscriptions où NBTel/MTT ne fournissent pas de services d'ARN. Donc, le fait que les concurrents n'aient pas déjà d'installations d'ARN dans une zone ne justifie pas le refus de l'abstention.

48.

Les requérantes ont fait valoir que les intervenantes ont tort d'affirmer qu'il n'y a pas de vive concurrence de prix dans la fourniture de services d'ARN, parce que le tarif initial applicable à l'ARN était structuré pour l'environnement concurrentiel qui existait déjà alors.

49.

Les requérantes ont indiqué qu'elles ne sont pas mieux placées que les concurrents, en ce qui concerne l'accès aux droits de passage et au câblage intérieur. BC TEL/TCI ont soutenu que le fait que les requérantes se trouvent déjà dans la plupart des bâtiments et offrent un service local de base ne signifie pas qu'elles ont une entente générale avec le propriétaire, pour installer et exploiter d'autres types d'installations. NBTel a fait observer que, depuis la mise en place des règles du Conseil à l'égard de l'accès aux structures de soutènement, les concurrents ont facilement accès à ces structures.

Risque de discrimination anticoncurrentielle par l'approbation d'une abstention

50.

Le Conseil estime que les requérantes ont bien défini les marchés géographiques et de produits pertinents pour évaluer le degré de concurrence aux fins d'une abstention de réglementation en vertu de l'article 34(2) de la Loi. À l'exception de Shaw/Fundy, aucune autre intervenante n'a exprimé de préoccupations concernant la définition par les requérantes du marché pertinent des produits. Le Conseil estime que l'approche de Shaw/Fundy, qui définit un service d'ARN différemment selon l'usage, ne règle pas la question de l'emprise sur le marché, puisque cette emprise dans le cas présent dépend du service d'accès lui-même.

51.

Il semble bien que la concurrence soit en train de s'installer dans le secteur des services d'ARN à haut débit. Mais le Conseil conclut qu'il ne conviendrait pas, pour l'instant, de s'abstenir de réglementer les services d'ARN dans la mesure réclamée, étant donné que les services d'ARN constituent un apport crucial, nécessaire aux entreprises pour concurrencer directement les requérantes dans de nombreux marchés d'utilisateurs finals.

52.

Le Conseil éprouve des craintes relativement à l'accord d'une abstention pour les centres de commutation en question. Il estime en effet difficile de mettre en place des mesures suffisantes pour éviter que les requérantes exercent une discrimination envers les concurrents en leur facturant plus cher qu'à leurs propres clients finals de services d'ARN, pour les dissuader de choisir un fournisseur concurrent.

53.

Le Conseil fait observer que, bien que le maintien des pouvoirs que lui confère l'article 27(2) de la Loi servirait, dans une certaine mesure, de garantie contre l'exercice d'une discrimination injuste ou d'une préférence indue, il serait difficile de déceler les cas où le client final des requérantes bénéficie d'un prix ou encore de modalités ou de conditions plus favorables. Le Conseil estime donc que dans ce cas particulier, le maintien des pouvoirs que lui confère l'article 27(2) de la Loi n'offre pas suffisamment de protection contre l'exercice d'une discrimination anticoncurrentielle.

54.

Le Conseil estime que s'abstenir de réglementer les services d'ARN ne conviendrait pas, tant que ne seront pas résolues les questions d'accès aux droits de passage, aux bâtiments et au câblage intérieur qui, actuellement, empêchent les concurrents d'étendre leurs réseaux relativement à la fourniture de services d'ARN.

55.

Le Conseil rejette donc les demandes d'abstention pour les raisons suivantes :
a) la concurrence n'est pas suffisante pour protéger les intérêts des utilisateurs conformément à l'article 34(2) de la Loi; et

b) s'abstenir de réglementer freinerait probablement indûment l'établissement ou le maintien d'un marché concurrentiel pour les services d'ARN conformément à l'article 34(3) de la Loi.
Secrétaire général
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