Décision de télécom CRTC 2005-28

Voir aussi: 2005-28-1

Ottawa, le 12 mai 2005

Cadre de réglementation régissant les services de communication vocale sur protocole Internet

Référence :  8663-C12-200402892

Table des matières

  Paragraphe
Sommaire  
I. Introduction 1
II. Historique 8
Avis préliminaires du Conseil 8
Services VoIP 16
Catégories de services VoIP 29
Le cadre législatif 32
III. Demandes d'abstention de la réglementation 37
Demandes d'abstention de la réglementation présentées par les Compagnies et TELUS 37
Applicabilité des conclusions actuelles en matière d'abstention de la réglementation des SI de détail 41
Demandes d'abstention de la réglementation 71
Analyse fondée sur le cadre de la décision 94-19 74
Une analyse séparée de l'article 34 133
Paragraphe 34(2) 134
Paragraphe 34(1) 172
Paragraphe 34(3) 191
Conclusion 193
IV. Cadre de réglementation 195
Application du cadre de réglementation pour la concurrence locale 195
Inscription des revendeurs de services VoIP 196
Accès aux numéros et transférabilité des numéros locaux 205
Inscriptions à l'annuaire 215
Égalité d'accès 226
Règles de reconquête 243
Accès pour les personnes handicapées 261
Service de relais téléphonique 273
Garanties relatives à la protection de la vie privée 293
Exigences relatives aux dépôts tarifaires concernant les services VoIP locaux offerts dans le territoire de l'ESLT 311
Réglementation des entreprises non dominantes qui fournissent des services VoIP locaux 328
Réglementation des ESLT qui fournissent des services VoIP locaux dans des territoires où la concurrence locale n'est pas encore autorisée 345
Interconnexion IP 358
Contribution 370
Admissibilité des services VoIP au titre de la contribution 373
Déduction des revenus générés par les services Internet de détail 381
Services groupés 390
Subvention provenant du Fonds de contribution national - Admissibilité des services VoIP 393
Montant de la subvention à payer à même le Fonds de contribution national 409
Questions relatives à l'accès 413
Retrait de la restriction visant l'accès Internet de tiers aux fins des services VoIP 415
Retrait des restrictions imposées aux FSLAN à l'égard des services VoIP 430
Condition imposée aux fournisseurs d'accès 448
Applicabilité des décisions d'abstention actuelles 484

Dans la présente décision, le Conseil formule les conclusions qu'il a tirées dans l'instance amorcée par l'avis Cadre de réglementation régissant les services de communication vocale sur protocole Internet, Avis public de télécom CRTC 2004-2, 7 avril 2004 (l'avis 2004-2). Il fixe les paramètres du régime de réglementation qui régira la fourniture des services VoIP. Par services VoIP, le Conseil entend les services de communication vocale sur protocole Internet (IP) qui utilisent des numéros de téléphone établis conformément au Plan de numérotation nord-américain et qui assurent un accès universel à destination et/ou en provenance du réseau téléphonique public commuté (RTPC). Or, dans la mesure où le service VoIP assure l'accès à destination et/ou en provenance du RTPC et qu'il permet à l'abonné d'effectuer ou de recevoir des appels dont les points de départ et d'arrivée se situent dans une circonscription ou une zone d'appel local, telles qu'elles sont définies dans les tarifs des entreprises de services locaux titulaires (ESLT), le service s'entend d'un service VoIP local aux fins de la présente décision.

Conformément à l'avis 2004-2, les services de communication vocale poste à poste utilisant le protocole Internet (les services poste à poste), tels qu'ils sont définis dans la présente décision, ne sont pas assujettis à la réglementation.

Dans l'instance amorcée par l'avis 2004-2, quelques grandes ESLT ont demandé au Conseil de confirmer que les décisions d'abstention à l'égard du service Internet (SI) de détail s'appliquaient à une catégorie précise de services VoIP. Le Conseil rejette cette demande.

Certaines parties ont également demandé au Conseil de s'abstenir de réglementer les services VoIP aux termes de l'article 34 de la Loi sur les télécommunications(la Loi). Le Conseil a examiné ces demandes selon deux approches distinctes. Dans un premier temps, il a abordé la question à la lumière du cadre analytique établi initialement dans la décision Examen du cadre de réglementation, Décision Télécom CRTC 94-19, 16 septembre 1994 (la décision 94-19). Dans un deuxième temps, il a soupesé les arguments des parties, sans s'appuyer sur le cadre prescrit dans la décision 94-19. Dans un cas comme dans l'autre, le Conseil en arrive à une seule et même conclusion : il ne convient pas pour le moment, dans le cas des services VoIP locaux fournis par les ESLT, qu'il s'abstienne d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi.

Aux fins de la réglementation, le Conseil établit que les services VoIP locaux doivent être considérés comme des services locaux. Par conséquent, le cadre de réglementation régissant la concurrence locale, tel qu'il est prescrit dans la décision Concurrence locale, Décision Télécom CRTC 97-8, 1er mai 1997 (la décision 97-8) et dans les décisions subséquentes, s'applique aux fournisseurs de services VoIP locaux, sauf indication contraire dans la présente décision. Au regard de la mise en oeuvre de ce cadre de réglementation, le Conseil se penche tout particulièrement sur les points suivants : l'inscription des revendeurs de services VoIP, l'accès aux numéros et la transférabilité des numéros locaux, les inscriptions aux annuaires, l'égalité d'accès, les reconquêtes, l'accès pour les personnes handicapées, le service de relais téléphonique, les garanties en matière de protection de la vie privée, l'obligation de déposer des tarifs, la réglementation des entreprises non dominantes, la réglementation des services VoIP dans les territoires où la concurrence locale n'est pas encore autorisée et l'interconnexion IP.

De plus, le Conseil conclut que les services VoIP sont admissibles à la contribution et que les fournisseurs de services VoIP ont droit aux subventions existantes, dans la mesure où ils satisfont aux règles et aux exigences applicables. Il conclut également que les services poste à poste, qui ne sont pas réglementés, ne sont pas admissibles à la contribution.

Le Conseil aborde ensuite les questions liées à l'accès. Il ordonne aux grandes entreprises de câblodistribution de supprimer une restriction de leurs tarifs sur l'accès Internet de tiers (AIT) afin que les clients de l'AIT puissent fournir des services VoIP en plus du service Internet (SI) de détail. Parallèlement, le Conseil ordonne aux ESLT de supprimer une restriction de leurs tarifs afin que les fournisseurs de services de ligne d'abonné numérique qui utilisent des lignes dégroupées, des services de liaison de raccordement et des services de co-implantation puissent également offrir des services VoIP en plus du SI de détail. Le Conseil rejette la demande visant l'imposition d'une condition d'accès aux ESLT et aux entreprises de câblodistribution.

Finalement, le Conseil conclut que toutes les décisions d'abstention pertinentes qu'il a prises à ce jour s'appliquent à la fourniture des services VoIP. Ainsi, les ESLT ne sont pas tenues de déposer des tarifs en ce qui concerne, par exemple, les services interurbains sur IP. Les opinions minoritaires des conseillères Wylie et Noël sont jointes à la présente.

I. Introduction

1. Le 6 novembre 2003, Bell Canada a présenté une demande sollicitant que le Conseil amorce une instance sur les règles, le cas échéant, qui régissent la fourniture des services de télécommunication par les câblodistributeurs et autres fournisseurs de services qui offrent des services téléphoniques sur protocole Internet. Le 12 janvier 2004, Call-Net Enterprises Inc. (Call-Net) a présenté une lettre dans laquelle elle a demandé quelles exigences réglementaires s'appliqueraient à la fourniture de ces services.

2. En réponse, le Conseil a publié l'avis Cadre de réglementation régissant les services de communication vocale sur protocole Internet, Avis public de télécom CRTC 2004-2, 7 avril 2004 (l'avis 2004-2), dans lequel il énonce un certain nombre d'avis préliminaires sur le régime de réglementation applicable à la fourniture des services VoIP qu'il a définis comme des services de communication vocale utilisant le Protocole Internet (IP) qui utilise des numéros de téléphone établis conformément au Plan de numérotation nord-américain (PNNA), et qui fournissent l'accès universel à destination et/ou en provenance du réseau téléphonique public commuté (RTPC). Dans le cadre de l'instance publique qu'il a amorcée, y compris une consultation de vive voix, le Conseil a sollicité des observations sur ses avis préliminaires et sur toute autre question pertinente.

3. Le processus établi initialement dans l'avis 2004-2 a été ensuite élargi de manière à inclure une série de demandes de renseignements. La consultation de vive voix s'est déroulée du 21 au 23 septembre 2004 et le processus public a pris fin avec les observations en réplique déposées au plus tard le 13 octobre 2004.

4. En réponse à l'avis 2004-2, les parties suivantes ont déposé des observations, des observations en réplique et/ou des réponses aux demandes de renseignements : Aliant Telecom Inc., Bell Canada, Saskatchewan Telecommunications (SaskTel) et la Société en commandite Télébec (Télébec) [collectivement, les Compagnies1], Alcatel Canada Inc. (Alcatel), le Centre d'aide et de défense juridique pour les handicapés (le CADJH), l'Association des centres d'urgence 9-1-1 du Québec, AT&T Global Services Canada Co. (AT&T), Bell West Inc. (Bell West), le British Columbia Public Interest Advocacy Centre au nom de la British Columbia Old Age Pensioners' Organization, les Council of Senior Citizens' Organizations of B.C., les Federated Anti-Poverty Groups of B.C., la Senior Citizens' Association of Canada, la End Legislated Poverty et Tenant Rights Action Coalition (BCOAPO et autres), Call-Net, l'Association canadienne des chefs de police, l'Association canadienne des fournisseurs Internet, l'Association canadienne de télécommunication par câble (ACTC) [anciennement l'Association canadienne de télévision par câble], la ville de Calgary (Calgary), la Coalition for Competitive Telecommunications Pricing (la CCTP), Cogeco Câble Canada Inc. (Cogeco), le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (le SCEP), Comwave Telecom Inc. (Comwave), Cybersurf Corp. (Cybersurf), Bragg Communications Inc., faisant affaires sous la raison sociale d'EastLink, le Service de police d'Edmonton, Futureway Communications Inc., faisant affaires sous la raison sociale de FCI Broadband, le District régional du Grand Vancouver, en son nom et pour le compte des autres membres de la British Columbia 9-1-1 Service Providers Association, The Greenlining Institute, Microcell Solutions Inc., en son nom et pour le compte de son affiliée, Inukshuk Internet Inc. (Microcell2), le ministère du Développement économique et du Commerce au nom du gouvernement de l'Ontario (Ontario), MTS Allstream Inc. (MTS Allstream), New North Networks Ltd. (New North), Nortel Networks (Nortel), Norouestel Inc. (Norouestel), l'Ontario 9-1-1 Advisory Board (OAB), Ontera (anciennement O.N.Telcom), le Centre pour la défense de l'intérêt public au nom de l'Association des consommateurs du Canada, l'Organisation nationale anti-pauvreté et l'Union des consommateurs (les Groupes de défense des consommateurs), Primus Telecommunications Canada Inc. (Primus), pulver.com (Pulver), Québécor Média Inc. (QMI) au nom de Vidéotron Télécom ltée et Vidéotron ltée, RipNET Limited (RipNET), Rogers Communications Inc. (Rogers), Shaw Cablesystems GP (Shaw), la Telecommunications Workers Union (la TWU), TELUS Communications Inc. (TCI) en son nom et pour le compte de TELUS Communications (Québec) Inc. (collectivement TELUS), l'Union des municipalités du Québec, UTC Canada (UTC), Vonage Holdings Corp. et Vonage Canada Corp. (Vonage), WorldCom Canada Ltd., exerçant ses activités sous le nom de MCI Canada), Xit télécom inc. en son nom et pour le compte de Télécommunications Xittel inc. (Xit), Yak Communications (Canada) Inc. (Yak) et le gouvernement du Yukon (Yukon). Un certain nombre de ces parties ont également participé à la consultation de vive voix. En outre, sept personnes ont présenté des observations à titre individuel.

5. Dans la présente décision, les positions des parties intéressées ont été résumées; toutefois, le Conseil a examiné attentivement et tenu compte des exposés oraux et écrits de toutes les parties.

6. En raison de préoccupations pour la sécurité publique liées à l'accès aux services d'urgence par les utilisateurs du service VoIP, le Conseil a traité de la question du service 9-1-1 et 9-1-1 évolué (E9-1-1) avant celles qui ont été abordées dans cette instance et il s'est prononcé dans la décision Obligations des fournisseurs de services VoIP locaux à l'égard des services d'urgence, Décision de télécom CRTC 2005-21, 4 avril 2005 (la décision 2005-21).

7. Les questions soulevées dans l'instance amorcée par l'avis 2004-2 sont traitées ci-après, sous les rubriques suivantes :

II. Historique

Avis préliminaires du Conseil

8. Dans l'avis 2004-2, le Conseil a énoncé un certain nombre d'avis préliminaires concernant la réglementation des services VoIP. Le Conseil a fait remarquer que les services VoIP utilisent des numéros de téléphone établis selon le PNNA et permettant à l'abonné de faire et/ou de recevoir des appels en provenance et/ou à destination du RTPC partout dans le monde. Le Conseil était d'avis préliminaire que ces caractéristiques des services VoIP étaient fonctionnellement identiques à celles des services de télécommunication vocale à commutation de circuits.

9. L'absence d'incidences sur la technologie fait partie des principes sous-jacents du cadre de réglementation établi à l'égard de la concurrence locale dans la décision Concurrence locale, Décision Télécom CRTC 97-8, 1er mai 1997 (la décision 97-8). Suivant le principe de l'absence d'incidences sur la technologie, le Conseil, dans l'avis 2004-2, était d'avis préliminaire que le cadre de réglementation existant, y compris ses décisions en matière d'abstention de la réglementation, devraient s'appliquer aux services VoIP. Ainsi, les exigences réglementaires imposées aux fournisseurs de services VoIP seraient fonction de la catégorie de fournisseur de services [p. ex., entreprise de services locaux titulaire (ESLT), entreprise de services locaux concurrente (ESLC), entreprise canadienne non dominante, fournisseur de services sans fil mobiles, revendeur de services locaux] ainsi que du type de service offert.

10. Dans la mesure où les services VoIP assurent à l'abonné l'accès à destination et/ou en provenance du RTPC et qu'il permet à l'abonné d'effectuer et/ou de recevoir des appels dont les points de départ et d'arrivée se situent dans une circonscription ou une zone d'appel local, telles qu'elles sont définies dans les tarifs des ESLT, le Conseil était d'avis préliminaire que ces services devraient être traités comme des services locaux. Ils sont désignés comme des services VoIP locaux.

11. Lorsque les ESLT fournissent un service VoIP local dans leurs territoires de desserte, elles seraient tenues de respecter leurs tarifs en vigueur ou de déposer des projets de tarifs au besoin, en conformité avec les règles de réglementation applicables. Les ESLC, y compris les ESLC sans fil et les ESLT hors territoire, ne seraient pas tenues de déposer des tarifs à l'égard des services VoIP locaux de détail; toutefois, à l'instar, dans une certaine mesure, des revendeurs qui fournissent un service VoIP local, elles seraient obligées de satisfaire aux obligations réglementaires imposées dans la décision 97-8, et les décisions connexes subséquentes. Les ESLT, les entreprises canadiennes non dominantes et les fournisseurs de services sans fil mobiles qui ne sont pas des ESLC ne seraient pas tenus de déposer des tarifs à l'égard des services VoIP visés par les décisions applicables en matière d'abstention.

12. Dans l'avis 2004-2, le Conseil a également reconnu qu'il est possible qu'au début, certains fournisseurs de services VoIP locaux ne puissent pas offrir le 9-1-1, le E9-1-1, le service de relais téléphonique (SRT) ou encore des garanties relatives à la protection de la vie privée. Le Conseil a estimé qu'il est donc essentiel que les abonnés des services VoIP locaux soient informés de la nature et des modalités des services qui leur sont offerts. Le Conseil s'attend à ce que l'information que les fournisseurs de services VoIP locaux dispenseront aux abonnés actuels et potentiels soit claire. De plus, de l'avis préliminaire du Conseil, il devrait devenir obligatoire, et ce le plus rapidement possible, pour tous les fournisseurs de services VoIP locaux d'offrir le 9-1-1/E9-1-1, le SRT ainsi que des garanties relatives à la protection de la vie privée. Tel qu'indiqué précédemment, le Conseil a traité de la question de l'accès au service 9-1-1/E9-1-1 dans la décision 2005-21.

13. Dans l'avis 2004-2, le Conseil a fait remarquer que le Comité directeur du CRTC sur l'interconnexion (CDCI) se penchait déjà sur un grand nombre de questions se rapportant au service VoIP. Le Conseil a estimé que le CDCI serait la tribune idéale pour traiter les questions touchant la fourniture, aux abonnés du service VoIP local, des services 9-1-1/E9-1-1, du SRT ainsi que les garanties relatives à la protection de la vie privée. De plus, il serait indiqué, selon lui, que le CDCI examine également les questions concernant l'accès aux services VoIP par les personnes handicapées.

14. Dans la décision 97-8, le Conseil a établi un fonds central pour subventionner les services locaux de résidence à coût élevé dans les zones rurales et éloignées. Dans la décision Modifications au régime de contribution, Décision CRTC 2000-745, 30 novembre 2000 (la décision 2000-745), le Conseil a mis en place un mécanisme national de perception de la contribution dans le cadre duquel tous les fournisseurs de services de télécommunication (FST) dont les revenus dépassent un certain seuil sont tenus de contribuer au fonds un pourcentage du total des revenus admissibles à la contribution provenant de services de télécommunication canadiens. Les revenus des services Internet (SI) de détail ne sont pas admissibles à la contribution. Les définitions permettant d'établir les revenus admissibles à la contribution ont par la suite été approuvées par le Conseil dans l'ordonnance Rapports de consensus de l'industrie présentés par les Groupes de travail sur la mise en oeuvre du mécanisme de perception de la contribution (MPC), Ordonnance CRTC 2001-220, 15 mars 2001 (l'ordonnance 2001-220).

15. Du fait que les services VoIP fournissent l'accès en provenance et/ou à destination du RTPC, le Conseil était d'avis préliminaire qu'ils n'étaient pas des services Internet de détail, au sens qui leur est donné dans l'ordonnance 2001-220 et que les revenus provenant des services VoIP étaient donc admissibles à la contribution. Le Conseil était également d'avis préliminaire que les services poste à poste, définis dans la section suivante, étaient des services Internet de détail et que les revenus provenant de ces services ne sont donc pas admissibles à la contribution.

Services VoIP

16. Le Conseil fait remarquer que le terme « services VoIP » peut être utilisé par certains, à des fins autres que de réglementation, de manière à inclure les services poste à poste, qui sont des services de communication vocale activé par IP qui ne sont pas raccordés au RTPC et qui n'utilisent pas généralement de numéros de téléphone établis conformément au PNNA; toutefois, dans la présente décision, le terme « services VoIP » désignera uniquement les services qui utilisent des numéros établis conformément au PNNA et qui fournissent l'accès universel en provenance et/ou à destination du RTPC. Conformément à l'avis 2004-2 ainsi qu'au dossier de l'instance, les services poste à poste ne sont pas réglementés. De plus, dans la mesure où les services VoIP fournissent aux abonnés l'accès en provenance et/ou à destination du RTPC ainsi que la capacité de faire ou de recevoir des appels en provenance et à destination d'une circonscription ou d'une zone d'appel local définie dans les tarifs de l'ESLT, ils seront appelés, dans la présente décision, services VoIP locaux.

17. L'IP peut se définir comme une méthode normalisée qui permet le transport des informations en paquets de signaux vocaux, vidéo et de données sur un même réseau, y compris Internet ou de gestion de réseau IP. À l'origine, les réseaux à commutation par paquets ne permettaient que la transmission de données, mais grâce à l'évolution de la technologie IP, il est désormais possible de faire circuler efficacement du trafic voix de qualité sur ces réseaux.

18. L'introduction de la technologie IP dans le RTPC marque une autre étape dans l'évolution des réseaux de télécommunication. La commutation électromécanique pas-à-pas et la commutation numérique sont des exemples des premières technologies. Dans chaque cas, les progrès technologiques ont accru la capacité des réseaux d'acheminer de gros volumes de trafic voix à un coût unitaire inférieur. Il est ainsi devenu possible de réduire les coûts unitaires de capital et d'exploitation des FST, ce qui a permis de diminuer le prix des services de télécommunication pour les consommateurs.

19. Les services traditionnels à commutation de circuits impliquent de dédier à chaque appel un ou plusieurs circuits qui raccordent les appelants et les appelés jusqu'à ce que l'appel soit terminé. Il en résulte des inefficiences potentielles évidentes en ce sens que tout le circuit est engagé pendant la durée de l'appel, que le contenu soit ou non effectivement acheminé sur le circuit à un moment quelconque.

20. Par contre, la technologie IP emploie une technique de commutation par paquets qui divise le contenu vocal en paquets discrets, dont chacun contient l'adresse de destination. Ces paquets sont ensuite transmis sur un réseau avec d'autres paquets et le contenu vocal est rassembléà destination. Un réseau IP a entre autres grands avantages de ne pas nécessiter l'affectation d'une infrastructure de commutation et de transport pour des types particuliers de trafic vocal ou de données, ce qui libère le réseau pour traiter le trafic de façon plus efficace.

21. Jusqu'à tout récemment, la technologie des services de communication vocale qui étaient généralement offerts sur IP limitaient l'abonné à faire et/ou à recevoir des appels depuis un ordinateur, et la communication ne pouvait être établie que si tous les interlocuteurs utilisaient le même logiciel de téléphonie. Ces services sont dits services poste à poste.

22. Cependant, les services VoIP permettent maintenant à l'abonné de faire un appel à partir d'une connexion à large bande, par exemple au moyen d'un téléphone traditionnel muni d'un adaptateur ou d'un téléphone IP, en utilisant des numéros de téléphone conformes au PNNA et en offrant l'accès universel à destination ou en provenance du RTPC.

23. Bien qu'Internet soit lui-même un réseau à large bande, initialement, les utilisateurs du service de résidence ne pouvaient y accéder que par voie d'une connexion (accès commuté) à faible débit. Toutefois, l'arrivée du modem câble et de la ligne d'abonné numérique (LAN) ainsi que d'autres technologies, a permis d'obtenir un accès Internet haute vitesse à large bande. Et de son côté, l'accès Internet haute vitesse et d'autres connexions à large bande permettent la livraison de services VoIP de grande qualité.

24. La technologie VoIP a permis l'adoption de nouvelles fonctions au profit des consommateurs, notamment l'envoi de messages vocaux en pièce jointe de courrier électronique; l'utilisation d'un « téléphone logiciel » sur un ordinateur personnel pour faire et recevoir des appels pendant un voyage et configurer toutes ces fonctions sur une interface Web. Pour les fournisseurs de services, la technologie VoIP permet de réaliser des économies considérables dans l'équipement de réseau nécessaire pour offrir les services vocaux et elle permet de déployer rapidement des fonctions comme l'attribution d'un numéro de téléphone d'un client à son service VoIP à partir d'une circonscription située à l'extérieur de la circonscription de l'utilisateur, et permet qu'un seul numéro de téléphone appelle simultanément plusieurs autres numéros de téléphone. Depuis un certain temps déjà, les grandes entreprises utilisent la technologie IP ou autre technologie par paquets sur leurs réseaux privés pour fournir des communications vocales rentables ainsi que des fonctions améliorées pour leurs entreprises.

25. D'après les éléments de preuve déposés au cours de cette instance, il est évident pour le Conseil que les grandes ESLT, les ESLC, les câblodistributeurs et autres fournisseurs de services sont vivement intéressés à fournir aux clients des services de résidence et d'affaires divers services VoIP, comportant toute une gamme de fonctions. Au moment de la consultation de vive voix, Bell Canada, TELUS, SaskTel, Call-Net, Woods Lake Cable, Primus, Vonage et Yak, par exemple, offraient déjà un ou plusieurs types de service VoIP. De nombreux autres participants ont également exprimé leur intention de commencer à offrir des services VoIP. Il est également évident pour le Conseil, d'après les réponses des parties, que les fournisseurs de services actuels et potentiels prévoient une croissance importante des services VoIP.

26. Le Conseil fait remarquer que l'IP est très prometteur puisqu'il ouvre la voie à des réseaux plus efficients et à une panoplie de nouvelles fonctions pour les consommateurs, et qu'il incite les entreprises de télécommunication du monde entier à consacrer des sommes considérables pour transformer leurs réseaux.

27. Le Conseil se réjouit de cette évolution et il s'attend à ce que les FST canadiens se prévalent des avantages qu'offre la technologie IP pour améliorer leur efficacité et leur compétitivité, pour étendre des services de télécommunication accessibles, fiables et abordables de grande qualité partout au Canada et pour stimuler la recherche et le développement dans les nouveaux services de télécommunication.

28. Le Conseil fait remarquer que la politique canadienne de télécommunications énoncée dans la Loi sur les télécommunications (la Loi) encourage ces développements. Il fait en outre remarquer que la réglementation par plafonnement des prix adoptée par le Conseil et en place depuis près de huit ans au Canada encourage les entreprises canadiennes réglementées à intégrer dans leurs réseaux de nouvelles technologies qui accroissent l'efficience, en leur permettant de conserver les avantages de cette efficience accrue.

Catégories de services VoIP

29. Dans l'avis 2004-2, le Conseil a classé les services VoIP (qui n'incluaient pas les services poste à poste) dans une catégorie générale. Dans cette instance, par ailleurs, les Compagnies ont classé les services poste à poste comme des services de catégorie 1 et elles ont fait valoir que les services VoIP devraient être divisés en trois catégories :

30. TELUS a divisé les services VoIP en deux catégories (qui n'incluent pas de services poste à poste). Elle les décrit ainsi :

31. Les Compagnies et TELUS ont convenu que les services VoIP de catégorie 2 des Compagnies sont équivalents aux services VoIP indépendants de l'accès de TELUS et que les services VoIP de catégorie 3 sont équivalents aux services dépendants de l'accès. Le Conseil utilisera ces deux termes indifféremment dans la présente décision. En ce qui concerne les services VoIP de catégorie 4, TELUS a indiqué que ces services correspondaient à son concept de services dépendants de l'accès, tandis que les Compagnies ont déclaré que la classification de services indépendants de l'accès faite par TELUS pourrait inclure les services VoIP de catégorie 4.

Le cadre législatif

32. La Loi prévoit fondamentalement que tous les services de télécommunication3 fournis par des entreprises canadiennes doivent être fournis aux termes de tarifs approuvés par le Conseil, sous réserve des critères établis dans la Loi. La Loi habilite également le Conseil à s'abstenir d'obliger les entreprises à soumettre des tarifs à son approbation (et d'exercer tout autre pouvoir et fonction) à l'égard de certains services ou catégories de services, basé sur certaines conclusions de fait que la Loi l'autorise à faire. Le Conseil souligne que la Loi met l'accent sur les services de télécommunication plutôt que sur les technologies sous-jacentes utilisées pour fournir ces services.

33. Le paragraphe 25(1) de la Loi énonce comme suit l'exigence en matière de tarification :

(1) L'entreprise canadienne doit fournir les services de télécommunication en conformité avec la tarification déposée auprès du Conseil et approuvée par celui-ci fixant - notamment sous forme de maximum, de minimum ou des deux - les tarifs à imposer ou à percevoir.

34. Les paragraphes 27(1) et (2) de la Loi énoncent comme suit les principaux critères régissant les tarifs et les pratiques des entreprises :

(1) Tous les tarifs doivent être justes et raisonnables.

(2) Il est interdit à l'entreprise canadienne, en ce qui concerne soit la fourniture de services de télécommunication, soit l'imposition ou la perception des tarifs y afférents, d'établir une discrimination injuste, ou d'accorder -- y compris envers elle-même -- une préférence indue ou déraisonnable, ou encore de faire subir un désavantage de même nature.

35. L'article 34 de la Loi prévoit une abstention de la réglementation :

(1) Le Conseil peut s'abstenir d'exercer - en tout ou en partie et aux conditions qu'il fixe - les pouvoirs et fonctions que lui confèrent normalement les articles 24, 25, 27, 29 et 31 à l'égard des services - ou catégories de services - de télécommunication fournis par les entreprises canadiennes dans les cas où il conclut, comme question de fait, que son abstention serait compatible avec la mise en ouvre de la politique canadienne de télécommunication.

(2) S'il conclut, comme question de fait, que le cadre de la fourniture par les entreprises canadiennes des services - ou catégories de services - de télécommunication est suffisamment concurrentiel pour protéger les intérêts des usagers - ou le sera -, le Conseil doit s'abstenir, dans la mesure qu'il estime indiquée et aux conditions qu'il fixe, d'exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent normalement les articles 24, 25, 27, 29 et 31 à l'égard des services ou catégories de services en question.

(3) Le Conseil ne peut toutefois s'abstenir, conformément au présent article, d'exercer ses pouvoirs et fonctions à l'égard des services ou catégories de services en question s'il conclut, comme question de fait, que cela aurait vraisemblablement pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour leur fourniture.

36. Au nombre des autres dispositions législatives mentionnées à l'article 34 :

24.  L'offre et la fourniture des services de télécommunication par l'entreprise canadienne sont assujetties aux conditions fixées par le Conseil ou contenues dans une tarification approuvée par celui-ci.

25(3) La tarification est déposée puis publiée ou autrement rendue accessible au public, selon les modalités de forme et autres fixées par le Conseil; celui-ci peut par ailleurs préciser les renseignements devant y figurer.

27(3) Le Conseil peut déterminer, comme question de fait, si l'entreprise canadienne s'est ou non conformée aux dispositions du présent article ou des articles 25 ou 29 ou à toute décision prise au titre des articles 24, 25, 29, 34 ou 40.

27(4) Il incombe à l'entreprise canadienne qui a fait preuve de discrimination, accordé une préférence ou fait subir un désavantage d'établir, devant le Conseil, qu'ils ne sont pas injustes, indus ou déraisonnables, selon le cas.

27(5) Pour déterminer si les tarifs de l'entreprise canadienne sont justes et raisonnables, le Conseil peut utiliser la méthode ou la technique qu'il estime appropriée, qu'elle soit ou non fondée sur le taux de rendement par rapport à la base tarifaire de l'entreprise.

III. Demandes d'abstention de la réglementation

Demandes d'abstention de la réglementation présentées par les Compagnies et TELUS

37. Les Compagnies et TELUS ont soit demandé au Conseil de confirmer que certains services VoIP font déjà l'objet d'une abstention aux termes de décisions antérieures du Conseil soit de s'abstenir de réglementer à l'avenir. Plus précisément, elles ont réclamé une abstention de la réglementation comme suit :

  1. Les Compagnies ont demandé que le Conseil confirme qu'en vertu des paragraphes 34(1), (2) et (3) de la Loi, les services VoIP de catégorie 2, y compris les services de la même catégorie que les Compagnies pourraient offrir à l'avenir, font l'objet d'une abstention en vertu des articles 25, 29, 31 et des paragraphes 27(1), (5) et (6) de la Loi, conformément aux conclusions qu'il a tirées dans une série d'ordonnances, culminant avec l'ordonnance Abstention de la réglementation pour les services Internet de détail, Ordonnance Télécom CRTC 99-592, 25 juin 1999 (l'ordonnance 99-592) et qu'il conclue que ces services font l'objet d'une abstention en vertu des paragraphes 27(2), (3) et (4);
  2. SaskTel a demandé que si le Conseil ne confirme pas que les services VoIP de catégorie 2 font l'objet d'une abstention, tel que réclamé en a) ci-dessus, il détermine que les services VoIP de catégorie 2, y compris les services de la même catégorie que celle que SaskTel pourrait offrir à l'avenir, font l'objet d'une abstention;
  3. Les Compagnies ont demandé que le Conseil conclue que les services VoIP de catégorie 3 et 4, y compris les services de la même catégorie que les Compagnies pourraient offrir à l'avenir, font l'objet d'une abstention en vertu des articles 25, 27, 29 et 31 de la Loi;
  4. TELUS a demandé que le Conseil conclue que les services VoIP indépendants de l'accès soient visés par les ordonnances du Conseil en matière d'abstention de la réglementation qui s'appliquent aux SI de détail;
  5. TELUS a demandé que, si le Conseil ne tire pas la conclusion réclamée en (d), il s'abstienne d'une réglementation économique des services VoIP indépendants de l'accès.

38. Dans les sections suivantes, le Conseil traite dans un premier temps des demandes des Compagnies et de TELUS, aux alinéas (a) et (d) du paragraphe précédent, voulant qu'il confirme que les services VoIP de catégorie 2 fassent l'objet d'une abstention. Il aborde ensuite les demandes, aux alinéas (b), (c) et (e) du paragraphe précédent, voulant que le Conseil s'abstienne de réglementer les services VoIP en vertu des articles 25, 27, 29 et 31 de la Loi.

39. Comme la plupart des services VoIP, autres que les services VoIP locaux, feraient l'objet d'une abstention selon l'avis préliminaire du Conseil, lequel est confirmé ci-dessous, la présente décision porte principalement sur les services VoIP locaux.

40. Le Conseil fait remarquer que les Compagnies et TELUS ont toutes deux précisé qu'elles ne demandaient pas une abstention de la réglementation concernant le marché des services locaux en général. Par conséquent, cette question plus vaste n'est pas abordée et ne fait pas partie de la présente décision.

Applicabilité des conclusions actuelles en matière d'abstention de la réglementation des SI de détail

Positions des parties

41. Les Compagnies et TELUS ont fait valoir que les services VoIP de catégorie 2 ou indépendants de l'accès sont des SI, fournis à partir de connexions Internet de détail. Elles ont fait valoir que comme les autres SI de détail, ces services VoIP font l'objet d'une abstention conformément à l'ordonnance 99-592 dans laquelle le Conseil s'est abstenu de réglementer les tarifs des SI de détail fournis par les entreprises non déjà visées par une décision d'abstention de la réglementation concernant les SI de détail. Plus précisément, elles ont fait valoir que le Conseil s'est abstenu de réglementer conditionnellement ou inconditionnellement, selon que l'entreprise en question a mis en place les séparations comptables qui s'imposent et qu'il ne s'est pas abstenu de réglementer les installations de transmission sous-jacentes.

