ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2004-298

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Décision de radiodiffusion CRTC 2004-298

  Ottawa, le 29 juillet 2004
  The Sports Network Inc.
Le Réseau des sports (RDS) inc.
Country Music Television Ltd.
L'ensemble du Canada
  Demandes 2003-0139-1, 2003-0867-8, 2003-0222-4
Avis public de radiodiffusion CRTC 2003-59
30 octobre 2003
 

TSN, RDS et CMT - Modifications de licence

  Le Conseil approuve les demandes de The Sports Network Inc. et Le Réseau des sports (RDS) inc. en vue de modifier les licences des entreprises nationales de programmation spécialisée appelées The Sports Network et Réseau des sports, en changeant le type d'assemblage et le mode de distribution de ces services par les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) pour passer d'un « double statut » à un « double statut modifié ».
  Le Conseil approuve également une demande similaire de Country Music Television Ltd. visant à modifier le statut de l'entreprise nationale de programmation spécialisée connue sous le nom de Country Music Television (CMT). Cependant, le Conseil refuse la demande de la titulaire visant à facturer des frais aux abonnés, lorsque CMT est distribuée dans le cadre du service de base d'une EDR.
  L'opinion minoritaire du conseiller Langford est jointe en annexe.
 

Les demandes

 
Statut relatif à la distribution et à l'assemblage

1.

Le Conseil a reçu des demandes de The Sports Network Inc. (Sports Network), Le Réseau des sports (RDS) inc. (Le Réseau) et Country Music Television Ltd. (Country Music TV) qui sollicitaient des modifications de licence relatives au statut de distribution des entreprises nationales de programmation spécialisée analogique appelées respectivement The Sports Network (TSN), Réseau des sports (RDS) et Country Music Television (CMT). Country Music TV propose également d'instaurer un tarif de gros mensuel maximal de 0.07 $ dans les marchés anglophones et de 0.05 $ dans les marchés francophones lorsque CMT est distribuée au service de base d'une entreprise de distribution de radiodiffusion (EDR).

2.

En ce qui a trait à leur distribution par les EDR de classe 1, TSN, RDS et CMT ont actuellement un « double statut » d'après les exigences relatives à la distribution et à l'assemblage établies dans Exigences relatives à la distribution et à l'assemblage pour les titulaires de classe 1 et de classe 2, avis public de radiodiffusion CRTC 2003-42, 29 juillet 2003 (l'avis public 2003-42). Les exigences relatives à la distribution et à l'assemblage sont incorporées par renvoi dans l'article 20 du Règlement sur la distribution de la radiodiffusion (le Règlement). Les requérantes proposent de changer le statut de leurs entreprises pour un « double statut modifié ». Les changements seraient reflétés dans des modifications aux exigences relatives à la distribution et à l'assemblage.

3.

D'après les exigences relatives à la distribution et à l'assemblage, un service ayant un double statut doit être distribué au service de base d'une EDR, à un tarif de gros réglementé, à moins que le service n'accepte par écrit d'être distribué à un volet facultatif. TSN, RDS et CMT font partie des 12 services spécialisés de langues anglaise et française autorisés pour distribution en tant que services à double statut.

4.

D'après les mêmes exigences, un service à double statut modifié doit être distribué à un volet facultatif, à moins que le service et le distributeur ne consentent à sa distribution au service de base. Tous les services spécialisés autorisés depuis 1994 (à l'exception de Le Réseau de l'information et CMT) ont soit un double statut modifié ou un statut facultatif uniquement. Actuellement, 32 services spécialisés ont un double statut modifié.

5.

A l'appui de leurs demandes, Sports Network et Le Réseau ont déclaré qu'au début, les volets facultatifs avaient une faible pénétration et que le double statut leur avait permis d'élaborer une programmation de qualité. Elles ont ajouté que, grâce au double statut, leurs services s'étaient bien établis et avaient réussi à négocier leur distribution à un volet facultatif avec la plupart des EDR. Récemment, cependant, quelques EDR ont effectué ou proposé des modifications à la distribution de TSN et de RDS, conduisant au déplacement de ces services d'un volet facultatif au service de base. Selon les requérantes, les EDR ont procédé à ces transferts afin de profiter des tarifs de gros réglementés au service de base, qui tendent à être inférieurs aux tarifs de gros négociés pour la distribution facultative. Sports Network et Le Réseau ont indiqué que l'approbation d'un changement permettant de passer au double statut modifié empêcherait les EDR qui sont soumises aux exigences de distribution et d'assemblage de déplacer TSN et RDS au service de base, sans leur consentement.

