Politique réglementaire de radiodiffusion et de télécom CRTC 2011-191

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Référence au processus : 2010-406

Autres références : 2010-406-1, 2010-406-2

Ottawa, le 18 mars 2011

Le processus de transfert de clients et autres questions connexes relatives à la concurrence

Dans la présente politique réglementaire, le Conseil énonce des mesures qui simplifieront le processus à suivre lorsque des consommateurs souhaitent changer de fournisseur de services de télécommunication ou de radiodiffusion. Ces mesures permettront au nouveau fournisseur de services choisi par le client de résilier au nom de ce dernier les services qu’il reçoit de son fournisseur actuel. Le client pourra tout de même résilier lui-même ses services, s’il le préfère, et pourra continuer de recevoir des offres du fournisseur de services actuel.

De plus, le Conseil estime inutile de modifier les règles existantes sur le câblage intérieur, les normes de qualité de service, les ententes sur l’accès et l’utilisation des disponibilités locales dans le marché de la distribution de radiodiffusion.

Introduction

1.      Une concurrence accrue dans les secteurs de la radiodiffusion et des télécommunications a eu comme résultat d’offrir aux consommateurs l’accès à davantage de choix de services et de fournisseurs de services. Les consommateurs qui se prévalent de ces choix changent souvent de fournisseur de services, et il n’est pas rare que deux fournisseurs collaborent pour coordonner le transfert des installations ou des ressources[1] afin de faciliter la transition des clients d’un fournisseur vers un autre.

2.      Dans le cadre de l’établissement d’une concurrence locale au sein de l’industrie des télécommunications, celle-ci a développé un processus à l’égard du transfert efficace du service d’un client, communément appelé le processus de transfert de clients. En vertu de ce processus, lorsqu’il est nécessaire de coordonner la résiliation et le transfert d’un service d’un fournisseur de services à un autre, le nouveau fournisseur peut obtenir l’autorisation du client de résilier les services de télécommunications actuels en son nom (l’autorisation d’agir).

3.      Au cours des années, l’industrie des télécommunications et de la radiodiffusion a adopté des processus de transfert de clients semblables pour des catégories de services comme le sans fil, l’internet et la radiodiffusion, y compris l’autorisation d’agir au nom du client en faveur du nouveau fournisseur lorsqu’une coordination entre le fournisseur actuel et le nouveau fournisseur est nécessaire. Cependant, dans d’autres cas, le processus de transfert de clients peut être différent.

4.      Dans le contexte de l’augmentation de la convergence des marchés de radiodiffusion et de téléphonie, où les services de communication sont d’ordinaire offerts aux consommateurs dans le cadre de regroupements de service par un seul fournisseur, la possibilité de mettre en œuvre l’autorisation d’agir pour certains transferts de services de clients est remise en question par certains fournisseurs de services, avec pour conséquence que certaines demandes ne son pas traitées ou que des consommateurs sont sujets à des coûts additionnels ou à de la frustration.

5.      Les fournisseurs de services de radiodiffusion et de télécommunications ont de plus mis en place des groupes afin d’identifier des renseignements de nature délicate concernant les consommateurs/concurrents à partir de la fonction vente et mise en marché. Ces groupes sont qualifiés de groupes de service aux entreprises, dans le cas des télécommunications, ou de groupes de service au consommateur, dans le cas de la radiodiffusion (collectivement, les « GSC »). La raison d’être d’un GSC est de permettre à des concurrents d’échanger des renseignements de nature délicate quant à la concurrence lorsque des clients désirent changer de fournisseur de services. Le GSC garantit que les renseignements communiqués ne sont pas transmis au groupe de vente et mise en marché, afin d’éviter que les titulaires bénéficient d’un avantage injuste et ultimement anticoncurrentiel.

Les demandes

6.      Le Conseil a reçu une demande de Bell Aliant Communications régionales, société en commandite, Bell Canada et Bell TV (les compagnies Bell), datée du 27 mai 2010, proposant des modifications au processus de transfert de clients dans les domaines de la radiodiffusion et des télécommunications ainsi que des modifications réglementaires destinées à établir une symétrie entre la réglementation des marchés de la distribution de téléphonie et de radiodiffusion. Les compagnies Bell cherchent un allègement tant en vertu de la Loi sur les télécommunications que de la Loi sur la radiodiffusion. Elles cherchent également un allègement quant à plusieurs autres questions en vertu de la Loi sur la radiodiffusion.