42. TELUS a indiqué que son service VoIP indépendant de l'accès est semblable à celui de Vonage et de Primus, c'est-à-dire un service qui passe par une connexion Internet haute vitesse de détail, que ce soit une LAN fournie par TELUS ou par un fournisseur de services LAN indépendant (FSLAN), le modem câble fourni par un câblodistributeur ou une tierce partie indépendante ou la large bande sans fil. Les Compagnies ont indiqué que leurs services VoIP de catégorie 2 sont fournis par connexion Internet d'une manière qui s'apparente à la façon dont les fournisseurs de services Internet (FSI) fournissent des applications comme le courrier électronique, la messagerie, le contenu vidéo et audio, la protection contre les virus, les services coupe-feu, les jeux téléchargeables et les jeux interactifs.

43. TELUS et les Compagnies ont soutenu que les services VoIP indépendants de l'accès ou de catégorie 2 ne sont pas simplement un service local de base (SLB) fourni au moyen d'une autre technologie, car les abonnés se procurent le service téléphonique séparément des SI haute vitesse de détail.

44. TELUS a déclaré que les services VoIP indépendants de l'accès partagent de nombreuses caractéristiques avec d'autres applications Internet, comme le « Hotmail » de Microsoft et autres services de courriel et messagerie instantanée (dont bon nombre ont des capacités de fonction vocale). De l'avis de TELUS, le service VoIP fait partie des nombreuses applications qui se situent à la marge du réseau et auquel on peut accéder par Internet haute vitesse.

45. D'un point de vue fonctionnel, les Compagnies ont appuyé cette position en déclarant que les services VoIP de catégorie 2 sont des applications qui viennent compléter les services de connexion Internet. Les Compagnies ont fait valoir que les services offerts par Vonage, Primus, BabyTEL, Call-Net et Navigata Communications Inc. (Navigata) sont commercialisés comme des applications Internet et non comme un service téléphonique.

46. Xit a déclaré que les services VoIP qu'offrent les ESLT et les entreprises de câblodistribution titulaires feraient partie du marché des services téléphoniques locaux, mais que les services VoIP qui transitent par les réseaux des FSI non affiliés aux ESLT ou aux entreprises de câblodistribution titulaires, en passant par des points d'homologues d'Internet public feraient partie du marché des SI de détail.

47. Cybersurf a fait valoir que dans la mesure où les services VoIP sont transportés sur l'Internet public sans les contraintes d'acheminement qui exigent le transport de ces appels sur des réseaux exclusifs, ces services (services de catégorie 2 indépendants de l'accès) peuvent être considérés comme des applications Internet.

48. La majorité des parties se sont opposées à l'affirmation des ESLT selon laquelle le VoIP est un SI de détail du fait qu'il est fourni par une connexion Internet de détail. Elles ont soutenu en général que l'utilisation d'une connexion Internet ne suffit pas à elle seule pour qu'un service VoIP soit un SI de détail.

49. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait remarquer que plusieurs parties cherchent à catégoriser le VoIP comme un SI de détail ou une application Internet simplement dans l'espoir que le Conseil applique ses décisions en matière d'abstention de la réglementation des SI de détail aux services VoIP. De l'avis des Groupes de défense des consommateurs, cette catégorisation confond les éléments des opérations du VoIP avec la question importante de l'équivalence fonctionnelle du VoIP et du service téléphonique à commutation de circuits.

50. Call-Net et MTS Allstream ont fait valoir que le VoIP est tout simplement un service téléphonique sur IP passant par un réseau à commutation de circuits plutôt qu'une infrastructure traditionnelle à commutation de circuits. Call-Net, l'ACTC, UTC et les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir que la fonction la plus importante d'un service VoIP est la capacité de faire et de recevoir des appels de n'importe quel abonné du RTPC, ce qui est la fonction qui définit le SLB. UTC a également fait valoir que les abonnés du SLB et du VoIP peuvent accéder à d'autres réseaux (comme le sans-fil ou les réseaux interurbains) qui sont interconnectés au RTPC.

51. De l'avis de Call-Net, le service est essentiellement le même qu'un SLB, bien qu'il permette un plus grand nombre de fonctions et la connectivité Internet en raison de la différence dans le réseau de données sous-jacent. MTS Allstream et l'ACTC ont déclaré que du point de vue du client final, « VoIP » n'est qu'un nouveau mot pour désigner un service bien connu - un service qui permet à une partie de parler à une autre en temps réel. La technologie sous-jacente utilisée pour atteindre ce résultat importe peu aux parties qui participent à l'appel ou au client qui paie la facture. Le SCEP a exprimé une opinion semblable.

52. L'ACTC a fait valoir que les services VoIP n'utilisent pas nécessairement l'Internet public et sont caractérisés à tort comme des SI. L'ACTC a déclaré ne pas s'accorder avec les Compagnies et TELUS pour dire que les services VoIP sont comme d'autres applications Internet. Elle a soutenu que le service est appelé communication vocale sur IP pour la simple raison qu'il sert à placer des appels vocaux, et non à naviguer sur Internet ou à envoyer des courriels.

53. MTS Allstream a fait remarquer que les Compagnies et TELUS ont souligné la nécessité d'une connexion Internet à large bande de détail pour accéder aux services VoIP, mais ont négligé le fait qu'un appel doit traverser l'Internet public pour atteindre la plate-forme du fournisseur de services VoIP. MTS Allstream a fait valoir qu'il est peu probable que l'appel VoIP d'un abonné Internet haute vitesse d'une ESLT passe par l'Internet public. Selon MTS Allstream, ces appels pourraient être acheminés au moyen d'une connexion Internet LAN pour fournir une voie téléphonique dédiée avec qualité du service directement des locaux du client à la passerelle du RTPC, sans utiliser l'Internet public. MTS Allstream a conclu qu'il pourrait même être impossible de détecter le moment où ces appels sont transmis sur Internet et celui où ils sont assurés en tant que service géré sur IP ou VoIP dépendant de l'accès.

54. Les Compagnies ont soutenu que le Conseil a reconnu que les services VoIP de catégorie 2 sont des SI de détail lorsqu'il a exclu le « RTPC Voix » dans l'ordonnance 2001-220 de l'exemption de payer la contribution accordée à d'autres SI de détail. De l'avis des Compagnies, le fait de distinguer ainsi le RTPC Voix montre bien que le Conseil a estimé que le service VoIP est un SI de détail de fait et de droit, sans quoi il n'y aurait eu aucune raison d'exclure le VoIP de cette façon.

55. Un certain nombre de parties se sont opposées à la position des Compagnies. Les Groupes de défense des consommateurs ont déclaré que la définition de « services Internet de détail » dans l'ordonnance 2001-220 exclut « les services RTPC Voix » uniquement aux fins de déterminer la portée de l'exemption de la contribution à l'égard des SI de détail. Call-Net a mentionné la déclaration du président lors de la consultation publique, selon laquelle il est bien précisé dans l'ordonnance 2001-220 que « les services RTPC Voix désignent les communications téléphoniques en temps réel par Internet à destination ou en provenance d'un téléphone ou de tout autre équipement ». Par conséquent, de l'avis de Call-Net, l'argument avancé par les Compagnies à cet égard ne tient pas compte de la définition précise donnée de ces services dans l'ordonnance en question.

56. Les Compagnies ont également indiqué que dans l'avis Nouveaux médias, Avis public Télécom CRTC 99-14, 17 mai 1999 (l'avis 99-14), le Conseil a reconnu qu'aux fins de la réglementation, les services VoIP qui utilisent les connexions Internet fournies par les clients devraient être traitées de la même manière que les autres applications Internet. Les Compagnies ont fait remarquer que le Conseil a assimilé la téléphonie IP à une liste de nouveaux médias et qu'il a déclaré que ces services pouvaient être fournis par des « moyens traditionnels de distribution » et des « réseaux interconnectés localement ou à l'échelle mondiale ». Les Compagnies ont soutenu que dans l'avis 99-14, le Conseil avait reconnu que les SI de détail avaient évolué et qu'ils évolueraient de différentes façons, d'où la difficulté d'établir une liste de tous les services SI de détail. Les Compagnies ont souligné que le Conseil a déclaré que l'abstention de la réglementation des nouveaux médias encouragerait les applications Internet. Elles ont en outre affirmé que depuis la publication de la décision sur les nouveaux médias, elles-mêmes et d'autres FSI ont lancé un grand nombre de nouvelles applications Internet qui n'ont pas été tarifées. À leur avis, les services VoIP sont le fruit des développements évolutifs ou des améliorations des SI de détail haute vitesse qui font déjà l'objet d'une abstention.

57. Ne souscrivant pas à la position des Compagnies, Call-Net a notamment fait valoir que leur interprétation de l'avis 99-14 n'était pas valable, car cet avis concernait la question de savoir s'il fallait réglementer le contenu Internet qui remplit les conditions d'un service de programmation en vertu de la Loi sur la radiodiffusion.

58. Les Compagnies et TELUS ont également fait valoir que dans le Rapport à la gouverneure en conseil : État de la concurrence dans les marchés des télécommunications au Canada - Mise en place et accessibilité de l'infrastructure et des services de télécommunication de pointe, 27 novembre 2003 (Rapport de 2003 sur l'état de la concurrence), le VoIP est considéré comme une composante du nouveau marché des applications Internet d'affaires autonomes. Elles ont cité l'extrait suivant :

Les FSI et d'autres entreprises de télécommunication participent aux nouveaux marchés des applications Internet d'affaires autonomes, dont des services comme l'hébergement Web, les centres de données Internet et l'entreposage de données à l'extérieur, la sécurité, les coupe-feu et la gestion de réseau; l'audio, le vidéo, les conférences sur le Web, la voix sur IP, l'IP-PBX, les services de fax par Internet et l'enregistrement de noms de domaine.

Analyse et conclusions du Conseil

59. Le Conseil a publié un certain nombre d'ordonnances en matière d'abstention de la réglementation des SI. En 1997 et 1998, il en a publié plusieurs à l'égard des compagnies dans lesquelles il s'est abstenu de réglementer le service d'accès Internet tarifé des requérantes (p. ex., Ordonnance Télécom CRTC 97-928, 30 juin 1997, pour le service PLAnet de TCEI).

60. En 1999, le Conseil a publié l'ordonnance 99-592 à titre d'ordonnance générale en matière d'abstention de la réglementation des « services Internet de détail d'utilisateurs finals » fournis par toutes les entreprises canadiennes non déjà visées par une décision d'abstention concernant les SI de détail.

61. Le Conseil estime que les faits cités par les Compagnies et par TELUS, à savoir que les services de catégorie 2 ou les services VoIP indépendants de l'accès sont offerts comme SI de détail au moyen d'un raccordement Internet haute vitesse, qu'ils peuvent utiliser intégralement ou partiellement l'Internet public et qu'ils se situent à la limite du réseau ne sont pas déterminants dans la question de savoir si l'abstention actuelle de la réglementation des SI de détail s'applique à ces services VoIP. Le Conseil estime que ce qui importe ce n'est pas tant la technologie utilisée mais la nature du service fourni.

62. Le Conseil fait remarquer que la plupart des parties se sont généralement opposées à la position des Compagnies et de TELUS voulant que certains types de services VoIP de catégorie 2 partagent bon nombre des caractéristiques des autres applications Internet ou complètent la connexion Internet. Ces parties ont soutenu que les services VoIP ne servent pas à échanger des courriels ou à naviguer sur Internet, mais à fournir des services locaux ou des communications téléphoniques en temps réel.

63. Comme l'ont fait remarquer de nombreuses parties, le Conseil estime que la caractéristique qui définit les services VoIP et les distingue des SI de détail est que, même s'ils partagent certaines parties de l'infrastructure de transmission sous-jacente - Internet - pour raccorder les utilisateurs, leurs points d'origine et de destination sont adressables par des numéros PNNA et leurs équivalents internationaux, outre la capacité de se raccorder à toute personne sur le RTPC. De l'avis du Conseil, la principale fonction des services VoIP de catégorie 2 n'est pas d'accéder à Internet, mais d'accéder au RTPC afin de faire et de recevoir des appels téléphoniques.

64. Le Conseil n'accepte pas les arguments selon lesquels il a déterminé par le passé que le service VoIP est un SI de détail. Tel qu'il est indiqué précédemment, le terme « services VoIP » inclut uniquement les services qui permettent l'accès en provenance et/ou à destination du RTPC et l'utilisation de numéros établis conformément au PNNA (c.-à-d., autres que les services poste à poste). En fait, dans l'ordonnance 2001-220, le Conseil a clairement distingué les services vocaux raccordés au RTPC des services Internet de détail.

65. Dans l'ordonnance 2001-220, le Conseil a déclaré ce qui suit :

Le service Internet de détail inclut tous les services Internet (SI) sans égard à la vitesse ou aux installations au moyen desquelles les services sont fournis. Pour plus de certitude, les SI au détail comprennent, mais sans s'y limiter, tous les SI qui permettent aux utilisateurs de ces services de télécharger de l'information à partir d'Internet et d'utiliser des applications comme le courrier électronique, mais n'incluent pas les services du réseau téléphonique public commuté (RTPC) Voix ou tout autre service de télécommunication admissible à la contribution, pas plus qu'ils ne comprennent de biens ou de services dont les revenus correspondent à la définition de revenus canadiens autres que de télécommunication. (Soulignement ajouté)

66. Contrairement à l'argument des Compagnies selon lequel exclure les service RTPC Voix de l'exemption de la contribution pour les SI de détail signifie que le VoIP doit être considéré comme un SI de détail, le Conseil fait remarquer que la phrase commençant par « Pour plus de certitude » est incluse spécifiquement pour préciser que le RTPC Voix n'est pas considéré comme un SI de détail aux termes de l'ordonnance 2001-220.

67. En ce qui concerne l'avis 99-14, rien dans cet avis ne permet au Conseil d'appuyer l'affirmation des Compagnies selon laquelle les services VoIP sont des SI de détail. De plus, dans cet avis, le Conseil n'a tiré aucune conclusion à l'égard d'une abstention de la réglementation de services de télécommunication. Ce que le Conseil a effectivement indiqué dans l'avis, c'est qu'il exempterait les entreprises qui fournissent des services de radiodiffusion sur Internet des exigences en matière de licence prévues par la Loi sur la radiodiffusion.

68. Pour ce qui est de l'extrait cité par les Compagnies du Rapport de 2003 sur l'état de la concurrence, le Conseil fait remarquer qu'il s'agit là d'un extrait tiré d'un rapport annuel sur l'état de la concurrence dans le secteur des télécommunications au Canada. De l'avis du Conseil, le passage ne peut être considéré comme une conclusion du Conseil qui découle d'un processus de réglementation au regard de la classification et du traitement des services VoIP locaux.

69. Bref, le Conseil estime que les ordonnances en matière d'abstention de la réglementation des SI de détail n'ont jamais concerné les services vocaux raccordés au RTPC.

70. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut et confirme que les services VoIP ne sont pas des SI de détail comme ceux visés dans l'ordonnance 99-592 et les décisions subséquentes en matière d'abstention de la réglementation. Par conséquent, les services VoIP locaux de catégorie 2 ne sont pas visés par les décisions qui s'appliquent actuellement en matière d'abstention de la réglementation des SI de détail.

Demandes d'abstention de la réglementation

71. Au moment d'étudier les demandes d'abstention, le Conseil doit conclure que l'abstention de la réglementation est conforme à l'article 34 de la Loi. Pour appliquer l'article dans cette instance, le Conseil a adopté deux approches distinctes.

72. La première approche utilise le cadre analytique, qui s'inspire des principes couramment utilisés en économie et dans les politiques sur la concurrence. Ce cadre a initialement été exposé dans la décision Examen du cadre de réglementation, Décision Télécom CRTC 94-19, 16 septembre 1994 (la décision 94-19). Suivant cette approche, désignée ici comme le cadre de la décision 94-19, la décision de s'abstenir ou non de réglementer un service ou une catégorie de services repose sur la définition du marché pertinent dans lequel le ou les services sont offerts et sur le fait de savoir si les ESLT y exercent un pouvoir de marché.

73. La deuxième approche se fonde sur les arguments présentés par les parties qui demandent une abstention de la réglementation en vertu de l'article 34 de la Loi, et qui n'ont pas nécessairement été invoqués dans le cadre de la décision 94-19.

Analyse fondée sur le cadre de la décision 94-19
Historique

74. La décision 94-19 comprend une analyse en trois étapes de l'étude des demandes d'abstention de la réglementation. La première étape est la définition du marché pertinent. Le marché pertinent est le marché composé du plus petit groupe de produits et de la plus petite région géographique dans lesquels une entreprise qui a un pouvoir de marché peut imposer de façon rentable une hausse durable des prix. La définition du marché pertinent repose sur la substituabilité des services en question.

75. La deuxième étape de l'analyse consiste à décider si une entreprise exerce un pouvoir de marché dans le marché pertinent. Comme il est indiqué dans la décision 94-19, il ne peut y avoir de concurrence durable dans un marché où une entreprise exerce un pouvoir de marché important. Le pouvoir de marché se manifeste par la capacité de l'entreprise de maintenir ou de porter les prix au-delà du niveau qui aurait cours dans un marché concurrentiel.

76. La troisième étape de l'analyse est de déterminer si, et dans quelle mesure, l'abstention de la réglementation devrait être accordée.

Positions des parties

77. TELUS a déclaré que

…pour savoir si deux produits ou services sont des substituts suffisamment proches pour être dans le même marché économique, la question sous-jacente est de savoir si le prix d'un produit ou service est touché par le prix de l'autre produit ou service. Les prix n'auraient pas à évoluer ensemble par échelons fixes, mais évolueraient généralement ensemble. ;

78. TELUS a déclaré que deux produits ou services n'ont pas besoin d'être identiques pour être considérés comme des substituts suffisamment proches. TELUS a indiqué que la question est plutôt de savoir si les services sont suffisamment semblables pour répondre aux mêmes besoins d'ordre général des consommateurs et seraient, par conséquent, des substituts suffisamment proches pour appartenir au même marché économique.

79. Les Compagnies ont fait valoir que le marché pertinent des services VoIP de catégorie 1, 2 et 3 est celui des services de communication locaux de résidence, ce qui comprend, selon elles, toute la gamme des services de communication locaux filaires, les services sans fil et certains services de données Internet, comme la messagerie instantanée. De plus, les Compagnies ont fait valoir que le marché pertinent pour les catégories 2, 3 et 4 est celui des services de communication locaux d'affaires, qui comprend également de nombreux autres services qui offrent aux clients des services d'affaires des communications vocales internes avec accès téléphonique à destination et en provenance du RTPC.

80. TELUS a soutenu que les services VoIP et les services traditionnels à commutation de circuits sont des substituts suffisamment proches pour appartenir au même marché économique. TELUS a ajouté que les clients ayant accès à Internet haute vitesse de détail peuvent facilement passer d'un service VoIP indépendant de l'accès à un service traditionnel à commutation de circuits en fonction des changements des prix relatifs. En ce qui concerne le service indépendant de l'accès, TELUS a fait valoir que même si ce service ainsi que l'accès Internet haute vitesse de détail n'est pas identique au service vocal traditionnel à commutation de circuits, les deux se ressemblent assez pour qu'un nombre suffisant de clients les considèrent comme des substituts raisonnables. TELUS a déclaré que du point de vue des clients, les services VoIP dépendants de l'accès ressemblent au service téléphonique traditionnel, car les services vocaux et d'accès ne peuvent être acquis qu'ensemble auprès de la même entreprise. TELUS a également fait valoir que les clients compareraient les diverses caractéristiques du VoIP et du service téléphonique traditionnel et choisiraient celui qu'ils préfèrent.

81. Un certain nombre d'autres parties, notamment BCOAPO et autres, Call-Net, l'ACTC, les Compagnies, les Groupes de défense des consommateurs, MTS Allstream, Primus et QMI ont convenu que les services VoIP peuvent être considérés comme des substituts suffisamment proches des services locaux. L'ACTC et QMI ont également fait valoir que les services VoIP locaux devraient appartenir au même marché pertinent que les services locaux.

82. L'ACTC a fait valoir que la décision des clients d'utiliser le VoIP est motivée par la nécessité de fonctionnalités vocales de base et qu'il importe peu aux consommateurs qu'un service téléphonique fasse appel à la technologie de la commutation de circuits ou d'IP ou soit dépendant ou indépendant de l'accès. L'ACTC a fait valoir que les consommateurs ne feraient pas la différence entre les services VoIP dépendants de l'accès et les services locaux à commutation de circuits actuels. De plus, l'ACTC a déclaré que les consommateurs ne sauront probablement pas que le service téléphonique géré ou le service dépendant de l'accès repose sur la technologie IP plutôt que sur la technologie traditionnelle à commutation de circuits. L'ACTC a ajouté que la majorité des fournisseurs de services VoIP de catégorie 3 et 4 utiliseraient à la fois les réseaux IP gérés et les installations à commutation de circuits. L'ACTC et Rogers ont déclaré que les limites actuelles du VoIP n'empêcheraient pas les clients de l'adopter à la place du SLB, car ils y trouveraient leur compte sur le plan des prix et des fonctions supplémentaires.

83. Call-Net a soutenu que l'introduction d'une nouvelle technologie IP pour accéder au RTPC ne doit pas conduire à la conclusion que le VoIP est très différent du SLB. Call-Net a fait valoir en outre que le principal objet d'un service VoIP est la capacité de faire et de recevoir des appels d'un abonné du RTPC, ce qui, selon la compagnie, est la fonction qui définit le SLB traditionnel. Call-Net a déclaré que le VoIP indépendant de l'accès n'est en fait qu'un SLB doté de fonctions supplémentaires, qui permettent aux abonnés d'accéder à leur service à partir de n'importe quelle connexion haute vitesse. À son avis, la mesure dans laquelle les abonnés compléteront leur service avec le VoIP dépendra de l'importance relative des limites et des fonctions, ainsi que du coût. Call-Net a déclaré que pour le moment, la mesure dans laquelle ce remplacement se produira n'est que pure conjecture.

84. Le SCEP a fait valoir que la fonctionnalité du VoIP est la même que celle du service de télécommunication à commutation de circuits et que l'utilisation du RTPC est ce qui compte. Selon lui, « la voix est la voix ». Le SCEP a fait valoir qu'il importait peu qu'un service de communication vocal soit géré par réseau, découplé, fourni par une tierce partie ou groupé avec d'autres services.

85. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir que le VoIP n'est simplement qu'une nouvelle technologie de transmission de la voix. Selon eux, le fait que le VoIP offre d'autres capacités qui fonctionnent comme des services Internet ne change pas la réalité, c.-à-d. qu'il s'agit avant tout d'un service téléphonique. Ils ont soutenu que les services téléphoniques seraient la principale fonction des services VoIP pendant encore un certain temps.

86. MTS Allstream a fait valoir que quelle que soit la configuration du service VoIP, le produit final est essentiellement le même - un service téléphonique qui permet à l'abonné d'accéder au RTPC et de faire ou de recevoir des appels en provenance et à destination de la circonscription ou de la zone d'appel local d'une ESLT. MTS Allstream a fait valoir que si ce n'est le fait que l'accès aux services VoIP de catégorie 3 et 4 n'est pas possible par l'Internet public, rien ne les distingue vraiment des services VoIP de catégorie 2. MTS Allstream a fait valoir que pour les services VoIP fournis par des tierces parties, des problèmes de qualité vocale peuvent survenir en raison du partage de la capacité de transmission Internet. Toutefois, MTS Allstream a prévu qu'à mesure du déploiement des capacités de priorisation vocale, les niveaux de qualité vocale devraient être comparables, voire même supérieurs, aux normes existantes. De l'avis de MTS Allstream, toutes les catégories des services VoIP et des services téléphoniques locaux traditionnels avec accès au RTPC, comme le SLB, devraient être considérées comme faisant partie d'un seul marché de produits ou services, d'affaires et de résidence.

87. MTS Allstream a fait valoir que les services VoIP ne sont pas un marché de services ou de produits distinct et toutes choses étant égales, un client du service VoIP pourrait facilement remplacer un service téléphonique local traditionnel par le service VoIP si le prix du service VoIP augmentait de façon non transitoire. MTS Allstream a fait valoir que l'inverse serait également vrai en cas de hausse non transitoire du prix du service téléphonique local traditionnel, bien qu'à un moindre degré, étant donné que seuls les abonnés d'Internet haute vitesse seraient en mesure de s'abonner au service VoIP. MTS Allstream a également fait valoir que les prix relatifs des services téléphoniques fournis au moyen de différentes technologies, y compris les coûts du passage au service VoIP, finiraient par influer largement sur le taux d'adoption du service au Canada.

88. Primus a déclaré que même les services VoIP indépendants de l'accès offerts à l'intérieur du territoire sont, du point de vue du client, un substitut du SLB. Elle a fait remarquer qu'environ 70 % de ses clients utilisent le service comme une ligne fixe principale ou secondaire, ce qui montre bien, selon la compagnie, que les clients le considèrent et l'utilisent comme un substitut du SLB. Primus a fait valoir que dans la perspective des clients, les fonctions des services VoIP de catégorie 2 sont identiques à celles traditionnellement offertes avec le SLB ou s'en rapprochent beaucoup.

89. QMI a soutenu que ce n'est pas parce qu'une offre de service VoIP fournit plus ou moins de fonctions de gestion des appels que le SLB traditionnel, permet à certains des clients de choisir un numéro de téléphone à partir d'un indicatif régional extérieur ou offre des appels interurbains à tarif fixe, que la population en général ne peut pas la considérer comme un substitut du SLB traditionnel. QMI a déclaré qu'il existait déjà des substituts à cette soi-disant nouvelle fonctionnalité dans le monde de l'avant VoIP, notamment des services comme les lignes hors circonscription et les fonctions de renvoi automatique des appels. QMI a déclaré qu'en fin de compte, ce sont les perceptions des consommateurs qui décideraient des services qui occuperont la même place dans le marché pertinent.

90. UTC a reconnu que le SLB et le VoIP comportent quelques fonctions différentes, mais que cela ne changeait rien au fait que le service de base est essentiellement le même. Il a déclaré que les utilisateurs du SLB et des services VoIP peuvent communiquer de vive voix en temps réel avec le monde des abonnés du service local en utilisant une adresse téléphonique du PNNA pour les appels de départ et d'arrivée, et accéder à d'autres réseaux qui sont interconnectés au RTPC. De l'avis d'UTC, même si les fonctions supplémentaires du VoIP et du SLB peuvent différer, cette fonction de communication de base reste la même. UTC a fait valoir que le fait que la majorité des fournisseurs de services VoIP offrent à leurs clients la transférabilité des numéros locaux (TNL) montre que les clients seraient prêts à abandonner le SLB lorsqu'ils adoptent le service VoIP.

91. Yak a affirmé que ce sont les caractéristiques des services, et non la technologie, qui devraient servir de critères de base pour évaluer le marché qui convient aux services de télécommunication VoIP. Yak a déclaré que le marché pertinent des produits est celui des services téléphoniques vocaux non mobiles, divisés en services locaux et en services interurbains, alors que le VoIP n'est qu'un produit dans cette définition plus large de marché. Yak a convenu que le simple fait que le VoIP ne possède pas certaines des caractéristiques du SLB ne veut pas dire nécessairement que le service ne doit pas être classé comme un SLB. Yak a déclaré que le développement de sa propre offre du service VoIP lui avait permis de constater que les principales caractéristiques du produit qui plaisent aux clients des services VoIP sont essentiellement semblables à celles des SLB existants. Par exemple, Yak a fait valoir que de nombreux consommateurs utilisent des téléphones sans cordon, qui ne fonctionnent pas en cas de panne d'électricité et qui pourtant, malgré cette limite, sont considérés comme faisant partie du SLB. Yak a donc déclaré qu'elle ne traiterait de cette question que si ses clients indiquent qu'il s'agit d'un problème important. Yak a dit vouloir surveiller la qualité de la voix, notamment toute détérioration due au téléchargement, pour savoir quelles mesures prendre, le cas échéant, pour maintenir la qualité vocale. En créant son propre service VoIP, Yak a conclu que les principales caractéristiques du produit qui attirent les clients du VoIP ressemblent beaucoup à celles du SLB.

92. L'Ontario a déclaré qu'à ce stade-ci, on ne sait pas exactement si les abonnés actuels des services téléphoniques considéreront les services VoIP comme de parfaits substituts. Elle a fait remarquer que la technologie VoIP offre des fonctions uniques qui peuvent attirer certains abonnés.

93. La CCTP a soutenu que le VoIP est un nouveau service distinct, qui se situe dans un marché différent de celui du SLB traditionnel. La CCTP a soutenu que les différences fonctionnelles entre les services VoIP et le SLB sont telles qu'il est impossible d'affirmer que les deux services sont fonctionnellement identiques.

94. Norouestel a déclaré que le VoIP est un service nouveau, différent du SLB traditionnel et qui offre davantage de fonctions et de capacités que le SLB. Selon elle, au tout début de son adoption, les consommateurs seraient surtout attirés par le fait que les applications du VoIP offrent une solution de rechange moins coûteuse à l'interurbain.

95. L'ACTC a déclaré que les entreprises de câblodistribution ont l'intention de lancer des services VoIP qui respectent ou dépassent les normes de fiabilité et de qualité des services vocaux traditionnels de la compagnie de téléphone.

96. Les Compagnies ont fait valoir que de nombreux concurrents fixent les tarifs de leurs services VoIP de manière à attirer les clients des services locaux. Les Compagnies ont déclaré qu'elles s'attendaient à ce que les entreprises de câblodistribution commercialisent les services VoIP de catégorie 3 comme substitut du SLB des ESLT. Les Compagnies ont également déclaré que les services VoIP de catégorie 3 auraient probablement une forme ou une autre de source d'alimentation de secours afin de ne pas être touchés par les pannes d'Internet, qu'ils peuvent avoir une qualité spécifique ou garantie, ou qu'ils peuvent être offerts à un prix inférieur dans la mesure du possible.

97. En ce qui concerne la façon dont le VoIP a été et serait mis en marché, MTS Allstream, en renvoyant aux sites Web de Primus et Vonage, a fait valoir qu'ils montraient comment il est possible d'utiliser leurs services à la place du service téléphonique :

Peu importe votre situation : vous pouvez profiter du service DSL et utiliser ParlezHauteVitesseMC à titre de ligne téléphonique secondaire ou, si vous profitez du service Internet haute vitesse par câble et que vous désirez remplacer votre ligne téléphonique actuelle à domicile, Primus vous enverra tout ce dont vous avez besoin! Il vous suffit de brancher la ligne et de commencer à jaser! (Site Web de Primus)

[ Traduction]
Vonage offre une panoplie de services téléphoniques et elle peut remplacer votre compagnie de téléphone. (Site Web de Vonage)

98. MTS Allstream a fait remarquer que les Compagnies et TELUS ont annoncé publiquement leur intention de commercialiser les services téléphoniques IP comme substitut direct du SLB. MTS Allstream a cité le paragraphe 3 de la lettre d'accompagnement de l'avis de modification tarifaire 6813 de Bell Canada du 10 mai 2004, dans lequel il est dit que le service gestion de téléphonie IP (GTIP) de Bell Canada serait offert comme une solution de rechange sur IP au service Centrex (un service téléphonique local traditionnel) :

Le GTIP est offert comme solution de rechange sur IP au service Centrex III de la compagnie. Il répondra également à la demande des clients pour un service de téléphonie d'affaires sur IP compatible avec le Centrex III. La Compagnie propose d'offrir le GTIP de façon à permettre aux clients de déployer le GTIP parallèlement à leurs postes Centrex III existants sans perturbation et sans frais de résiliation, puisque les postes de Centrex III ont migré vers les ports GTIP. (Soulignement ajouté par MTS Allstream.)

99. TELUS a soutenu qu'il est évident que les fournisseurs de services VoIP indépendants de l'accès considèrent leur service comme un substitut du service téléphonique traditionnel à commutation de circuits, puisqu'ils offrent la transférabilité des numéros et annoncent leurs services comme un substitut du service téléphonique traditionnel.

100. Les Compagnies ont fait valoir qu'un certain nombre de limites pourraient influer sur le rythme d'adoption des services VoIP de catégorie 2 par les consommateurs, notamment les appels d'urgence et la disponibilité du service en cas de panne d'électricité. Toutefois, les Compagnies ont déclaré que plusieurs fournisseurs de services ont déjà annoncé leur intention d'introduire des services VoIP qui remédient à ces problèmes. Elles ont également déclaré qu'elles prévoyaient que les avantages que représentent les services VoIP encourageraient l'adoption des SI haute vitesse par les consommateurs canadiens et finiraient par offrir de nouvelles possibilités aux fournisseurs de services VoIP de catégorie 2.

101. Les Compagnies ont affirmé que les services VoIP de catégorie 2 et de catégorie 3 se distinguent par le fait que le prix que le client paie pour un service de catégorie 3 comprend nécessairement l'accès au réseau IP sous-jacent du fournisseur de services à partir de l'équipement terminal à l'emplacement du client.

102. QMI a déclaré que les ESLT grouperaient leurs offres de service VoIP indépendants de l'accès dans leur territoire avec leurs offres d'Internet haute vitesse dans leur territoire, de sorte que les deux décisions d'achat n'en deviendraient rapidement plus qu'une.

103. Call-Net a fait valoir que lorsqu'une ESLT offre des services VoIP sur ses installations à large bande, il est possible qu'il n'y ait que très peu de distinction, voire aucune, entre les services VoIP de catégorie 2 et 3.

Analyse et conclusions du Conseil

Marché pertinent

104. Comme il est indiqué ci-dessus, la première étape dans le cadre de la décision 94-19 consiste à définir le marché pertinent des services VoIP locaux. Le Conseil fait remarquer que la majorité des parties, notamment TELUS, MTS Allstream, l'ACTC et Yak, ont convenu que les services VoIP appartiennent au même marché pertinent que les services locaux à commutation de circuits. Les Compagnies ont toutefois adopté une définition plus large du marché pertinent.

105. Une des questions importantes à laquelle il faut répondre pour pouvoir définir le marché pertinent est celle de savoir si les services VoIP locaux et les services locaux à commutation de circuits sont de proches substituts.

106. Le Conseil convient avec TELUS que pour déterminer si deux produits ou services sont des substituts suffisamment proches pour se situer dans le même marché économique, la question sous-jacente est de savoir si le prix d'un produit ou service est touché par le prix de l'autre produit ou service. Comme TELUS l'a fait remarquer, les prix n'auraient pas à évoluer ensemble par échelons fixes, mais évolueraient généralement ensemble.

107.À cet égard, le Conseil estime que la possibilité de substitution des services peut se démontrer au moyen d'éléments de preuve statistiques en rapport avec la volonté des consommateurs de remplacer un service par un autre en réaction à des changements de prix des services en question.

108. Les Compagnies et TELUS ont indiqué que les nouveaux venus fixent les prix des services VoIP de manière à attirer les clients des services locaux à commutation de circuits. Toutefois, le Conseil estime que du fait que les services VoIP en sont au tout début de leur développement, les éléments de preuve statistiques au dossier ne permettent pas de montrer le degré de substitution entre les services VoIP locaux et les services locaux à commutation de circuits.