6.

Les deux titulaires ont de plus noté que le changement demandé assurerait un positionnement continu de leurs services à des volets facultatifs, dont le tarif de gros par abonné perçu par les titulaires leur permettrait de continuer à accroître leurs investissements dans les émissions canadiennes et à maintenir la qualité de service à laquelle les téléspectateurs sont habitués.

7.

De plus, le Réseau a fait valoir que le maintien du double statut pour RDS pourrait avoir un impact négatif sur les autres services de langue française qui sont offerts en bloc avec RDS et qui restent au volet facultatif, ce qui pourrait créer une instabilité dans les marchés francophones, étant donné la popularité de RDS au sein de ces blocs de services.

8.

Country Music TV a déclaré que plusieurs EDR de classe 1 ont déjà déplacé CMT de volets facultatifs au service de base, entraînant une perte de revenus d'abonnements au volet facultatif pour CMT. Country Music TV a déclaré que le but de sa demande est d'interrompre le transfert de CMT du volet facultatif au service de base. Puisque les abonnés obtiennent CMT gratuitement lorsqu'une EDR le distribue au service de base, le déplacement de CMT au service de base lui occasionne des pertes financières.

9.

Country Music TV a indiqué que, dans la plupart des cas, le transfert de CMT au service de base a eu pour conséquence une augmentation du nombre d'abonnés inférieure à 20 %. Les augmentations potentielles des recettes publicitaires provenant de la distribution au service de base ne seraient pas suffisantes pour compenser la perte de revenus d'abonnements que Country Music TV tire de la distribution de CMT au volet facultatif. De plus, selon Country Music TV, lorsque les EDR ont déplacé CMT au service de base, un alignement de canaux défavorable s'est traduit dans de nombreux cas par une baisse du nombre des téléspectateurs, et par conséquent a engendré une diminution des recettes publicitaires.
 
Demande de tarif de gros pour CMT

10.

Comme indiqué précédemment, en plus de sa demande de modification du statut de distribution de CMT, Country Music TV a proposé d'appliquer un tarif de gros de 0.07 $ par abonné dans les marchés anglophones et 0.05 $ par abonné dans les marchés francophones lorsque CMT est distribuée au service de base. Actuellement, le distributeur ne verse rien à Country Music TV lorsque CMT est distribuée au service de base.

11.

A l'appui de sa demande, Country Music TV a déclaré qu'en raison de l'absence d'un tarif de gros de base, CMT est devenue la cible des distributeurs qui, sous l'effet de pressions de la concurrence, déplacent le service du volet facultatif au service de base où ils peuvent le distribuer sans encourir de frais.

12.

Country Music TV a indiqué que la perte de recettes, qu'elle soit due au fait que CMT ait conservé un double statut ou n'ait pas de tarif de gros de base, affectera éventuellement la qualité globale de son service et sa contribution à la production canadienne. Country Music TV a indiqué que, bien qu'elle préfère voir approuver sa demande de double statut modifié ainsi que sa demande d'instauration d'un tarif de gros de base, si une seule des options devait être approuvée, elle préférerait que le Conseil approuve la modification de statut de distribution.
 

Interventions concernant les demandes de modification de statut de distribution

13.

À ls suite des demandes de Sports Network, Le Réseau et Country Music TV, le Conseil a émis l'avis public de radiodiffusion CRTC 2003-59, 30 octobre 2003 (l'avis public 2003-59) qui sollicite des observations sur les trois demandes. Le Conseil a fait remarqué que les demandes soulevaient des questions de politique générale, dont:
 
  • l'à-propos des exigences actuelles du Conseil relatives à la distribution des services spécialisés analogiques;
 
  • les répercussions possibles sur la dynamique des négociations entre les EDR et les exploitants de services spécialisés;
 
  • les répercussions possibles sur les abonnés tant au niveau de la diversité et qualité de la programmation, qu'au niveau des coûts pour obtenir cette programmation.

