Décision de télécom CRTC 2013-76

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Ottawa, le 21 février 2013

Rogers Communications Partnership – Demande de révision et de modification de la politique réglementaire de télécom 2011-703

Numéro de dossier : 8662-R28-201201699

Dans la présente décision, le Conseil traite les demandes présentées par le Rogers Communications Partnership (RCP) en vue de faire réviser et modifier certains éléments de la politique réglementaire de télécom 2011-703 concernant les éléments de coût ayant servi à fixer les tarifs des services d’accès haute vitesse (AHV) de gros du RCP ainsi que ceux d’autres entreprises de câblodistribution.

Le Conseil modifie les tarifs des services AHV de gros du RCP en éliminant le rajustement de coût associé aux cartes du système de terminaison modem câble, et modifie également les tarifs mensuels relatifs à la capacité des services AHV de gros de Cogeco Câble inc., du RCP et de Vidéotron s.e.n.c. de manière à ce que ces tarifs s’appliquent uniquement aux tranches en aval. Le Conseil rejette toutes les autres demandes du RCP.

Le Conseil fait remarquer que la politique réglementaire de télécom 2013-70, laquelle présente une série de décisions concernant les services AHV de gros, accompagne la présente décision.

Demande

1. Le Conseil a reçu une demande modifiée1 du Rogers Communications Partnership (RCP), datée du 1er mars 2012, dans laquelle la compagnie lui demandait de réviser et modifier certains éléments de la politique réglementaire de télécom 2011-703 concernant les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité2 pour ses services AHV de gros.3

2. Le RCP a fait valoir que le Conseil avait commis diverses erreurs de fait et de droit dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, lesquelles prouvent qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale. Selon le RCP, ces erreurs ont une incidence sur les taux tarifés de ses services AHV de gros et empêchent la compagnie de recouvrer entièrement les coûts qu’elle engage pour fournir les services, ce qui va à l’encontre des articles 27 et 47 de la Loi sur les télécommunications (la Loi). Le RCP a en outre fait valoir que la politique réglementaire de télécom 2011-703 désavantage les entreprises de câblodistribution par rapport aux entreprises de services locaux titulaires (ESLT) auxquelles elles livrent concurrence, et ce, parce qu’elle impose aux entreprises de câblodistribution un niveau de productivité supérieur pour leur équipement d’accès et qu’elle leur refuse des suppléments comparables à l’égard des coûts du service Internet par fibre de vitesse supérieure4.

3. Le Conseil a reçu des observations concernant la demande du RCP de la part du Consortium des Opérateurs de Réseaux Canadiens Inc. (CORC), de Cogeco Câble inc. (Cogeco), de Shaw Cablesystems G.P. (Shaw), de Québecor Média inc., en son nom et au nom de sa filiale Vidéotron s.e.n.c. (Vidéotron) [collectivement Québecor Média], et de Vaxination Informatique (Vaxination). On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 3 août 2012. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca, sous l’onglet Instances publiques ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.

4. Dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, le Conseil a énoncé les critères qu’il utilisera pour examiner les demandes de révision et de modification qui seront déposées en vertu de l’article 62 de la Loi. En particulier, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, résultant, par exemple : i) d’une erreur de droit ou de fait; ii) d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision; iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale ou iv) d’un nouveau principe découlant de la décision.

5. Dans la présente décision, le Conseil estime qu’il doit se pencher sur les questions suivantes :

I. Le Conseil a-t-il commis une erreur en établissant les facteurs d’utilisation (FU) de certains équipements du RCP?

II.  Le Conseil a-t-il commis une erreur en fixant à cinq ans la durée de vie estimative des cartes du système de terminaison modem câble (STMC) du RCP?

III.   Le Conseil a-t-il commis une erreur en calculant les tarifs mensuels relatifs à la capacité pour toutes les entreprises de câblodistribution?

IV.   Le Conseil a-t-il commis une erreur en plafonnant les dépenses relatives au signalement des incidents et à la réparation des services AHV de gros pour toutes les entreprises de câblodistribution?

V.  Le Conseil a-t-il commis une erreur en fixant, pour les entreprises de câblodistribution et les ESLT, des variations annuelles du coût unitaire différentes à l’égard de l’équipement d’accès?