109. En l'absence d'une preuve statistique suffisante, le Conseil a examiné si les services sont de proches substituts selon que les services VoIP locaux répondent ou non aux mêmes exigences générales des utilisateurs à l'égard des services locaux à commutation de circuits. Comme TELUS l'a fait remarquer, deux services n'ont pas besoin d'être identiques pour être considérés comme des substituts proches, la question est plutôt de savoir si les services se ressemblent suffisamment pour répondre aux mêmes besoins d'ordre général des consommateurs et pourraient se substituer tout en appartenant au même marché économique.

110.À partir des arguments présentés par les parties concernant la substitution des services en question, le Conseil a défini quatre facteurs qui établiront si les services VoIP locaux répondent aux exigences générales des utilisateurs des services locaux à commutation de circuits : l'objet fondamental des services; la façon dont les services VoIP locaux sont commercialisés et offerts; si les consommateurs perçoivent ou pourraient percevoir les services VoIP locaux comme de proches substituts des services locaux à commutation de circuits; et si les services VoIP locaux et les services locaux à commutation de circuits sont ou seront achetés indifféremment.

111. Le Conseil estime que l'utilisation de l'IP ne définit pas la nature du service, mais plutôt la technologie sous-jacente utilisée pour le fournir et le transporter. Comme il a été fait remarquer précédemment, les technologies de transmission et de commutation ont évolué et changé depuis les débuts de la téléphonie. Le Conseil fait remarquer que du point de vue des consommateurs, la question principale n'est pas de savoir si la technologie permet de fournir le service mais plutôt l'usage que le consommateur en fera.

112. Selon M. Crandall, un témoin expert de TELUS, en réponse à une question sur la perception que doit avoir le consommateur de la différence entre les services VoIP dépendants de l'accès et indépendants de l'accès,

Je ne sais pas pourquoi ils doivent .la seule chose qu'ils doivent savoir, c'est ce que le service offre. Ils n'ont pas besoin de connaître les aspects techniques.

113. De l'avis du Conseil, l'objet fondamental des services locaux à commutation de circuits est de fournir des communications vocales bidirectionnelles en temps réel, à destination et en provenance de toute personne sur le RTPC. Le Conseil estime que la fonction fondamentale du service VoIP local, que ce soit de catégorie 2, 3 ou 4, est la même.

114. Le Conseil fait remarquer que les services VoIP locaux et les services locaux à commutation de circuits offrent un large éventail d'options, dont certaines sont communes et d'autres uniques à chaque service. Les services VoIP locaux et les services locaux à commutation de circuits offrent, par exemple, l'Afficheur et la messagerie vocale, tandis que le service VoIP local permet également, par exemple, l'accès en ligne aux renseignements sur les appels ainsi que des capacités mobiles. En outre, le service VoIP local permet aux abonnés d'obtenir un numéro de téléphone à partir d'une circonscription située à l'extérieur de leur région géographique. De l'avis du Conseil, toutefois, même si ces fonctions améliorent ces différents services, il ne s'agit pas des principales caractéristiques des services, dont l'objectif fondamental demeure le même.

115. Cette conclusion est renforcée par la façon dont ces services sont commercialisés et offerts. Le Conseil fait remarquer qu'un certain nombre de parties ont mentionné que les services VoIP sont commercialisés et offerts comme substitut des services locaux à commutation de circuits.

116. Comme MTS Allstream l'a fait remarquer, les sites Web de Primus et de Vonage indiquent que leurs services peuvent remplacer les services téléphoniques à commutation de circuits des clients.

117. En ce qui concerne les services VoIP de catégorie 3, le Conseil fait remarquer que ces services utilisent un réseau géré, qu'ils sont intégrés à un service d'accès à large bande, qu'ils peuvent garantir la qualité du service, qu'ils permettent la fourniture des capacités 9-1-1/E9-1-1 et qu'ils peuvent assurer une alimentation électrique de secours.

118. Le Conseil fait en outre remarquer qu'un certain nombre d'entreprises de câblodistribution ont indiqué qu'elles offriront les services VoIP qui satisfont aux exigences des ESLC relatives à la décision 97-8.

119. Le Conseil fait remarquer que le service GTIP4 de Bell Canada et le service IP-Évolution5 de TELUS sont des exemples de services VoIP de catégorie 4. Le Conseil souligne que selon les Compagnies, le GTIP est offert comme une solution de rechange au service Centrex III de Bell Canada, et selon TELUS, dans l'avis de modification tarifaire 150 du 23 août 2004, le service IP-Évolution ressemble à son service Centrex actuel et est offert soit comme une amélioration, soit comme une solution de rechange au service Centrex. Le Conseil ajoute que les tarifs de Bell Canada et de TELUS pour leurs services VoIP de catégorie 4 respectifs permettent aux clients de transférer individuellement leurs utilisateurs de postes Centrex au service VoIP local de catégorie 4, tout en demeurant dans un groupe Centrex. Il est évident que ces services sont ou seront utilisés comme des substituts des services Centrex existants.

120. En fait, du point de vue de TELUS, les services VoIP de catégorie 3 et 4 sont essentiellement les mêmes que les services locauxà commutation de circuits, quelle que soit la technologie utilisée. Comme un témoin de TELUS l'a déclaré :

TELUS ne cherche pas à échapper à la réglementation des services locaux dans ses territoires traditionnels en tant que titulaire en changeant simplement la technologie à l'intérieur de ses réseaux. Ce n'est pas en remplaçant simplement ses commutateurs de classe 5 par des routeurs par paquets qu'une ESLT pourrait justifier une abstention de réglementation. Il s'agirait uniquement d'une modification de la technologie utilisée.

121. En ce qui a trait aux services VoIP locaux de catégorie 2, un certain nombre de parties ont soutenu que le fait que « deux décisions d'achat » sont en cause, puisque le service d'accès Internet doit être obtenu séparément du service VoIP local, différencie le service local à commutation de circuits du SLB, ainsi que les services VoIP de catégorie 3. Le Conseil fait remarquer, cependant, que pour les clients qui ont déjà un service d'accès Internet haute vitesse, une seule décision d'achat est requise pour un service VoIP local de catégorie 2, comme pour le service local à commutation de circuits. De plus, les ESLT pourraient offrir un groupe de services comprenant l'accès Internet haute vitesse et le service VoIP local de catégorie 2 dans le cadre d'un seul achat, et à un seul prix. De l'avis du Conseil, le fait que les services de catégorie 2 peuvent être offerts séparément du service d'accès ne sera pas un facteur déterminant pour savoir si les services VoIP de catégorie 2 seront commercialisés et offerts par les ESLT et perçus par les consommateurs comme substitut des services locaux à commutation de circuits.

122. En outre, en ce qui concerne plus particulièrement les services VoIP locaux de catégorie 2, le Conseil fait remarquer que certaines parties ont soutenu que ces services ont des limites, notamment la qualité du service et de la voix, la sécurité, la fiabilité (p. ex., l'absence d'alimentation électrique de secours) et l'absence de capacités E9-1-1, ce qui pourrait influer sur le taux de substitution par les consommateurs. Le dossier de l'instance indique, cependant, qu'à mesure que les services VoIP évoluent, les fournisseurs de services VoIP amélioreront leurs offres de services, en réponse aux exigences réglementaires (p. ex., E9-1-1), à la demande des consommateurs et aux pressions de la concurrence.

123. Le Conseil fait en outre remarquer que comme l'ont fait valoir certaines parties, lorsque l'ESLT fournit les services VoIP de catégorie 2 sur ses propres installations d'accès, elle peut contrôler et gérer l'infrastructure sous-jacente qui assure le service. Par conséquent, dans ces conditions, l'ESLT est en mesure de remédier à une bonne partie, sinon à la totalité, des limites du service VoIP de catégorie 2 et d'offrir un service essentiellement le même que le service VoIP de catégorie 3. De plus, dans la mesure où il reste des lacunes sur le plan qualitatif, le Conseil estime, comme de nombreuses parties l'ont fait remarquer, qu'au moment de se prononcer, le client évaluera les limites par rapport au prix relatif du service et les avantages du service VoIP par rapport aux services locaux à commutation de circuits.

124. Le Conseil estime que ni les nouvelles fonctions ni les limites des services VoIP locaux ne définissent ou modifient la fonction fondamentale du service, pas plus d'ailleurs qu'elles n'empêcheront les consommateurs de percevoir le service VoIP local comme un substitut du service local à commutation de circuits.

125. En fait, le Conseil fait remarquer que plusieurs fournisseurs de services VoIP locaux ont indiqué leur intention d'offrir la TNL, ce qui n'est nécessaire que si les clients ont l'intention de remplacer leur service téléphonique par le service VoIP local. En fait, le Conseil signale que Primus a indiqué à titre confidentiel la proportion, que le Conseil estime considérable, de ses clients des services de résidence et d'affaires qui actuellement, ont des numéros transférés. Même si les services VoIP en sont encore aux tout débuts et qu'il n'existe qu'une preuve empirique minimale de la transférabilité des numéros aux services VoIP, le Conseil estime que les données de Primus concernant la TNL sont très significatives et constituent une indication évidente que le service VoIP local est un substitut du service local à commutation de circuits.

126. Compte tenu du dossier de l'instance, le Conseil conclut que les services VoIP locaux répondent ou répondront aux mêmes exigences générales des consommateurs en matière de services locaux à commutation de circuits. Le Conseil conclut donc que les services VoIP locaux sont de proches substituts des services téléphoniques locaux à commutation de circuits et que par conséquent, ils font partie du même marché pertinent que les services à commutation de circuits.

127. Le Conseil fait remarquer que selon les Compagnies, le marché pertinent comprend les services locaux filaires et sans fil et certains services de données Internet, comme la messagerie instantanée entre utilisateurs d'ordinateurs personnels et qu'ils sont souvent utilisés pour remplacer la communication vocale. Toutefois, le Conseil estime que les Compagnies n'ont pas présenté de preuves à l'appui de cette position. Le Conseil estime qu'il n'est pas suffisant de soutenir que l'usage d'un service a été remplacé par l'usage d'un autre.

128. Le Conseil estime que les Compagnies n'ont pas présenté suffisamment de preuves pour montrer que les services de données Internet, comme la messagerie instantanée, sont offerts, achetés ou utilisés pour remplacer le service local et encore moins comme de proches substituts. En ce qui concerne le sans-fil mobile notamment, le Conseil fait remarquer que ce service fait partie d'un marché distinct à des fins de réglementation depuis son adoption il y a 20 ans. De plus, le Conseil fait remarquer que le Rapport à la gouverneure en conseil : État de la concurrence dans les marchés des télécommunications au Canada - Mise en place et accessibilité de l'infrastructure et des services de télécommunication de pointe, 25 novembre 2004 (le Rapport de 2004 sur l'état de la concurrence), indique qu'en 2003, moins de 2 % des ménages canadiens étaient abonnés du sans-fil seulement. De l'avis du Conseil, cette situation montre que les utilisateurs canadiens continuent de penser que le sans-fil mobile ne peut pas se substituer au service téléphonique filaire. Par conséquent, le Conseil conclut que la définition qu'ont donnée les Compagnies de marché pertinent n'est pas valable pour le moment.

Pouvoir de marché

129. Selon le cadre de la décision 94-19, la deuxième étape consiste à définir le pouvoir de marché de l'entreprise dans le marché pertinent.

130. Tel que noté précédemment, aucune ESLT n'a réclamé une abstention de la réglementation des services locaux dans le cadre de cette instance.6

131. Même si la part de marché ne permet pas toujours de déterminer le pouvoir de marché, il est clair que les ESLT sont des fournisseurs dominants de services locaux au Canada. Dans le Rapport de 2004 sur l'état de la concurrence, il est indiqué qu'en 2003, les ESLT représentaient 98 % des revenus des services locaux de résidence et 92 % des revenus des services locaux d'affaires; et que les concurrents, y compris les ESLT en dehors de leur territoire, représentaient 2 % des revenus des services locaux de résidence et 8 % des revenus des services locaux d'affaires. Le Conseil fait remarquer que rien n'indique dans la preuve qui été produite au cours de l'instance que ces parts de marché ont considérablement changé depuis la fin de 2003 ou que les ESLT n'ont pas de pouvoir de marché en ce qui a trait aux services locaux.

132. Par conséquent, en se fondant sur le cadre de la décision 94-19, le Conseil conclut que pour le moment, il ne convient pas de s'abstenir d'exercer les pouvoirs ou les fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi à l'égard des services VoIP locaux offerts par les ESLT.

Une analyse séparée de l'article 34

133. Tel qu'indiqué ci-dessus, le Conseil estime que pour tenir compte pleinement des arguments présentés par les parties qui demandent une abstention de la réglementation à l'égard des services VoIP au cours de cette instance, il convient de faire deux analyses distinctes: une dans le cadre de la décision 94-19, et l'autre à l'extérieur de ce cadre. Pour ce qui est de l'analyse qui déborde ce cadre, comme le paragraphe 34(2) de la Loi exige que le Conseil s'abstienne de réglementer lorsque les conditions fixées dans ce paragraphe sont satisfaites, le Conseil l'invoque en premier.

Paragraphe 34(2)

134. Le paragraphe 34(2) de la Loi se lit comme suit :

Le Conseil peut s'abstenir d'exercer - en tout ou en partie et aux conditions qu'il fixe - les pouvoirs et fonctions que lui confèrent normalement les articles 24, 25, 27, 29 et 31 à l'égard des services - ou catégories de services - de télécommunication fournis par les entreprises canadiennes dans les cas où il conclut, comme question de fait, que son abstention serait compatible avec la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication.

Positions des parties

135. De l'avis des Compagnies, les ESLT n'exercent pas un pouvoir de marché sur la fourniture des services VoIP et ne seraient donc pas en mesure de fournir avec succès un service VoIP tarifé au-dessus des niveaux concurrentiels. Elles ont soutenu que les services VoIP de catégorie 2 font déjà l'objet d'une concurrence vigoureuse, que les entreprises de câblodistribution en particulier seraient de sérieux concurrents dotés d'installations en ce qui concerne la fourniture de services VoIP de catégorie 3 et que Bell Canada est la seule ESLT qui ait lancé un service VoIP de catégorie 4 dans son territoire, et ce seulement après que d'autres aient lancé ce service dans son territoire. Les Compagnies ont également fait valoir que les clients qui s'abonnent aux services VoIP ont comme recours les services locaux et les services sans fil réglementés pour satisfaire à leurs besoins en communications si les services VoIP se révèlent insatisfaisants.

136. Pour ce qui est de l'affirmation selon laquelle la fourniture des services VoIP fait déjà l'objet d'une concurrence vigoureuse, la CCTP a fait valoir que le déploiement et le développement actuels des services VoIP au Canada répondent bien aux besoins des clients. Elle a soutenu qu'en matière de services VoIP, les Canadiens continueront de jouir d'un grand choix, à comparer au marché du sans-fil, marché auquel le Conseil n'a pas imposé de réglementation économique.

137. Les Compagnies ont soutenu que les nombreuses années d'expérience de l'industrie invalident les affirmations voulant que les ESLT pourraient utiliser leur pouvoir de marché dans un secteur pour éliminer la concurrence dans un autre. Elles ont déclaré que depuis 25 ans, les divers segments de l'industrie des services de télécommunication sont ouverts à la concurrence et que les ESLT n'ont jamais éliminé la concurrence. En fait, tous les secteurs qui étaient ouverts à la concurrence et pour lesquels le Conseil s'était abstenu de réglementer les ESLT, sont restés très concurrentiels. Elles ont donné comme exemples le sans-fil, les SI de détail, l'interurbain, les liaisons spécialisées, les services de données par commutation de même que l'équipement terminal.

138. Les Compagnies ont fait valoir que certaines parties pourraient soutenir une réglementation des prix des services VoIP des ESLT pour les empêcher de baisser les prix de façon à obliger les concurrents à quitter le marché. Les Compagnies et TELUS ont fait valoir que cet argument n'est pas valable sur le plan économique, en ce sens qu'une stratégie de bas prix ne contribuerait pas à éliminer les concurrents, car les obstacles à l'entrée sont minimes, le nombre des nouveaux venus sur le marché est élevé et la taille de certains nouveaux venus potentiels est considérable. Plusieurs autres parties qui ont appuyé la position des Compagnies et de TELUS ont convenu que les obstacles à l'entrée ne sont pas très importants.

139. TELUS a soutenu que ni l'équivalence fonctionnelle ni la possibilité de substituer un service par un autre sont des critères pertinents pour savoir s'il faut réglementer les prix du service VoIP indépendant de l'accès. Elle a fait valoir que le critère approprié consiste à se demander si TELUS peut exercer un pouvoir de marché pour agir de façon anticoncurrentielle. TELUS a soutenu qu'elle n'exerce pas de pouvoir de marché pour agir de façon anticoncurrentielle dans la fourniture du service VoIP indépendant de l'accès, car elle ne domine pas la fourniture du SI haute vitesse de détail dans son territoire, comme le Conseil l'a récemment affirmé. Deuxièmement, TELUS a déclaré qu'elle ne peut pas empêcher ses clients du service Internet haute vitesse d'acheter les services VoIP indépendants de l'accès auprès des nombreux nouveaux venus. Finalement, TELUS a fait valoir qu'elle n'exerce aucun contrôle sur les installations essentielles dont les concurrents ont besoin pour fournir le service VoIP indépendant de l'accès.

140. De plus, TELUS a déclaré qu'en ce qui concerne les services VoIP dépendants de l'accès, elle approuve généralement l'avis préliminaire du Conseil selon lequel ils devraient être assujettis au régime actuel des entreprises de services locaux (ESL) établi dans la décision 97-8 et des décisions ultérieures. Tel que souligné ci-dessus, TELUS a insisté sur le fait qu'elle ne demande pas une abstention de la réglementation économique à l'égard du SLB ou du service VoIP dépendant de l'accès apparenté au SLB qui n'est pas transmis par Internet et qu'elle serait susceptible d'offrir à l'avenir. TELUS a reconnu que le simple fait de changer la technologie sous-jacente du réseau d'accès local de la commutation par circuits à la commutation par paquets ne modifierait pas le réseau ni son service de base connexe.

141. Alcatel a fait valoir que le Conseil devrait s'abstenir de réglementer sur le plan économique les services VoIP en raison de la nécessité de maintenir une forte dynamique d'innovation et d'assurer un déploiement rapide du marché pour la prochaine génération des services à large bande. Selon Alcatel, les nouveaux venus plafonneraient les prix des services VoIP.

142. La majorité des autres parties se sont opposées aux opinions des Compagnies et de TELUS concernant leur manque de pouvoir de marché à l'égard des services VoIP locaux. Elles ont soutenu qu'une abstention de la réglementation serait contraire à l'objectif du Conseil, à savoir une concurrence fondée sur les installations, et qu'une abstention conférerait aux titulaires des avantages qui donneraient lieu à un comportement anticoncurrentiel de leur part et à des tarifs plus élevés pour les utilisateurs.

143. Cybersurf a déclaré que si les Compagnies et TELUS offrent un service VoIP de catégorie 2 par rapport à un service VoIP de catégorie 3 ou 4, elle ne s'opposerait pas à une abstention de la réglementation. Toutefois, Cybersurf a indiqué que les ESLT pourraient très facilement acheminer leurs propres paquets de trafic VoIP sur leurs réseaux IP afin d'avoir un service de meilleure qualité et une plus grande fonctionnalité du SLB pour leurs propres utilisateurs finals, tout en permettant que le trafic des concurrents soit acheminé avec Internet sans traitement spécial. Cybersurf a fait valoir qu'il serait difficile de s'assurer que les ESLT offrent réellement des services VoIP de catégorie 2, plutôt que de catégorie 3 ou 4. Par conséquent, elle estime qu'une abstention de la réglementation des services VoIP de catégorie 2, offerts par une ESLT ou une entreprise de câblodistribution dans son territoire, doit être assortie d'une condition interdisant un tel comportement et être appuyée par une méthode de vérification pour éviter ce genre de conduite.

144. MCI Canada a soutenu que si les services VoIP des ESLT sont des substituts fonctionnels du SLB (ce que, selon elle, les ESLT ont admis) et si les ESLT dominent le marché du SLB (ce que, selon elle, les ESLT n'ont pas cherché à réfuter), il s'ensuit que les ESLT dominent la fourniture des services VoIP. MCI Canada a fait valoir que compte tenu de la part de 97 % du marché SLB détenue par les ESLT et leur quasi-monopole dans la fourniture des services d'accès à large bande, il est illogique de penser que les ESLT n'utiliseraient pas leur position dominante et leur contrôle dans ces marchés pour adopter un comportement anticoncurrentiel. Elle a déclaré que le simple fait que les ESLT peuvent choisir de fournir le SLB au moyen d'une plate-forme technologique différente ou évolutive ne les empêche pas d'être moins dominantes dans le marché de détail des services téléphoniques ou les marchés de gros des services d'accès locaux et de transport. Voilà pourquoi, MCI Canada estime que la déréglementation des services VoIP des ESLT, à cette étape de la concurrence dans le marché local, serait non seulement catastrophique pour les fournisseurs de services VoIP concurrents, mais compromettrait gravement l'industrie naissante des ESLC, qui essaient de s'établir dans le marché depuis son ouverture à la concurrence.

145. L'ACTC a fait valoir que pour les ESLT, le service VoIP est une menace à leur monopole dans le marché des services locaux et qu'elles seraient donc incitées à perdre de l'argent sur le service VoIP pour conserver leur monopole le plus longtemps possible.

146. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir qu'en l'absence d'une réglementation économique des ESLT, ces fournisseurs pourraient tarifer le VoIP à un prix inférieur au prix coûtant, créer des obstacles à l'accès à leurs réseaux par les fournisseurs de VoIP concurrents et regrouper de façon anticoncurrentielle les services d'accès Internet non réglementés avec le VoIP. QMI a déclaré que les ESLT ont les moyens financiers et la motivation nécessaire pour pratiquer une tarification inférieure au prix coûtant et détruire la concurrence.

147. UTC a affirmé que dans un contexte d'abstention, les ESLT pourraient : se servir du VoIP pour contourner les règles de reconquête chaque fois qu'elles perdent un client du SLB en faveur d'un concurrent, éviter les exigences tarifaires et les règles relatives au groupement pour les contrats personnalisés en remplaçant les éléments du SLB traditionnel par le VoIP, et se lancer dans des initiatives de tarification ciblée sélective en utilisant le VoIP pour éliminer les concurrents chaque fois qu'elles sont confrontées à la concurrence, tout en récupérant les tarifs plus élevés du SLB auprès des clients captifs.

148. MTS Allstream a fait valoir qu'étant des fournisseurs dominants des services d'accès Internet du SLB et LAN dans leurs territoires de desserte respectifs, les Compagnies et TELUS ont la motivation et la possibilité d'exercer leur pouvoir de marché et leur statut de titulaire dans chacun de ces marchés pour détourner autant de trafic vocal que possible sur leurs réseaux IP gérés omniprésents. MTS Allstream a indiqué que les Compagnies et TELUS savent bien que les services VoIP totalement gérés auraient certainement beaucoup plus de succès dans le marché, car ces services sont privés et sûrs et sont d'une qualité supérieure aux services VoIP indépendants de l'accès, auxquels on accède par l'Internet public.

149. Yak a énuméré plusieurs types de comportement que les ESLT peuvent envisager d'adopter pour utiliser leur pouvoir de marché et limiter les choix. Yak a indiqué que les ESLT pourraient :

  1. augmenter le prix du service LAN autonome (un service faisant l'objet d'une abstention aux termes des règles actuelles), tout en réduisant le prix d'un groupe comprenant le VoIP plus le LAN et en gardant au même niveau le prix du SLB plus le LAN. Ce faisant, les ESLT détruiraient le marché pour les exploitants de VoIP indépendants sur leur service LAN et consolideraient leur position;
  2. encourager les clients du SLB à passer à une offre de VoIP qui ne se distingue pas du SLB et qui en fait comporte certaines fonctions supplémentaires ou des améliorations de la qualité du service susceptibles de motiver un transfert. Cela fait, les ESLT pourraient refuser l'égalité d'accès, notamment le service de contournement 1010 et la transférabilité des numéros, ce qui compromettrait les activités des concurrents dans les services interurbains, locaux et VoIP;
  3. introduire un SI à supplément à large bande et ne l'offrir qu'à leurs propres clients du VoIP. Le service à supplément pourrait avoir de meilleures options, par exemple sur le plan des vitesses de téléchargement, une plus grande capacité de largeur de bande et/ou de meilleurs délais de réparation et d'intervention. Là encore, la disponibilité d'un produit restrictif de ce genre dissuaderait de nombreux clients d'utiliser un autre fournisseur de VoIP;
  4. chercher à conclure des contrats pluriannuels avec les clients dans toutes ces activités, conduite qui est autorisée pour les activités faisant l'objet d'une abstention. Les nouveaux venus ne pourraient donc pas obtenir ces clients pendant une longue période.

150. La CCTP a fait valoir que les préoccupations exprimées par certaines parties au sujet de la capacité des ESLT d'appliquer des prix inférieurs au prix coûtant pour éliminer les concurrents ne sont pas fondées, compte tenu du nombre de fournisseurs actuels et potentiels offrant les services VoIP ainsi que de l'expérience et de l'historique des services ayant fait l'objet d'une abstention.

151. Yak a indiqué que le Conseil pourrait envisager de s'abstenir de réglementer au début le VoIP des ESLT « à accès non accompagné », lorsque l'ESLT souhaite offrir le service VoIP à des clients d'une entreprise de câblodistribution ayant accès par la large bande. Toutefois, Yak a fait remarquer qu'il faudra veiller à ce que les ESLT ne vendent pas le service VoIP à ses propres clients du service LAN, sauf en respectant les exigences tarifaires.

152. L'ACTC a fait valoir que dans la mesure où les ESLT sont propriétaires de l'infrastructure et la contrôlent, elles peuvent obtenir des avantages en offrant des services VoIP indépendants de l'accès dans leur territoire auxquels n'ont pas accès leurs concurrents. Elle a indiqué que les ESLT pourraient s'auto-approvisionner pour tous les éléments essentiels à la fourniture d'un service VoIP indépendant de l'accès dans leur territoire de desserte alors que les fournisseurs de services VoIP indépendants de l'accès autres que les ESLT devraient obtenir au moins certains de ces éléments auprès des ESLT ou d'une autre ESL.

Analyse et conclusions du Conseil

153. Les Compagnies ont fait valoir les points suivants concernant le contexte concurrentiel pour les services VoIP locaux : 

154. TELUS a avancé des arguments semblables à l'appui de sa requête, c.-à-d. ne pas exiger de tarifs dans le cas des services VoIP indépendants de l'accès, y compris :

155. En ce qui concerne les arguments des Compagnies concernant la capacité des entreprises de câblodistribution de devenir de sérieux concurrents dans le secteur de la fourniture des services VoIP, le Conseil reconnaît que les entreprises de câblodistribution possèdent certaines forces comparables à celles des ESLT, notamment une large clientèle bien établie, une expérience dans l'exploitation d'une infrastructure de réseau IP et des connexions d'accès aux foyers.

156. Toutefois, le Conseil fait remarquer que les entreprises de câblodistribution se heurtent à certains obstacles, contrairement aux ESLT, et que les ESLT ont des avantages dont ne bénéficient pas les entreprises de câblodistribution. Par exemple, le réseau de câble partagé des entreprises de câblodistribution doit être mis à niveau pour pouvoir offrir le service téléphonique local de qualité que fournissent les ESLT et que les clients s'attendent à recevoir. De plus, le Conseil fait remarquer que les entreprises de câblodistribution - à l'exception d'EastLink - n'ont pratiquement aucune expérience des marchés des services téléphoniques locaux de résidence ou d'affaires et devront donc acquérir cette expertise pour desservir les clients du téléphone. Elles devront mettre en ouvre les processus associés au transfert des clients, notamment la transférabilité des numéros, les inscriptions à l'annuaire, les services de téléphonistes, le service E9-1-1 et la facturation.

157. Seules parmi les fournisseurs actuels et potentiels de services VoIP, les ESLT possèdent et exploitent un réseau RTPC omniprésent, notamment l'accès et l'infrastructure sous-jacente, qui concerne à la fois les clients des services d'affaires et de résidence. L'accès au RTPC fait partie intégrante du service VoIP local et les ESLT en sont les seuls fournisseurs omniprésents.

158. En outre, le Conseil fait remarquer que les ESLT ont la capacité de faire passer les clients actuels du service local à commutation de circuits à un service VoIP totalement géré qu'elles possèdent et exploitent. Par exemple, les tarifs du VoIP de catégorie 4 permettent le transfert progressif des postes de Centrex à commutation de circuits du client à un service Centrex IP. Le Conseil estime que la capacité des ESLT de faire passer leurs clients aussi facilement d'un service à un autre représente un obstacle important à l'entrée des concurrents, car ceux-ci ne seraient pas en mesure de faire passer à leur service VoIP de catégorie 4 les postes de clients de Centrex d'une ESLT, un à la fois.

159. Pour ce qui est de l'argument selon lequel les fournisseurs de services de catégorie 2 exercent déjà une forte concurrence à l'égard des services VoIP locaux à bas prix, le Conseil estime qu'il est trop tôt pour tirer des conclusions sur l'état de la concurrence, étant donné que le développement des services VoIP de catégorie 2 en est à ses tout débuts. Le Conseil estime que les éléments de preuve présentés dans cette instance sont convaincants en ce qui concerne les difficultés, sur le plan de la concurrence, que connaîtraient certainement les fournisseurs de services de catégorie 2 dans un contexte d'abstention.

160. Le Conseil estime que les ESLT bénéficient de l'avantage relatif de leur forte position de titulaire dans la fourniture des services téléphoniques locaux. La concurrence fondée sur les installations dans les services locaux existe au Canada depuis près de huit ans et pourtant, à la fin de 2003, les ESLT conservaient 98 % du marché local des services de résidence et 92 % du marché local des services d'affaires dans tout le pays. Le Conseil fait également remarquer que même dans le marché de l'interurbain, qui est totalement concurrentiel depuis 13 ans, seulement 41 % des abonnés du service de résidence ont essayé un fournisseur de services interurbains autre qu'une ESLT.7 L'expérience du Conseil lui a enseigné que les clients des services téléphoniques locaux sont très réticents à changer de fournisseur de services locaux. Cette inertie - en particulier chez les clients du service de résidence - s'est révélée un obstacle important pour les concurrents.

161. Pour ce qui est des arguments concernant le contexte concurrentiel des services VoIP de catégorie 2, le Conseil convient que les obstacles à l'entrée pour ces services sont minimes. Toutefois, les fournisseurs de services VoIP de catégorie 2 dépendent également des composantes de service achetées auprès des ESL, comme les numéros et les connexions au RTPC. Là où aucune solution de rechange d'ESLC n'est offerte, ces fournisseurs de services ne pourraient obtenir ces composantes qu'auprès d'ESLT. Par contre, parce que leurs composantes et installations sont omniprésentes, y compris les installations d'accès, les ESLT sont en mesure de s'auto-approvisionner pour offrir des services VoIP locaux.

162. Le Conseil estime que les ESLT auraient la motivation et la capacité d'offrir des services VoIP locaux de catégorie 2 non réglementés à leurs propres clients d'Internet haute vitesse de détail ayant une qualité de service supérieure à celle offerte par leurs concurrents. De plus, alors que le service VoIP local de catégorie 2 nécessiterait deux décisions d'achat, l'ESLT fournissant à la fois le service LAN et le service VoIP local de catégorie 2, elle pourrait, tel que susmentionné, offrir un groupe combiné de sorte que les deux décisions d'achat seraient rapidement ramenées à une seule. Le Conseil estime donc que les ESLT seraient facilement en mesure de transformer leur service VoIP local de catégorie 2 lorsqu'elles fournissent également la connexion d'accès Internet, en un service qui ne se différencie pas du service de catégorie 3 et que dans ces conditions, les fournisseurs de services VoIP locaux de catégorie 2 auraient beaucoup de difficulté à faire concurrence aux ESLT.

163. En ce qui a trait à l'argument selon lequel il ne serait pas logique que les ESLT se lancent dans des pratiques de tarification inférieure au prix coûtant, car elles ne pourraient pas, compte tenu des obstacles minimes à l'entrée en concurrence, récupérer les revenus perdus, le Conseil estime que la preuve présentée dans cette instance n'est pas convaincante. En effet, aucun argument probant n'a été présenté pour montrer que dans un régime d'abstention, les ESLT n'auraient pas la motivation, les moyens ou la possibilité de fixer des prix inférieurs au prix coûtant qui auraient pour effet d'étouffer la concurrence. En fait, le Conseil estime qu'il serait normal de s'attendre à ce que dans un régime d'abstention, les ESLT, compte tenu du fait qu'elles dominent le secteur de la fourniture des services locaux, cherchent à protéger leur position.

164. Le Conseil estime qu'à court terme, on peut s'attendre à ce que les revenus que les ESLT tirent de leur position dominante dans le marché des services locaux leur permettent de fournir des services VoIP locaux à un prix inférieur au prix coûtant (sur une base autonome, et en particulier lorsqu'ils sont groupés avec des LAN). À son avis, cette situation aura probablement pour effet d'étouffer la concurrence, d'où la possibilité qu'à moyen et à long terme, les ESLT augmentent ou maintiennent les prix au-dessus de ceux qui prévalent dans un marché concurrentiel.

165. Le Conseil s'attend en outre à ce que, dans un régime d'abstention, la capacité des ESLT de cibler les clients des concurrents leur permette également de contrôler le transfert des clients du service local à commutation de circuits à leurs propres services locaux VoIP et aux services VoIP locaux des concurrents, leur donnant ainsi la possibilité de conserver autant que possible leur clientèle.

166. Le Conseil estime que si une abstention de la réglementation est accordée prématurément, la capacité et la motivation des ESLT de fixer des prix inférieurs au prix coûtant pour les services VoIP locaux ainsi que d'établir des stratégies de groupement, avant l'entrée et le déploiement d'autres concurrents dotés d'installations, auraient un effet négatif important sur la présence d'une concurrence durable dans le secteur de la fourniture des services VoIP locaux et par conséquent sur la protection des intérêts des utilisateurs. Ces stratégies compromettraient l'entrée des participants potentiels dans le marché, et non pas seulement ceux qui dépendent des ESLT pour obtenir les services et les installations.