7.      Cette demande fait suite à une demande antérieure de Shaw Communications Inc. (Shaw), reçue le 25 mai 2010, afin que le Conseil examine les obligations relatives au traitement des demandes de résiliation et de transfert de service dans le marché de la distribution de radiodiffusion et qu’il décide s’il existe une obligation des entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) de traiter par l’intermédiaire d’un GSC une demande de résiliation faite par une tierce partie.

8.      Dans l’avis de consultation de radiodiffusion et de télécom 2010-406, le Conseil a sollicité des observations sur les demandes des compagnies Bell et de Shaw et a étendu la portée de l’instance pour y inclure le processus de transfert de clients en matière de services Internet haute vitesse. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion et de télécom 2010-406-2, le Conseil a encore étendu la portée de l’instance pour y inclure le processus de transfert de clients en matière de services sans fil.

9.      Le Conseil a reçu des observations sur les demandes des compagnies Bell et de Shaw de la part d’Access Communications Co-operative Limited, l’Association des Compagnies de téléphone du Québec inc., Bragg Communications Inc., Canadian Cable Systems Alliance Inc., Cogeco Câble Canada inc. (Cogeco), Comwave Telecom Inc., Distributel Communications Limited, Globalive Wireless Management Corp., Mobilicity and Public Mobile Inc., MTS Allstream Inc. (MTS Allstream), Novus Entertainment Inc., Primus Telecommunications Canada Inc., le Centre pour la défense de l’intérêt public, au nom de l’Association des consommateurs du Canada et Canada sans pauvreté (anciennement l’Organisation nationale anti-pauvreté), Quebecor Média inc. (QMI), Rogers Communications inc. (RCI), Saskatchewan Telecommunications (SaskTel), Shaw, Tbay Tel, TekSavvy Solutions Inc., TELUS Communications Company (TELUS) et l’Union des consommateurs. Le dossier complet se trouve sur le site web du Conseil à www.crtc.gc.ca sous « Instances publiques ».

La demande des compagnies Bell

10.  Les compagnies Bell demandent que le Conseil impose, en vertu de l’article 24 de la Loi sur les télécommunications, une condition à l’égard de la fourniture des services locaux de base de résidence et d’affaires et des services interurbains offerts par les entreprises canadiennes et par les fournisseurs de services de télécommunication (FST). Cette condition exigerait que, dans le cas où une entreprise, ou un FST offrant des services par voie de location/revente des services ou des installations d’une entreprise, désire offrir ce type de services à un client, la résiliation d’un service existant ne puisse se faire que par le client lui-même et non par le nouveau fournisseur de services.

11.  À défaut, les compagnies Bell demandent qu’à tout le moins un fournisseur de services puisse résilier des services existants seulement dans le cas d’un nouveau client dans le marché de la distribution de radiodiffusion. Elles font cependant valoir qu’il est préférable de modifier le processus de transfert de clients également en matière de téléphonie.

12.  Les compagnies Bell demandent également au Conseil :

Le processus de transfert de clients devrait-il être symétrique pour tous les services de télécommunication et de distribution de radiodiffusion?

Position des compagnies Bell

13.  À l’appui de leur demande, les compagnies Bell allèguent que la gouverneur générale en conseil, dans le Décret donnant des instructions au CRTC relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication, DORS 2006-2534, 14 décembre 2006 (les Instructions relatives à la politique), exige que les mesures de nature non économique, comme le processus de transfert de clients, soient appliquées de manière symétrique. Elles avancent que, selon ce principe, la réglementation devrait être symétrique dans les marchés convergents de la téléphonie et de la distribution de radiodiffusion.