14.

En réponse à l'avis public 2003-59, le Conseil a reçu 22 interventions favorables aux demandes de Sports Network et Le Réseau.

15.

Les interventions s'opposant aux trois demandes ont été déposées par l'Association canadienne de télévision par câble (ACTC), la Canadian Cable Systems Alliance Inc. (CCSA), Cogeco Inc. (Cogeco), Mountain Cablevision Limited (Mountain) et Quebecor Média inc. (Quebecor).

16.

Les intervenantes opposées aux demandes ont exprimé leur inquiétude face aux faits suivants : tout d'abord ces demandes soulèvent d'importantes questions de politique et ne devraient pas être examinées individuellement mais plutôt dans le contexte d'une révision du cadre de réglementation concernant la distribution des services spécialisés. Les intervenantes ont également fait valoir que, même si les demandes étaient examinées individuellement, les requérantes n'ont pas prouvé la nécessité de modifier leur statut de distribution pour conserver leur viabilité financière. Plus précisément, les intervenantes ont déclaré que TSN et RDS ont augmenté leurs tarifs de gros au volet facultatif à un niveau tel qu'il a eu un effet négatif sur les marges de profit de quelques EDR, en particulier les petites EDR; elles ont ajouté que tout autre changement nuirait aux négociations entres les EDR et les services spécialisés, au détriment des EDR.

17.

Les intervenantes ont également soutenu qu'une modification du statut de distribution favoriserait les services spécialisés au moment des négociations, au détriment des câblodistributeurs et de leurs abonnés. Elles ont ajouté que cette situation permettrait à un service de programmation, lorsque le câblodistributeur est tenu par le Règlement de le distribuer, d'imposer sa distribution et ses tarifs sans que le distributeur n'ait de recours si ces tarifs sont excessifs.

18.

Les intervenantes ont de plus fait remarquer que, si les demandes étaient approuvées, tout changement aux listes de canaux aurait un effet négatif tant sur les EDR que sur leurs abonnés.

19.

L'Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR), Rogers Media Inc. (Rogers), Pelmorex Inc. (Pelmorex) et MusiquePlus inc. (MusiquePlus) ont déposé des observations relatives aux questions de politique générale soulevées par ces trois demandes tout en s'abstenant de commenter les mérites de chacune d'elle.

20.

Pelmorex et MusiquePlus ont toutes deux fait valoir que toute décision de supprimer la règle de distribution relative au double statut aurait un effet négatif sur la capacité des autres services spécialisés à remplir leurs obligations réglementaires.

21.

MusiquePlus a également déclaré que les EDR utilisent la désignation de double statut afin de renforcer leur propre position pour négocier des accords d'affiliation avec plusieurs services spécialisés. Selon MusiquePlus, le Conseil devrait clarifier l'étendue des droits et obligations inhérents à la désignation de double statut.

22.

De plus, MusiquePlus a exprimé sa préoccupation face aux EDR qui ne réduisent pas le tarif de détail payable par les abonnés aux services facultatifs, malgré les économies considérables qu'elles en tirent lorsqu'un service est déplacé du volet facultatif au service de base. Pourtant, comme l'a fait remarquer MusiquePlus dans son mémoire, les EDR répercutent aux abonnés l'augmentation ultérieure du coût du service de base, plus une marge brute, ce que bien des EDR sont libres de faire en raison de la déréglementation tarifaire.
 
Réponses des requérantes
 
Sports Network et Le Réseau

23.