167. En ce qui concerne les arguments des Compagnies concernant l'émergence de marchés concurrentiels à la suite d'une abstention de la réglementation dans d'autres secteurs de l'industrie des services de télécommunication, le Conseil estime que les précédents cités par les Compagnies ne sont pas convaincants. Pour ce qui est de l'interurbain, des liaisons spécialisées, des services de données par commutation et de l'équipements terminal, lorsque le Conseil a rendu ses décisions en matière d'abstention de la réglementation, il était persuadé, en fonction des éléments de preuve qui lui ont été présentés, qu'il existait une concurrence durable dans chaque marché et que les titulaires n'exerçaient pas de pouvoir de marché. La preuve présentée dans le cadre de cette instance ne l'a pas convaincu que des conditions comparables sont présentes en ce qui concerne la fourniture des services VoIP locaux.

168. En ce qui a trait au sans-fil, au début du déploiement du sans-fil mobile, les avantages du statut de titulaire étaient beaucoup moins importants qu'ils ne le sont pour les services VoIP actuels. Les deux fournisseurs de services titulaires ont dû construire de nouveaux réseaux, s'interconnecter au RTPC et surmonter un certain nombre d'autres difficultés liées à la qualité du service, à la couverture et aux fonctions du service. En ce qui concerne l'abstention de la réglementation des SI de détail, au moment des décisions en matière d'abstention de la réglementation, les ESLT bénéficiaient encore moins d'avantages liés à leur statut de titulaire et encore moins de motivations et de possibilités d'adopter un comportement anticoncurrentiel. De plus, le sans-fil mobile et les SI étaient alors des services nouveaux et distincts tant pour les ESLT que pour les concurrents.

169. Quant aux arguments des Compagnies voulant que les clients qui s'abonnent aux services VoIP bénéficient du recours aux services locaux et des services sans fil réglementés pour satisfaire à leurs besoins en communications si les services VoIP se révèlent insatisfaisants, le Conseil estime que cet argument n'a aucun rapport avec la question de savoir si, dans le cas des services VoIP, la concurrence sera suffisante pour protéger les intérêts des utilisateurs, comme l'exige le paragraphe 34(2) de la Loi.

170. Compte tenu du dossier de l'instance, le Conseil n'est pas en mesure pour le moment de conclure, comme question de fait, qu'il existe ou qu'il existera une concurrence suffisante dans la fourniture des services VoIP locaux par les ESLT pour protéger les intérêts des utilisateurs.

171. Par conséquent, le Conseil estime qu'il ne convient pas pour le moment de s'abstenir, conformément au paragraphe 34(2) de la Loi, d'exercer les pouvoirs et fonctions conférés par les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi en rapport avec la fourniture des services VoIP locaux par les ESLT.

Paragraphe 34(1)

172. Le paragraphe 34(1) de la Loi se lit comme suit :

Le Conseil peut s'abstenir d'exercer - en tout ou en partie et aux conditions qu'il fixe - les pouvoirs et fonctions que lui confèrent normalement les articles 24, 25, 27, 29 et 31 à l'égard des services - ou catégories de services - de télécommunication fournis par les entreprises canadiennes dans les cas où il conclut, comme question de fait, que son abstention serait compatible avec la mise en oeuvre de la politique canadienne de télécommunication.

173. Les objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés au paragraphe 34(1) (les objectifs de la politique de télécommunication) figurent à l'article 7 de la Loi, qui se lit comme suit :

La présente loi affirme le caractère essentiel des télécommunications pour l'identité et la souveraineté canadiennes; la politique canadienne de télécommunication vise à : 

  1. favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions;
  2. permettre l'accès aux Canadiens dans toutes les régions -- rurales ou urbaines -- du Canada à des services de télécommunication sûrs, abordables et de qualité;
  3. accroître l'efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;
  4. promouvoir l'accession à la propriété des entreprises canadiennes, et à leur contrôle, par des Canadiens;
  5. promouvoir l'utilisation d'installations de transmission canadiennes pour les télécommunications à l'intérieur du Canada et à destination ou en provenance de l'étranger;
  6. favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l'efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire;
  7. stimuler la recherche et le développement au Canada dans le domaine des télécommunications ainsi que l'innovation en ce qui touche la fourniture de services dans ce domaine;
  8. satisfaire les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunication;
  9. contribuer à la protection de la vie privée des personnes.

Positions des parties

174. Les parties ont présenté un certain nombre d'arguments concernant la façon dont l'abstention de la réglementation des services VoIP pourrait contribuer à l'investissement, à l'innovation et à la prise de risques, ainsi qu'à favoriser le libre jeu du marché et la compétitivité internationale de l'industrie canadienne des télécommunications.

175. Les Compagnies et un certain nombre d'autres parties ont fait valoir qu'obliger certains participants dans le marché à obtenir une approbation tarifaire avant d'offrir de nouveaux services ou d'améliorer ceux qui existent déjà, découragerait fortement l'investissement et la prise de risques, ce qui influerait sur le niveau d'innovation et de création des emplois connexes. Ces parties ont affirmé que les entreprises canadiennes réglementées ne seraient pas en mesure de réagir rapidement aux nouvelles conditions du marché, d'introduire de nouveaux services VoIP et de modifier ou de retirer ceux qui existent déjà en réponse aux nouvelles conditions du marché. De plus, l'obligation de verser des tarifs au dossier public aurait pour effet de communiquer aux concurrents des renseignements commerciaux précieux, ce qui, de l'avis des Compagnies, découragerait les concurrents non réglementés d'acquérir leurs propres connaissances du marché et de faire preuve d'innovation dans le développement de produits et les options de tarification.

176. Les Compagnies ont indiqué qu'au contraire, une abstention de la réglementation établirait un contexte réglementaire favorable qui permettrait aux Compagnies de développer et d'offrir des services VoIP, encourageant ainsi l'innovation et la compétitivité sur le plan international de l'industrie canadienne des télécommunications.

177. La CCTP a convenu que la réglementation tarifaire des services VoIP aurait pour effet de compromettre l'innovation, l'investissement, le choix et la compétitivité du Canada. Alcatel a également soutenu une abstention de la réglementation en rapport avec les aspects économiques de la réglementation du VoIP et a dit craindre qu'un contexte réglementaire défavorable aux ESLT conduirait à une réduction importante des plans d'investissement.

178. D'autres parties ne partageaient pas ces opinions. Pour sa part, MTS Allstream a indiqué que pour encourager l'investissement, l'innovation et le choix, il fallait éliminer les obstacles à l'entrée. MTS Allstream a convenu avec l'ACTC qu'une déréglementation prématurée des services VoIP locaux des ESLT leur permettrait de hausser le coût d'entrée ou de réduire la probabilité d'une entrée réussie par d'autres en gardant les clients captifs ou en offrant des prix artificiellement bas pour défendre leur position. De l'avis de MTS Allstream, pareille situation nuirait à la concurrence et à l'innovation.

179. Cogeco a convenu que la concurrence fondée sur les installations dans la téléphonie locale devait rester l'objectif ultime, car il s'agit de la seule façon de donner aux clients des avantages durables sous la forme d'une baisse des tarifs, d'une amélioration du service et d'innovations, qui sont, selon elle, les clés de la croissance économique et de l'investissement.

180. Comwave a fait valoir que l'innovation en matière de VoIP n'est pas du tout le fait des ESLT. Elle a indiqué que l'innovation viendrait de compagnies comme elle-même, qui n'émergeraient que dans un contexte où les services VoIP ne seraient pas marginalisés par les grandes compagnies qui imposent leur loi.

181. Call-Net a fait valoir que l'innovation a coexisté avec d'importantes politiques réglementaires sociales et économiques destinées à protéger les consommateurs des abus de la domination exercée dans le marché et à encourager l'instauration d'un marché des télécommunications concurrentiel au Canada face à l'échec et aux distorsions structurelles du marché. Call-Net a fait valoir que l'innovation est possible, comme cela a déjà été le cas, « dans le cadre de la réglementation sociale et économique mise de l'avant par le Conseil dans ses avis préliminaires. »

182. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir que le VoIP ne représente qu'un progrès technologique dans la fourniture des services de communication téléphonique et que le Conseil n'a pas l'habitude d'abandonner, au nom de l'innovation, les exigences réglementaires pour de simples améliorations technologiques. Pour appuyer cette opinion, ils ont déclaré que la commutation numérique a été mise en oeuvre par les ESL dans les années 1990 sans abstention de la réglementation pour contribuer à son adoption.

Analyse et conclusions du Conseil

183. Même si en général, les parties n'ont pas abordé spécifiquement la question des objectifs de la politique de télécommunication de la Loi, le Conseil, chaque fois qu'il était possible de le faire, a tenté de lier leurs arguments aux objectifs.

184. Les parties qui étaient favorables à la réglementation ont insisté sur le fait qu'une abstention de la réglementation encouragerait l'investissement, l'innovation et la prise de risques, réduirait au maximum la réglementation et stimulerait la compétitivité internationale de l'industrie des télécommunications au Canada. Ces parties ont également soutenu que la réglementation dissuaderait l'investissement et l'innovation, car le processus associé à la réglementation - en particulier la divulgation de renseignements commerciaux, les retards dans la réglementation et les désavantages concurrentiels - compromettrait la position concurrentielle de la compagnie réglementée et avantagerait ses concurrents.

185. Le Conseil reconnaît que l'atteinte des objectifs de la politique canadienne de télécommunication commande d'importants investissements dans le secteur canadien des télécommunications. En ce qui concerne les ESLT, elles consentent déjà les investissements nécessaires pour transférer leurs réseaux à la technologie IP et continueront de le faire. De plus, le Conseil est d'avis que le régime actuel de réglementation par plafonnement des prix continue d'encourager les ESLT à investir dans les installations et les services IP, même si elles sont obligées de continuer à déposer des tarifs, du fait que les avantages découlant des efficiences des réseaux qu'elles obtiennent en mettant en ouvre l'IP peuvent être transmis à leurs actionnaires.

186. Toutefois, le Conseil estime également que l'atteinte des objectifs de la politique de télécommunication nécessite aussi des investissements considérables de la part des concurrents. Le Conseil estime que s'abstenir prématurément de réglementer les services VoIP locaux réduirait sensiblement la capacité et/ou la motivation des concurrents à consentir les investissements nécessaires à l'atteinte de ces objectifs.

187. Pour ce qui est de l'innovation, le Conseil fait remarquer que les ESLT ont fait preuve d'innovation dans la fourniture des services de télécommunication au Canada lorsque la concurrence a été autorisée, et qu'elles continuent d'être réglementées. Le Conseil estime que la concurrence réglementée dans des secteurs où les ESLT restent dominantes a permis à l'ensemble de l'industrie canadienne des télécommunications d'atteindre des niveaux remarquables d'innovation, d'investissement et d'efficacité. Le Conseil est d'avis que rien dans le contexte réglementaire actuel n'empêche les ESLT d'utiliser les possibilités offertes par l'IP pour offrir des services nouveaux et innovateurs. En fait, la concurrence des entreprises de câblodistribution et d'autres fournisseurs de services qui utilisent l'IP encouragera les ESLT à innover.

188. Le Conseil a tenu compte des arguments montrant comment une abstention de la réglementation serait compatible ou non avec un certain nombre d'autres objectifs de la politique de télécommunication, notamment offrir des services de télécommunication abordables et favoriser le libre jeu du marché pour la fourniture des services de télécommunication. Finalement, le Conseil estime qu'éliminer trop tôt les exigences tarifaires relatives aux services VoIP locaux des ESLT et s'en remettre trop tôt aux forces du marché réduiraient la probabilité d'une concurrence durable et les avantages qui s'y rattachent pour les consommateurs, c'est-à-dire une baisse des tarifs, de nouveaux services et l'innovation.

189. Compte tenu du dossier de cette instance, le Conseil n'est pas en mesure de conclure, comme question de fait, que le fait de s'abstenir d'exercer les pouvoirs et les fonctions que lui confèrent les articles 24, 25, 27, 29 et 31 de la Loi à l'égard la fourniture des services VoIP locaux par les ESLT serait compatible avec les objectifs de la politique canadienne de télécommunication.

190. Quant aux arguments des Compagnies au sujet des retards dans la réglementation qui entraînent des désavantages sur le plan de la concurrence, le Conseil a reconnu que les délais nécessaires pour traiter les tarifs des ESLT sont un problème qu'il faut régler. En réponse à cette préoccupation, le Conseil a récemment publié la circulaire Lancement d'un processus simplifié pour le traitement des dépôts tarifaires concernant les services de détail, Circulaire de télécom CRTC 2005-6, 25 avril 2005 (la circulaire 2005-6), qui précise comment les dépôts tarifaires des ESLT seront traités rapidement. Le Conseil entend traiter les demandes complètes relatives aux dépôts tarifaires concernant les services de détail des ESLT dans les 10 jours suivant la réception de la demande. Les dépôts tarifaires concernant les services VoIP locaux des ESLT seront inclus. Le Conseil fait également remarquer que les ESLT peuvent demander un traitement ex parte de leurs dépôts tarifaires, à condition de pouvoir prouver que le préjudice concurrentiel que la divulgation de renseignements risque de leur faire subir l'emporte sur l'intérêt public de la divulgation, comme il est précisé dans la décision 94-19. Les dépôts présentés ex parte permettent aux ESLT d'offrir un nouveau service ou d'apporter des changements à un service existant sans informer à l'avance leurs concurrents de ces offres de service. Le Conseil estime que grâce à ces mesures, la réglementation des ESLT sera efficiente et efficace, et sera ainsi compatible avec les objectifs de la politique de télécommunication.

Paragraphe 34(3)

191. Le paragraphe 34(3) de la Loi se lit comme suit :

Le Conseil ne peut toutefois s'abstenir, conformément au présent article, d'exercer ses pouvoirs et fonctions à l'égard des services ou catégories de services en question s'il conclut, comme question de fait, que cela aurait vraisemblablement pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour leur fourniture.

192.À la lumière des décisions ci-dessus, le Conseil ayant conclu qu'il ne devrait pas s'abstenir de réglementer conformément aux paragraphes 34(1) et 34(2) de la Loi, il est donc inutile dans ce cas d'invoquer le paragraphe 34(3) de la Loi.

Conclusion

193. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil rejette les demandes d'abstention de la réglementation des services VoIP locaux présentées par les Compagnies et TELUS.

194. Le Conseil conclut que les services VoIP locaux devraient être réglementés comme des services locaux et que le cadre de réglementation qui régit la concurrence locale, lequel est énoncé dans la décision 97-8 et dans des décisions subséquentes, s'applique aux fournisseurs de services VoIP locaux, sauf indication contraire dans la présente décision.

IV. Cadre de réglementation

Application du cadre de réglementation pour la concurrence locale

195. Dans cette section de la décision, le Conseil examine des questions concernant la mise en oeuvre du cadre de réglementation pour la concurrence locale telle qu'elle s'applique aux fournisseurs de services VoIP locaux. Plus particulièrement, le Conseil aborde les aspects du cadre de réglementation auxquels, de l'avis des parties, il faut porter une attention spéciale, afin de tenir compte de la fourniture des services VoIP locaux.

Inscription des revendeurs de services VoIP
Historique

196. Dans la décision Concurrence intercirconscription et questions connexes, Décision Télécom CRTC 85-19, 29 août 1985, le Conseil a déclaré que la revente s'entend de la vente ou de la location subséquente sur une base commerciale, avec ou sans valeur ajoutée, de services ou d'installations de communication loués auprès d'une entreprise.

197. Dans la décision Concurrence dans la fourniture des services téléphoniques publics vocaux interurbains et questions connexes relatives à la revente et au partage, Décision Télécom CRTC 92-12, 12 juin 1992 (la décision 92-12), le Conseil a exigé que les revendeurs et les groupes de partageurs s'inscrivent auprès du Conseil avant de recevoir le service.

198. Dans l'ordonnance Télécom CRTC 97-590, 1er mai 1997 (l'ordonnance 97-590), le Conseil a fait remarquer que lorsque le réseau Internet est utilisé comme installation de transmission sous-jacente par un fournisseur de services pour offrir des services intercirconscriptions publics commutés vocaux ou de données, le fournisseur de services doit s'inscrire comme revendeur.

Positions des parties

199. Les Compagnies ont fait remarquer que Vonage et d'autres fournisseurs de services VoIP qui offrent des applications vocales au Canada, n'étaient inscrits sur aucune des listes du Conseil.

200. Vonage a fait valoir qu'elle ne revend pas de SLB et ne devrait donc pas automatiquement être assujettie aux restrictions réglementaires qui découlent du partage du réseau d'un revendeur et du lien contractuel avec une ESL. Vonage a déclaré qu'elle devrait être classée pour ce qu'elle est, c'est-à-dire un fournisseur de VoIP.

201. Yak a fait valoir que les fournisseurs de services VoIP devraient s'inscrire auprès du Conseil.

Analyse et conclusions du Conseil

202. Dans l'ordonnance 97-590, le Conseil a conclu que les fournisseurs de services qui utilisent Internet pour offrir des services intercirconscriptions publics commutés vocaux ou de données doivent s'inscrire comme revendeurs. Le Conseil estime que cette décision s'applique aux fournisseurs de services VoIP intercirconscriptions qui ne sont pas des entreprises canadiennes.

203. De plus, en ce qui concerne les fournisseurs de services VoIP locaux (autres que des entreprises canadiennes), le Conseil estime que comme ils louent auprès d'ESL des services ou des installations, comme l'accès au RTPC et les numéros, qui sont utilisés pour fournir des services VoIP locaux, ils agissent comme revendeurs de services VoIP locaux.

204. Par conséquent, comme condition pour obtenir des services d'une entreprise canadienne ou d'un autre FST, le Conseil ordonne à tous les fournisseurs de services VoIP locaux qui ne sont pas des entreprises canadiennes de s'inscrire comme revendeurs auprès du Conseil.

Accès aux numéros et transférabilité des numéros locaux
Historique

205. Dans la décision 97-8, le Conseil a autorisé les ESLC à accéder directement aux ressources de numérotation et il a demandé à toutes les ESL de mettre en ouvre la TNL. Dans l'ordonnance Télécom CRTC 99-5, 8 janvier 1999 (l'ordonnance 99-5), qui traitait de la question du transfert de numéros par des entreprises autres que des ESL, le Conseil a conclu que le fait d'étendre l'accès à la base de données sur la transférabilité aux entreprises autres que des ESL pour fournir, entre autres choses, une transférabilité entre des ESL et des entreprises autres que des ESL, en l'absence des obligations correspondantes d'une ESL, modifierait les modalités du cadre établi pour la concurrence locale dans la décision 97-8 d'une manière contraire à l'intérêt public.

206. Dans une lettre datée du 8 avril 1999, le Conseil a approuvé le Consensus [ du CDCI] sur le respect par les revendeurs des obligations des ESL relatives au service 9-1-1, au service de relais téléphonique (SRT) et à la conservation des numéros qui, entre autres, oblige les revendeurs à accorder des numéros de téléphone à transférer lorsque les clients passent à d'autres fournisseurs de services.

Positions des parties

207. Yak a demandé au Conseil de préciser que les revendeurs de services VoIP locaux seraient autorisés à obtenir des numéros directement de l'administrateur de la numérotation canadienne (ANC), faisant valoir qu'obtenir des numéros des ESL coûte cher. Elle a souligné que les numéros sont une ressource nationale précieuse et qu'il n'y a pas de raison d'empêcher les exploitants légitimes d'avoir accès aux numéros dont ils ont besoin pour exercer leurs activités.

208. Cybersurf a fait valoir que l'accès aux ressources de numérotation et à la TNL doit également être accordé aux fournisseurs de services VoIP.

209. TELUS a fait valoir que rendre les indicatifs de centraux disponibles aux fournisseurs de services IP non assujettis aux contraintes réglementaires qui s'appliquent aux ESL et aux fournisseurs de services sans fil créerait des inefficiences sur le plan de la numérotation, ce qui aurait pour effet d'épuiser prématurément les indicatifs régionaux et d'épuiser rapidement le PNNA actuel.

210. FCI Broadband a fait valoir que tous les fournisseurs de services VoIP devraient être tenus de fournir la TNL et que les règles actuelles qui régissent l'accès aux numéros devraient continuer de s'appliquer.

211. De l'avis de la CCTP, d'AT&T, de MCI Canada et des Groupes de défense des consommateurs, tous les fournisseurs de services VoIP devraient pouvoir accéder directement aux numéros de téléphone de l'ANC. AT&T a soutenu que la capacité d'obtenir la ressource de numérotation directement donnerait la souplesse nécessaire aux fournisseurs de services et leur permettrait d'imposer des contraintes, au besoin, sur la conduite des ESL qui fournissent la ressource. Et comme l'ont fait remarquer MCI Canada et les Groupes de défense des consommateurs, tous les fournisseurs de services VoIP devraient être obligés de fournir la TNL.

212. Les Compagnies, l'ACTC, Rogers, Cogeco, MTS Allstream, Microcell, Primus, QMI, TELUS, UTC et Xit ont soutenu qu'il faudrait maintenir le cadre actuel à l'égard de l'accès direct aux numéros et de l'obligation de fournir la TNL.

Analyse et conclusions du Conseil

213. Dans la décision 97-8, le Conseil a accordé certains droits et imposé aussi des obligations aux ESL. Parmi les obligations qu'il a imposées aux ESL figure l'obligation de mettre en oeuvre la TNL. Le Conseil estime que cette décision s'applique aux ESL qui fournissent des services VoIP locaux.

214. Figurent parmi les droits accordés dans la décision 97-8 aux ESLC, mais non aux revendeurs, le droit d'accéder directement aux numéros PNNA de l'ANC ainsi qu'à la base de données TNL. Les revendeurs de services VoIP locaux, comme les revendeurs de services à commutation de circuits, peuvent obtenir des numéros et la transférabilité à partir de tout numéro d'une ESL dans le marché, et ne sont pas limités indûment par le manque d'accès direct à l'un ou à l'autre. Du fait qu'il conclut que les services VoIP locaux devraient être réglementés comme des services locaux, le Conseil estime que les règles actuelles devraient s'appliquer également aux revendeurs de services VoIP.

Inscriptions à l'annuaire
Historique

215. Dans la décision 97-8, le Conseil a conclu qu'il devrait y avoir au moins un annuaire complet disponible dans chaque zone d'appel local pour que les utilisateurs du réseau local soient en mesure d'obtenir les renseignements voulus pour utiliser le réseau local. Les ESLT sont donc tenues de fournir une inscription complète à l'annuaire. Les ESLC sont tenues, à cette fin, de fournir les numéros de téléphone de leurs abonnés aux ESLT alors qu'il n'en est rien pour les revendeurs qui doivent payer des taux tarifés pour inclure les numéros de téléphone de leurs abonnés dans l'annuaire téléphonique local.

Positions des parties

216. Les Compagnies ont soutenu que les inscriptions à l'annuaire devraient être fonction de la demande des clients et que pour les services VoIP de catégorie 2, en particulier lorsque le numéro de téléphone à 10 chiffres du client ne correspond pas à l'emplacement de ce client, il peut être difficile de savoir quel annuaire est l'annuaire local du client. TELUS a exprimé une opinion semblable, précisant que les services indépendants de l'accès sont des services de nature mobile et non géographique.

217. Les Compagnies ont également admis que si un fournisseur de services ne sait pas quels sont les numéros de téléphone des abonnés d'un jour à l'autre, il est difficile de préparer un annuaire avec des numéros de téléphone correspondant à ces personnes et à leur adresse.

218. Call-Net a déclaré que même si la capacité de changer facilement un numéro de téléphone peut être une fonction du VoIP, elle ne voit pas pourquoi quiconque voudrait le faire puisqu'il deviendrait alors plus difficile d'appeler la personne.

219. Yak a fait valoir que le CDCI est l'organisme compétent pour traiter des questions d'annuaire.

220. FCI Broadband a déclaré que les inscriptions à l'annuaire constituent une dimension fondamentale du service téléphonique au Canada et que le remplacement de la commutation de circuits par la commutation par paquets ne changerait pas la situation. FCI Broadband a ajouté quemême si les revendeurs qui fournissent la téléphonie à commutation de circuits ne sont pas assujettis actuellement aux exigences relatives aux inscriptions à l'annuaire, il s'agit d'un bon exemple d'exigence qui devrait être imposée dans l'intérêt public aux fournisseurs de services VoIP locaux et que toute autre décision risquerait d'entraîner une grave érosion de l'utilité de l'annuaire. Xit a également fait valoir que les obligations actuelles à l'égard des inscriptions à l'annuaire devraient être maintenues.

Analyse et conclusions du Conseil

221. En ce qui concerne l'argument des Compagnies voulant que les inscriptions à l'annuaire seraient difficiles à préparer si les clients changent de numéros de téléphone d'un jour à l'autre, le Conseil fait remarquer que les clients peuvent aussi changer leurs numéros avec un service local à commutation de circuits et il estime que le VoIP ne pose pas de problème à cet égard.

222. En ce qui a trait aux observations de TELUS et des Compagnies selon lesquelles les services indépendants de l'accès sont de nature mobile et non géographique, le Conseil estime que les numéros de téléphone sont de nature géographique et sont associés à une zone d'appel local particulière. Le Conseil estime que les inscriptions à l'annuaire profitent aux client, qu'ils utilisent ou non la fonction mobile des services VoIP, étant donné qu'elles en aident d'autres à les appeler, peu importe où ils se trouvent.

223. Comme le Conseil a conclu que les services VoIP locaux devraient être réglementés comme des services locaux, il estime que les mêmes raisons d'exiger des ESLT un annuaire complet de numéros de téléphone locaux dans chaque zone d'appel local et d'exiger des ESLC qu'elles fournissent à cette fin leurs inscriptions locales aux ESLT s'appliquent dans le cas des services VoIP locaux. Selon lui, rien de particulier dans les services VoIP locaux ne justifierait qu'il modifie les règles actuelles dans le cas des ESLT et des ESLC, ni qu'il impose de nouvelles obligations aux fournisseurs de services VoIP exploitant en tant que revendeurs de services VoIP locaux ou aux ESLT à l'égard des inscriptions à l'annuaire des fournisseurs de services VoIP locaux.

224. Les inscriptions à l'annuaire pour les services VoIP local soulèvent également la question de savoir dans quel annuaire l'inscription devrait figurer lorsqu'un client d'un service VoIP local a un numéro de téléphone dans une circonscription qui est différente de l'adresse de service. Dans l'optique de ce qu'il considère comme la principale raison pour laquelle un client choisit un tel numéro de téléphone, le Conseil estime qu'il devrait figurer dans l'annuaire de la zone d'appel local où le client peut être joint et peut joindre d'autres numéros inscrits, comme un appel local.

225. Par conséquent, le Conseil conclut que les exigences réglementaires actuelles relatives aux inscriptions à l'annuaire pour les ESLT, les ESLC et les revendeurs s'appliqueront également lorsqu'ils fournissent des services VoIP locaux. Les inscriptions à l'annuaire devraient figurer dans l'annuaire local lorsque les appels à destination ou en provenance de ce numéro sont des appels locaux, quel que soit l'endroit géographique de l'adresse de service du client.

Égalité d'accès
Historique

226. Dans la décision 92-12, le Conseil a établi la concurrence dans les services téléphoniques publics interurbains et il a ordonné aux ESLT d'assurer l'égalité d'accès aux entreprises de services intercirconscriptions (ESI). Les abonnés pouvaient ainsi déterminer quelle ESI ils désirent utiliser pour leurs appels interurbains lorsqu'ils composaient le 1+. Dans la décision 97-8, le Conseil a ordonné aux ESLC d'assurer l'égalité d'accès à toutes les ESI selon les mêmes modalités et conditions que celles contenues dans les tarifs des ESLT. Cette obligation ne s'appliquait pas aux revendeurs.

227. Dans l'ordonnance Télécom CRTC 99-379, 29 avril 1999 (l'ordonnance 99-379), le Conseil a rejeté une demande visant à étendre aux revendeurs l'obligation d'égalité d'accès. Le Conseil a déclaré que du fait que les revendeurs de services locaux n'avaient aucun des droits des ESLC conformément à la décision 97-8, il ne convenait pas d'imposer aux revendeurs une obligation aussi fondamentale pour les ESL que l'égalité d'accès.

Positions des parties

228. L'ACTC, Cogeco, MTS Allstream, Microcell, Primus, Rogers et UTC ont fait valoir que les exigences actuelles à l'égard de l'égalité d'accès devraient s'appliquer aux fournisseurs de services VoIP locaux. Call-Net a souligné que son offre de service VoIP, qui prévoit une capacité d'égalité d'accès pour l'interurbain, n'entraîne pas de coûts supplémentaires importants si on le compare avec la fourniture de l'égalité d'accès pour son service normal d'ESLC.

229. Call-Net a fait remarquer que les revendeurs, dans le cadre d'arrangements contractuels, obtiennent les droits des ESLC relatifs à l'accès à la TNL, aux arrangements d'interconnexion facturation-conservation et aux lignes locales dégroupées utilisées pour la fourniture des services d'accès aux LAN. Call-Net a déclaré que dans un contexte où les revendeurs de services VoIP peuvent offrir toute la fonctionnalité d'une ESL à leurs clients, ils devraient être obligés d'assumer les obligations des ESLC, en particulier l'égalité d'accès. Call-Net a fait valoir que la justification invoquée par le Conseil dans l'ordonnance  99-379 n'est plus valable dans le nouveau contexte VoIP, car les revendeurs semblent maintenant capables d'obtenir par contrat la plupart des droits auparavant jugés exclusifs aux ESLC.

230. Les Compagnies ont fait remarquer que l'égalité d'accès visait à fournir aux clients du SLB un choix de fournisseurs de services interurbains à un moment où le service local était offert par les ESLT dans un régime de monopole. Les Compagnies ont soutenu que l'égalité d'accès est inutile puisque les clients du VoIP qui ne sont pas satisfaits de leurs services interurbains ont la capacité de choisir un autre fournisseur de services VoIP. TELUS a exprimé une opinion semblable. De son côté, Comwave a indiqué que les fournisseurs de services VoIP ne devraient pas être tenus de fournir l'égalité d'accès.

231. Les Compagnies ont fait remarquer que les systèmes des fournisseurs de services interurbains actuels sont conçus pour être utilisés avec des réseaux d'ESL à commutation de circuits; ces systèmes devraient être complétés pour permettre l'égalité d'accès des services VoIP. Elles se sont demandé si un fournisseur de services interurbains serait prêt à apporter ces changements, compte tenu de la structure tarifaire forfaitaire actuelle des services VoIP. Les Compagnies ont également fait valoir que la fourniture de l'égalité d'accès aux clients du VoIP représenterait un défi extrêmement coûteux et complexe et elles ne s'attendaient pas à recevoir de demande d'égalité d'accès de la part des clients du VoIP. Les Compagnies ont fait remarquer que dans l'ordonnance Tarif général de Microcell Connexions Inc. approuvé provisoirement avec modifications, Ordonnance CRTC 2000-831, 8 septembre 2000, le Conseil a dégagé les ESLT de leur obligation d'interconnecter leurs réseaux intercirconscriptions avec ceux des ESLC sans fil, en raison des difficultés techniques et des coûts associés à la mise en oeuvre de l'égalité d'accès.

232. Yak a déclaré que les Canadiens veulent avoir accès à d'autres fournisseurs de services interurbains et elle a soutenu que l'expérience du sans-fil montre que l'absence d'égalité d'accès se traduit par des frais d'interurbain plus élevés. Elle a fait valoir que si les clients venaient à penser que le service VoIP limite leur choix de fournisseurs de services interurbains et que ceux-ci augmentent donc le coût des appels interurbains, ils seraient probablement moins susceptibles de passer au service VoIP.

233. Yak a demandé instamment au Conseil de continuer d'appliquer les règles relatives à l'égalité d'accès et de les étendre aux revendeurs, soutenant que les problèmes techniques et logistiques ne sont pas suffisamment gênants pour l'emporter sur les avantages indéniables de l'égalité d'accès. Yak a indiqué que ces questions pourraient être soumises à l'étude et aux recommandations du CDCI. FCI Broadband a fait valoir que tous les fournisseurs de services VoIP, y compris les revendeurs, devraient être obligés de fournir l'égalité d'accès. De plus, MCI Canada a dit estimer que les revendeurs devraient être tenus de fournir l'égalité d'accès dans la mesure de leurs capacités.

234. Vonage a estimé inutile de permettre à ses clients du VoIP de choisir leur ESI, faisant remarquer que les clients qui souhaitent avoir des fournisseurs différents pour les services locaux et interurbains peuvent choisir de s'abonner au service téléphonique traditionnel ou accéder à d'autres services de communication au moyen des cartes d'appel.

235. Nortel a déclaré que sur le plan technologique, rien n'empêche les ESL de fournir l'égalité d'accès pourvu que l'appel passe par un système de commutation intégré au RTPC. Toutefois, Nortel a fait valoir que le VoIP présenterait des défis biens particuliers du fait que, de par sa nature, il est indépendant de l'endroit où l'appel est fait, ce qui rend impossible la distinction entre les services locaux, interurbains et internationaux. La recherche effectuée par Nortel montre que moins de 5 % des foyers ayant accès à la large bande paieraient pour un service téléphonique à large bande qui ne comprendrait pas l'interurbain ou tout autre service de la prochaine génération.

236. TELUS a fait valoir qu'une obligation d'égalité d'accès n'aurait tout simplement aucun sens dans le contexte du VoIP et qu'elle serait peut-être même impossible à mettre en ouvre. TELUS a fait remarquer qu'il n'y a souvent aucune distinction entre les appels locaux et interurbains lorsqu'on utilise les services VoIP indépendants de l'accès.

Analyse et conclusions du Conseil

237. Dans la décision 94-19, le Conseil était d'avis que le libre accès était essentiel pour créer une infrastructure publique omniprésente, un réseau de réseaux permettant de répondre aux nouveaux besoins de communication des Canadiens.

238. Le Conseil fait remarquer que l'obligation d'égalité d'accès s'appliquait initialement aux ESLT pour que les ESI concurrentes puissent fournir les services à leurs clients sur un pied d'égalité avec les ESI titulaires. Le Conseil fait en outre remarquer que l'obligation d'égalité d'accès a été étendue aux ESLC, conformément à la décision 97-8, pour empêcher de limiter la concurrence par voie d'accords exclusifs entre ESLC et ESI. Plus précisément, dans la décision 97-8, le Conseil a jugé nécessaire d'imposer l'égalité d'accès aux ESLC pour qu'elles ne confèrent pas de préférence indue ou déraisonnable à quiconque, y compris les ESI, à l'égard de l'accès à leurs réseaux.