14.  Les compagnies Bell notent également que les services et les marchés sont maintenant convergents et que les fournisseurs de services se fient de plus en plus aux regroupements de services pour attirer les clients. Elles suggèrent que la réglementation actuelle, par conséquent, agit à l’encontre de la convergence et la mine parce qu’elle impose des règles sur le transfert de clients différentes en télécommunication et en distribution de radiodiffusion. Elles font valoir que cette situation est source de confusion et d’inconvénients pour les clients, bon nombre d’entre eux ignorant que des obligations réglementaires et des processus de résiliation différents s’appliquent à leurs divers services de télécommunication et de radiodiffusion.

15.  Les compagnies Bell estiment qu’un processus de résiliation de service téléphonique selon lequel seul le client lui-même pourrait s’en prévaloir ferait en sorte que ce dernier prendrait une décision beaucoup plus éclairée que le permettrait un statu quo. Selon elles, les consommateurs pourraient ainsi connaître les offres prévues pour encourager leur fidélité et les renseignements quant aux frais de résiliation anticipée, de l’information qu’ils méconnaissent souvent en vertu du présent régime réglementaire. Les compagnies Bell ajoutent que leur proposition donnerait l’occasion au fournisseur de services actuel de réagir et de corriger toute information trompeuse véhiculée auprès d’un client qui transfère son service par le nouveau fournisseur de services.

Positions des autres parties

16.  RCI appuie la proposition des compagnies Bell selon laquelle le processus de résiliation d’un service téléphonique devrait appartenir exclusivement au client, mais est en désaccord avec la solution de rechange proposée d’adopter de nouvelles règles de transfert de clients pour le marché de la distribution de radiodiffusion. RCI fait valoir que, contrairement à ce que les compagnies Bell en disent, il ne s’agit pas d’un problème de symétrie, les règles gouvernant le transfert de clients étant déjà symétriques dans les domaines des télécommunications et de la radiodiffusion. RCI note que, lorsqu’un service ou une installation doit être transféré d’une manière coordonnée, on a créé, dans le cas où le nouveau fournisseur a le droit d’agir au nom du client, la notion de représentation ou de mandat tant en matière de télécommunication que de radiodiffusion. RCI ajoute cependant que, lorsqu’un transfert n’exige pas de coordination, il n’existe aucune relation de type représentant ou mandataire en télécommunication et en radiodiffusion.

17.  D’autres parties soit favorisent le statu quo, soit sont en faveur d’ajouter l’autorisation d’agir à l’égard de tous les services de télécommunication et de radiodiffusion. Celles qui préfèrent le statu quo notent que les Instructions relatives à la politique n’exigent pas la symétrie réglementaire entre le marché des télécommunications et celui de la distribution de radiodiffusion. Elles ajoutent que la concurrence est devenue vive dans les domaines de la radiodiffusion, du sans fil et d’internet sans qu’il ait été nécessaire d’imposer l’autorisation d’agir. Elles font aussi remarquer que, dans le cas des services internet et de radiodiffusion, la fourniture d’une pièce d’équipement du fournisseur de services dans les locaux du client rend moins efficace le fait de permettre au nouveau fournisseur de résilier l’ancien service au nom du client.

18.  Les parties favorables à l’ajout de l’autorisation d’agir à l’égard de tous les services de télécommunication et de radiodiffusion allèguent que, compte tenu de la popularité croissante des regroupements de services, il est logique d’adopter une politique simple, efficace et normalisée sur les transferts de clients, et ce, à l’égard de tous les services. Selon elles, appliquer les mêmes règles à tous les services favorisera le choix des consommateurs et rendra leur expérience plus positive. Elles allèguent aussi que, sans l’autorisation d’agir, les fournisseurs en place pourraient refuser les résiliations demandées par des tiers, ce qui causerait de la frustration chez les clients et nuirait à la concurrence.

Analyse et décisions du Conseil

19.  Le Conseil note que l’obligation prévue dans les Instructions relatives à la politique exigeant que les mesures réglementaires soient appliquées de manière symétrique ne s’applique pas en matière de radiodiffusion, mais se limite plutôt au traitement des services de télécommunication. Le Conseil estime néanmoins que la symétrie réglementaire en matière de transfert de clients serait dans le meilleur intérêt des consommateurs, compte tenu de la convergence croissante et de la tendance au regroupement des services, et aiderait à la poursuite des objectifs de la Loi sur la radiodiffusion.