En réponse, Sports Network et le Réseau ont fait valoir que les EDR qui sont assujetties à des obligations de distribution et d'assemblage ont profité des tarifs de gros de base maximaux réglementés des services à supplément comme TSN et RDS, en déplaçant les services du volet facultatif au service de base avec les résultats suivants:
 
  • les abonnés paient davantage pour un service de base élargi, n'ayant aucun choix en la matière;
 
  • au fil du temps, la diminution des recettes des services spécialisés entraîne une baisse de qualité de la programmation et une réduction des dépenses en émissions canadiennes au sein du système de radiodiffusion;
 
  • au fil du temps, la baisse de qualité de la programmation devient une excuse que les EDR avancent pour soutenir que la demande de services étrangers dans des genres identiques ou similaires est plus grande.

24.

Sports Network et Le Réseau ont fait valoir que la demande des intervenantes pour une vaste révision de la politique est de nature dilatoire afin de garantir aux EDR la possibilité de déplacer TSN et RDS du volet facultatif au service de base, et de permettre ainsi aux EDR de se plaindre ensuite des dérangements que cela causerait aux consommateurs si le statut de distribution était changé. Les requérantes estiment que le Conseil devrait examiner les modifications du statut de distribution au cas par cas sans réviser la politique.

25.

Sports Network et Le Réseau ont également constaté que les engagements relatifs à la programmation faits au nom de TSN et RDS lors des derniers renouvellements de licence supposaient que les services continueraient à être distribués à titre facultatif. Les requérantes ont également fait remarquer que les préoccupations exprimées concernant le pouvoir de négociation accrû de TSN et RDS sous un double statut modifié ne tiennent pas compte du fait que les deux parties participant aux négociations des tarifs de gros auraient accès à un processus de résolution des différends.
 
Country Music TV

26.

En réponse, Country Music TV a déclaré que sa demande visant à modifier son statut de distribution n'a pas pour objectif d'augmenter ses revenus d'abonnements, mais d'empêcher leur baisse et donc de maintenir sa capacité à générer des recettes publicitaires. Country Music a fait remarquer que, si les EDR continuent à déplacer CMT au service de base, et particulièrement à des positions de canaux défavorables, il s'ensuivrait un effet négatif tant sur l'écoute que sur les recettes de CMT.
 

Interventions relatives à la proposition de Country Music TV d'instaurer un tarif de gros

27.

L'ACTC, la CCSA, Quebecor et Cogeco ont déposé des interventions s'opposant à la proposition d'instaurer un tarif de gros par abonné lorsque CMT est distribuée au service de base.

28.

L'ACTC a fait valoir que la demande de tarif devrait être refusée puisque Country Music TV n'a pas fourni la preuve qu'elle avait besoin de ces revenus. Au contraire, selon l'ACTC, dans le rapport annuel 2003 de Corus Entertainment1, CMT est définie comme la chaîne spécialisée pour adulte ayant connu la plus grande croissance, ayant affiché une augmentation de 50 % du nombre de téléspectateurs adultes (25-54) au cours de l'année se terminant en août 2003.

29.

Cogeco et la CCSA se sont également opposées à la demande alléguant l'absence de preuve d'un besoin financier. Cogeco a ajouté que l'approbation de la demande mettrait en question l'intégrité du processus d'attribution de licence du Conseil puisque Country Music TV s'est engagée, au moment de sa demande initiale, à renoncer à un tarif de gros de base dans un contexte de processus d'attribution de licence concurrentiel. La CCSA a de plus déclaré que la demande de Country Music TV, si elle était approuvée, augmenterait le coût du service de base pour le consommateur, sans aucune valeur ajoutée en compensation.

30.

Quebecor a indiqué qu'elle s'opposait au tarif de base de CMT car, pour des raisons de concurrence, les EDR ne peuvent augmenter automatiquement leurs tarifs à chaque fois qu'un service de programmation demande des revenus supplémentaires.
 
Réponse de la requérante

31.

En réponse aux interventions contre l'augmentation de tarif proposée, Country Music TV a fait valoir que sa proposition de tarif de gros de base n'est pas exorbitante et que la proposition n'a pas pour but d'augmenter ses revenus d'abonnements mais de les maintenir au niveau actuel.
 

L'analyse et les conclusions du Conseil relatives aux demandes de modification du statut de distribution de TSN et RDS

32.