239. De l'avis du Conseil, s'accorder une préférence indue et exercer une discrimination injuste envers des fournisseurs de services intercirconscriptions concurrents demeure une préoccupation et se pose quelle que soit la technologie sous-jacente utilisée pour fournir le service local. Le Conseil estime que l'accès par les ESI aux utilisateurs finals reste un objectif important.

240. Le Conseil désapprouve l'argument de Call-Net selon lequel la justification invoquée dans l'ordonnance 99-379 ne s'applique pas dans le nouvel environnement du VoIP. En effet, il estime que les questions concernant la capacité des revendeurs de conclure des arrangements contractuels avec les ESLC n'étaient pas différentes au moment où la concurrence locale a été permise de ce qu'elles sont maintenant.

241. Même si les Compagnies ont fait valoir que la mise en oeuvre de l'égalité d'accès pour les services VoIP serait extrêmement coûteuse et complexe, elles n'ont produit aucune preuve à cet effet. Cependant, Call-Net a fait remarquer que la fourniture de l'égalité d'accès avec son produit VoIP n'entraînait pas de coûts supplémentaires importants.

242. Un certain nombre de parties à l'instance ont fait valoir qu'il ne faudrait pas exiger l'égalité d'accès dans un environnement VoIP, soutenant qu'un client VoIP insatisfait pourrait choisir un autre fournisseur de services VoIP ou encore pourrait s'abonner à une offre à commutation de circuits, afin d'obtenir un service plus satisfaisant. Le Conseil estime que le maintien de l'obligation de l'égalité d'accès pour les ESL qui fournissent le service VoIP est conforme au principe de l'absence d'incidence sur la technologie. De l'avis du Conseil, il ne conviendrait pas d'exempter les ESL offrant le service VoIP local de fournir l'égalité d'accès lorsque leurs concurrents à commutation de circuits y sont obligés. En fait, à mesure que les ESLT font passer leurs réseaux à commutation de circuits à la technologie IP, les soustraire en dernier ressort à l'obligation de fournir l'égalité d'accès à l'égard des services VoIP locaux leur permettrait d'abandonner l'obligation complètement. Le Conseil estime que la possibilité qu'une ESL confère une préférence indue ou déraisonnable à l'égard de l'accès à ses réseaux continue d'être une préoccupation valable et que les consommateurs devraient continuer d'avoir des options et de pouvoir choisir des ESI, lorsqu'ils optent pour un service VoIP d'une ESL. Par conséquent, le Conseil conclut que l'obligation actuelle de fournir l'égalité d'accès s'appliquera aux ESL qui fournissent des services VoIP.

Règles de reconquête
Historique

243. Dans la lettre-décision intitulée Décision du Conseil concernant le litige du Comité directeur sur l'interconnexion du CRTC portant sur les lignes directrices relatives à la reconquête du marché concurrentiel publiée le 16 avril 1998, le Conseil s'est dit d'avis que les lignes directrices de reconquête asymétriques pour les ESLT contribueraient à protéger les consommateurs et à assurer une entrée concurrentielle efficace.

244. Dans cette lettre-décision, le Conseil a interdit à l'ESLT de tenter de reconquérir un abonné pour une période de trois mois après que le service local de l'abonné ait été complètement transféré à un autre fournisseur de services locaux, sous réserve d'une exception : les ESLT ont été autorisées à reconquérir les abonnés qui appellent pour les aviser qu'ils veulent changer de fournisseur de services locaux. Le Conseil a fait remarquer qu'il s'agirait là d'une exception plutôt que de la règle, car les ESLC traitent généralement avec les ESLT au nom du client.

245. Dans la décision Application des règles de reconquête dans le cas du service local de base, Décision de télécom CRTC 2002-1, 10 janvier 2002 (la décision 2002-1), le Conseil a modifié les règles de reconquête comme suit :

…le Conseil interdit à l'ESLT de tenter de reconquérir un abonné du service d'affaires dans le cas du service local de base, ou un client du service de résidence, dans le cas du service local de base ou de tout autre service, pour une période de trois mois après que le service de l'abonné a été complètement transféré à un autre fournisseur sous réserve d'une exception : les ESLT doivent être autorisées à reconquérir les abonnés qui appellent pour les aviser qu'ils veulent changer de fournisseur de services locaux.

246. Le Conseil a fait remarquer que les ESLT ne se verraient pas empêcher de poursuivre leurs efforts de reconquête des clients qui auraient seulement transféré des services autres que le SLB de résidence et qu'elles demeureraient tout à fait libres de commercialiser leur SLB de résidence et leurs autres services à l'aide de différents médias tels que la radio, la presse écrite et la télévision.

247. Dans la décision Call-Net Enterprises Inc. c. Bell Canada - Respect des règles de reconquête, Décision de télécom CRTC 2002-73, 4 décembre 2002 (la décision 2002-73), le Conseil a réitéré qu'il estimait que les règles de reconquête s'appliquent à partir du moment où une ESLT a reçu une demande de service local jusqu'à trois mois après que les services locaux du client sont complètement transférés à un autre fournisseur de services locaux. Le Conseil a fait remarquer que les activités de reconquête interdites n'ont commencé uniquement après que le service du client a été transféré, mais qu'elles se rapportent également aux activités visant à convaincre le client de ne pas changer de fournisseur de services avant que le transfert n'ait été effectué.

248. Dans la décision Demande présentée par Call-Net en vertu de la partie VII - Promotion de la concurrence locale dans les services locaux de résidence, Décision de télécom CRTC 2004-4, 27 janvier 2004 (la décision 2004-4), le Conseil a conclu qu'il convient de prolonger de trois à 12 mois la période sans contact, faisant remarquer que les ESLC auraient ainsi une occasion raisonnable de prouver qu'elles offrent des services fiables et de qualité et que cette mesure ne devrait avoir qu'un impact minimal sur la capacité de commercialisation des ESLT.

Positions des parties

249. Plusieurs parties ont fait valoir qu'il fallait faire appliquer les règles de reconquête pour empêcher les ESLT de cibler les clients des services locaux qui passent à un nouveau fournisseur de services VoIP. Ontera a déclaré que les règles de reconquête devraient s'appliquer à moins, qu'à l'avenir, la concurrence se soit suffisamment implantée pour qu'il soit raisonnablement possible d'avancer qu'elles ne sont plus nécessaires. FCI Broadband a déclaré que les règles de reconquête, telles qu'elles sont formulées, devraient s'appliquer aux ESLT et aux entreprises de câblodistribution qui utilisent leurs propres installations d'accès.

250. Les Compagnies ont fait valoir qu'il est inutile ou inapproprié que le Conseil impose des restrictions à la reconquête aux ESLT et aux entreprises de câblodistribution ou à tout autre fournisseur de services offrant l'accès à large bande, car les services VoIP sont des applications qui sont fournies dans un contexte concurrentiel. TELUS a soutenu que le VoIP et les SI de détail font également l'objet d'une forte concurrence et elle a souligné qu'un fournisseur de SI de détail qui est aussi un fournisseur de services VoIP pourrait ne pas savoir à qui ses anciens clients du service VoIP se sont adressés ni comment entrer en contact avec eux pour essayer de les reconquérir.

251. SaskTel a fait valoir queles restrictions à la reconquête limiteraient considérablement sa capacité à commercialiser efficacement son service VoIP.

252. La CCTP a déclaré qu'elle ne jugeait pas opportun d'appliquer les règles de reconquête aux services VoIP, car il s'agit, selon elle, d'un type d'application Internet qui ne remplace pas le SLB.

253. Rogers a estimé que l'application des règles de reconquête ne serait pas possible, car il n'est pas nécessaire que le client ou le fournisseur de services communique avec Rogers si le client utilise une connexion à large bande pour obtenir la téléphonie Internet. Rogers a également indiqué que jusqu'à présent, le Conseil n'a imposé les règles de reconquête qu'aux titulaires et que du fait que les câblodistributeurs sont des nouveaux venus dans le marché de la téléphonie, il n'y a aucune raison de leur imposer les règles de reconquête.

Analyse et conclusions du Conseil

254. Le Conseil estime que pour empêcher les comportements anticoncurrentiels, les règles de reconquête sont nécessaires et pertinentes. Dans la décision 2004-4, le Conseil a déclaré que l'activité de reconquête peut être un élément constituant de marchés concurrentiels arrivés à maturité, mais que le marché des services locaux n'est pas un marché concurrentiel pleinement développé. Le Conseil estime en outre que les mêmes préoccupations concernant le risque de comportement anticoncurrentiel de la part des ESLT surgissent, à son avis, dans le cas de la reconquête des clients du VoIP local. Le Conseil estime qu'en l'absence de règles de reconquête, les ESLT pourraient, en leur qualité de titulaire, utiliser les mêmes avantages pour reconquérir les clients du VoIP local que pour reconquérir les clients du SLB.

255. Par exemple, le Conseil estime que dans la mesure où la majorité des clients du VoIP local seront d'anciens clients du SLB des ESLT, celles-ci connaîtront leurs besoins en télécommunication, leurs préférences et leurs habitudes d'appel. Les règles de reconquête empêcheront les ESLT de tenter de reconquérir d'anciens clients du SLB ou du service VoIP local avant qu'ils n'acquièrent suffisamment d'expérience avec le service VoIP d'un concurrent pour être en mesure de bien évaluer le service. Le Conseil estime que les règles de reconquête donneront aux fournisseurs de services VoIP concurrents une période adéquate pour faire la preuve de la fiabilité et de la qualité de leurs services, avant que l'ESLT ne puisse tenter de reconquérir le client.

256. Certaines parties ont fait valoir que les règles de reconquête devraient s'appliquer aux offres de VoIP des entreprises de câblodistribution titulaires. Le Conseil estime que les ESLT sont les fournisseurs dominants de services locaux et qu'il n'est pas nécessaire d'appliquer les règles de reconquête des services VoIP aux entreprises de câblodistribution titulaires.

257. En ce qui concerne l'argument de TELUS voulant que les SI de détail sont concurrentiels et qu'aucune règle de reconquête n'est nécessaire pour le VoIP, le Conseil est d'avis que l'existence de la concurrence dans la fourniture des SI de détail n'empêche pas l'instauration de règles de reconquête pour le service VoIP local.

258. Le Conseil fait remarquer que l'application des règles de reconquête aux services VoIP ne veut pas dire que les clients ne pourraient pas retourner à une ESLT s'ils sont insatisfaits du service. Comme il est fait remarquer dans la décision 2004-4, les règles de reconquête ne font qu'empêcher l'ESLT de contacter les clients qui ont décidé de changer leur service local de résidence afin de les reconquérir. Les règles de reconquête ne s'appliquent pas lorsque les clients communiquent avec l'ESLT.

259. De plus, les règles de reconquête ne s'appliqueraient pas lorsque les clients annulent le service téléphonique local et achètent ensuite le service VoIP local d'un autre fournisseur sans que l'ESLT le sache ou participe au changement. Les règles ne sont déclenchées que lorsque le fournisseur de services VoIP communique avec une ESLT pour l'informer du changement de service, soit habituellement lorsque la demande de service local est faite.

260. Par conséquent, le Conseil conclut que les raisons pour lesquelles la règle de reconquête applicable au SLB a été établie sont également valables pour la fourniture des services VoIP locaux par les ESLT. Le Conseil étend donc les règles de reconquête de manière qu'elles s'appliquent comme suit au service VoIP local :

…le Conseil interdit à l'ESLT de tenter de reconquérir un abonné du service d'affaires dans le cas du service local de base ou du service VoIP local, et dans le cas d'un client du service local de résidence (p. ex. SLB ou service VoIP local), à l'égard de tout autre service, pour une période commençant au moment de la demande de service local et se terminant 12 mois après que le service local de base ou service VoIP local de l'abonné a été complètement transféré à un autre fournisseur de services locaux sous réserve d'une exception : les ESLT doivent être autorisées à reconquérir les abonnés qui appellent pour les aviser qu'ils veulent changer de fournisseur de services locaux.

Accès pour les personnes handicapées
Positions des parties

261. Le CADJH a fait valoir que ce serait contrevenir à la Charte, au paragraphe 27(2) de la Loiet à l'article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne que d'offrir la technologie VoIP au public sans répondre aux besoins des personnes handicapées.

262. Le CADJH a fait valoir que le Conseil devrait exiger des entreprises qu'elles dotent leurs téléphones d'un certain nombre de fonctions spécifiques afin de permettre l'accès aux personnes handicapées. Le CADJH a également fait valoir que dans la mesure où une personne aveugle ne peut pas voir ou toucher le clavier virtuel, il est essentiel que les appareils téléphoniques offrent d'autres mécanismes d'interface, ainsi que des instructions pour les utiliser. Le CADJH a également fait valoir qu'il est important que le logiciel utilisé dans ces appareils soit compatible avec le logiciel de lecture d'écran.

263. BCOAPO et autres ont fait valoir que la question des normes d'accès pour les personnes handicapées ne devrait pas être réservée pour une étude ultérieure. À leur avis, il pourrait être plus efficace d'intégrer dès le départ ces normes dans les services VoIP plutôt que de modifier ultérieurement un système déjà établi. Surtout, l'accessibilité ne devrait pas être considérée comme quelque chose que l'on fait après coup. Ils ont soutenu que le Conseil devrait fixer une date limite pour la mise en oeuvre complète d'un ensemble adéquat de normes d'accessibilité.

264. Les Groupes de défense des consommateurs, le Yukon, UTC et le SCEP ont fait valoir que les fournisseurs de services VoIP devraient être obligés de tenir compte des consommateurs handicapés comme l'ont fait les autres fournisseurs de services de télécommunication qui offrent des services téléphoniques et des services connexes.

265. Les Compagnies, TELUS et Vonage ont chacune fait valoir que la réglementation du Conseil n'est pas nécessaire pour que les utilisateurs ayant des besoins spéciaux bénéficient de la technologie IP. Elles ont soutenu que les logiciels et les périphériques ont été développés sans l'imposition de règlements et que l'intervention réglementaire ne ferait qu'aboutir à des solutions uniformisées qui retireraient aux utilisateurs l'avantage du choix et compromettraient l'innovation. À leur avis, le Conseil devrait s'en remettre dans la mesure du possible aux forces du marché pour promouvoir l'accessibilité aux services VoIP par les utilisateurs ayant des besoins spéciaux.

266. Yak a fait valoir que la nature particulière des services VoIP commande un traitement réglementaire spécifique et qu'il pourrait être impossible ou peu pratique de respecter certaines des exigences réglementaires actuelles. De l'avis de Yak, le Conseil ne devrait pas insister sur ces exigences pendant que le CDCI cherche des solutions. Les Compagnies, TELUS, MTS Allstream, Cybersurf, la CCTP et l'ACTC ont convenu que le CDCI serait l'organisme compétent pour trouver des solutions qui permettraient aux fournisseurs de services VoIP de respecter leurs obligations sociales.

267. Le CADJH a fait valoir que le CDCI devrait être tenu d'établir un groupe de travail sur l'accessibilité qui serait chargé d'étudier et d'évaluer les types de fonctions qui pourraient être intégrées aux services VoIP, ainsi que tout autre service sur IP susceptible d'être développé ultérieurement, afin d'assurer leur accessibilité aux personnes handicapées. De l'avis du CADJH, il serait opportun de demander au Groupe de travail sur l'accessibilité de rendre compte au Conseil deux fois par année de toute nouvelle fonction d'accessibilité ou de toute modification aux fonctions existantes des services VoIP, ainsi que des fonctions d'accessibilité relatives à tout autre service sur IP qui justifieraient un examen du Conseil.

268. Le CADJH a également fait valoir qu'il conviendrait que le Conseil ordonne au Groupe de travail sur l'accessibilité d'examiner les questions d'accessibilité liées au VoIP et à d'autres services sur IP. À son avis, ce groupe pourrait également rendre compte au Conseil deux fois par année des technologies VoIP comme le texte à texte, le service de relais téléphonique vidéo, la qualité vocale adaptable et les communications multimodales (faisant intervenir la vidéo, l'audio et le texte) afin qu'elles puissent être mises en ouvre dès qu'elles sont disponibles.

Analyse et conclusions du Conseil

269. Le Conseil estime que le dossier de cette instance ne lui permet pas d'examiner le caractère raisonnable de la demande du CADJH concernant les services VoIP. Toutefois, il considère que ces questions sont importantes et qu'elles nécessitent un examen plus approfondi.

270. En ce qui concerne la fourniture d'outils de communication innovateurs pour les personnes handicapées, le Conseil estime que la technologie IP a beaucoup à offrir et que l'un des problèmes les plus importants lié à l'accessibilité des personnes handicapées est le manque général d'attention porté à leurs besoins lorsque de nouvelles technologies et de nouveaux services sont développés. Le Conseil estime également que les fournisseurs de services VoIP devraient s'occuper des questions concernant l'accès des personnes handicapées aux services IP et faire en sorte que les applications et les technologies soient mises au point. De l'avis du Conseil, il est plus rentable de rendre ces technologies, ces applications et ces services accessibles au début du processus de développement.

271. Par conséquent, le Conseil demande au CDCI d'évaluer, dans le cas des personnes handicapées, les besoins d'accessibilité dans le contexte du développement des technologies VoIP. Le Conseil demande au CDCI de s'assurer que les fournisseurs de services VoIP, les experts en techno-accessibilité, les groupes de défense des consommateurs comme le CADJH, BCOAPO et autres et toutes les autres parties en cause ont l'occasion de participer à ces discussions.

272. Le Conseil demande que le CDCI lui remette dans les six mois un rapport qui :

Service de relais téléphonique
Historique

273. Le SRT permet aux abonnés malentendants de communiquer avec d'autres personnes raccordées au RTPC en fournissant un téléphoniste comme intermédiaire. Une personne entendante qui souhaite communiquer avec une personne malentendante compose un numéro sans frais pour être mise en contact avec un téléphoniste qui communique avec l'usager malentendant et relaie la communication à l'aide d'un téléscripteur. De la même façon, une personne malentendante, équipée d'un téléscripteur, communique avec une personne entendante au moyen du téléphoniste relais en composant le 711.

274. Dans la décision Compagnie de téléphone de la Colombie-Britannique - Service de relais téléphonique, Décision Télécom CRTC 85-29, 23 décembre 1985 (la décision 85-29), le Conseil a conclu que B.C. Tel devait fournir le SRT dans ses zones d'exploitation. Le Conseil avait conclu que puisque les abonnés malentendants payaient les pleins tarifs applicables au SLB, il fallait donc leur offrir la même capacité que tout autre abonné de communiquer avec n'importe quel autre abonné. Le Conseil a déclaré qu'il ne s'agit pas ici d'une question d'ordonner à une compagnie de téléphone de dispenser un service amélioré ou d'offrir un rabais, à ses propres frais, à cause de l'incapacité d'une catégorie particulière d'abonnés. Il s'agit plutôt qu'une compagnie de téléphone donne, à des abonnés de plein droit, le moyen d'utiliser le téléphone d'une manière qui leur assure un accès comparable à celui dont jouissent les autres abonnés. Le Conseil a également a estimé que le coût du service devrait être assumé par l'ensemble des abonnés.

275. Dans des décisions ultérieures, le Conseil a estimé que les conclusions énoncées au sujet du SRT en Colombie-Britannique étaient applicables dans tous les territoires d'exploitation des ESLT. Dans la décision 97-8, il a étendu les obligations concernant le SRT aux ESLC et aux revendeurs compte tenu des obligations sous-jacentes des ESL.

Positions des parties

276. Call-Net, Primus et QMI ont fait valoir que les obligations sociales d'absence d'incidence sur la technologie qui sont imposées aux fournisseurs de services de communication vocale à commutation de circuits dans la décision 97-8 devraient s'appliquer à tous les fournisseurs de services de communication vocale de résidence lorsque la fourniture repose sur le RTPC traditionnel. Call-Net a fait remarquer qu'elle offre actuellement le SRT sur VoIP aux abonnés malentendants et que les coûts initiaux de développement et de mise en oeuvre sont élevés.

277. TELUS, la CCTP, Nortel, Microcell et MTS Allstream estimaient qu'il devrait être obligatoire pour tous les fournisseurs de services VoIP d'offrir le SRT dès que possible, bien que certaines parties aient fait valoir que le développement des services VoIP ne devrait pas être retardé ou limité en attendant la résolution des problèmes concernant le SRT. La TWU a fait valoir qu'il faudrait obliger les fournisseurs de services VoIP de cesser de vendre leurs services tant que leurs clients n'auront pas ces protections.

278. De l'avis de Cogeco et de l'ACTC, le SRT ne devrait devenir obligatoire que dans la mesure où l'on trouve des solutions réalisables et pratiques dans le contexte de la technologie VoIP. À leur avis, le principe de l'absence d'incidence de la technologie ne veut pas dire que les mêmes solutions s'appliquent à des services semblables fournis par des technologies différentes sans tenir compte des contraintes ou des limites associées à la technologie utilisée.

279. Les Compagnies ont demandé que le Conseil détermine que les fournisseurs de services seront tenus non pas de fournir le SRT défini dans les tarifs des ESLT, mais de fournir aux clients malentendants l'accès aux services, suivant des normes de service minimales que le Conseil aura établies. Les Compagnies ont fait valoir qu'elles faisaient actuellement l'essai de la compatibilité de la technologie des téléscripteurs avec les téléphones IP. Elles ont déclaré que si ces essais étaient concluants, elles ouvriraient le SRT aux abonnés du VoIP. Les Compagnies ont ajouté que le marché offre actuellement des solutions de rechange sur IP supérieures fonctionnellement aux services prescrits comme le SRT. Elles ont fait remarquer qu'il existe des applications évoluées comme le texte vers la voix et la voix vers le texte qui sont prometteuses en ce qui a trait à l'accès par les personnes handicapées. De l'avis des Compagnies, demander aux fournisseurs de services VoIP d'offrir le SRT tel qu'il est offert aujourd'hui par les ESL ne ferait que compromettre le développement et le déploiement de solutions de rechange supérieures sur IP.

280. TELUS a fait valoir que lorsqu'elle entrerait dans le monde des services VoIP indépendants de l'accès, elle chercherait à respecter ou à dépasser les normes relatives au SLB en matière de SRT.

281. Le CADJH a fait valoir que tous les fournisseurs de services qui offrent des services basés sur la technologie VoIP doivent fournir le SRT dès le départ et que pour le moment, la transformation du signal de téléscripteur en signal VoIP pose un problème du fait qu'un nombre excessif de paquets sont perdus, ce qui brouille le message du téléscripteur. De l'avis du CADJH, ce qui importe c'est de donner aux fournisseurs de services des incitatifs suffisants pour résoudre rapidement ce problème technique.

282. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait remarquer que la promesse d'une amélioration des installations d'accès pour les personnes handicapées est un élément positif, mais que certaines personnes handicapées pourraient mettre longtemps à adopter les nouvelles technologies d'accès au téléphone. Selon eux, toute promesse d'amélioration de la fonctionnalité associée au VoIP pour les personnes handicapées devrait aller de pair avec l'obligation de fournir les technologies d'accès traditionnel, comme le téléscripteur et le SRT, jusqu'à ce qu'il soit prouvé qu'elles sont fiables et qu'elles sont généralement acceptées.

283. Vonage a fait valoir que l'un des avantages de l'architecture ouverte de la technologie IP est qu'elle permet aux participants autres que les fournisseurs de services, qui connaissent bien les logiciels de programmation pour les personnes handicapées, de créer des solutions qui pourraient être supérieures à celles qui sont prescrites actuellement.

Analyse et conclusions du Conseil

284. Depuis la décision 85-29, le Conseil a toujours conclu que les abonnés malentendants doivent avoir accès à un service téléphonique qui leur assure un accès comparable à celui dont jouissent les autres abonnés. De plus, le Conseil a conclu qu'il est possible de s'acquitter de cette obligation en fournissant le SRT aux abonnés malentendants.

285. Le Conseil estime que l'obligation de fournir aux abonnés malentendants des services téléphoniques qui répondent à leurs besoins est valable quelle que soit la technologie utilisée pour fournir le service.

286. Le Conseil fait remarquer que de l'avis de certaines parties, il serait préférable que les fournisseurs de services offrent aux consommateurs malentendants des services techniquement différents du SRT mais ayant une fonction semblable, comme la technologie texte vers la voix et voix vers le texte qui aurait la même fonction que le système de relais vocal, mais qui serait mis en ouvre différemment.

287. Le Conseil estime que ces solutions de rechange au SRT pourraient donner aux malentendants certains choix de communication et qu'il serait possible de remplacer le SRT traditionnel par un service qui remplit la même fonction à l'aide de méthodes différentes. Toutefois, les Canadiens malentendants sont habitués au système SRT et possèdent déjà un équipement compatible avec ce système. Le Conseil conclut donc que dans l'intérêt de ces consommateurs, toute solution VoIP doit être compatible avec le système SRT et l'appareil téléscripteur connexe et qu'en outre, tout nouveau service doit assurer, au minimum, une qualité de service comparable à celle offerte par le système SRT.

288. Toutefois, comme ces solutions de rechange ne sont pas encore complètement développées et que l'on ne sait pas encore dans quelle mesure elles fonctionneront ni quel en sera le coût pour les consommateurs, le Conseil estime que pour le moment, on ne peut pas considérer ces solutions de rechange comme des substituts du SRT.

289. Par conséquent, le Conseil conclut que les offres de service VoIP local doivent fonctionner avec le système SRT existant et l'appareil téléscripteur connexe.

290. Le Conseil reconnaît, toutefois, que des problèmes d'ordre technique empêchent encore d'offrir le SRT. Le Conseil estime qu'il ne serait pas dans l'intérêt public d'empêcher les fournisseurs de services VoIP d'entrer dans le marché ou d'obliger les fournisseurs de services VoIP existants à cesser de fournir le service jusqu'à ce que la fourniture du SRT soit techniquement possible. En fait, à son avis, il faudrait concilier les intérêts en cause pour permettre aux fournisseurs de services VoIP de fournir le service et de faire en sorte que le SRT soit fourni dès qu'il est techniquement possible de le faire, en accordant du temps aux parties pour résoudre les problèmes techniques. Le Conseil demande donc que le CDCI étudie ces questions pour que les fournisseurs de services VoIP ne retardent pas la résolution de ces problèmes techniques et qu'ils trouvent des solutions.

291. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que les obligations actuelles relatives à la fourniture du SRT s'appliquent aux offres du service VoIP local, dans la mesure des possibilités techniques. Le Conseil ordonne à toutes les ESL de fournir l'accès au SRT dans tout leur territoire d'exploitation, dans la mesure des possibilités techniques et comme condition pour fournir des services de télécommunication aux fournisseurs de services VoIP locaux,d'inclure dans leurs contrats ou autres arrangements avec le fournisseur de services, l'obligation de respecter cette obligation et de fournir l'accès au SRT dans tout leur territoire d'exploitation.

292. D'autre part, le Conseil demande que le CDCI lui rende compte dans les trois mois, dans le cadre de l'étude sur les conditions dans lesquelles le SRT peut être fourni actuellement par le VoIP, de tout problème susceptible d'empêcher la prestation du SRT au moyen du VoIP, des solutions possibles pour la fourniture de la fonctionnalité du SRT au moyen du VoIP lorsque cela n'est pas possible techniquement à l'heure actuelle et du temps nécessaire pour que les fournisseurs de services VoIP existants mettent en ouvre ces solutions.

Garanties relatives à la protection de la vie privée
Historique

293. Dans la décision 97-8, des exigences réglementaires spécifiques concernant la protection de la vie privée ont été imposées aux ESL et ont par la suite été étendues aux revendeurs de services locaux. Dans une lettre datée du 1er février 2000, le Conseil a exigé que les ESL, comme condition pour fournir des services aux revendeurs de services locaux, incluent dans leurs contrats de services avec les revendeurs de services locaux l'obligation de fournir les garanties relatives à la protection de la vie privée des consommateurs décrites dans le rapport de consensus intitulé Application des garanties de protection des consommateurs aux revendeurs déposé auprès du Conseil le 2 septembre 1997.

294. Les garanties relatives à la protection de la vie privée à propos desquelles les parties ont formulé des observations dans le cadre de cette instance et qui sont traitées dans cette section incluent notamment : (1) la fourniture de l'indicateur de protection de la vie privée lorsqu'un abonné final l'invoque; (2) la fourniture de la fonction automatisée universelle du blocage par appel de l'identification de la ligne de l'appelant; (3) la fourniture du blocage de l'affichage des appels par ligne aux abonnés finals admissibles; (4) l'interdiction de la fonction Mémorisateur dans le cas d'un numéro bloqué; (5) la mise en application des restrictions du Conseil sur les composeurs-messagers automatiques, sur les composeurs automatiques et sur les télécopies non sollicitées, et qui s'appliquent dans le territoire de l'ESLT où les ESL exercent leurs activités; et (6) la fourniture de la fonction Dépisteur universel des appels.

Positions des parties

295. Call-Net a fait valoir qu'elle fournissait déjà les garanties relatives à la protection de la vie privée énoncées dans la décision 97-8 dans le cadre de son offre du service VoIP. À son avis, la réglementation sociale qui a été imposée aux fournisseurs de services de communication vocale à commutation de circuits dans la décision 97-8 devrait s'appliquer à tous les fournisseurs de services de communication vocale de résidence lorsque la fourniture de ce service repose sur le RTPC.

296. Plusieurs parties ont fait valoir que les fournisseurs de services VoIP devraient être assujettis aux mêmes normes de protection de la vie privée que les fournisseurs de services de télécommunication réglementés. La TWU a fait valoir que les fournisseurs de services VoIP devraient être obligés de cesser de vendre leurs services jusqu'à ce que ces garanties relatives à la protection de la vie privée soient en place pour leurs clients.

297. Plusieurs parties ont soutenu que malgré certaines difficultés techniques associées à la mise en ouvre des garanties relatives à la protection de la vie privée dans un environnement VoIP, ces garanties devraient être rendues obligatoires dès que possible. Toutefois, les Compagnies, Cybersurf et Yak ont fait valoir que le déploiement des services VoIP ne devrait pas être retardé ou limité jusqu'à ce que les garanties relatives à la protection de la vie privée soient disponibles. Les Compagnies ont précisé qu'elles s'attendent à ce que leurs services VoIP respectent les garanties relatives à la protection de la vie privée énoncées dans la décision 97-8 au lancement ou dès que possible après le lancement, selon la disponibilité des technologies sous-jacentes nécessaires. TELUS a indiqué que lorsqu'elle entrera dans le monde des services VoIP, elle cherchera, dans toute la mesure du possible, à rencontrer ou à dépasser les normes SLB concernant la protection de la vie privée.

298. Vonage a déclaré que même s'il est probablement possible techniquement d'assurer les fonctions de protection de la vie privée comme celles décrites dans la décision 97-8 par le VoIP, il n'était pas judicieux selon elle que le Conseil oblige les fournisseurs de services VoIP à offrir ces services. Vonage a fait valoir que les forces concurrentielles du marché trouveraient de nouvelles solutions techniques qui amélioreront le niveau de protection de la vie privée des clients, au-delà éventuellement de ce qui est actuellement possible avec les systèmes à commutation de circuits.

299. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir que le VoIP représente de nouvelles menaces pour la vie privée des consommateurs, notamment les pourriels et l'abus potentiel du système d'affichage automatique d'adresses (AAA) nécessaire pour le service E9-1-1, y compris la possibilité que cette information soit demandée aux termes des règles d'accès légal. Ils ont fait remarquer que les boîtes vocales raccordées aux téléphones VoIP reposent sur le système d'adresses IP, à l'aide des numéros ANC/PNNA comme « identificateurs » ou « alias » et que chaque abonné au service VoIP aura une adresse IP. Ils ont déclaré que le pourriel, ou « Spam over Information Technology (SPIT) », deviendra plus importun dans un système VoIP qu'il ne l'a été avec le réseau à commutation de circuits, car les personnes qui envoient les pourriels et qui utilisent les logiciels IP peuvent transmettre les messages instantanément à des millions de boîtes vocales, à leurs adresses particulières. Les Groupes de défense des consommateurs ont estimé que le Conseil devrait interdire les messages de boîte vocale non sollicités aux abonnés du VoIP et demander aux fournisseurs de services VoIP de suivre les règlements pour intercepter et filtrer ces messages. Ils ont également fait valoir que le VoIP et le E9-1-1 sans fil posent des risques pour la vie privée en ce sens que les consommateurs peuvent, sans s'en rendre compte, communiquer des renseignements sur leur adresse qui peuvent être repris et utilisés dans le cadre d'une surveillance clandestine de la commercialisation fondée sur l'adresse. Ils ont ajouté que le Conseil devrait ordonner l'utilisation des renseignements sur l'adresse produits par les solutions E9-1-1 pour le VoIP uniquement aux fins du E9-1-1 et non pour des fins secondaires comme la commercialisation.

300. Les Compagnies, Cybersurf, la CCTP et TELUS ont convenu que le CDCI est l'organisme compétent pour s'occuper des questions d'ordre technique et opérationnel associées à la fourniture des garanties relatives à la protection de la vie privée.

Analyse et conclusions du Conseil

301. Le Conseil estime que pour satisfaire à l'objectif énoncé à l'alinéa 7i) de la Loi, les services de télécommunication doivent être fournis de manière à « contribuer à la protection de la vie privée des personnes ». Le Conseil fait remarquer que toutes les parties, sauf Vonage, étaient favorables à l'idée d'obliger les fournisseurs de services VoIP à offrir certaines garanties en matière de protection de la vie privée. Plusieurs parties ont d'ailleurs suggéré que les normes actuellement applicables à cet égard aux fournisseurs de services réseau à commutation de circuits sont également imposées aux fournisseurs de services VoIP.

302. Le Conseil fait remarquer que selon Vonage, le marché devrait dicter les normes en matière de protection de la vie privée, car les garanties risqueraient d'être supérieures à celles actuellement offertes par les fournisseurs de services réseau à commutation de circuits. Le Conseil estime qu'il est possible que les concepteurs VoIP finissent par créer de nouvelles technologies qui garantiraient une protection supérieure aux normes établies dans la décision 97-8. Il souligne toutefois que d'après le dossier de l'instance, rien n'indique qu'il existe déjà de telles technologies ni même qu'elles sont en voie de développement.

303. Le Conseil estime que bien que le marché ait un grand potentiel d'innovation, il n'offre aucune garantie aux consommateurs en ce qui concerne la protection de la vie privée. De l'avis du Conseil, les problèmes liés à la protection de la vie privée des utilisateurs de services de télécommunication sont les mêmes, quelle que soit la technologie sous-jacente du service. Ainsi, le Conseil est d'avis que les utilisateurs de services VoIP devraient, à tout le moins, obtenir le même degré de protection de la vie privée que les utilisateurs de services à commutation de circuits.