20.  Le Conseil partage l’avis de RCI selon qui les règles sur le transfert de clients sont déjà symétriques en matière de télécommunication et de radiodiffusion. Le Conseil note qu’un nouveau fournisseur de services peut résilier des services existants au nom d’un client dans le domaine des télécommunications et dans celui de la radiodiffusion, mais uniquement lorsqu’il faut coordonner les opérations entre le nouveau fournisseur et le fournisseur actuel[4]. Dans le cas où la coordination est inutile, il n’existe actuellement aucune obligation réglementaire pour un fournisseur de services existant d’accepter une demande de résiliation présentée au nom du client par un nouveau fournisseur.

21.  Le Conseil croit cependant que, dans certaines circonstances, les règles actuelles peuvent créer de la confusion et causer des inconvénients aux clients. Par exemple, un nouveau fournisseur de services pourrait lui-même résilier le service local de téléphone ou de sans fil d’un client, mais si aucune coordination n’est nécessaire, le client lui-même devrait résilier ses services d’EDR ou d’Internet.

22.  Dans la décision de télécom 2009-538, le Conseil a refusé une demande de Bell Aliant Communications régionales, société en commandite et Bell Canada visant à retirer aux FST le droit d’annuler, aux noms de leurs clients, leur abonnement aux services local et interurbain auprès de leur FST actuel pendant le processus de transfert de client. Dans cette décision, le Conseil a notamment conclu qu’obliger les clients à téléphoner à leur FST actuel afin d’annuler leur abonnement pourrait être considéré par certains clients comme un frein au changement de fournisseur de services et pourrait rendre le processus de transfert plus complexe et plus long. Le Conseil exprimait l’avis que le processus de transfert de clients en vigueur favorisait davantage la concurrence et les clients que le processus proposé.

23.  Selon le Conseil, les compagnies Bell n’ont démontré au cours de l’instance aucun changement qui justifierait de modifier la conclusion de la décision de télécom 2009-538. Le Conseil note que les parties ont fait des observations sur la relation de représentant ou de mandataire qui résulte de l’autorisation d’agir. Le Conseil estime que cette relation de mandataire découlant du processus de transfert de clients a une portée très limitée et n’a pour objectif que la mise en œuvre des instructions du client à l’égard du transfert. Les droits et obligations découlant du mandat sont aussi restreints que le mandat lui-même. En tenant compte de tout ce qui précède, le Conseil estime qu’il doit conserver l’autorisation d’agir au nom d’un client dont jouit un nouveau fournisseur de services pour résilier le service auprès du fournisseur actuel au cours du processus de transfert de clients.

24.  Le Conseil estime également qu’appliquer l’autorisation d’agir au nom d’un client pour résilier un service à des cas qui n’exigent présentement pas une telle autorisation favorisera les clients, parce que le processus de transfert sera plus facile et offrira davantage de choix dans ce milieu où la convergence prévaut. Le Conseil estime qu’une telle approche allégerait la tâche des clients désireux de changer de fournisseur de services puisque le nouveau fournisseur s’occuperait du transfert. Une telle autorisation réduirait les difficultés liées aux étapes du processus que le client aurait pu avoir négligé par inadvertance.

25.  Par ailleurs, rien n’empêche les clients qui le désirent de résilier eux-mêmes leurs services et d’obtenir de nouvelles offres de services de leur ancien fournisseur. Autrement dit, c’est le client lui-même qui coordonne le processus de transfert en décidant de son degré de participation, tout en veillant à toujours être capable de profiter de la meilleure offre des fournisseurs.

26.  Par conséquent, le Conseil entend modifier le Règlement sur la distribution de radiodiffusion, conformément à la procédure établie à l’article 10(3) de la Loi sur la radiodiffusion, afin d’obliger une EDR à accepter une demande de résiliation de la part d’une nouvelle EDR lorsque le client a demandé à cette dernière d’agir en son nom.

27.  De plus, le Conseil impose, en vertu de l’article 24 de la Loi sur les télécommunications, une condition à l’offre et à la fourniture de services de télécommunication par les entreprises canadiennes, y compris les entreprises de services sans fil, à l’effet qu’elles acceptent une demande de résiliation d’un service provenant d’un nouveau fournisseur de services agissant au nom du client.