Lors de son introduction en 1987, la distribution à double statut visait à aider les premiers groupes de services spécialisés à accroître leur auditoire et à s'implanter dans le système de radiodiffusion canadien. La distribution au service de base assurait l'accès des services de programmation au plus grand nombre possible de téléspectateurs pour leur publicité, et conjointement avec le tarif de gros de base réglementé, garantissait un minimum de revenus d'abonnements. La désignation de double statut permettait également aux services de programmation et aux distributeurs, lorsque c'était à leur avantage, de négocier les modalités et conditions de distribution des services à titre facultatif. Le Conseil note qu'avec le temps, Sports Network et Le Réseau ont consenti à ce que TSN et RDS soient largement distribués à titre facultatif et qu'en fait, les EDR ont utilisé ces services pour augmenter la pénétration des volets facultatifs.

33.

Le Conseil note que TSN et RDS sont des services bien établis qui se sont développés pour devenir deux des services spécialisés les plus populaires de l'industrie de la radiodiffusion canadienne, avec des marges historiques de bénéfices avant intérêt et impôts (BAII) supérieures aux moyennes de l'industrie. Par conséquent, ces services n'ont plus besoin de l'accès garanti à la majorité des abonnés à la câblodistribution et à des revenus d'abonnements minimaux offerts par la désignation de double statut. Le Conseil estime que la modification de statut demandée reflète cette situation.

34.

En ce qui a trait aux préoccupations exprimées sur le renforcement du pouvoir de négociation de TSN et RDS s'ils bénéficiaient du double statut modifié, le Conseil note que, dans le cas d'un différend qui lui a été transmis, il a le pouvoir discrétionnaire d'établir les tarifs de gros pour les services distribués sur une base facultative. Le Conseil estime qu'il est préférable que les modalités et les conditions d'une telle distribution fassent l'objet de négociations entre les parties en cause et, à cette fin, il les encourage à négocier de façon juste et équitable. S'il arrivait toutefois que les négociations échouent, le Conseil estime que la capacité du distributeur autorisé d'avoir recours au mécanisme de résolution des différends restreindra suffisamment toute forme de pouvoir de négociation accrû que pourrait avoir TSN et RDS à la suite de l'attribution du double statut modifié.

35.

En conséquence, le Conseil approuve les demandes de The Sports Network Inc. et Le Réseau des sports (RDS) inc. en vue de modifier la licence des entreprises nationales de programmation spécialisée analogiques appelées The Sports Network (TSN) et Réseau des sports (RDS). Les modifications se traduiront par le changement du statut de distribution de TSN et RDS qui passera du double statut au double statut modifié.

36.

Les modifications du statut de distribution de TSN et RDS se retrouvent dans les exigences révisées de distribution et d'assemblage définies dans Exigences relatives à la distribution et à l'assemblage pour les titulaires de classe 1 et de classe 2, avis public de radiodiffusion CRTC 2004-56, également publié aujourd'hui.
 

L'analyse et les conclusions du Conseil relatives aux demandes de CMT de modifier le statut de distribution et d'instaurer un tarif de gros de base

37.

Le Conseil note que, malgré le double statut de CMT, la plupart des systèmes de câblodistribution l'ont distribué au volet facultatif, où il est devenu un service rentable, avec des marges de BAII supérieures aux moyennes de l'industrie. Le Conseil est cependant conscient que la tendance visant à déplacer CMT au service de base pourrait avoir un effet préjudiciable sur le bien-être financier du service, étant donné que les abonnés obtiennent CMT gratuitement lorsqu'une EDR le distribue au service de base.

38.

Le Conseil prend note de la déclaration de Country Music TV selon laquelle son problème de perte de revenus pourrait être réglé par l'approbation d'une seule de ses demandes, soit le changement de statut de distribution ou l'introduction d'un tarif de gros de base. Au cours du processus de demande, Country Music TV a indiqué que, bien qu'elle préfère que le Conseil approuve les deux demandes, si elle devait choisir entre les deux, elle préférerait obtenir le statut de distribution modifié, car il empêcherait les EDR de déplacer CMT du volet facultatif au service de base sans le consentement de Country Music TV.