304. Le Conseil estime toutefois que, pour des raisons techniques, certains fournisseurs de services VoIP ne sont peut-être pas capables de satisfaire aux exigences en matière de garanties relatives à la protection de la vie privée en date de la présente décision. Or, s'il exige que tous les fournisseurs de services VoIP offrent ces garanties immédiatement, certains risquent de ne pouvoir entrer dans le marché, d'autres risquent même de devoir cesser leurs activités. En revanche, il estime qu'il concilierait les différents intérêts de façon acceptable s'il autorisait les fournisseurs de services VoIP à offrir leurs services même s'ils sont incapables actuellement, sur le plan technique, de mettre en oeuvre toutes les garanties relatives à la protection de la vie privée. Néanmoins, le Conseil juge qu'il est essentiel de trouver des solutions aux lacunes techniques le plus rapidement possible.

305. De plus, d'ici à ce que toutes les garanties relatives à la protection de la vie privée soient offertes aux utilisateurs finals, le Conseil estime que les fournisseurs de services VoIP doivent obtenir des clients, avant de commencer à leur fournir le service, une attestation expresse dans laquelle ils reconnaissent que le service présente des limites par rapport aux garanties prescrites relatives à la protection de la vie privée.

306. Le Conseil conclut que les exigences réglementaires actuelles relatives à la protection de la vie privée du client s'appliquent à tous les fournisseurs de services VoIP locaux, dans la mesure où c'est possible sur le plan technique. Le Conseil ordonne à toutes les ESL de se conformer à ces exigences, dans la mesure où c'est possible et comme condition pour fournir des services de télécommunication aux fournisseurs de services VoIP locaux, d'inclure dans leurs contrats ou autres arrangements avec les fournisseurs de services, l'obligation pour ces derniers d'offrir aux clients les garanties en question à l'égard de la protection de la vie privée, dans la mesure où c'est techniquement possible.

307. Le Conseil demande au CDCI d'examiner les problèmes techniques qui empêchent les fournisseurs de procéder immédiatement à la mise en oeuvre des garanties relatives à la protection de la vie privée et de lui en faire rapport dans trois mois. Le CDCI doit faire état de solutions à ces problèmes et soumettre un calendrier d'exécution correspondant.

308. Le Conseil ordonne aux ESL, comme condition inhérente à la fourniture de services VoIP locaux, d'obtenir du client une attestation expresse dans laquelle il reconnaît les limites que présente son service VoIP local à l'égard des garanties relatives à la protection de la vie privée. Le Conseil exige des ESL, comme condition inhérente à la fourniture de services de télécommunication à un fournisseur de services VoIP locaux, qu'elles prévoient dans leurs contrats de service ou autres ententes avec de tels fournisseurs, une disposition obligeant ces fournisseurs à obtenir la même attestation expresse de leurs clients.

309. Aux fins de l'exigence énoncée dans le paragraphe qui précède, il est présumé que le client a donné son attestation expresse lorsqu'il fournit :

310. Le Conseil fait remarquer que les Groupes de défense des consommateurs ont relevé plusieurs points qui touchent la protection de la vie privée et qui mériteraient d'être examinés plus attentivement, notamment les pourriels et l'utilisation abusive du système AAA dans le cas des appels 9-1-1. Toutefois, aucun renseignement au dossier public ne révèle que de telles situations d'abus concernant la vie privée des consommateurs risquent de se produire, ou si elles sont possibles techniquement. Néanmoins, le Conseil estime que dans un monde IP, ces préoccupations deviendront probablement de plus en plus importantes. Le Conseil s'attend à ce que ces questions soient soumises systématiquement au CDCI pour fins d'examen et de règlement.

Exigences relatives aux dépôts tarifaires concernant les services VoIP locaux offerts dans le territoire de l'ESLT
Historique

311. Aux termes des exigences prévues dans le cadre de réglementation régissant la concurrence locale, et compte tenu des conclusions susmentionnées, les ESLT sont tenues de respecter leurs tarifs en vigueur ou de déposer, le cas échéant, des projets de tarif, conformément aux règles applicables, lorsqu'elles offrent des services VoIP locaux dans leurs territoires.

312. Cette section porte sur les exigences en matière de dépôt de tarifs, dont les circonstances établissant quand une ESLT est réputée fournir des services VoIP locaux dans son territoire.

Positions des parties

313. TELUS a fait valoir qu'il ne semble exister aucun critère fiable ou raisonnable pour établir s'il s'agit d'un service offert à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire. La compagnie a suggéré les critères suivants : (i) l'adresse domiciliaire de l'abonné; (ii) l'adresse de facturation de l'abonné; (iii) le numéro de téléphone et l'indicatif régional de l'abonné; ou (iv) le point de vente du boîtier nécessaire pour le service. Toutefois, dans chaque cas, TELUS n'a vu aucun lien logique entre l'emplacement et la fourniture du service. TELUS a indiqué que de nombreux fournisseurs de services VoIP permettent à leurs clients de choisir leur indicatif régional parmi certaines circonscriptions où ils ont accès à des numéros de téléphone. TELUS a d'ailleurs ajouté que certains fournisseurs de services VoIP offrent parfois des numéros de téléphone d'autres pays et qu'il arrive même que des abonnés déménagent et décident de conserver leur service VoIP et les numéros de téléphone qui s'y rattachent. Ontera a dit partager la position de TELUS. Norouestel, la CCTP et Cybersurf ont également fait valoir qu'aucun des quatre critères n'est approprié ou utile.

314. Les Compagnies ont également soutenu qu'il n'existe aucun critère valable qui permette d'établir si un abonnement à un service VoIP local est rattaché à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire du fournisseur. Selon elles, imposer des dispositions réglementaires fondées sur des facteurs géographiques minerait le déploiement des innovations découlant de la technologie IP et il est inconcevable d'envisager un traitement réglementaire qui varie en fonction des facteurs géographiques. De plus, tenter d'aller dans ce sens risquerait d'occasionner un casse-tête administratif pour le Conseil et les Compagnies, d'autant plus que les clients des services VoIP des Compagnies en souffriraient.

315. FCI Broadband et MCI Canada ont fait valoir que les quatre critères permettent de déterminer si un service est fourni à l'intérieur du territoire ou non.

316. MTS Allstream a fait valoir que le principal facteur, associé à la question de savoir si le service VoIP local que l'ESLT fournit à l'abonné et dont il faudrait tenir compte pour déterminer si le service est offert à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire est le numéro de téléphone local lié à chaque service VoIP. De l'avis de la compagnie, la circonscription liée à l'indicatif régional et au numéro de téléphone où l'ESLT doit fournir la connectivité locale au RTPC détermine la circonscription. MTS Allstream a également proposé que les règles actuelles du Conseil en matière de groupement s'appliquent dans les cas où une ESLT a groupé des services tarifés offerts à l'intérieur du territoire avec des services VoIP de détail offerts à l'extérieur du territoire. La compagnie a soutenu que des services VoIP de détail offerts à rabais, à l'extérieur du territoire, avec des services locaux offerts à l'intérieur du territoire (y compris des services téléphoniques locaux conventionnels à commutation de circuits et/ou des services VoIP) seraient assujettis aux exigences tarifaires actuelles ainsi qu'à la réglementation afférente.

317. QMI a estimé que l'indicatif régional et le numéro de téléphone sont les indices appropriés, parce que la vaste majorité des utilisateurs finals de la téléphonie locale continueront de demander un numéro de téléphone associé à l'endroit où ils habitent.

318. Alcatel a également fait valoir que l'indicatif régional et le numéro de téléphone constituent le meilleur moyen de déterminer si le service VoIP d'une ESLT est fourni à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire (seulement lorsque l'ESLT fournit également la LAN à large bande).

319. Call-Net a estimé que pour établir la distinction entre la fourniture du service à l'intérieur et à l'extérieur du territoire, l'adresse de service et l'emplacement de l'IR-NXX seraient déterminants. Elle a déclaré que si l'adresse de service et/ou l'IR-NXX se trouvaient à l'intérieur du territoire de desserte d'une ESLT, le service VoIP de l'ESLT devrait être considéré comme à l'intérieur du territoire, auquel cas, l'adresse de service serait le lieu de résidence habituel de l'abonné.

320. L'ACTC, Cogeco, Shaw, EastLink et Rogers ont dit estimer que l'adresse de facturation et le numéro de téléphone de l'abonné montrent dans bon nombre de cas, l'endroit où le service est fourni. À leur avis, un autre indicateur possible serait l'information sur l'emplacement de l'abonné 9-1-1 que l'abonné fournit à l'ESLT.

321. Pour leur part, BCOAPO et autres ont fait valoir que le service VoIP local est offert à l'intérieur du territoire si l'installation de transmission de l'accès qui fournit la connectivité au point terminal du VoIP fixe ou mobile situé dans le territoire - sans égard au fait que le client final utilise à un moment quelconque le point terminal VoIP. De l'avis d'UTC, c'est l'emplacement de l'installation d'accès haute vitesse du client dont on se sert pour accéder au service VoIP qui devrait déterminer où le service VoIP est fourni, étant donné qu'il s'agit de l'emplacement de base où les appels ont été logés ou reçus par le client ainsi que l'emplacement où l'installation d'accès est située aux fins de la contribution.

322. Certaines parties ont fait valoir que l'adresse domiciliaire et/ou de facturation pourrait servir d'indices. Pour d'autres, par ailleurs, il serait préférable d'utiliser l'adresse IP du service VoIP local.

Analyse et conclusions du Conseil

323. Le Conseil fait remarquer que dans la décision 97-8, une circonscription est définie comme l'unité de base pour l'administration et la fourniture du service téléphonique par une ESLT. Le Conseil ajoute que les limites des circonscriptions des ESLT ont toujours servi à établir si les services d'une ESLT donnée sont offerts à l'intérieur ou à l'extérieur de son territoire. Par définition, les services VoIP locaux commandent l'utilisation de numéros de téléphone établis conformément au PNNA et qui comprennent un indicatif régional et un numéro de téléphone qui correspondent à une circonscription d'une ESLT dans un secteur géographique. Le Conseil désapprouve donc l'idée selon laquelle le service VoIP local n'est pas rattaché à un emplacement géographique.

324. Certaines parties soulignent qu'il faudrait se fonder sur l'adresse domiciliaire de l'abonné, l'adresse de facturation et/ou l'adresse IP pour établir si le service VoIP local d'une ESLT est offert à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire de l'ESLT tandis que d'autres soutiennent qu'il faudrait plutôt se fonder sur l'endroit d'où provient l'appel. Le Conseil estime qu'il ne serait ni logique ni pratique de se fonder sur l'endroit géographique d'où provient l'appel pour déterminer si le service VoIP local est offert à l'intérieur du territoire. Il ajoute qu'étant donné que l'adresse domiciliaire, l'adresse de facturation et l'adresse IP de l'abonné ne sont pas nécessairement associées à la circonscription rattachée au numéro de téléphone VoIP du client, ces indices ne permettraient pas d'établir si le service est offert à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire.

325. En fait, le Conseil conclut que l'indicatif régional et le numéro de téléphone fournis au client constituent le critère pertinent pour déterminer si le service VoIP local est offert à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire d'exploitation géographique traditionnel d'une ESLT, car le numéro de téléphone indique dans quelle circonscription l'appel local est disponible. Par conséquent, lorsqu'une ESLT fournit à un client un numéro de téléphone associé à une circonscription à l'intérieur du territoire de cette ESLT, elle doit le faire aux termes d'un tarif approuvé. Lorsqu'une ESLT fournit le service VoIP local avec un numéro de téléphone à l'extérieur du territoire, le service ne serait pas assujetti à un tarif, à moins qu'il ne soit fourni dans le cadre d'un groupe de services tarifables (p. ex., avec le service VoIP local offert à l'intérieur du territoire).

326. Pour ce qui est des exigences en matière de dépôt des tarifs applicables au service VoIP local, les ESLT doivent déposer des tarifs conformes aux exigences réglementaires qui s'appliquent actuellement aux services locaux, qui s'appliquent actuellement aux services locaux, y compris aux garanties de tarification énoncées dans la décision Examen des garanties relatives aux prix planchers des services tarifés de détail et questions connexes, Décision de télécom CRTC 2005-27, 29 avril 2005. Les ESLT pourront offrir des promotions portant sur des services VoIP locaux, sous réserve des règles établies dans la décision Promotions des services filaires locaux, Décision de télécom CRTC 2005-25, 27 avril 2005.

327. Le Conseil fait remarquer qu'il traitera les tarifs relatifs aux services VoIP locaux suivant les nouvelles procédures établies dans la circulaire 2005-6. Dans cette circulaire, le Conseil a annoncé une série de mesures récentes qui, selon lui, devraient contribuer à alléger le processus de dépôt tarifaire.

Réglementation des entreprises non dominantes qui fournissent des services VoIP locaux
Historique

328. Tel qu'il est indiqué précédemment, le Conseil a établi que les services VoIP locaux doivent être réglementés en tant que services locaux et qu'ils sont, par conséquent, assujettis au cadre de réglementation prévu dans la décision 97-8. Dans cette décision, le Conseil a fixé les droits et les obligations des ESLT et des ESLC et il a, dans la mesure autorisée, exercé ses pouvoirs de s'abstenir de réglementer les services de télécommunication de détail que fournissent les ESLC. De plus, le Conseil fait remarquer que les revendeurs offrant des services locaux répondraient à certaines exigences que le Conseil a imposées aux ESL, notamment les obligations relatives au 9-1-1 et au SRT.

329. Dans la décision Abstention - Services fournis par des entreprises canadiennes non dominantes, Décision Télécom CRTC 95-19, 8 septembre 1995 (la décision 95-19), le Conseil s'est abstenu de réglementer, dans la mesure prévue dans cette décision, les services de télécommunication que fournissaient les entreprises canadiennes non dominantes, sauf (1) les services téléphoniques publics commutés locaux, (2) les services de téléphonistes, (3) le service de tonalité vidéo offert par les entreprises canadiennes qui sont également des entreprises de télédistribution; et (4) les services visés par l'instance amorcée dans l'avis Fourniture de services hors programmation par des entreprises de distribution de radiodiffusion, Avis public Télécom CRTC 95-22, 9 mai 1995, modifié par l'avis Fourniture de services hors programmation par des entreprises de distribution de radiodiffusion - Modifications à la procédure, Avis public Télécom CRTC 95-34, 5 juillet 1995.

Positions des parties

330. Selon l'ACTC, il n'était ni nécessaire ni logique d'exiger que les entreprises de câblodistribution s'inscrivent en tant qu'ESLC. L'ACTC a par ailleurs suggéré que certains câblodistributeurs pourraient même envisager d'offrir le service VoIP local à titre de revendeurs. L'ACTC a ajouté que le Conseil devrait permettre aux entreprises de câblodistribution qui exercent leurs activités à titre d'ESLC dans une partie de leur territoire de ne remplir les obligations des ESLC que lorsqu'elles décident d'exploiter des services à titre d'ESLC. L'ACTC a soutenu que, suivant les conclusions que le Conseil a tirées dans l'ordonnance Télécom CRTC 98-1 du 7 janvier 1998 (l'ordonnance 98-1), les entreprises de câblodistribution ne devraient pas être tenues de remplir les obligations d'ESLC dans les endroits où elles ne se livrent pas à des activités d'ESLC.

331. L'ACTC a soutenu que les questions relatives à la propriété et à l'exploitation des installations de transmission sont directement liées au droit du fournisseur d'obtenir le statut d'entreprise canadienne, mais qu'elles ne dictent en rien la décision du fournisseur d'évoluer ou non dans le marché local à titre de revendeur ou d'ESLC. En outre, l'ACTC a soutenu qu'un câblodistributeur devient un revendeur dans le marché de la téléphonie locale lorsqu'il revend les services RTPC d'une ESL.

332. L'ACTC estime que dans la décision 97-8, le Conseil n'envisageait pas un régime dans le cadre duquel l'entreprise canadienne qui exerce ses activités à titre de revendeur serait obligée d'assumer le statut d'ESLC parce qu'elle utilise les installations de l'ESLC. L'ACTC a soutenu que, conformément au régime adopté dans la décision 97-8, le Conseil devrait continuer d'autoriser les fournisseurs de services à entrer dans le marché des services locaux à titre de revendeurs dans la mesure où ils s'engagent à respecter les obligations imparties aux revendeurs.

333. L'ACTC a soutenu qu'il cadrerait avec l'objectif visant la promotion de la concurrence d'autoriser ces fournisseurs de services à exercer leurs activités suivant un modèle de revente et de partenariat qui permettrait de faire bénéficier de la concurrence les petits centres, de favoriser le déploiement du SI à large bande et d'offrir aux petits câblodistributeurs une autre source de revenus qui leur servirait à absorber les coûts de transport énormes qu'ils doivent engager pour fournir le service Internet à large bande dans les régions rurales et éloignées.

334. L'ACTC a ajouté que dans la majorité des cas, les entreprises de câblodistribution sont traitées comme des entreprises non dominantes et qu'elles font l'objet d'une abstention de la réglementation conformément à la décision 95-19.

335. QMI a affirmé que les fournisseurs de services VoIP locaux devraient se voir imposer des exigences réglementaires en fonction de leur catégorie de fournisseurs et de leurs offres de service. Ainsi, QMI a souligné que si un câblodistributeur utilise sa propre infrastructure, il devrait être libre de choisir s'il devient une ESLC ou un revendeur de services d'une ESL. De l'avis de Yak, les entreprises de câblodistribution ne devraient pas être tenues de s'inscrire en tant qu'ESLC pour fournir des services VoIP.

336. Les Groupes de défense des consommateurs et FCI Broadband ont pour leur part fait valoir que les câblodistributeurs devraient être obligés de respecter les exigences réglementaires imposées aux ESLC, quel que soit le territoire. Ils ont soutenu qu'une telle mesure générale s'impose parce que les câblodistributeurs, comme les ESLT, représentent un des deux seuls groupes de fournisseurs de services à large bande réellement établis. Ils ont ajouté qu'étant donné que l'accès à la large bande est essentiel dans le cas de tous les nouveaux services VoIP concurrents et dans le cas de nombreux autres services VoIP, le Conseil doit s'assurer que les câblodistributeurs n'exploitent pas à leur avantage le goulot d'étranglement qui existe à l'égard de l'accès à la large bande.

337. Selon UTC, les câblodistributeurs qui utilisent leurs propres réseaux pour fournir les services VoIP locaux devraient être tenus de s'inscrire à titre d'ESLC. UTC a convenu toutefois que les services VoIP locaux que fournissent les câblodistributeurs devraient être assujettis aux mêmes exigences réglementaires que les services des autres nouveaux venus étant donné que les câblodistributeurs ne détiennent aucune emprise sur le marché des services locaux.

Analyse et conclusions du Conseil

338. Le Conseil fait remarquer que la décision 97-8 établit un cadre de réglementation qui prescrit les droits et les obligations des ESLT, des ESLC et des revendeurs dans le contexte de la fourniture des services locaux. Le Conseil précise toutefois que ce cadre ne s'applique pas aux services locaux qui sont fournis par une entreprise canadienne qui n'exerce ses activités ni au titre d'une ESLT ni à celui d'une ESLC.

339. En ce qui concerne l'affirmation de l'ACTC selon laquelle les câblodistributeurs exercent leurs activités à titre de fournisseurs non dominants conformément à la décision 95-19, le Conseil fait remarquer que les conclusions qu'il a tirées en matière d'abstention dans cette décision ne s'appliquent pas à la fourniture des services téléphoniques publics commutés locaux, mais bien aux conclusions qu'il a tirées dans la décision 97-8 concernant les services locaux offerts par les nouveaux venus. Ces conclusions ne visent toutefois que les ESLC.

340. Le Conseil fait remarquer que dans le cadre de réglementation, il a toujours opposé le terme « revendeur » à « entreprise canadienne ». En effet, dans l'avis Exemption de la réglementation pour les revendeurs, Avis public Télécom CRTC 93-62, 4 octobre 1993, le Conseil a conclu que les revendeurs étaient des fournisseurs de services de télécommunication qui n'étaient ni propriétaires ni exploitants des installations de transmission (non exemptées). Dans cet avis, le Conseil a conclu que « les revendeurs ne seraient pas assujettis aux dispositions de la Loi qui concernent les entreprises canadiennes, notamment l'obligation de déposer des tarifs pour fins d'approbation préalable du Conseil. »

341. Le Conseil estime que, parce qu'une entreprise canadienne peut revendre des services et des fonctionnalités d'autres entreprises pour fournir des services VoIP locaux, elle ne devient pas pour autant un revendeur. Tous les services de télécommunication qu'elle fournit sont assujettis aux dispositions de la Loi, y compris à l'obligation de déposer des tarifs s'il n'existe aucune ordonnance d'abstention à l'égard des services en cause.

342. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil écarte l'argument selon lequel les entreprises de câblodistribution prétendent avoir le loisir de devenir une ESLC lorsqu'elles fournissent des services locaux au Canada. Le Conseil fait remarquer que les entreprises de câblodistribution ne sont tenues de respecter les obligations d'ESLC que dans les endroits où elles fournissent un service local. Quant à l'argument de l'ACTC concernant l'ordonnance 98-1, le Conseil fait remarquer que les conclusions qu'il a tirées dans cette ordonnance portent sur la question des exigences de service des fournisseurs de services sans fil. Le Conseil estime que dans ce cas, l'ordonnance ne constitue pas un précédent pour les entreprises de câblodistribution et qu'à l'instar des ESLC, les entreprises de câblodistribution, peuvent définir leurs propres zones de desserte locales et ne sont tenues que de respecter leurs obligations d'ESLC que dans les endroits où elles fournissent un service local.

343. Pour ce qui est de l'argument de l'ACTC selon lequel ce serait favoriser la concurrence que de permettre aux entreprises de câblodistribution d'exercer leurs activités en utilisant un modèle de partenariat de revente, le Conseil fait remarquer que le cadre de réglementation établi dans la décision 97-8 n'empêche pas les ESLC de compter sur les installations de tierces parties pour fournir des services afin de pouvoir remplir leurs obligations conformément à cette décision. Par exemple, dans l'ordonnance Transitage et points d'interconnexion, Ordonnance Télécom CRTC 98-486, 19 mai 1998, le Conseil a accepté l'argument voulant que les installations d'un tiers peuvent être considérées comme l'installation désignée de l'ESLC aux fins de certaines obligations prévues dans la décision 97-8.

344. Le Conseil conclut que les droits et obligations des entreprises canadiennes qui fournissent des services locaux sont énoncés dans la décision 97-8 et qu'il ne conviendrait pas de les modifier dans le cas de la fourniture de services VoIP locaux. Par conséquent, le Conseil détermine que, pour fournir des services locaux au Canada, les entreprises canadiennes non dominantes doivent remplir les obligations des ESLC et se conformer aux procédures en matière d'entrée prescrites dans la décision 97-8.

Réglementation des ESLT qui fournissent des services VoIP locaux dans des territoires où la concurrence locale n'est pas encore autorisée
Historique

345. La concurrence locale n'est pas encore autorisée dans les territoires que desservent Norouestel et les petites ESLT.

346. Dans la décision La concurrence dans l'interurbain et le service amélioré pour les abonnés de Norouestel, Décision CRTC 2000-746, 30 novembre 2000 (la décision 2000-746), le Conseil a exposé ses conclusions en vue d'améliorer les services de télécommunication dans le Grand Nord canadien, territoire desservi par Norouestel, mais il ne s'est pas penché sur la question de la concurrence locale dans le cas de Norouestel. Il avait alors décidé qu'il examinerait à une date ultérieure la question de la concurrence locale dans les services d'accès locaux.

Positions des parties

347. Norouestel a affirmé que l'avènement du VoIP risque d'avoir une incidence appréciable sur ses sources de revenus. La compagnie fait valoir que dans bon nombre des cas, les fournisseurs de services VoIP en provenance ou à destination du Nord éviteraient toute contribution aux réseaux sous-jacents que ces services continueraient d'utiliser. La compagnie a ajouté qu'étant donné que ces services sont pour la plupart des applications Internet, ils n'entraîneraient pas de coûts d'accès à une entreprise ou de coûts de partage. Norouestel a affirmé que dans la mesure où les fournisseurs pourront contourner les coûts d'accès et les coûts de partage, la distorsion des marchés s'accentuera et le fardeau de la contribution sera réparti encore plus inégalement entre les contributeurs.

348. Norouestel a donc fait valoir qu'il serait logique dans son cas que les services VoIP soient exemptés de la réglementation économique puisqu'elle n'est pas encore entrée dans le marché de la téléphonie Internet.

349. Le Yukon a affirmé qu'il faut adapter le cadre de concurrence de Norouestel à la nouvelle réalité que présente la téléphonie Internet. Le Yukon a fait toutefois remarquer que le régime de réglementation actuel a réellement protégé les revenus d'interurbain de Norouestel contre la baisse spectaculaire des prix du marché. Le Yukon a par ailleurs ajouté que si Norouestel craignait que l'avènement de la concurrence dans le marché de la téléphonie Internet locale continue de faire baisser les revenus, il serait préférable que les services VoIP soient assujettis au cadre de réglementation actuel et non exclus de ce cadre, comme le proposait la compagnie.

350. Le Yukon s'est dit inquiet à l'idée de voir Norouestel offrir des services VoIP en concurrence avec les petits FSI indépendants, surtout si c'est sans réglementation. Le Yukon souligne qu'il faut prévoir les règles du jeu afin que les petits exploitants aient une même chance que la titulaire de se disputer le marché des services VoIP une fois que la concurrence sera autorisée.

351. En ce qui concerne la situation des petites ESLT, Ontera a demandé au Conseil de dégager de la décision 97-8 les éléments essentiels au déploiement de la concurrence dans le marché des services VoIP et de les appliquer, en principe, aux territoires des petites ESLT. Selon Ontera, le Conseil pourrait procéder de la sorte, suivant un processus accéléré, sur demande, lorsqu'un fournisseur de services, y compris une ESLT, signifie qu'il entend offrir des services VoIP locaux dans le territoire en question.

352. Selon Ontera, peut-être suffirait-il que le Conseil autorise les nouveaux venus à offrir des services VoIP concurrentiels de catégorie 2 dans les territoires des petites ESLT. Ontera a ajouté que les petites ESLT devraient être assujetties aux mêmes modalités et conditions que les autres ESLT visées par la présente instance, sauf si un traitement spécial s'applique à l'égard des services 9-1-1.

Analyse et conclusions du Conseil

353. Le Conseil fait remarquer que Norouestel lui a demandé d'exempter ses services VoIP locaux de la réglementation économique. Il note également qu'Ontera lui a souligné qu'il devrait s'occuper du déploiement de la concurrence dans le marché des services VoIP locaux suivant un processus accéléré, sur demande.

354. Pour sa part, le Conseil estime qu'il serait illogique de traiter les questions susmentionnées concernant la fourniture de services VoIP locaux avant même de s'occuper du cadre de concurrence locale à l'égard des ESLT qui ne sont pas encore autorisées à livrer concurrence, d'autant plus qu'une telle démarche aurait, ultérieurement, une incidence importante sur le cadre de réglementation de ces compagnies.

355. Par conséquent, le Conseil rejette les demandes susmentionnées de Norouestel et d'Ontera.

356. Le Conseil conclut donc que Norouestel et les petites ESLT doivent soumettre à son approbation des projets de tarif à l'égard de tous les services VoIP locaux qu'elles veulent offrir.

357. Le Conseil a reporté l'examen du cadre de réglementation qui régirait la concurrence dans la fourniture des services VoIP locaux dans ces territoires jusqu'à ce qu'il se soit prononcé sur la concurrence locale dans les territoires des ESLT où elle n'est pas encore autorisée.

Interconnexion IP
Historique

358. Dans la décision 97-8, le Conseil a encouragé, au bénéfice de tous les abonnés, la conclusion d'ententes efficientes et neutres sur le plan technologique et qui permettent l'interconnexion de réseaux concurrents.

Positions des parties

359. Les Compagnies et Norouestel ont fait valoir qu'il faudrait établir une norme canadienne sur l'interface avant d'élaborer des ententes et des tarifs applicables à l'échange de trafic IP. Les Compagnies ont déclaré que cette tâche devrait être confiée au CDCI. TELUS a soutenu que la question de l'interconnexion IP débordait le cadre de la présente instance, mais elle convenait que le CDCI était la meilleure tribune pour élaborer des normes et des pratiques en collaboration. L'ACTC a fait valoir que le Conseil devrait confier au CDCI le mandat de traiter cette question.

360. MTS Allstream a déclaré qu'aux termes du régime actuel d'interconnexion des ESL, les nouveaux venus doivent convertir le trafic IP en trafic multiplexé, ce qui risque de se traduire par une inefficacité accrue et d'éventuels problèmes quant à la qualité du service vocal. MTS Allstream a fait valoir que le Conseil devrait amorcer immédiatement une instance pour traiter de la nécessité d'exiger des ententes d'interconnexion IP étant donné que le régime d'interconnexion actuel s'applique uniquement à l'échange de trafic sur circuit commuté ou multiplexé. La compagnie a également déclaré que le Conseil ne devrait pas simplement confier la question de l'interconnexion IP au CDCI, mais qu'il devrait participer directement au processus et en déterminer le calendrier des travaux et la date de conclusion. L'ACTC, Cogeco et QMI se sont accordées pour dire que le régime d'interconnexion actuel n'apportait pas les solutions efficientes et rentables qu'un régime d'interconnexion IP devrait offrir aux nouveaux venus.

361. MTS Allstream a également fait valoir que le Conseil devrait indiquer clairement au CDCI que l'interconnexion est obligatoire pour toutes les entreprises titulaires, y compris les ESLT et les entreprises de câblodistribution, dans la mesure où ces dernières exercent leurs activités à titre « d'entreprises de radiodiffusion ». MTS Allstream a également fait valoir que le Conseil doit s'assurer que tous les fournisseurs de services titulaires adoptent des normes de réseau ouvert qui permettent l'interopérabilité des réseaux et des services IP, afin d'empêcher que les titulaires conçoivent des services exclusifs.

362. Call-Net a fait valoir que le Conseil devrait rendre l'interconnexion obligatoire dans le cas où l'industrie ne réussirait pas à élaborer d'ententes d'interconnexion adéquates. Call-Net a également fait valoir qu'il existe divers services tarifés permettant l'interconnexion au RTPC des ESLT, sans oublier les tarifs d'interconnexion avec un fournisseur de services VoIP que Bell Canada a déposés.

363. Microcell a fait valoir que le Conseil pourrait vouloir établir des critères précis (p. ex., des critères liés au déploiement interne de l'équipement VoIP chez les ESLT), qui détermineraient quand les ESLT devraient commencer à offrir aux ESLC et aux revendeurs la possibilité d'opter pour des ententes d'interconnexion directe IP à IP. Microcell a également déclaré que pour que le CDCI puisse accomplir cette tâche avec succès, le Conseil devrait définir une orientation stratégique précise et fixer des échéanciers clairs.

364. Yak a fait valoir que, pour le moment, il n'était pas nécessaire d'étendre les ententes d'interconnexion des ESL aux fournisseurs de services VoIP autres que les ESL. Selon Yak, les fournisseurs de services pourraient soit conclure des ententes avec des ESL, au moyen desquelles l'interconnexion à d'autres ESL pourrait être obtenue, soit devenir eux-mêmes des ESLC.

Analyse et conclusions du Conseil

365. Le Conseil fait remarquer que les revendeurs qui offrent des services VoIP locaux obtiennent leur accès au RTPC au moyen des services des ESL.

366. Étant donné que les ESLT et les autres fournisseurs de services déploient déjà la technologie VoIP et que cette tendance devrait se maintenir, le Conseil estime que la normalisation de l'interconnexion IP à IP est, pour diverses raisons, dont l'amélioration de l'efficacité du réseau, une question importante qu'il faut régler puisque l'IP s'implante dans le marché.

367. Le Conseil estime que le CDCI est la tribune appropriée pour traiter des questions relatives à l'interconnexion IP à IP. À ce sujet, le Conseil fait remarquer que le CDCI a déjà entrepris l'élaboration de lignes directrices sur l'interface d'interconnexion IP à IP.

368. MTS Allstream a demandé au Conseil de s'occuper directement des questions liées à l'interconnexion IP au lieu de confier le dossier au CDCI, mais le Conseil est d'avis qu'il devrait d'abord examiner les lignes directrices élaborées par le CDCI avant de décider de tout autre plan d'action.

369. Par conséquent, le Conseil ordonne au CDCI de déposer, au plus tard en novembre 2005, les lignes directrices sur l'interface d'interconnexion IP à IP. Le Conseil décidera alors d'un éventuel plan d'action, au besoin.

Contribution

Historique

370. Dans la décision 2000-745, le Conseil a établi un régime de contribution fondé sur les revenus afin de subventionner le service téléphonique de résidence dans les régions rurales et éloignées du pays. Aux termes de ce régime, tous les FST doivent déclarer annuellement leurs revenus basés sur la fin de l'exercice précédent. Les FST, ou groupes de FST apparentés, dont les services de télécommunication canadiens ont généré au moins 10 millions de dollars en revenus, doivent verser une contribution calculée suivant les revenus admissibles à cette fin. Les revenus admissibles à la contribution correspondent aux revenus générés par les services de télécommunication canadiens de la compagnie, moins les déductions autorisées par le Conseil, telles que les revenus découlant des services Internet de détail et des services de téléappel de détail.

371. En ce qui concerne les déductions pour les revenus découlant des services Internet de détail, le Conseil a établi que même si les revenus des services Internet et de téléappel de détail ne sont pas admissibles à la contribution, les revenus générés par tout autre service de télécommunication des fournisseurs de services Internet et de téléappel de détail le sont. De plus, les revenus qu'un autre fournisseur de services de télécommunication génère en fournissant des installations de télécommunication sous-jacentes à des fournisseurs de services Internet et de téléappel de détail (par exemple, les circuits d'interconnexion utilisés par ces fournisseurs) sont également admissibles à la contribution.

372. Tel qu'il est indiqué précédemment, dans l'ordonnance 2001-220, le Conseil a approuvé la définition suivante d'un SI de détail :

Le service Internet [de] détail inclut tous les services Internet (SI) sans égard à la vitesse ou aux installations au moyen desquelles les services sont fournis. Pour plus de certitude, les SI [de] détail comprennent, mais sans s'y limiter, tous les SI qui permettent aux utilisateurs de ces services de télécharger de l'information à partir d'Internet et d'utiliser des applications comme le courrier électronique, mais n'incluent pas les services du réseau téléphonique public commuté (RTPC) Voix ou tout autre service de télécommunication admissible à la contribution, pas plus qu'ils ne comprennent de biens ou de services dont les revenus correspondent à la définition de revenus canadiens autres que de télécommunication.