28.  En outre, le Conseil ordonne aux entreprises canadiennes, à titre de condition à l’offre et à la fourniture de service de télécommunication à tout FST, fournisseur et revendeur de services Internet d’inclure dans tous les contrats de service actuels ou nouveaux, ou autres ententes, l’obligation de respecter une demande de résiliation et de transfert de service faite par un nouveau fournisseur de services agissant au nom d’un client.

29.  Les exigences énoncées aux paragraphes 26 à 28 plus haut d’accepter des demandes de résiliation et de transfert s’appliquent même lorsqu’aucune coordination n’est nécessaire entre les fournisseurs de services. Ces obligations sont conditionnelles à ce que le nouveau fournisseur confirme son exigence d’agir conformément au paragraphe 31 de la présente politique réglementaire.

Questions relatives à la mise en vigueur

Confirmation de l’autorité d’agir

30.  Lorsqu’un nouveau fournisseur de services agit au nom d’un client pour demander la résiliation d’un service, il doit être en mesure de prouver que son client a autorisé le transfert du service afin d’assurer l’exactitude des renseignements et d’empêcher les transferts non autorisés. Le Conseil note que des procédures de confirmation de mandat en matière de télécommunication ont été adoptées pour les transferts qui doivent être coordonnés, mais qu’il n’en est rien en matière de radiodiffusion.

31.  Dans la décision de télécom 2005-15, le Conseil a énoncé les moyens acceptables pour les entreprises canadiennes d’obtenir d’un client le consentement explicite à la divulgation de renseignements confidentiels. L’industrie des télécommunications a depuis adopté ces moyens de confirmation de commande du client, établis à la section C de l’annexe H (Procédures de transfert de clients) de l’Entente cadre d’interconnexion des entreprises de services locaux[5]. Le Conseil estime que ces procédures sont adéquates pour régir tous les transferts de clients demandés par des tierces parties. Il exige par conséquent que l’un des moyens suivants serve à obtenir la confirmation du client :

Finalisation d’un transfert

32.  En vue de faciliter le traitement en temps utile d’une demande de résiliation de service faite par un fournisseur de services, le Conseil estime nécessaire d’imposer un délai dans lequel le fournisseur actuel doit compléter le transfert. Dans le cadre de son observation, TELUS propose que le transfert des services de radiodiffusion soit complété dans les 48 heures à compter de la réception d’une demande. Cependant, Shaw avance que l’imposition d’une telle limite équivaut à réglementer les clauses sur la durée et l’échéance des contrats de services des EDR avec leurs clients.

33.  Le Conseil note qu’il existe déjà des normes de service prévoyant un échéancier pour un transfert de service qui exige une coordination entre les fournisseurs. Par exemple, un délai de deux jours ouvrables s’applique au débranchement de lignes dégroupées[6] ou au transfert de numéros de téléphone supplémentaires[7],[8]. De plus, les EDR doivent traiter dans les 24 heures de leur réception les demandes d’autres distributeurs pour avoir accès aux enceintes de services aux clients ou aux panneaux de distribution en vue de transférer le câblage intérieur. Le Conseil estime donc qu’il convient d’établir un délai limite de deux jours ouvrables pour compléter un transfert de client lorsqu’aucune coordination n’est nécessaire entre les fournisseurs de services.

34.  Par conséquent, dans son projet de modifications, le Conseil énoncera une exigence à l’effet que les EDR doivent compléter les transferts de clients dans le même délai que celui imposé par le Conseil aux FST, soit deux jours ouvrables à compter de la réception d’une demande de résiliation de la part d’une tierce partie lorsqu’aucune coordination n’est nécessaire entre les fournisseurs de services. Le Conseil note cependant que le client demeurera responsable de toute pénalité de résiliation de service et de tout autre engagement contractuel le liant au fournisseur actuel.

35.  À cet égard, le Conseil réitère son point de vue exprimé dans la décision de télécom 2009-538 selon lequel les fournisseurs de services devraient donner, et ce, au début de tout contrat, des renseignements à leurs clients sur les pénalités de résiliation de service, le cas échéant. Le Conseil est toujours d’avis que les clients ont présentement assez de moyens pour déterminer s’ils devront payer une pénalité en cas de résiliation de service.