VI.   Le Conseil a-t-il commis une erreur en rajustant les coûts des services AHV de gros en raison du changement de la date de début de la période visée par l’étude pour toutes les entreprises de câblodistribution?

VII.    Les tarifs définitifs révisés du modèle de facturation fondé sur la capacité des services AHV de gros devraient-ils s’appliquer rétroactivement?

I.    Le Conseil a-t-il commis une erreur en établissant les FU de certains équipements du RCP?

6. Le RCP a fait valoir que le Conseil avait commis une erreur en fixant les FU à 75 % au lieu de 60 %, comme il le proposait. Il a fait remarquer avoir pour pratique de segmenter les nœuds et d’ajouter des ports au système de terminaison modem câble (STMC)5 lorsque le volume d’utilisation d’Internet atteint 60 % de la capacité durant les périodes de pointe. Le RCP a affirmé que cette méthode lui permettait d’offrir un service de qualité supérieure à ses clients.

7. Le CORC s’est opposé à la demande du RCP, affirmant qu’il recouvrait adéquatement ses coûts aux termes du régime que le Conseil a établi dans la politique réglementaire de télécom 2011-703.

8. Le RCP a répliqué que l’observation du CORC était inexacte quant aux faits.

Résultats de l’analyse du Conseil

9. Le FU6 mesure l’utilisation moyenne des installations partagées et sert à calculer les coûts de la Phase II7. Un FU faible se traduit par des coûts élevés.

10. Le Conseil fait remarquer que le FU de 60 % que le RCP a proposé pour l’équipement du STMC et l’équipement de la segmentation de nœuds correspondait au point déclencheur de l’augmentation de la capacité (c’est-à-dire le niveau d’utilisation à partir duquel le RCP commence à segmenter les nœuds et à ajouter des ports au STMC pour augmenter la capacité de son réseau), également fixé à 60 %. Le Conseil ajoute que le point déclencheur de l’augmentation de la capacité n’est pas synonyme du FU, car le point déclencheur que propose le RCP ne reflète pas la mesure moyenne de l’utilisation comme le fait le FU. Il y a généralement un délai entre le point déclencheur de l’augmentation de la capacité et le moment où la capacité est effectivement augmentée, et pendant ce laps de temps, le volume d’utilisation peut continuer d’augmenter au-delà de 60 %. Par conséquent, le Conseil estime qu’il ne convient pas d’utiliser le point déclencheur de l’augmentation de la capacité plutôt que le FU moyen pour calculer les coûts de la Phase II.

11. Le Conseil ajoute qu’en réponse à une demande de renseignements dans le cadre de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2011-703, le RCP a déclaré que lorsque le volume d’utilisation atteint 60 %, elle commence à augmenter la capacité et compte avoir terminé avant que le volume d’utilisation n’ait atteint 75 %. La compagnie a également fourni un graphique montrant que le volume d’utilisation atteignait parfois un niveau aussi élevé que 90 %.

12. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il n’a pas commis d’erreur lorsqu’il a fixé à 75 % le FU du RCP pour l’équipement du STMC et l’équipement de segmentation de nœuds. Par conséquent, le Conseil conclut que le RCP n’a pas réussi à démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la présente décision.

II. Le Conseil a-t-il commis une erreur en fixant à cinq ans la durée de vie estimative des cartes STMC du RCP?

13. Le RCP a fait valoir que le Conseil avait commis une erreur en fixant à cinq ans la durée de vie estimative de ses cartes STMC, notant qu’il avait proposé une durée de vie estimative de quatre ans en s’appuyant sur la durée de vie comptable actuellement utilisée par la compagnie pour cet actif. Le RCP a ajouté que les cartes STMC évoluent rapidement, si bien qu’il est rentable de les mettre à niveau tous les quatre ans. La compagnie a précisé que la durée de vie comptable estimative des cartes STMC est évaluée chaque année, et ce, par la compagnie et par un vérificateur externe. Le RCP a ajouté qu’on ne peut pas établir la durée de vie estimative de ses cartes STMC en fonction des autres entreprises de câblodistribution à cause des différences entre les capacités des réseaux, leurs normes de dimensionnement et les coûts.

14. Le CORC a affirmé qu’il appuyait le recours à une durée vie estimative de cinq ans, donnée à laquelle le Conseil était arrivé en utilisant une référence pour l’ensemble des entreprises de câblodistribution. Le CORC a soutenu que le RCP a le droit de recouvrer uniquement les coûts engagés raisonnablement pour offrir la fonctionnalité STMC et non tous les coûts que le RCP engage ou souhaite engager.