39.

En conséquence, le Conseil approuve la demande de Country Music Television Ltd. visant à modifier la licence de l'entreprise nationale de programmation spécialisée analogique appelée Country Music Television (CMT). La modification se traduira par un changement du statut de distribution de CMT qui passera du double statut au double statut modifié.

40.

En ce qui concerne la proposition de Country Music Television Ltd. d'instaurer un tarif de gros pour la distribution de CMT au service de base, le Conseil est d'avis que l'approbation du changement de statut de distribution de CMT tiendra compte de manière adéquate des préoccupations de Country Music TV quant à l'érosion de ses revenus, puisque la désignation de double statut modifié exigera que Country Music TV consente à la distribution au service de base. CMT sera donc en position de négocier son tarif de gros pour une distribution au volet facultatif. Par conséquent, la demande de CMT d'un tarif de gros mensuel de base maximal de 0.07 $ dans les marchés anglophones et de 0.05 $ dans les marchés francophones est refusée.

41.

Le Conseil note à nouveau que dans le cas d'un différend qui lui a été transmis, il a le pouvoir discrétionnaire d'établir les tarifs de gros pour les services distribués à titre facultatif. Le Conseil estime que la capacité d'un distributeur autorisé d'avoir recours à un mécanisme de règlement des différends restreindra suffisamment le pouvoir de négociation accrû qui pourrait incomber à CMT, consécutif à l'attribution du double statut modifié.

42.

La modification du statut de distribution de CMT se retrouve dans les exigences révisées de distribution et d'assemblage établies dans l'avis public CRTC 2004-56, également publié aujourd'hui.
 

Autres questions

43.

Comme décrit précédemment, quelques intervenantes dans cette instance ont proposé que le Conseil procède à l'examen complet des politiques relatives à la distribution des services spécialisés analogiques, avant de prendre une décision concernant ces demandes. En réponse, les requérantes ont avancé qu'un tel examen n'était pas nécessaire pour que le Conseil se prononce sur ces demandes et que le Conseil devrait traiter les demandes, telles que soumises. Les requérantes estiment entre autres, que les questions de politique soulevées par les éventuelles modifications de statut peuvent varier d'un service à l'autre.

44.

Le Conseil conclut que le dossier de l'instance est suffisant pour se prononcer sur les demandes particulières. Selon le Conseil, il ne serait pas d'intérêt public de différer l'examen des demandes jusqu'à ce que l'on procède à la révision de la politique de distribution des services spécialisés. De plus, selon le Conseil un tel examen n'est pas nécessaire pour le moment.
 

Demande de divulgation

45.

Dans son intervention, la CCSA a demandé la divulgation des renseignements sur les tarifs et les revenus déposés par TSN à titre confidentiel en réponse à une question supplémentaire du personnel du Conseil. Les renseignements non divulgués se composent des tarifs de gros mensuels par abonné que TSN facturait aux systèmes de câblodistribution en question avant d'être déplacé au service de base, et le revenus d'abonnements que TSN a perdu à la suite de son déplacement au service de base de chacun des systèmes de câblodistribution, au cours des cinq dernières années. La CCSA a fait valoir que, sans l'accès aux tarifs de la société et aux renseignements sur ses revenus, elle n'aurait pas en main tous les éléments concernant le sujet et se verrait refuser tous les avantages de l'équité procédurale et de la justice naturelle.

46.

Le Conseil note que TSN a déposé au dossier public le montant total de la perte de revenus d'abonnements consécutive au déplacement de TSN au service de base. De plus, le Conseil note que le nombre des abonnés des entreprises membres de la CCSA ne représente qu'une très petite partie du nombre total des abonnés affectés par le déplacement au service de base. Donc, la divulgation des renseignements spécifiques aux entreprises membres de la CCSA ne révélerait pas la cause principale des baisses de revenus subies par TSN. En tout état de cause, le Conseil estime que les tarifs facturés par TSN avant chaque déplacement au service de base et la baisse des revenus qu'elle déclare avoir subie à la suite de chaque déplacement ne sont pas des éléments déterminants pour les questions soulevées dans la demande de The Sports Network Inc.