Aux fins de la présente définition, services « RTPC Voix » désignent les communications téléphoniques en « temps réel » par Internet à destination ou en provenance d'un téléphone ou de tout autre équipement où la conversion pour la transmission par Internet se fait par l'équipement du fournisseur de services (c.-à-d., celui du FSI) défini dans l'ordonnance Télécom CRTC 98-929.

Admissibilité des services VoIP au titre de la contribution
Positions des parties

373. En général, les parties conviennent que les services VoIP devraient être admissibles à la contribution. Dans l'ensemble, elles conviennent aussi que les services poste à poste sont des SI de détail et ne devraient pas être admissibles à la contribution, comme le soutient le Conseil dans ses avis préliminaires.

374. Quant à la façon de traiter les services poste à poste aux fins de la contribution lorsqu'ils sont offerts dans le cadre d'un service VoIP, les parties proposent deux choix : considérer tous les appels admissibles à la contribution du fait que la possibilité d'accès au RTPC existe ou analyser chaque appel individuellement et considérer comme admissibles à la contribution seulement les appels en provenance ou à destination du RTPC (ce qui exclut les appels poste à poste).

375. La CCTP a dit craindre que si chaque service (p. ex., un service VoIP), pouvant accéder au RTPC, y compris le trafic sur le Web, était admissible à la contribution, il y aurait beaucoup d'occasions d'évitement de la contribution et d'abus. Quant à Ontera, elle a fait valoir que tous les services VoIP devraient être admissibles à la contribution, car analyser chaque appel, au cas par cas, coûterait très cher.

Analyse et conclusions du Conseil

376. Dans la décision 2000-745, le Conseil a établi que les revenus découlant des SI de détail n'étaient pas admissibles à la contribution. Il fait remarquer que presque toutes les parties convenaient que les services VoIP devraient eux aussi être admissibles à la contribution. Or, comme il a conclu précédemment que la téléphonie Internet n'est pas un SI de détail, le Conseil établit que les revenus découlant des services VoIP sont admissibles à la contribution.

377. En outre, toutes les parties ont convenu que les services poste à poste sont des SI de détail et qu'ils ne sont donc pas admissibles à la contribution. Le Conseil précise que les services poste à poste ne se raccordent pas au RTPC et que, normalement, ils n'utilisent pas de numéros de téléphone établis conformément au PNNA. Les utilisateurs finals se servent de leur ordinateur ou d'autre équipement terminal pour faire des appels poste à poste et, normalement, ces appels sont traités par un FSI comme d'autres types de trafic Internet, p. ex., du courriel.

378. Le Conseil conclut que les revenus générés par les services poste à poste, tels que ces services sont définis dans la présente décision, peuvent être déduits des revenus annuels des services Internet de détail qui doivent être déclarés dans le rapport exigé aux termes de la décision 2000-745.

379. Le Conseil estime que s'il obligeait les fournisseurs de services à analyser chaque appel individuellement pour différencier les appels poste à poste des appels VoIP, il minerait l'objectif même qu'il s'était donné dans la décision 2000-745 de simplifier le régime de contribution. Dans le cas des appels faisant intervenir divers fournisseurs de services, il faudrait donc que tous ces fournisseurs participent à l'analyse.

380. Par conséquent, le Conseil détermine que si le service permet un accès en provenance et/ou à destination du RTPC, il doit être considéré admissible à la contribution, même si le client utilise également le service pour faire des appels poste à poste.

Déduction des revenus générés par les services Internet de détail
Positions des parties

381. Dans leurs observations initiales, les Compagnies ont souligné qu'il fallait modifier la définition de SI de détail de manière à refléter les conditions actuelles du marché et, autant que possible, les conditions futures. Voici la définition que proposent les Compagnies pour le service RTPC Voix :

Le service « RTPC Voix » désigne les communications téléphoniques en « temps réel » par Internet à destination ou en provenance d'un téléphone ou de tout autre équipement où la conversion pour la transmission entre Internet et le RTPC se fait au Canada, sous la direction du fournisseur de services VoIP (les modifications à la définition actuelle sont soulignées).

382. Les Compagnies ont fait valoir que si la définition précise que la conversion pour la transmission doit se faire « au Canada », comme elles le proposent, les fournisseurs de services seraient forcément du ressort du Conseil, ce qui faciliterait l'application du régime. Elles ont en outre fait valoir que les fournisseurs de services qui utilisent des numéros de téléphone canadiens se servent généralement de passerelles et d'installations connexes établies au Canada afin de réduire le plus possible leurs coûts; ce qui veut dire que la conversion se ferait au Canada.

383. En ce qui concerne le changement proposé, à savoir que la conversion doit se faire « sousla direction du fournisseur de services VoIP », les Compagnies ont fait valoir que la modification garantirait que, peu importe qui exécute réellement la conversion, le fournisseur de services VoIP serait tenu de contribuer.

384. Plusieurs parties ont formulé des observations sur les deux modifications proposées et les incidences qu'elles pourraient avoir. Selon Primus et Yak, le Conseil devrait carrément supprimer la déduction des revenus découlant des services Internet de détail.

385. TELUS fait valoir qu'il serait plus simple de remplacer le terme « RTPC Voix » par « services VoIP ». L'ACTC et MTS Allstream sont du même avis, soutenant qu'un tel changement rendrait les services VoIP admissibles à la contribution.

Analyse et conclusions du Conseil

386. Le Conseil estime que si les services RTPC Voix sont définis en fonction de leur mode de fourniture plutôt qu'en fonction du service offert, les FST pourraient bien se trouver d'autres façons de fournir le service afin de contourner la définition. Le Conseil précise que la définition du service RTPC Voix a été formulée avant que la notion de services VoIP ne commence à être utilisée.

387. Selon le Conseil, les parties risqueraient de s'y perdre si nous commencions à intervertir l'ancien terme (RTPC Voix) et le nouveau terme (services VoIP) sans modifier la définition actuelle des revenus découlant des services Internet de détail. Pour éviter toute confusion, le Conseil juge qu'il est préférable de s'en tenir à un seul et même terme, à savoir services VoIP.

388. Or, modifier la définition de déduction des revenus pour l'Internet de détail de manière à inclure seulement les services VoIP signifierait que l'admissibilité à la contribution serait basée sur la capacité du service de permettre l'accès en provenance et/ou à destination du RTPC et où il utilise des numéros de téléphone établis conformément au PNNA, mais qu'il ne serait plus fait référence à une condition relative à la conversion pour la transmission par Internet. De plus, les modifications visant à préciser que la conversion pour la transmission du service RTPC Voix se fait « au Canada » et « sous la direction du fournisseur de services VoIP » deviendraient alors superflues. Finalement, le fait d'inclure seulement les services VoIP garantirait que tous les services VoIP au Canada sont admissibles à la contribution, peu importe que la conversion s'effectue à partir des installations du client, du fournisseur de services ou d'une tierce partie, au Canada ou ailleurs.

389. Par conséquent, le Conseil modifie la définition des services Internet de détail, telle qu'elle est formulée aux fins de la déduction des revenus dans l'ordonnance 2001-220. Il remplace le terme « RTPC Voix » par « services VoIP », et la définition se lit désormais comme suit :

Le service Internet de détail inclut tous les services Internet (SI) sans égard à la vitesse ou aux installations au moyen desquelles les services sont fournis. Pour plus de certitude, les SI de détail comprennent, mais sans s'y limiter, tous les SI qui permettent aux utilisateurs de ces services de télécharger de l'information à partir d'Internet et d'utiliser des applications comme le courrier électronique, mais n'incluent pas les services VoIP ou tout autre service de télécommunication admissible à la contribution, pas plus qu'ils ne comprennent de biens ou de services dont les revenus correspondent à la définition de revenus canadiens autres que de télécommunication.

Aux fins de la présente définition, services VoIP désignent les services de communication vocale sur IP qui utilisent des numéros de téléphone établis conformément au PNNA et qui offrent un accès en provenance et/ou à destination du RTPC.

Services groupés
Positions des parties

390. Comwave fait valoir que pour réduire le plus possible leurs montants à payer au titre de la contribution, les câblodistributeurs et les compagnies de téléphone pourraient grouper un service VoIP à bas prix avec le service Internet haute vitesse.

Analyse et conclusions du Conseil

391.À l'annexe B de l'ordonnance 2001-220, le Conseil a établi comment traiter un groupe incluant à la fois des services admissibles à la contribution et des services non admissibles à la contribution.

392. Selon le Conseil, l'ordonnance 2001-220 couvre un groupe qui inclut un service VoIP et un SI haute vitesse. Le Conseil juge donc qu'il n'y a pas lieu de modifier les règles.

Subvention provenant du Fonds de contribution national - Admissibilité des services VoIP
Historique

393. Dans la décision 97-8, le Conseil a établi que toutes les ESL auraient droit à une contribution, ou subvention, qui serait calculée en fonction du nombre de services d'accès au réseau (SAR) de résidence desservis dans chaque tranche des ESLT.

394. Dans la décision 2000-745, le Conseil a établi que la subvention s'appliquerait précisément au SAR de résidence dans les tranches à coût élevé et qu'elle serait calculée par SAR de résidence à compter du 1er janvier 2002.

395. Dans la décision Tranches de tarification restructurées, tarifs des lignes locales révisés et questions connexes, Décision CRTC 2001-238, 27 avril 2001, modifiée par les décisions CRTC 2001-238-1 du 28 mai 2001 et 2001-238-2 du 7 août 2001 (la décision 2001-238), le Conseil a conclu que :

Positions des parties

396. Dans l'ensemble, les parties sont d'avis que les règles d'admissibilité énoncées dans la décision 97-8 devraient s'appliquer aux services VoIP locaux. Pour la plupart, elles sont également favorables à l'idée que les fournisseurs de services VoIP locaux aient droit à une subvention provenant du Fonds de contribution national, dans la mesure où ils satisfont à au moins une des conditions suivantes :

397. Norouestel s'est opposée à ce que des subventions soient accordées aux ESL offrant des services VoIP locaux aient droit à une subvention. Elle a fait valoir que, puisque la concurrence locale n'est pas encore autorisée dans son territoire, il faudrait aborder cette question dans le cadre d'une instance sur la concurrence locale.

398. La majorité des parties convenaient que le fournisseur de services devait fournir à la fois le service VoIP local et l'accès sous-jacent pour avoir droit à une subvention.

399. Selon l'ACTC, les parties qui s'opposent à l'octroi de subventions aux fournisseurs qui n'assurent pas l'accès sous-jacent au service interprètent beaucoup trop sévèrement les décisions antérieures que le Conseil a rendues concernant les services admissibles à la subvention. L'ACTC a d'ailleurs fait valoir que si un fournisseur de services VoIP indépendant de l'accès était en mesure de satisfaire aux obligations nécessaires pour s'inscrire en tant qu'ESLC et qu'il pouvait fournir le service local de résidence dans une tranche admissible à la subvention, il serait alors logique de lui permettre de demander une subvention.

400. Faisant renvoi à l'ordonnance 98-1, l'ACTC a souligné que sur le plan fonctionnel, les services VoIP équivalent au service local et qu'ils devraient donc être admissibles à la subvention.

401. Quant à FCI Broadband, elle a fait valoir que les fournisseurs de services VoIP locaux ne devraient pas avoir droit à la subvention étant donné que c'est le client lui-même qui fournit la ligne et non le fournisseur de services.

402. Selon Yak, les fournisseurs de services VoIP locaux qui satisfont à l'objectif du service de base seraient bien placés pour réclamer une subvention. Les Compagnies ont soutenu que seuls les services VoIP locaux qui satisfont à l'objectif du service de base devraient être admissibles à la subvention.

Analyse et conclusions du Conseil

403. Dans l'ordonnance 98-1, le Conseil a établi que le SAR de résidence à l'égard duquel une ESL est admissible à recevoir une contribution doit se définir comme le SAR que l'ESL utilise pour offrir des services téléphoniques locaux bidirectionnels commutés de résidence dans les circonscriptions qu'elle dessert à titre d'ESL.

404. Le Conseil fait remarquer que lorsque le client reçoit le SLB par voie commutée, il obtient à la fois accès au réseau et accès au service local. Or, conformément à l'ordonnance 98-1, le Conseil conclut que le SAR de résidence, peu importe qu'il se rattache au SLB ou au service VoIP local, est admissible à la subvention si le client se voit fournir la composante accès sous-jacent et la composante service local.

405. Dans la décision Le service téléphonique dans les zones de desserte à coût élevé, Décision Télécom CRTC 99-16, 19 octobre 1999 (la décision 99-16), le Conseil a défini l'objectif du service de base à l'égard des ESL comme suit :

406. Le Conseil a d'ailleurs fait remarquer que l'objectif du service de base n'était aucunement lié à la technologie servant à offrir le service.

407. Dans la décision 99-16, le Conseil a établi qu'après le 1er janvier 2002, les ESLT auraient droit à une subvention sous réserve d'un plan d'amélioration du service approuvé précisant comment l'entreprise s'y prendra pour satisfaire à l'objectif du service de base. Parallèlement, les ESLC auraient droit à une subvention à l'égard des clients qui bénéficient d'un niveau de service qui satisfait à l'objectif du service de base.

408. Par conséquent, le Conseil conclut que les fournisseurs de services VoIP locaux de résidence ont droit à l'actuelle subvention par SAR de résidence qui provient du Fonds de contribution national dans la mesure où ils remplissent les conditions suivantes : fournir à la fois la composante accès sous-jacent et la composante service local, et satisfaire à tous les critères que le Conseil a établis dans la décision 97-8 et dans les décisions connexes subséquentes. Ces critères prévoient notamment que le fournisseur de services doit se conformer à l'ensemble des obligations de l'ESL et qu'il doit atteindre ou dépasser l'objectif du service de base.

Montant de la subvention à payer à même le Fonds de contribution national
Historique

409. Dans la décision 2000-745, le Conseil a établi les composantes de la subvention de chaque ESLT calculée par SAR de résidence. Dans la décision Cadre de réglementation applicable à la deuxième période de plafonnement des prix, Décision de télécom CRTC 2002-34, 30 mai 2002, le Conseil a établi que les grandes ESLT seraient tenues de déposer des calculs des subventions annuelles. Le Conseil a établi un processus semblable pour Télébec et l'ancienne TELUS Communications (Québec) Inc. (TCQ) dans la décision Mise en oeuvre de la réglementation des prix pour Télébec et TELUS Québec, Décision de télécom CRTC 2002-43, 31 juillet 2002, bien que le processus d'approbation de la subvention par SAR de résidence n'ait commencé qu'en 2005, après la publication de la décision Mise en oeuvre de la concurrence dans les marchés des services locaux et des téléphones payants locaux dans les territoires de la Société en commandite Télébec et de l'ancienne TELUS Communications (Québec) Inc., Décision de télécom CRTC 2005-4, 31 janvier 2005 (la décision 2005-4).

Analyse et conclusions du Conseil

410. Le Conseil fait remarquer que les ESL qui desservent des clients de résidence dans les zones de desserte à coût élevé dans la tranche de l'ESLT reçoivent toutes le même montant de subvention par SAR de résidence, par tranche de l'ESLT, peu importe leurs revenus, leur structure de coûts et la technologie qu'elles utilisent pour fournir le service.

411. Ainsi, l'ESL qui réussit à accroître ses revenus ou à réduire ses coûts peut réellement bénéficier du fruit de ses efforts. L'avènement de la technologie IP dans le marché du SLB de résidence risque d'entraîner la modification de l'actuelle structure de coûts, qui repose sur la technologie d'accès commuté existante. Néanmoins, le Conseil estime qu'il n'est pas pour autant justifié de s'écarter du processus actuellement utilisé pour calculer la subvention.

412. Par conséquent, le Conseil conclut que les ESL offrant des services VoIP locaux de résidence dans les zones de desserte à coût élevé ont droit aux montants actuels de la subvention par SAR de résidence dans la mesure où elles satisfont à toutes les conditions d'admissibilité à la subvention, dont fournir à la fois la composante accès sous-jacent et la composante service local, satisfaire à tous les critères que le Conseil a établis dans la décision 97-8 et dans les décisions connexes subséquentes, et atteindre ou dépasser l'objectif du service de base.

Questions relatives à l'accès

413. Un certain nombre de parties ont fait des demandes particulières, soutenant qu'il s'agissait de conditions essentielles pour faciliter l'entrée de fournisseurs de services VoIP concurrents dans ce marché. Voici en quoi se résument ces demandes :

414. Dans les sections qui suivent, le Conseil examine ces demandes précises.

Retrait de la restriction visant l'accès Internet de tiers aux fins des services VoIP
Historique

415. Dans l'ordonnance Modalités et tarifs approuvés pour le service d'accès grande vitesse des grandes entreprises de câblodistribution, Ordonnance CRTC 2000-789, 21 août 2000 (l'ordonnance 2000-789), le Conseil a approuvé les modalités et les tarifs du service d'accès haute vitesse fourni aux FSI par les entreprises de câblodistribution. Dans cette ordonnance, le Conseil confirmait également que la décision Réglementation en vertu de la Loi sur les télécommunications de certains services de télécommunications offerts par des « entreprises de radiodiffusion », Décision Télécom CRTC 98-9, 9 juillet 1998 (la décision 98-9) et la décision Réglementation en vertu de la Loi sur les télécommunications des services d'accès des entreprises de câblodistribution, Décision Télécom CRTC 99-8, 6 juillet 1999 (la décision 99-8) exigeaient des entreprises de câblodistribution qu'elles offrent le service d'accès haute vitesse aux FSI pour leur permettre d'offrir le SI haute vitesse de détail. À cette fin, le Conseil a déclaré que le SI haute vitesse de détail n'incluait pas le service téléphonique IP, la multi-diffusion, les réseaux privés virtuels ou les réseaux locaux.

416. Dans la décision 98-9, le Conseil avait conclu qu'il approuverait les tarifs et les modalités aux termes desquels les entreprises de câblodistribution titulaires offriraient aux fournisseurs concurrents de SI de détail l'accès haute vitesse à leurs installations de télécommunication. L'instance qui a mené à la décision 98-9 ne prévoyait pas l'examen des questions liées aux services locaux de télécommunication, y compris les services téléphoniques publics commutés locaux.

417. Dans l'ordonnance 2000-789, le Conseil a déclaré que les modalités suivant lesquelles l'accès est fourni aux FSI et suivant lesquelles l'entreprise de câblodistribution utilise ses installations pour fournir son propre SI haute vitesse de détail ne doivent pas entraîner une préférence ou un désavantage qui irait à l'encontre du paragraphe 27(2) de la Loi.

Positions des parties

418. Plusieurs parties se sont opposées au retrait de l'actuelle restriction relative à l'AIT. L'ACTC a soutenu que ce retrait obligerait les entreprises de câblodistribution à assurer l'accès pour la fourniture de services téléphoniques, ce qui est contraire au cadre de réglementation établi par le Conseil dans la décision 97-8 et confirmé dans les décisions qu'il a prises concernant le service AIT. L'ACTC a fait valoir que dans une telle situation, les entreprises de câblodistribution risqueraient d'avoir à assurer un service de téléphonie dépendant de l'accès ou géré. Selon l'ACTC, cette exigence déborde le but du service AIT. L'ACTC a également fait valoir qu'obliger les entreprises de câblodistribution à fournir l'accès à leurs installations aurait pour effet d'étouffer le développement de la concurrence fondée sur les installations.

419. L'ACTC a également soutenu que la restriction relative à l'AIT n'empêcherait pas forcément les clients de l'AIT d'offrir à leurs utilisateurs finals un service VoIP indépendant de l'accès, qui permet la transmission des appels téléphoniques au moyen de l'Internet public, étant donné que le service VoIP est indépendant de l'accès obtenu aux termes du tarif applicable à l'AIT. L'ACTC a également fait valoir que le manque d'accès aux installations de câble n'était pas un obstacle à l'entrée dans le marché puisque des fournisseurs de services VoIP, dont Primus, Vonage et Navigata, ont lancé des services VoIP dans quelques marchés même si les entreprises de câblodistribution n'étaient pas obligées d'offrir l'accès à leurs installations. QMI, Cogeco, EastLink, Rogers et Shaw ont adopté une position semblable.

420. TELUS s'est opposée fermement au retrait de la restriction relative au tarif AIT si, au bout du compte, les FSI peuvent fournir des services téléphoniques locaux dépendants de l'accès, au moyen d'installations dégroupées. TELUS a fait valoir que les joueurs actuels dans le marché canadien des télécommunications ont investi massivement dans l'industrie et que le retrait de la restriction relative à l'AIT signifierait le rejet du modèle de concurrence locale du Conseil, modèle qui a été conçu dans le but de promouvoir la concurrence durable fondée sur les installations. Toutefois, TELUS a également déclaré qu'il serait injuste d'empêcher les FSI d'offrir des services VoIP indépendants de l'accès puisque de nombreux autres fournisseurs de services offrent actuellement les mêmes services au moyen du SI haute vitesse des FSI.

421. Certaines parties ont appuyé le retrait de la restriction actuelle à l'égard de l'AIT, étant donné que cette restriction, selon elles, constitue une pratique anticoncurrentielle qui nuirait à la concurrence émergente dans le domaine de la téléphonie IP. Les Compagnies ont fait valoir qu'interdire l'utilisation du service AIT des entreprises de câblodistribution dans le but de fournir des services VoIP nuirait au développement de services VoIP fournis au moyen des installations sous-jacentes des entreprises de câblodistribution. MTS Allstream a exprimé des opinions semblables.

422. Call-Net a fait valoir qu'au cours de l'instance qui a mené à l'ordonnance 2000-789, le Conseil s'est intéressé expressément à la question de l'accès par des FSI tiers à l'infrastructure des entreprises de câblodistribution dans le but de fournir un service d'accès Internet haute vitesse concurrent de détail. Selon l'interprétation de Call-Net, la restriction relative à l'AIT ne permettrait pas aux entreprises de câblodistribution d'empêcher les fournisseurs de service VoIP de desservir leurs clients du service Internet haute vitesse au moyen du service VoIP, ou de les limiter ou désavantager. La compagnie a déclaré que le Conseil voudrait peut-être confirmer la justesse de cette interprétation.

423. Primus a fait valoir que l'interdiction de fournir des services VoIP au moyen des services AIT des entreprises de câblodistribution constituait un obstacle majeur auquel faisaient face les concurrents. Primus a fait remarquer que les clients de ParlezHauteVitesseMC pouvaient utiliser ce service quelle que soit la connexion SI haute vitesse, mais que, présentement, les concurrents ne pouvaient se servir du service AIT pour utiliser les réseaux des entreprises de câblodistribution dans le but de fournir leur propre groupe de services Internet haute vitesse et VoIP. Primus a également fait remarquer que les entreprises de câblodistribution ne devraient pas avoir le droit d'entrer dans le marché de la téléphonie locale à moins que cette restriction soit retirée des ententes et des tarifs.

424. Cybersurf a fait valoir qu'il n'était pas dans l'intérêt public d'empêcher un FSI, ou un autre concurrent qui dépend de services sous-jacents provenant d'une entreprise de câblodistribution, d'utiliser ces services pour fournir des services VoIP indépendants de l'accès alors que d'autres parties qui ne sont pas dépendantes d'une entreprise de câblodistribution peuvent accéder au réseau de l'entreprise à cette fin et sans le consentement de l'entreprise.

Analyse et conclusions du Conseil

425. Le Conseil fait remarquer que les parties s'entendaient en général sur le fait que les FSI qui utilisent l'AIT pour fournir leurs services d'accès Internet devraient pouvoir offrir à leurs clients des services VoIP indépendants de l'accès. L'ACTC a fait valoir que la restriction à l'égard de l'AIT n'empêcherait pas forcément les FSI qui se servent de l'AIT pour fournir leurs services d'accès Internet d'offrir également des services VoIP indépendants de l'accès. Néanmoins, le Conseil estime que le libellé de la clause sur la restriction n'est pas clair et qu'il pourrait être interprété comme étant une restriction imposée pour ce type d'offre de service.

426. Le Conseil prend note de l'affirmation de l'ACTC selon laquelle le retrait de la restriction actuelle risquerait de contraindre les entreprises de câblodistribution à assurer un service de téléphonie dépendant de l'accès ou géré mais il ne croît pas que retirer la restriction aurait un tel effet. À son avis, le retrait de la restriction permettrait plutôt de garantir aux clients de l'AIT qu'ils ne seront pas empêchés d'offrir des groupes de services VoIP à leurs clients uniquement parce qu'ils se servent de l'AIT pour fournir leurs services d'accès Internet. Le retrait de la restriction favorisera l'équité sur le plan de la concurrence et réduira le risque que les clients de l'AIT des entreprises de câblodistribution désirant offrir des services VoIP à leurs clients ne subissent un désavantage indu sur le plan de la concurrence par rapport aux autres fournisseurs de services VoIP. En encourageant la concurrence, le retrait de la restriction favorisera l'innovation chez les fournisseurs de services et accroîtra le choix offert aux consommateurs.

427. En ce qui concerne l'affirmation de l'ACTC et de TELUS selon laquelle le retrait de la restriction nuira à la concurrence fondée sur les installations, le Conseil estime que permettre aux fournisseurs de services d'offrir des services téléphoniques au moyen du câble favorisera encore plus la concurrence dans le marché des services locaux. À cet égard, le Conseil fait remarquer que dans la décision 97-8, il était d'avis que la revente de services de télécommunication pouvait favoriser le développement d'un marché concurrentiel tout en donnant aux concurrents le temps de construire leurs propres installations. Le Conseil estime qu'accorder aux FSI le droit d'utiliser le service en question pour fournir des services téléphoniques leur permettrait d'établir une clientèle, ce qui, en retour, leur donnera la possibilité d'investir progressivement dans l'équipement requis, conformément aux objectifs du Conseil.

428. Le Conseil prend note de la position de TELUS selon laquelle la restriction devrait être maintenue afin d'empêcher l'offre de services VoIP dépendants de l'accès, mais que cette restriction ne devrait pas empêcher la fourniture de services VoIP indépendants de l'accès au moyen d'installations de câble. De l'avis du Conseil, non seulement serait-il difficile de faire respecter une telle restriction, mais obliger les fournisseurs de services VoIP locaux qui sont des clients de l'AIT à offrir seulement des services indépendants de l'accès constituerait une contrainte artificielle et inadéquate dans le marché.

429. Par conséquent, le Conseil conclut que la restriction à l'égard de l'AIT devrait être retirée, et il ordonne à Rogers, à Vidéotron ltée, à Shaw et à Cogeco de publier, dans les 20 jours suivant la date de publication de la présente décision, des tarifs AIT révisés de manière à retirer la restriction existante, pour permettre aux clients de l'AIT de fournir des services VoIP en plus du SI de détail.

Retrait des restrictions imposées aux FSLAN à l'égard des services VoIP
Historique

430. Dans l'ordonnance Approbation de l'accès par les fournisseurs de services de lignes d'abonnés numériques aux lignes dégroupées et à la co-implantation, Ordonnance CRTC 2000-983, 27 octobre 2000 (l'ordonnance 2000-983), le Conseil a conclu que les FSLAN qui ne sont pas des ESLC devraient avoir accès aux tarifs des ESLT concernant les lignes dégroupées et les liaisons de raccordement et de co-implantation s'ils ne recourent pas à ces services pour fournir des services téléphoniques locaux commutés. Le Conseil a également ordonné aux ESLT, et à toute ESLC qui fournit de tels services aux FSLAN, de veiller à ce que ces derniers ne les utilisent pas pour fournir des services téléphoniques locaux commutés.

Positions des parties

431. Des parties ont demandé au Conseil qu'il continue d'exiger des ESLT qu'elles fournissent aux FSLAN des services de co-implantation et l'accès à des lignes dégroupées, sans restriction concernant la fourniture de services VoIP locaux au moyen des mêmes lignes. Certaines parties ont fait valoir que cette restriction ne devrait être retirée que si les FSLAN satisfont aux obligations imposées aux ESLC.

432. Les Compagnies et Bell West ont fait valoir que les services VoIP n'étaient pas des services téléphoniques locaux commutés, mais plutôt des SI fournis dans un environnement concurrentiel et que, par conséquent, la restriction susmentionnée ne s'applique pas aux fournisseurs de services VoIP, et rien ne justifie donc sa modification ou son retrait.

433. TELUS s'est fortement opposée à l'idée que les FSLAN puissent fournir des services téléphoniques locaux dépendants de l'accès au moyen d'installations dégroupées. Selon TELUS, retirer la restriction nuirait fortement au modèle de concurrence locale conçu par le Conseil dans le but de promouvoir une concurrence durable fondée sur les installations. Toutefois, TELUS a fait valoir que le Conseil devrait imposer une restriction identique pour les services AIT fournis aux FSI et pour les services de lignes dégroupées et de co-implantation fournis aux FSLAN. Selon TELUS, la restriction devrait porter sur la fourniture de services téléphoniques, qu'il s'agisse de services commutés ou VoIP dépendants de l'accès. TELUS a également déclaré qu'il serait injuste d'empêcher les fournisseurs de services concurrents d'offrir des services VoIP indépendants de l'accès.

434. Plusieurs parties ont appuyé le retrait des restrictions. MTS Allstream a fait valoir que les restrictions actuellement imposées à l'égard des services VoIP dans le cas des lignes dégroupées des ESLT fournies aux FSLAN devrait être éliminée. MTS Allstream a déclaré que la restriction ne ferait que limiter artificiellement la concurrence en matière de fourniture de services téléphoniques locaux. AT&T et Microcell ont appuyé cette opinion.

435. L'ACTC, Cogeco, EastLink, Rogers et Shaw ont fait valoir qu'il conviendrait de retirer la restriction relative à la fourniture de services VoIP locaux au moyen de lignes dégroupées louées. Ces parties ont en général fait valoir que les FSLAN qui désiraient offrir des services VoIP devraient s'engager à respecter les obligations des revendeurs de services locaux.

436. Cybersurf a appuyé le retrait de la restriction et a fait valoir qu'il n'était pas dans l'intérêt public d'empêcher un FSI ou un autre concurrent dépendant des services sous-jacents d'une ESLT ou d'une entreprise de câblodistribution de recourir à ces services pour fournir des services VoIP indépendants de l'accès quand d'autres parties qui ne dépendent pas des ESLT peuvent accéder au réseau d'une ESLT dans ce but, et sans son consentement.

437. Primus a fait remarquer que la téléphonie IP n'est pas un service commuté puisqu'il n'utilise pas la partie analogique de la bande de base de la ligne de cuivre. Par conséquent, Primus a appuyé le retrait de la restriction interdisant la fourniture de services téléphoniques, au moyen de lignes louées par les FSLAN, sur la partie analogique de la bande de base de la ligne ou sur le train numérique qui se déplace sur la même ligne à une fréquence supérieure. Primus s'est dit d'avis que sur le plan de la concurrence, le retrait de la restriction favoriserait les nouveaux fournisseurs innovateurs qui ne sont pas des ESL et qui offrent des services VoIP, et faciliterait leur intégration dans le marché, avec leurs propres services et leurs nouveaux groupes de services.

438. Call-Net, MCI Canada et la TWU ont fait valoir que la restriction imposée aux FSLAN pouvait être retirée si ces fournisseurs satisfaisaient à toutes les obligations que le Conseil impose aux ESLC.

439. La majorité des autres participants, y compris FCI Broadband, Pulver, Vonage, Yak, UTC, RipNet, le CADJH, la CCTP, l'Ontario et les Groupes de défense des consommateurs, ont fait valoir qu'aucune restriction relative à la fourniture de services VoIP au moyen de LAN dégroupées ne devrait être imposée. De manière générale, ces parties ont déclaré que le retrait de la restriction favoriserait la concurrence locale et accroîtrait le choix offert aux consommateurs. Les Groupes de défense des consommateurs ont fait valoir qu'étant donné qu'une grande proportion de consommateurs accèdent à des SI à large bande au moyen de connexions LAN, toute restriction imposée au trafic VoIP au moyen des LAN aurait l'effet pervers de réduire la concurrence dans le marché de la téléphonie IP.

Analyse et conclusions du Conseil

440. Comme la présente décision l'a clairement établi précédemment, le Conseil désapprouve la position des Compagnies et de Bell West selon laquelle les services VoIP ne sont pas des services téléphoniques locaux commutés. Le Conseil fait remarquer que l'utilisation du terme « commuté » ne se limite pas à « la commutation de circuit » et qu'il peut signifier également la « commutation par paquets ». Par conséquent, de l'avis du Conseil, la restriction qui est faite dans l'ordonnance 2000-983 interdit l'offre de tout service VoIP local au moyen des installations en question.

441. Le Conseil souligne la position de TELUS selon laquelle la restriction devrait être conservée afin d'empêcher l'offre de services VoIP dépendants de l'accès, mais pas la fourniture de services VoIP indépendants de l'accès au moyen d'une LAN.

442. Le Conseil estime qu'imposer une règle empêchant les fournisseurs de services VoIP locaux d'offrir des services dépendants de l'accès serait non seulement difficile à mettre en application, mais constituerait une restriction artificielle et inadéquate dans le marché.

443. En ce qui concerne l'affirmation de TELUS selon laquelle le retrait de la restriction minerait la concurrence fondée sur les installations, le Conseil estime que permettre aux revendeurs d'offrir des services téléphoniques au moyen de LAN favoriserait encore davantage la concurrence dans le marché des services locaux. À cet égard, le Conseil fait remarquer que dans la décision 97-8, il a exprimé l'opinion que la revente de services de télécommunication pourrait favoriser le développement d'un marché concurrentiel tout en donnant aux concurrents le temps de construire leurs propres installations. Le Conseil est d'avis que si les FSLAN étaient autorisées à utiliser les services en question pour fournir des services vocaux, ils auraient l'occasion de s'établir une clientèle, ce qui leur permettrait alors d'investir progressivement dans l'équipement connexe, conformément à l'objectif du Conseil en faveur de l'intensification de la compétitivité.

444. Le Conseil est d'avis que le retrait de la restriction éliminerait les distorsions du marché qui découlent du fait qu'il est interdit aux FSLAN d'offrir des services VoIP au moyen de LAN, ni des groupes de services. Le Conseil estime que le marché concurrentiel qui en résultera favorisera l'innovation et les investissements et permettra d'accroître le nombre de fournisseurs de services locaux auquel les consommateurs ont accès.