Résultats de l’analyse du Conseil

15. Dans la décision de télécom 2006-77, le Conseil a décidé qu’il convenait, dans l’étude de coûts sur les services AHV de gros, d’utiliser la durée de vie comptable d’un actif comme durée de vie économique estimative.

16. Le Conseil fait remarquer qu’il serait conforme aux décisions prises dans la décision de télécom 2006-77 de fixer la durée de vie économique des cartes STMC du RCP en fonction de la durée de vie comptable de cet actif. Il estime que le RCP a fourni des éléments de preuve montrant que la durée de vie comptable de ses cartes STMC est de quatre ans et qu’elle est évaluée chaque année par la compagnie ainsi que par un vérificateur externe.

17. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut donc qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de sa décision de fixer à cinq ans la durée de vie estimative des cartes STMC du RCP et qu’il convient d’approuver une durée de vie estimative de quatre ans pour cet actif.

III. Le Conseil a-t-il commis une erreur en calculant les tarifs mensuels relatifs à la capacité pour toutes les entreprises de câblodistribution?

18. Le RCP a fait valoir que le trafic ayant servi à calculer le tarif mensuel relatif à la capacité8 incluait à la fois les tranches de capacité en amont et en aval, donc que le tarif mensuel relatif à la capacité approuvé devrait s’appliquer à la fois aux tranches de capacité en amont et en aval pour qu’il puisse recouvrer les coûts liés au trafic.

19. Cogeco et Québecor Média ont appuyé la demande du RCP.

20. Cogeco, Québecor Média et le RCP ont indiqué qu’elles ne s’opposaient pas à l’idée d’appliquer le tarif mensuel relatif à la capacité uniquement au trafic en aval pourvu que le tarif soit rajusté de manière à leur permettre de recouvrer les coûts liés au trafic. Le CORC a également appuyé cette formule de rechange, notant que les fournisseurs de services indépendants commandent les tranches de capacité en fonction de leurs prévisions du trafic en aval uniquement.

Résultats de l’analyse du Conseil

21. Compte tenu des précisions du RCP et de l’examen des calculs effectué par Cogeco, le RCP et Vidéotron pour établir les tarifs mensuels relatifs à la capacité, le Conseil est d’accord avec le RCP que si le tarif mensuel relatif à la capacité approuvé n’est appliqué qu’aux tranches de capacité en aval, il ne permettrait pas aux compagnies de recouvrer l’ensemble des coûts liés à l’utilisation.

22. Le Conseil fait également remarquer que le CORC, Cogeco, le RCP et Québecor Média appuient l’idée d’avoir un tarif mensuel relatif à la capacité qui s’applique uniquement aux tranches de capacité en aval, pourvu que le tarif soit rajusté de sorte qu’il leur permette de recouvrer tous les coûts liés à l’utilisation, majorés d’un supplément adéquat.

23. Par conséquent, le Conseil conclut qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de sa décision d’utiliser les prévisions de trafic proposées par les entreprises de câblodistribution pour calculer le tarif mensuel relatif à la capacité. Il conclut donc qu’il convient de modifier le tarif mensuel relatif à la capacité dans les cas de Cogeco, du RCP et de Vidéotron, de sorte qu’il soit appliqué uniquement aux tranches de capacité en aval et qu’il permette aux compagnies de recouvrer tous les coûts liés à l’utilisation, majorés d’un supplément de 30 %9.

IV. Le Conseil a-t-il commis une erreur en plafonnant les dépenses relatives au signalement des incidents et à la réparation des services AHV de gros pour toutes les entreprises de câblodistribution?

24. Le RCP a fait valoir qu’il engage, dans le cas du signalement des incidents et de la réparation, des dépenses plus élevées pour le service AHV de gros que pour le service Internet de détail, soulignant que l’incident moyen signalé pour le service AHV de gros est beaucoup plus compliqué que celui du service Internet de détail. Par conséquent, le RCP a indiqué que le Conseil devrait autoriser toutes les entreprises de câblodistribution à recouvrer la totalité des dépenses proposées pour le signalement des incidents liés au service de gros, plutôt que 80 % de leurs dépenses pour le service Internet de détail équivalent comme il est prévu dans la politique réglementaire de télécom 2011-703.