Groupes de services aux entreprises/clients

36.  Lorsque les transferts exigent une coordination, les fournisseurs de services doivent maintenir en place un GSC ou une « fonction de GSC »[9]. Tel qu’indiqué ci-dessus, la raison d’être d’un GSC est de permettre à des concurrents d’échanger des renseignements de nature délicate sur le plan de la concurrence lorsque des clients désirent changer de fournisseur de services. Le GSC garantit que les renseignements communiqués par des concurrents ne sont pas transmis au groupe de vente et mise en marché, afin d’éviter que les titulaires bénéficient d’un avantage injuste et, ultimement, anticoncurrentiel. Ces renseignements comprennent le nom et l’adresse du client, les services demandés, la date de la demande et celle du transfert.

37.  Les parties en faveur du maintien de l’obligation par les EDR de conserver un GSC allèguent que l’absence de règles de reconquête[10] n’élimine pas le besoin d’isoler les renseignements de nature délicate sur le plan de la concurrence du groupe de vente et mise en marché au cours du processus de transfert de clients. Elles font valoir que le GSC est le meilleur moyen de protéger ces renseignements dont les fournisseurs existants pourraient autrement se servir pour empêcher le transfert ou causer un délai déraisonnable.

38.  Les parties qui s’opposent au maintien d’un GSC obligatoire par les EDR allèguent que l’isolement des renseignements dans le cas de transfert de clients empêche ces derniers de bénéficier d’information à l’égard, par exemple, des choix à meilleur prix, de meilleures occasions, ainsi que de connaître certaines obligations contractuelles telles que les frais ou pénalités de résiliation de contrat.

39.  Dans l’avis public 2000-81, le Conseil a exigé que RCI, Shaw, Vidéotron ltée (Vidéotron) et Cogeco établissent chacune un GSC. Il a exigé que toutes les autres titulaires de câble en place élaborent et concluent des ententes de non-divulgation avec toutes les titulaires concurrentes concernant le traitement des renseignements concurrents confidentiels. Le Conseil n’a pas supprimé l’obligation des EDR de maintenir un GSC lorsqu’il a supprimé, dans l’avis public de radiodiffusion 2007-111, les règles de reconquête auxquelles elles étaient assujetties. Par conséquent, le Conseil confirme que l’obligation des quatre principales EDR en place (RCI, Shaw, Vidéotron et Cogeco) subsiste, c’est-à-dire qu’elles doivent traiter les demandes de résiliation de service faites par une tierce partie par l’intermédiaire d’un GSC.

40.  Néanmoins, le Conseil est sensible aux points de vue des parties selon qui l’obligation de passer par un GSC empêche les clients de connaître les offres spéciales visant à les retenir et d’être bien renseignés par leurs fournisseurs actuels au sujet de leurs obligations contractuelles. En conséquence, le Conseil est prêt à examiner si le maintien des GSC, tant en radiodiffusion qu’en télécommunication, est vraiment dans le meilleur intérêt des consommateurs. Cependant, le Conseil note que la portée de l’avis de consultation de radiodiffusion et de télécom 2010-406 se limitait à la question de savoir si les EDR seraient obligées de traiter les demandes de résiliation de services faites par une tierce partie par l’intermédiaire d’un GSC. Par conséquent, dans l’avis de consultation de radiodiffusion et de télécom 2011-192, également publié aujourd’hui, le Conseil annonce une instance en vue d’examiner le besoin des EDR et des entreprises de télécommunication de maintenir des GSC ou des fonctions de GSC; l’instance portera aussi sur la question de savoir si des mesures réglementaires relatives aux GSC peuvent s’appliquer aux deux industries de manière symétrique et de quelle façon.