445. Le Conseil désapprouve les affirmations de Call-Net, de MCI Canada et de la TWU selon lesquelles les FSLAN qui désirent offrir des services VoIP devraient être assujettis aux mêmes obligations que les ESLC. Selon le Conseil, le retrait de la restriction permettrait aux FSLAN d'accéder à des tarifs applicables aux lignes dégroupées, aux liaisons de raccordement et à la co-implantation pour offrir des services VoIP, mais les FSLAN n'obtiendraient pas les autres avantages, tels l'accès aux numéros ou aux subventions, dont les ESLC bénéficient actuellement. Par conséquent, le Conseil estime qu'il n'est pas nécessaire d'imposer aux FSLAN qui offrent des services VoIP d'autres obligations auxquelles doivent satisfaire les ESLC.

446. Par conséquent, le Conseil modifie la restriction contenue dans l'ordonnance 2000-983 de manière à permettre maintenant aux FSLAN qui ne sont pas ESLC et qui recourent à des lignes dégroupées, à des liaisons de raccordement et à la co-implantation auprès d'ESLT, de fournir des services VoIP, en plus du SI de détail. Le Conseil ordonne aux ESLT de publier, dans les 20 jours suivant la date de la présente décision, des tarifs révisés afin de retirer la restriction actuelle de manière à permettre aux FSLAN qui ne sont pas des ESLC et qui se servent de lignes dégroupées, de liaisons de raccordement et de la co-implantation de fournir des services VoIP, en plus du SI de détail.

447. En ce qui concerne la proposition de Primus visant à retirer la restriction à l'égard de la fourniture de services téléphoniques au moyen de la partie analogique de la bande de base des lignes louées par les FSLAN, le Conseil estime que cette question déborde la cadre de la présente instance. De l'avis du Conseil, seule la transmission numérique de services téléphoniques IP au moyen de la fréquence supérieure de la ligne fait l'objet d'un examen dans la présente instance.

Condition imposée aux fournisseurs d'accès
Historique

448. Yak a fait valoir que le Conseil devrait prendre des mesures particulières pour empêcher que les ESLT et les entreprises de câblodistribution se livrent à des pratiques anticoncurrentielles à titre de fournisseurs d'accès Internet sous-jacent, en imposant une condition d'accès aux services VoIP conformément à l'article 24 de la Loi. Selon Yak, une telle condition viserait à garantir que les consommateurs ont accès aux fournisseurs de services VoIP de leur choix, suivant des modalités et des conditions raisonnables et non discriminatoires.

449. Yak a fait valoir que la condition d'accès aux services VoIP interdirait ce qui suit :

Positions des parties

450. Les Compagnies, Bell West et Xit ont fait valoir qu'il n'était ni nécessaire ni approprié que le Conseil impose une condition d'accès aux ESLT et aux entreprises de câblodistribution, ou à tout autre fournisseur de services d'accès à large bande. Étant donné que les services VoIP et les services d'accès sous-jacents sont fournis dans un environnement concurrentiel, les Compagnies estiment que les conditions du marché et la loi sur la concurrence empêcheraient toute pratique anticoncurrentielle de la part des fournisseurs de services à large bande. TELUS et l'ACTC ont exprimé des opinions semblables.

451. Les fournisseurs de services concurrents et la plupart des autres parties ont appuyé la condition d'accès proposée par Yak.

Restrictions contractuelles

452. Yak a fait valoir que de nombreux éléments de preuve confirmaient la valeur d'une condition interdisant aux ESLT et aux entreprises de câblodistribution de profiter de leur accès à large bande pour empêcher des clients d'utiliser le fournisseur de services VoIP de leur choix. Yak a donné comme exemple le cas de TELUS, qui impose au client de son service interurbain une disposition contractuelle interdisant au client d'utiliser un service de contournement, disposition que la compagnie met en application en bloquant les appels logés aux téléphonistes du service de contournement.

453. La majorité des parties ont fait valoir en général qu'un fournisseur de services à large bande ne devrait pas empêcher ses clients du service à large bande de faire affaires avec le fournisseur de services de leur choix.

454. AT&T a appuyé la proposition de Yak et a déclaré que le Conseil devrait interdire aux propriétaires de réseau qui fournissent l'accès à large bande d'empêcher l'accès au contenu Internet d'un autre fournisseur d'applications, sauf si cet accès menace l'intégrité du réseau ou si la loi l'exige.

455. Call-Net a fait valoir qu'il ne conviendrait pas qu'un fournisseur de services sous-jacents limite l'accès au fournisseur de services VoIP choisi par l'abonné lorsque cet accès est fourni au moyen de l'Internet public.

456. La CCTP a fait valoir que dans les marchés géographiques qui comptent au plus deux fournisseurs d'accès Internet haute vitesse, le Conseil devrait interdire que ces fournisseurs utilisent des clauses contractuelles ou des procédés techniques pour bloquer l'accès des clients à un fournisseur de services VoIP indépendant.

457. L'ACTC a convenu que les ESL et les FSI ne devraient ni s'ingérer dans le choix du fournisseur de services VoIP d'un utilisateur d'un service à large bande, ni s'inquiéter de l'utilisation convenable d'un service à large bande par un consommateur, mais que tout problème éventuel pourrait être résolu conformément aux règles du Conseil.

Dégradation du service

458. Yak a fait valoir que même si aucune partie n'a pu citer d'exemples de dégradations qui auraient été causées intentionnellement, il est possible, sur le plan technique, de causer une dégradation du service. Or, compte tenu de cette réalité et du fait que les titulaires ont eu traditionnellement un comportement anticoncurrentiel, Yak a ajouté que le Conseil devrait prévenir de telles pratiques dans la condition d'accès aux services VoIP.

459. Primus a demandé que le Conseil établisse aux termes de l'article 24 une nouvelle condition de service qui interdirait expressément à toutes les entreprises canadiennes de causer intentionnellement une dégradation du service offert par un concurrent en rejetant des paquets. Primus a fait valoir qu'en tant que revendeur qui dépend fortement des réseaux sous-jacents de ses fournisseurs de services, il a, dans le contexte des services de gros offerts par les ESLT, des inquiétudes concernant la priorisation des paquets et les risques de pertes des paquets, que ces situations soient intentionnelles ou non. Malgré le fait qu'elle ne pouvait fournir une preuve concrète de cas de rejets intentionnels de paquets par les entreprises, Primus a fait valoir que grâce aux changements technologiques dans le domaine des télécommunications, il serait facile pour les entreprises d'identifier des paquets voix et, au moyen d'un procédé appelé « inspection approfondie de paquets », de modifier la qualité de transmission téléphonique des services offerts par les concurrents.

460. Primus a fait remarquer qu'en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi, la compagnie pouvait présenter une preuve contre une entreprise et réclamer un redressement auprès du Conseil. Toutefois, selon la compagnie, le principal inconvénient de cette approche était que sur le plan de la concurrence, le préjudice serait déjà causé, et ce, tout au long du processus de demande.

461. Les Compagnies ont déclaré qu'elles ne bloqueraient les paquets de données téléphoniques IP que sur réception de l'ordonnance d'une cour ou d'une autorité compétente, ou si le trafic nuisait à l'utilisation du service par les abonnés, par exemple dans le cas des pourriels, de la propagation de virus ou d'autre trafic nuisible. L'ACTC, Cogeco, EastLink et Shaw ont exprimé des opinions semblables.

462. TELUS a offert trois raisons pour lesquelles le Conseil n'a pas besoin d'imposer la condition d'accès en question. Premièrement, TELUS a fait valoir que dans ses ordonnances d'abstention de réglementation des services Internet de détail, le Conseil a maintenu l'interdiction prévue au paragraphe 27(2) de la Loi sur la discrimination injuste. Selon TELUS, cette interdiction s'applique à la dégradation délibérée de la qualité d'un service VoIP indépendant de l'accès. Deuxièmement, TELUS a fait valoir qu'aucune partie n'avait présenté de preuve liée au risque que les problèmes soulevés surviennent un jour en Amérique du Nord. Selon TELUS, si de tels problèmes devaient survenir un jour, ils devront être réglés à ce moment-là. Troisièmement, TELUS a fait valoir qu'elle s'était engagée à ne pas dégrader délibérément le service offert aux utilisateurs finals d'un service VoIP indépendant de l'accès.

463. L'ACTC a fait valoir qu'actuellement, ses membres n'empêchaient, n'altéraient ou ne limitaient d'aucune façon, et n'avaient pas l'intention de le faire, la capacité d'un fournisseur de services VoIP de fournir des services aux clients du SI haute vitesse de détail d'une entreprise de câblodistribution. L'ACTC a fait remarquer que ni Yak ni un autre fournisseur de services VoIP indépendant de l'accès n'avaient présenté de preuve selon laquelle une entreprise de câblodistribution avait perturbé leurs services VoIP ou les services à large bande qu'utilisent leurs clients.

464. QMI et Xit ont également fait valoir qu'il n'était pas nécessaire que le Conseil impose une condition d'accès aux fournisseurs de services d'accès à large bande.

465. Nortel a fait valoir que sur le plan technique, il était possible qu'un fournisseur d'accès dégrade le trafic d'un concurrent. Toutefois, la compagnie a ajouté qu'une telle pratique causerait également une dégradation du trafic des clients de ce fournisseur. Par conséquent, les fournisseurs d'accès à large bande n'ont aucun intérêt à recourir à une technologie permettant de dégrader des paquets de données.

Qualité de service équivalente

466. Yak a suggéré que toute amélioration de la qualité du service apportée par les ESLT et les entreprises de câblodistribution à titre de fournisseurs d'accès Internet sous-jacent, telle la priorisation des paquets, devrait également être offerte à tous les fournisseurs de services VoIP, sur une base dégroupée. Yak a fait valoir que le Conseil ne pouvait pas espérer un résultat heureux sur le plan de la concurrence si les fournisseurs dominants des services à large bande étaient en mesure de s'accorder un traitement préférentiel en se servant de leurs réseaux gérés. Yak a également fait valoir que sur le plan technique, rien n'empêchait que les paquets voix d'un fournisseur de services VoIP concurrent soient transmis sur la même route que celle qu'utilise l'ESLT ou l'entreprise de câblodistribution.

467. Les Compagnies ont fait valoir que les autres fournisseurs de services VoIP pourraient offrir la même qualité de service que les Compagnies s'ils se conformaient aux mêmes normes que les Compagnies. En ce qui concerne le trafic associé aux services VoIP indépendants de l'accès, TELUS a déclaré douter qu'il soit possible, sur le plan technique, de prioriser la transmission de données de ses propres services VoIP sans le faire pour les services d'un concurrent.

468. L'ACTC a fait valoir que ses membres offraient une qualité de service identique à tous les clients, quel que soit le niveau de SI haute vitesse de détail auquel ils sont abonnés, mais elle a soutenu qu'aucune politique n'obligeait les entreprises de câblodistribution à mettre à la disposition de tiers l'accès à la fonctionnalité supplémentaire du service de gestion de réseau. Elle a également déclaré qu'imposer l'accès aux services de gestion de réseau des entreprises de câblodistribution serait contraire au cadre réglementaire du Conseil, lequel ne prescrit pas le dégroupement des installations des ESLC. L'ACTC a ajouté que le fait d'imposer un tel accès dissuaderait les entreprises de câblodistribution d'apporter des améliorations et des innovations technologiques dans le contexte du déploiement de services de téléphonie IP, ce qui est contraire aux objectifs énoncés dans la Loi.

469. La CCTP désapprouvait cet élément de la proposition de Yak. Selon elle, les fonctions comme la priorisation de paquets s'exécutent à l'aide de logiciels et c'est exactement ce type d'innovation dynamique que le Conseil devrait favoriser et protéger dans un cadre de réglementation destiné aux services VoIP. La CCTP a également déclaré qu'une telle condition d'accès nuirait aux innovations apportées aux services dont profitent les clients.

470. Rogers a fait valoir qu'un service de téléphonie Internet n'offrirait peut-être pas la même qualité de service qu'un service IP fourni au moyen d'un réseau géré. Rogers a déclaré que si la qualité de service était assurée lorsque les paquets voix sont transmis sur le réseau de câblodistribution mais pas sur l'Internet public, la communication téléphonique dans son ensemble risque de ne pas être grandement améliorée. Par conséquent, Rogers s'est opposée à la proposition de Yak dans la mesure où elle empêcherait les entreprises de câblodistribution de fournir des services téléphoniques gérés qui offrent une qualité de service supérieure à celle des services de téléphonie Internet.

471. MTS Allstream a fait valoir que le Conseil devrait ordonner le dégroupement de la fonction liée à la qualité de transmission téléphonique. MTS Allstream a également déclaré qu'en ce qui a trait aux exigences relatives au dégroupement, le Conseil devrait traiter les entreprises de câblodistribution et les ESLT de la même manière.

472. Primus a fait valoir que si les entreprises de câblodistribution ou les ESLT pouvaient offrir à leurs clients une fonction qui garantisse la qualité du traitement du trafic VoIP, elles devraient se voir obliger de dégrouper cette fonctionnalité à un coût raisonnable pour les concurrents. En ce qui concerne les questions liées à la qualité de service, Primus a fait valoir que si le fournisseur du service réseau sous-jacent mettait en place une fonctionnalité supplémentaire qui améliorerait la transmission des paquets voix, et ce, sur un réseau géré ou non géré, cette fonctionnalité « favorable » devrait être offerte à tous les concurrents susceptibles d'offrir ces services sur de tels réseaux.

473. Microcell a fait valoir que les ESLT devraient être tenues d'offrir aux autres fournisseurs, sur une base dégroupée et non discriminatoire, les services dont ils ont besoin pour offrir des services VoIP concurrents. Par exemple, si une ESLT rend disponibles ses propres installations à large bande avec priorisation des paquets voix, les mêmes fonctions devraient être offertes à tous les autres fournisseurs de services. Toutefois, Microcell est également d'avis que les entreprises de câblodistribution (et les entreprises autres que les ESLT) ne détiennent pas actuellement une position dominante dans le marché des services locaux et que, par conséquent, il n'est pas nécessaire d'exiger le même degré de surveillance réglementaire que dans le cas des ESLT.

Analyse et conclusions du Conseil

474. Le Conseil fait remarquer qu'aucune des parties ne s'est opposée à l'idée que les clients puissent faire affaires avec le fournisseur de services VoIP de leur choix, indépendamment de leur fournisseur de service d'accès sous-jacent.

475. Le Conseil estime qu'il n'est pas nécessaire d'imposer les restrictions contractuelles proposées aux fournisseurs de services à large bande. Le Conseil estime qu'il peut, au besoin, se fonder sur le paragraphe 27(2) la Loi pour interdire à une entreprise canadienne d'empêcher ses clients du service à large bande de faire affaires avec le fournisseur de services de leur choix. Par conséquent, si de tels problèmes survenaient, le Conseil les traiterait au cas par cas. Le Conseil devrait pouvoir régler rapidement de tels litiges entre concurrents grâce aux procédures accélérées.

476. En ce qui concerne la dégradation du service, le Conseil note les affirmations de Primus et de Yak selon lesquelles la technologie actuelle permettrait aux fournisseurs d'accès à large bande de dégrader les services VoIP des concurrents, mais il fait remarquer qu'aucune partie, y compris Primus et Yak, n'a présenté d'éléments de preuve révélant que des fournisseurs de services auraient déjà dégradé des services à large bande ou rejeté intentionnellement des paquets.

477. Le Conseil a également pris en considération les affirmations de Nortel selon lesquelles il est possible, en principe, de dégrader les services VoIP des concurrents, mais que le fournisseur d'accès qui agirait de la sorte risquerait également de détériorer le trafic de ses propres clients. Le Conseil estime qu'étant donné l'existence d'autres sources d'accès à la large bande, il est possible de se fier aux forces du marché pour contrer de tels agissements.

478. De plus, même si un tel problème survenait, le Conseil estime qu'il pourrait, au besoin, se fonder sur le paragraphe 27(2) de la Loipour interdire aux entreprises canadiennes de dégrader intentionnellement le trafic. Selon le Conseil, le cadre réglementaire actuel permet de contrer de tels comportements anticoncurrentiels de la part d'un fournisseur de service à large bande. Comme dans le cas susmentionné, le Conseil devrait pouvoir régler rapidement de tels litiges entre concurrents grâce aux procédures accélérées.

479. En ce qui concerne l'exigence de la qualité de service équivalente proposée, le Conseil fait remarquer que les fournisseurs de services à large bande ont fait valoir qu'en matière de priorité dans la transmission des paquets, ils offrent une qualité de service identique à tous les fournisseurs de services VoIP abonnés à un même service haute vitesse. La demande visait à garantir que toutes les améliorations que les fournisseurs de services à large bande apportent à la qualité de leurs propres services VoIP sont également offertes aux concurrents, à un coût raisonnable, sur une base dégroupée.

480. Le Conseil estime que les fournisseurs de services VoIP devraient être encouragés à concevoir leur propres améliorations et fonctions de qualité de service, qui ont avantage à être fournies dans le cadre de la concurrence fondée sur les installations ou par un fournisseur de services abonné à l'AIT ou à une ligne dégroupée. Le Conseil estime qu'ordonner le dégroupement des améliorations à la qualité de service qui sont offertes par les fournisseurs de services à large bande ferait en sorte que les concurrents seraient moins intéressés à investir dans leurs propres services VoIP gérés. Le Conseil est également d'avis que les FSI, les FSLAN et les ESLC sont capables d'offrir leurs propres formes de services VoIP gérés en se servant de l'AIT, de LAN offertes au moyen de lignes dégroupées, du SI haute vitesse de gros ou de la concurrence fondée sur les installations.

481.À cet égard, le Conseil convient avec la CCTP que les fournisseurs de services devraient améliorer eux-mêmes les fonctions offertes et la qualité de service de manière à favoriser l'innovation et la concurrence, et à accroître le choix pour les consommateurs.

482. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu'il ne conviendrait pas d'imposer à tous les fournisseurs d'accès à large bande l'obligation générale de dégrouper les fonctions liées à la qualité de service qu'ils offrent actuellement à leurs propres clients.

483. Par conséquent, le Conseil rejette la demande relative à l'imposition d'une condition d'accès.

Applicabilité des décisions d'abstention actuelles

484. Tel qu'il est indiqué précédemment, dans l'avis 2004-2, le Conseil s'est dit d'avis préliminaire que les fournisseurs de services VoIP devraient être assujettis au cadre de réglementation déjà en vigueur, ce qui inclut les décisions d'abstention du Conseil. Ainsi, les ESLT, les ESLC, les entreprises canadiennes non dominantes et les fournisseurs de services sans fil mobiles ne seraient pas tenus de déposer de tarifs à l'égard des services VoIP qui sont visés par les décisions d'abstention existantes. Or, selon cet avis préliminaire, les ESLT n'auraient pas à déposer de tarifs en ce qui concerne, par exemple, les services interurbains sur IP.

485. Bon nombre des parties se rallient aux avis préliminaires du Conseil en général, mais elles n'ont formulé aucune observation concernant précisément la question abordée au paragraphe précédent.

486. Par conséquent, le Conseil établit que la fourniture des services VoIP est assujettie aux décisions d'abstention pertinentes actuellement adoptées.

487. Les opinions minoritaires des conseillères Wylie et Noël sont jointes à la présente.

Secrétaire général

Ce document est disponible, sur demande, en média substitut, et peut également être consulté en version PDF ou en HTML sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca

Notes de bas de page

[1] SaskTel et Télébec ont chacune présenté des observations supplémentaires en plus de celles déposées par les Compagnies.

[2] Les observations en réplique de Microcell ont été déposées par Microcell Telecommunications Inc. au nom de Microcell Solutions Inc. et Inukshuk Internet Inc.

[3] Dans la Loi, « service de télécommunication » s'entend d'un « service fourni au moyen d'installations de télécommunication, y compris la fourniture -- notamment par vente ou location --, même partielle, de celles-ci ou de matériel connexe. » Par ailleurs, dans la Loi, « installation de télécommunication » désigne « Installation, appareils ou toute autre chose servant ou pouvant servir à la télécommunication ou à toute opération qui y est directement liée, y compris les installations de transmission. »

[4] Approuvé provisoirement dans l'ordonnance Service gestion de téléphonie IP, Ordonnance de télécom CRTC 2004-256, 30 juillet 2004.

[5] Approuvé provisoirement dans l'ordonnance TELUS Communications Inc. - Service IP-Évolution, Ordonnance de télécom CRTC 2004-445, 23 décembre 2004.

[6] Le Conseil a enclenché récemment une instance publique avec la publication de l'avis Abstention de la réglementation des services locaux, Avis public de télécom CRTC 2005-2, 28 avril 2005, dans lequel il sollicite des observations sur le cadre qu'il conviendrait d'adopter à l'égard de l'abstention de la réglementation des services locaux.

[7] Rapport de 2004 sur l'état de concurrence, page 108.

Opinion minoritaire de la conseillère et vice-présidente à la radiodiffusion, Andrée Wylie

En ce qui concerne la fourniture d'un service de télécommunication, les critères législatifs sur lesquels le Conseil peut s'appuyer pour s'abstenir d'exercer certains pouvoirs ou certaines fonctions que lui confère la Loi sur les télécommunications (la Loi) sont énoncés expressément et uniquement à l'article 34. Ces critères se résument comme suit :

  1. l'abstention doit être compatible avec les objectifs de la politique canadienne de télécommunication, qui est énoncée à l'article 7 (paragraphe 34(1));
  2. l'instauration de la concurrence dans le marché du service sur protocole Internet (service VoIP) suffit à protéger les intérêts des utilisateurs de ce service (paragraphe 34(2));
  3. l'abstention n'aurait vraisemblablement pas pour effet de compromettre indûment la création ou le maintien d'un marché concurrentiel pour la fourniture du service VoIP (paragraphe 34(3)).

Contrairement à la majorité, je ne peux admettre que la mise en vigueur de ces critères dans le contexte de la fourniture du service VoIP exige qu'un service VoIP local fourni par une entreprise de services locaux titulaire (ESLT), dans le territoire où elle offre le service téléphonique local filaire traditionnel, soit assujetti à l'approbation préalable d'un tarif, que le service soit offert sur une base autonome ou dans un groupe de services, alors que le service VoIP fourni par un concurrent ne serait pas assujetti à cette obligation.

Tout bien pesé, j'aurais exercé le pouvoir discrétionnaire inhérent à l'article 34 et j'aurais opté pour que le Conseil s'abstienne d'exiger l'approbation préalable de tarifs à l'égard de tout service VoIP, quel que soit le fournisseur. Au lieu d'appuyer l'imposition de contraintes tarifaires statiques à certains fournisseurs du service VoIP, mais pas à d'autres, j'aurais préconisé le libre jeu du marché, comme il est prévu à l'alinéa 7f) de la Loi, afin de créer une conjoncture dynamique où, conformément à bon nombre des objectifs prévus dans la politique formulée à l'article 7, autant de Canadiens que possible, dans toutes les régions du pays, auraient accès au service VoIP et à des services connexes à la fois sûrs, abordables et de qualité (alinéa 7b)); l'efficacité et la compétitivité des télécommunications canadiennes s'accroîtraient (alinéa 7c)); l'efficacité de la réglementation serait assurée lorsqu'elle s'impose (alinéa 7f)); la recherche et le développement au Canada dans le domaine des télécommunications ainsi que l'innovation en ce qui touche la fourniture de services dans ce domaine seraient stimulés (alinéa 7g)); et les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunication seraient satisfaites (alinéa 7h)).

À mon avis, l'organisme de réglementation des télécommunications canadiennes servirait mieux l'intérêt public canadien et il contribuerait plus à l'atteinte des objectifs stratégiques prévus à l'article 7 de la Loi si, pour la fourniture du service VoIP, il favorisait un contexte réellement concurrentiel qui inciterait tous les fournisseurs du service VoIP à injecter des fonds et à innover pour concevoir d'autres applications utilisant le protocole Internet et pour ainsi atténuer, voire surmonter, les obstacles ou les contraintes qui existent encore concernant la fourniture du service VoIP en émergence. Outre le pouvoir d'exiger des tarifs de détail, qui est un exercice complexe et qui nécessite de nombreuses ressources, la Loi confère au Conseil d'autres pouvoirs qui lui permettent, dans le contexte du service VoIP, d'empêcher un fournisseur de se livrer à des pratiques abusives, d'exiger des garanties de base concernant la protection de la vie privée et d'assurer une égalité d'accès aux numéros de téléphone, à l'infrastructure sous-jacente et à l'interconnexion au réseau de téléphone public commuté (RTPC).

La décision de la majorité voulant que le Conseil ne s'abstienne pas d'exiger que le service VoIP local fourni par les ESLT soit assujetti à l'approbation préalable d'un tarif repose sur le fait que, jusqu'à présent, le marché canadien connaît une faible concurrence dans le secteur du service téléphonique local filaire traditionnel à commutation de circuits, communément appelé le service local de base (SLB), et ce, malgré le cadre de réglementation que le Conseil a établi à l'égard de la concurrence fondée sur les installations, il y a huit ans, dans la décision Concurrence locale, Décision Télécom CRTC 97-8, 1er mai 1997, et pendant qu'il maintenait l'imposition de tarifs pour le SLB fourni par les ESLT.

La décision de la majorité repose alors en grande partie sur la conclusion voulant que, pour favoriser une concurrence fondée sur les installations dans le marché de la téléphonie locale, le service VoIP qui utilise des numéros de téléphone établis conformément au Plan de numérotation nord-américain et qui offre un accès universel en provenance et/ou à destination du RTPC, comme dans le cas du SLB, doit être réglementé comme s'il s'agissait du SLB fourni par les ESLT. La décision s'appuie également sur un principe de neutralité technologique selon lequel, dans la mesure où un service VoIP a des caractéristiques fonctionnelles du SLB, les ESLT ne peuvent le fournir que si les tarifs applicables ont d'abord été approuvés, comme lorsqu'elles fournissent le SLB, et ce même si la technologie utilisée pour fournir le service VoIP, d'une part ne possède pas certaines des caractéristiques du SLB et, de l'autre, comporte des fonctions et des capacités innovatrices qui permettent d'élargir les choix offerts aux consommateurs que la technologie du SLB ne comporte pas.

Je remarque que si les critères sur lesquels la majorité a fondé les deux piliers de son analyse avaient été appliqués à la fourniture des services téléphoniques sans fil par les affiliées des ESLT, des tarifs auraient été imposés dès le début, car la téléphonie sans fil les remplit tous. Pourtant, à l'époque, le Conseil n'a pas tiré cette conclusion et il a tenu compte des caractéristiques propres à la téléphonie sans fil, ainsi que des circonstances particulières qui ont entouré son introduction au Canada. Il a estimé à juste titre que pour protéger les consommateurs et stimuler le développement d'un marché concurrentiel, il n'était pas nécessaire d'imposer l'approbation préalable de tarifs.

Je ne prétends pas que les caractéristiques fonctionnelles du service VoIP sont identiques à celles de la téléphonie sans fil, ou que les circonstances dans lesquelles le service VoIP est introduit se comparent à celles dans lesquelles la téléphonie sans fil l'a été. J'estime toutefois que dans le cas présent, et dans le contexte des objectifs stratégiques de la Loiet du pouvoir discrétionnaire que lui confère l'article 34, le Conseil, en décidant de ne pas s'abstenir d'imposer des tarifs à l'égard de la fourniture du service VoIP local par les ESLT, n'a pas suffisamment tenu compte des caractéristiques fonctionnelles spécifiques au service VoIP par rapport à celles du SLB, et de la situation particulière ou de la dynamique concurrentielle qui entourent le lancement du service VoIP au Canada, notamment :

  1. une incertitude quant à la facilité et à la rapidité avec lesquelles, au Canada, le service VoIP se substituera généralement au SLB, au lieu de s'y ajouter comme la téléphonie sans fil, favorisant, dans un environnement vraiment concurrentiel, une croissance évolutive d'applications numériques innovatrices abordables, pour le bénéfice des consommateurs.
  2. la facilité relative avec laquelle les concurrents peuvent entrer dans le marché du VoIP et des services connexes, étant donné que l'entrée ne requiert pas la fourniture d'installations;
  3. le fait que le service VoIP et d'autres applications connexes puissent être configurés et offerts à des prix non réglementés indépendamment de l'utilisation de l'infrastructure au moyen de laquelle ils sont offerts, et qu'ils puissent être offerts par un fournisseur qui utilise l'infrastructure d'un autre;
  4. que les services VoIP se substituent au SLB ou s'y ajoutent, le marché VoIP est convoité par un nombre croissant de concurrents;
  5. la vive concurrence, dans le marché du service VoIP et des applications connexes, que livreront les entreprises de câblodistribution, qui bénéficient
    1. d'une infrastructure à large bande déjà existante et accessible à plus de 90 % des Canadiens,
    2. d'une vaste pénétration de leur infrastructure à large bande pour fournir des services de télévision et/ou d'accès Internet à des prix non réglementés, dans plusieurs grandes villes canadiennes dans plus de 80 % des foyers où leurs services sont disponibles,
    3. de relations de longue date avec les consommateurs, dont elles peuvent tirer profit pour offrir des services VoIP, et
    4. de la capacité d'offrir, de plus en plus, à un seul prix non réglementé, des groupes de services concurrentiels comprenant des services de télévision, d'accès Internet, de téléphonie sans fil et de VoIP.

Opinion minoritaire de la conseillère Andrée Noël

Avec tout le respect dû à l'opinion de mes collègues de la majorité, je ne crois pas que le service de Voix sur Protocole Internet (« Voix sur IP ») soit un substitut au service local de base offert par les entreprises de télécommunications à l'heure actuelle. Il s'agit plutôt, à mon avis, d'un service autonome par rapport à l'accès sous-jacent, c'est-à-dire qu'il peut être offert indépendamment de l'accès Internet à large bande sur lequel il se greffe.

D'autre part, le fait que pour des raisons culturelles, la Voix sur IP utilise le Plan de numérotation nord-américain plutôt que des adresses courriels par exemple, pour acheminer des octets du point A au point B ne transforme pas le service offert en service téléphonique; le service demeure un service Internet dont une des fonctionnalités permet de numériser et d'acheminer par paquets la voix humaine synthétisée. Il s'agit à mon avis d'un service Internet de détail qui ne doit donc pas être réglementé conformément à l'ordonnance Télécom CRTC 99-592.

Par ailleurs, comme le service de Voix sur IP peut être offert sur n'importe quel accès Internet à haute vitesse, que cet accès soit fourni par le fournisseur du service lui-même ou par un fournisseur concurrent, il est, à mon avis, erroné de conclure qu'il s'agisse d'un substitut au service local de base. D'autant plus que si le service de Voix sur IP présente certaines similarités avec le service local de base, l'acheminement de la voix pour ne nommer que celle-là, il s'en distingue à bien des égards. En effet malgré que le taux de pénétration de l'accès Internet haute vitesse soit en hausse constante, c'est encore une minorité de Canadiens qui en dispose. Et si on retranche de cette minorité ceux qui n'y ont accès qu'au travail, on se retrouve avec un nombre de clients résidentiels potentiels encore plus réduit. Pour qu'on puisse raisonnablement concevoir que le service de Voix sur IP soit un substitut au service local de base il faudrait que l'accès à l'Internet haute vitesse soit généralisé. Or ce n'est pas le cas. En fait le service Internet à haute vitesse ne fait même pas partie de l'objectif du service de base établi par le Conseil dans la décision Télécom CRTC 99-16 sur les zones de desserte à coût élevé.

D'autre part, afin de pouvoir bénéficier du service de Voix sur IP à un coût qui pourrait être inférieur aux tarifs en vigueur des ESLT, l'abonné devra d'abord souscrire à un service Internet à haute vitesse non réglementé dont le coût actuel n'est pas, et de loin, inférieur au coût du service téléphonique tarifé. En conséquence, pour la majorité des clients résidentiels potentiels, qui n'ont pas le service Internet à haute vitesse, il serait plus onéreux de convertir leur service téléphonique tarifé actuel en un service de Voix sur IP que de maintenir le statu quo. Quel substitut!

Tant à l'audience que dans leurs interventions écrites, plusieurs intervenantes ont soulevé d'autres failles du service de Voix sur IP notamment au niveau de la sécurité et des services d'urgence. Quoi que le Conseil, dans la décision de télécom CRTC 2005-21 ait exigé des fournisseurs de service de Voix sur IP de mettre en ouvre des solutions provisoires pour offrir des services s'apparentant aux services 9-1-1 et E 9-1-1, dans les 90 jours de la décision, il m'apparaît illusoire de croire, surtout dans le cas du service de nature mobile, qu'on en arrivera, à si court terme, à des solutions valables. À cet égard également le service de Voix sur IP n'est pas un substitut au service local de base. C'est un peu comme comparer un vélo à une voiture automobile : les deux ont des roues et peuvent nous transporter du point A au point B, mais là s'arrête la comparaison.

Et que dire de l'alimentation électrique? L'alimentation électrique échappe totalement au contrôle des entreprises offrant des services de Voix sur IP. Est-ce qu'une pile offrant une autonomie de 6 heures en cas de panne d'électricité offre un niveau de sécurité adéquat quant à la fourniture du service sur une base continue. Pour les résidents du Québec et de l'Est de l'Ontario qui ont connu la tempête de verglas de janvier 1998, c'est un niveau de sécurité bien précaire quand on se rappelle les pannes qui ont duré jusqu'à 36 jours dans certaines régions. Peut-on parler d'un service de substitution ? Je ne le crois pas.

Parce qu'il ne constitue pas un substitut au service local de base et qu'aucune entreprise n'occupe de position dominante dans ce nouveau secteur d'activités, j'en conclus que le Conseil devrait s'abstenir de réglementer les services de Voix sur IP dans le marché résidentiel.

Pour ce qui est du service d'affaires, la concurrence est de plus en plus vive entre les ESLT et les ESLC dans les territoires où la concurrence locale est permise. Comme à l'heure actuelle aucune entreprise de télécommunications n'occupe de position dominante dans la fourniture de services de Voix sur IP pour le marché Affaires étant donné qu'il s'agit de nouveaux services dans leurs premiers stades de développement, je crois que le Conseil devrait également s'abstenir de réglementer.

Si toutefois on pouvait raisonnablement conclure que le service de Voix sur IP est un substitut partiel au service local de base et qu'il n'est pas un service Internet de détail, avant de réglementer ce service uniquement lorsqu'il est offert par des ESLT il faudrait s'interroger sur les critères élaborés par le législateur dans la Loi sur les télécommunications (la «Loi»), permettant au Conseil de s'abstenir de réglementer. Ces critères législatifs sont énumérés de façon expresse à l'article 34 de la Loi et uniquement dans la Loi. À cet égard, je fais mienne et souscris entièrement à l'opinion minoritaire de la vice-présidente à la radiodiffusion, Andrée Wylie.

Pour toutes ces raisons, je considère que le Conseil n'aurait pas dû donner suite à son avis préliminaire et devrait s'abstenir de réglementer les services de Voix sur IP pour tous les fournisseurs, y compris les ESLT.

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