47.

A la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut que, pour que la CCSA ou ses membres aient la possibilité équitable de répondre à la demande de The Sports Network Inc., il est inutile qu'elle vérifie si TSN a indiqué correctement les tarifs facturés aux membres de la CCSA pour une distribution au volet facultatif et les baisses de revenus particulières estimées par TSN à la suite du déplacement de TSN au service de base, par les membres de la CCSA. Le Conseil conclut que la CCSA et ses membres ont disposé des renseignements adéquats pour pouvoir déposer des observations et participer de manière constructive à cette instance, et que l'approbation de la requête de la CCSA pourrait en l'occurrence nuire à The Sports Network Inc.

48.

Le Conseil s'attend à ce que les parties qui désirent faire une demande de divulgation de renseignements confidentiels le fasse avant le dépôt de leurs commentaires, de façon à ce que le Conseil soit en mesure de se prononcer sur la question avant la date limite du dépôt des commentaires.

49.

Pour toutes ces raisons, le Conseil refuse la requête de la CCSA de divulguer les renseignements confidentiels déposés par The Sports Network Inc. concernant les membres de la CCSA.
  Secrétaire général
  La présente décision devra être annexée à chaque licence. Elle est disponible sur demande en format substitut et peut aussi être consultée sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca 
 

Opinion minoritaire du conseiller Stuart Langford

  Hormis le paragraphe 40 que j'approuve, je ne suis pas d'accord avec la décision de la majorité à cet égard et j'aurais refusé les trois demandes. À mon avis, la décision de la majorité est aussi inutile qu'imprudente. Elle tente de corriger des problèmes qui selon les preuves au dossier ne semblent pas exister, bien qu'ils aient été âprement discutés par les requérantes. En voulant corriger des problèmes imaginaires, la décision de la majorité risque d'en créer de réels. En accordant aux services de programmation l'aide dont ils n'ont pas besoin, la majorité risque de porter préjudice aux deux autres parties concernées, c'est-à-dire les abonnés et les distributeurs de signaux (EDR).
 

Seul l'argent compte

  Les demandes qui font aujourd'hui l'objet de la décision de la majorité prétendent porter sur de nombreux sujets : symétrie de la réglementation, protection du consommateur, « rattrapage » administratif et programmation canadienne. En fait, ces demandes n'ont qu'un seul et même but : le profit. Les trois requérantes TSN, RDS et CMT font plein d'argent et elles veulent en faire plus. En leur donnant le droit de réclamer la distribution facultative, la majorité comble leurs voux. Les profits de TSN, RDS et CMT vont continuer à gonfler aux frais des abonnés et les EDR sont laissées pour compte.
  Jusqu'à maintenant, les EDR étaient bien placées pour protéger les Canadiens contre l'augmentation des prix de TSN, RDS et CMT. Si les services de programmation faisaient des demandes excessives lors des négociations de tarifs de distribution, les câblodistributeurs pouvaient les forcer à modifier leurs demandes pour ne pas risquer un transfert au service de base dont les tarifs d'abonnement sont bien moins alléchants que ceux des volets facultatifs à forte pénétration. La décision de la majorité change la donne. Elle prive les EDR de leur seul pouvoir de négociation efficace et ne leur laisse (et par extension à leurs abonnés aussi) pour seul recours que l'appel à l'aide du Conseil lorsque les demandes financières des requérantes deviennent excessives.
 

Que voulons-nous?