Autres questions

41.  Tel que noté ci-dessus, les compagnies Bell ont aussi fait plusieurs demandes visant une meilleure symétrie entre la radiodiffusion et les télécommunications, dans des domaines comme les normes QS, les frais de câblage intérieur, la publication des ententes sur l’accès avec les propriétaires d’immeubles et le partage des disponibilités locales. Les compagnies Bell appuient leurs demandes sur le fait que, selon elles, les nouveaux arrivants dans le marché des EDR font face aux mêmes barrières que celles qui attendaient les nouvelles entreprises de télécommunication, d’abord pour s’implanter dans leur marché et ensuite pour continuer sans relâche à faire face à la concurrence. Elles font remarquer que, jusqu’à présent, le Conseil a adopté la plupart de leurs propositions relatives au secteur des télécommunications parce qu’il estimait qu’elles supprimaient des barrières et favorisaient par conséquent le développement de ce que le Conseil appelle la concurrence « durable ».

42.  De façon générale, les propositions des compagnies Bell ont reçu l’aval des autres FST qui sont en faveur de mesures réglementaires plus symétriques pour les fournisseurs de services en pleine convergence. Par contre, la plupart des EDR en place ont désavoué ces propositions en alléguant que la concurrence est déjà bien implantée en matière de distribution de radiodiffusion et que les compagnies Bell n’avaient pas réussi à démontrer la nécessité de ces modifications.

43.  Le Conseil estime que la concurrence est bien établie dans le marché de la distribution de radiodiffusion. Les nouveaux venus, dont les fournisseurs par satellite comme Bell TV et Shaw Direct et les fournisseurs par ligne d’abonné numérique comme MTS Allstream et SaskTel, exploitent des entreprises de distribution concurrentielles qui ont démontré qu’elles constituent des solutions de rechange viables aux EDR par câble en place. Le Conseil ne dispose d’aucune indication sur le fait que les règles existantes sur le câblage intérieur, les normes QS, les ententes sur l’accès ou les disponibilités locales dans le marché de la distribution de radiodiffusion auraient nui à la concurrence. À cet égard, le Conseil note qu’il a récemment réexaminé sa politique sur les disponibilités locales et a énoncé sa décision dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-189. Par conséquent, le Conseil estime inutile de modifier ces cadres réglementaires et refuse les demandes des compagnies Bell à cet égard.

Secrétaire général

Documents connexes

Notes de bas de page

[1] Ces installations ou ressources sont par exemple les lignes locales ou les numéros de téléphone.

[2] Dans l’avis public 2000-81, le Conseil a accepté le « modèle de non-interférence » proposé par l’Association canadienne de télévision par câble au sujet de l’utilisation du câblage intérieur des LU et des ILM.

[3] Les disponibilités locales sont des périodes au cours des émissions de services non canadiens pendant lesquelles les EDR peuvent insérer des annonces ou des promotions à la suite d’ententes négociées entre elles et les services de programmation concernés.

[4] Par exemple, cette faculté est prévue dans les Lignes directrices relatives aux commandes locales canadiennes, approuvées par le Conseil, qui précisent les processus et les procédures. La dernière version de ce document a été approuvée dans la décision de télécom 2008-61.

[5] Les entreprises de services locaux se servent d’une entente cadre approuvée par le Conseil. La première entente cadre a été approuvée dans la décision de télécom 2007-62. Depuis, le Conseil publie des mises à jour du document sur son site web.

[6] Dans la décision de télécom 2002-14, le Conseil a exigé que les entreprises de services locaux titulaires rendent un service disponible aux entreprises de services locaux concurrentielles en deux jours ouvrables pour les groupes migrés de type A et B, y compris tous les sous-types.

[7] Dans la décision de télécom 2003-48, le Conseil a exigé que l’intervalle de service pour la fourniture de tous les numéros supplémentaires soit de deux jours.

[8] Sauf pour le transfert de numéros de sans fil à sans fil, pour lequel le Conseil exige, tel qu’énoncé dans la décision de télécom 2005-72, un délai maximum de 2,5 heures ouvrables.

[9] Une fonction de GSC peut, par exemple, comprendre le fait de conclure une entente de non-divulgation avec d’autres fournisseurs de services.

[10] Le Conseil a déjà imposé des limites à certains FST et EDR pour leur interdire pendant un certain temps de tenter de regagner des clients qui avaient choisi de souscrire un abonnement auprès d’un fournisseur concurrent.

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