  Alors que la réduction de toute interférence de la réglementation sur les forces du marché est devenue pratiquement le mantra des chroniqueurs qui commentent les affaires des secteurs publics et privés, on se demande pourquoi la majorité a adopté une décision qui ne peut générer que le résultat contraire. En privant l'une des parties de son pouvoir de négociation, en lui retirant toute option autre que l'appel à la réglementation, la majorité a créé des conditions de négociation si inégales que le Conseil devra soit répondre continuellement à des demandes de résolution de différends, soit accepter un marché où les gagnants sont toujours les mêmes et où les consommateurs doivent payer toujours plus ou se priver du service. Ce n'est pas ma conception d'une application judicieuse de la réglementation.
  En supposant que les Canadiens ne veuillent pas s'opposer en renonçant aux émissions populaires qu'ils aiment, que ce soit du sport ou de la musique country, il est difficile de comprendre pourquoi la majorité a voulu affaiblir la partie qui sert de rempart aux abonnés contre l'augmentation des prix. Les EDR n'ont aucun choix, elles sont obligées de distribuer TSN, RDS et CMT. Ce fait réglementaire confère déjà à ces trois services spécialisés un énorme pouvoir de négociation en matière de distribution. La présente décision de la majorité augmente ce pouvoir en accordant à TSN, RDS et CMT le droit illimité de choisir entre distribution au service de base et distribution facultative. On n'a rien donné aux EDR ni aux abonnés pour contrebalancer ce changement de pouvoir. On a efficacement neutralisé les forces du marché.
 

Où est l'urgence?

  C'est un tel changement par rapport au statu quo et un tel recul de la tendance actuelle qui consiste à laisser agir les forces du marché plutôt que d'imposer des solutions réglementaires, qu'à mon avis la majorité n'aurait pas dû se prononcer sans avoir procédé à un examen complet de la politique. Il n'y avait nul besoin de recourir au pouvoir de la réglementation pour résoudre cette question. Les requérantes n'ont aucune difficulté financière. Seules les EDR affectées peuvent revendiquer avec raison le droit de clamer leur pauvreté en pareilles circonstances. C'est aux câblodistributeurs de classe 1 que la décision de la majorité porte préjudice et ce sont eux qui peuvent donc demander une aide financière, et non pas les services spécialisés de sports et de musique country.
  Présentement, les câblodistributeurs sont obligés d'investir d'énormes sommes pour assurer la transition au numérique et ils sont même incités à faire de plus gros investissements pour défier les puissants monopoles du secteur de la téléphonie au Canada. Ce sont eux qui luttent pour se maintenir à flots, et non pas TSN, CMT et RDS qui profitent régulièrement de marges bénéficiaires à faire pâlir d'envie un banquier. RDS et TSN ont vite sonné l'alarme pour déclarer que sans garantie de profits, pas de garantie de dépenses en programmation canadienne. C'était un leurre. Les engagements de RDS et TSN envers la programmation canadienne ne sont pas tout à fait la vraie motivation de leurs demandes. Il n'y a aucune preuve au dossier de l'existence d'une proposition de dépenses additionnelles compensatoires en programmation canadienne, au cas où le Conseil approuverait les demandes.
  Quant à CMT, il bénéficie maintenant du statut de distribution et du tarif de gros obtenus lors de la demande de licence que le Conseil a bien voulu lui attribuer. De plus, il prévoit une marge d'exploitation de 28 % pour cette année. L'unique motivation de sa demande semble être l'éventualité d'une détérioration de la situation. Si, bien que tous les faits semblent démontrer le contraire, la crainte du pire est maintenant une raison suffisante pour justifier des demandes comme celles d'aujourd'hui, le Conseil ferait bien de se préparer à recevoir une montagne de papier.
  En rejetant prématurément des solutions qui s'appuient sur les forces du marché, la majorité expose les abonnés à d'éventuelles demandes d'augmentation de prix exorbitantes et expose le Conseil à ce qui promet d'être une interminable querelle d'argent. À mon avis, cette démarche prend carrément la mauvaise direction. J'aurais refusé toutes les demandes en ce sens. Nous traitons ici avec des joueurs avertis. Si TSN, RDS et CMT entrevoient à l'avenir une quelconque possibilité d'érosion de leur revenus, je veux dire un véritable risque qui menace leur survie et non pas un risque hypothétique, leurs avocats savent où sont les bureaux du Conseil. Les demandes d'examen de la réglementation ne sont jamais rejetées lorsqu'elles sont justifiées.
  Note de bas de page:
1Corus Entertainment est la société mère de Country Music TV.

Mise à jour : 2004-07-29

Date de modification :