25. Cogeco et Shaw ont appuyé la demande du RCP.

26. Le CORC s’est opposé à la demande du RCP, attribuant ces dépenses supérieures pour le signalement des incidents liés au service de gros à l’inefficacité des processus des entreprises de câblodistribution. Il a indiqué, par exemple, les débranchements inutiles survenus parce que les techniciens du RCP avaient mal identifié le service AHV de gros au moment de l’installation ainsi que le traitement des dossiers d’incident par courriel.

Résultats de l’analyse du Conseil

27. Le Conseil fait remarquer que puisque ce sont les fournisseurs de services indépendants qui assurent le soutien de première ligne aux utilisateurs finals du service AHV de gros, plusieurs activités nécessaires pour le soutien dans le secteur de détail ne le sont pas dans le secteur de gros (par exemple, la communication avec l’utilisateur final et les diagnostics). Dans des décisions antérieures10, le Conseil a décidé que les dépenses d’une entreprise de câblodistribution liées au signalement d’incidents et à la réparation dans le cas d’un utilisateur final de gros devraient, en général, être moindres que celles qu’elle engagerait pour un utilisateur final de son service Internet de détail.

28. Bien que le RCP ait fait valoir que ses dépenses relatives au signalement d’incidents et à la réparation sont supérieures pour le service AHV de gros que pour son service Internet de détail, comme il est indiqué dans la décision de télécom 2006-77, le Conseil s’attend à ce que les entreprises de câblodistribution, à mesure qu’elles offriront des activités de soutien dans le contexte du service AHV de gros durant la période de l’étude, deviendront aussi efficaces que dans le cas de leur service Internet de détail. Le Conseil précise que d’après le dossier de l’instance, rien ne justifie qu’il modifie son attente à leur égard.

29. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut qu’il n’a pas commis d’erreur lorsqu’il a fixé les dépenses relatives au signalement d’incidents et à la réparation pour le service AHV de gros des entreprises de câblodistribution à 80 % de leurs dépenses équivalentes pour le service Internet de détail. Le Conseil conclut donc que le RCP n’a pas réussi à démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la présente décision.

V. Le Conseil a-t-il commis une erreur en fixant, pour les entreprises de câblodistribution et les ESLT, des variations annuelles du coût unitaire différentes11 à l’égard de l’équipement d’accès?

30. Dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, le Conseil a décidé qu’il conviendrait d’appliquer à l’équipement d’accès12 des variations annuelles du coût unitaire de -10 % dans le cas des entreprises de câblodistribution et de -5 % dans le cas des ESLT afin de tenir compte des changements des prix et de l’amélioration de la productivité prévus durant la période de l’étude.

31. Le RCP a indiqué avoir fourni séparément les coûts en fonction de l’accès et ceux en fonction de l’utilisation, ce qui a révélé que la majorité de l’équipement est de l’équipement d’accès. Le RCP a ajouté que la décision du Conseil est discriminatoire et qu’elle n’est appliquée ni de façon uniforme ni de façon neutre entre les titulaires sur le plan de la concurrence.

32. Cogeco, Shaw et Québecor Média ont appuyé l’allégation du RCP.

33. Le CORC a fait valoir que, d’après les éléments de preuve au dossier, la décision du Conseil est correcte.

Résultats de l’analyse du Conseil

34. Le Conseil fait remarquer qu’il a établi les variations annuelles du coût unitaire relatives à l’équipement d’accès séparément pour les ESLT et les entreprises de câblodistribution à partir des éléments de preuve qu’ils ont présentés dans l’instance qui a mené à la politique réglementaire de télécom 2011-703. Dans cette instance, les ESLT ont fourni les variations annuelles antérieures du coût unitaire séparément pour l’équipement d’accès et pour l’équipement lié à l’utilisation. Pour leur part, les entreprises de câblodistribution ont fourni les coûts de l’équipement d’accès et ceux de l’équipement lié à l’utilisation pour chaque année de l’étude de coûts, mais n’ont pas fourni les variations annuelles antérieures du coût unitaire séparément pour l’équipement d’accès et pour l’équipement lié à l’utilisation, contrairement à ce qu’ils prétendent. À partir des éléments de preuve présentés par les ESLT, le Conseil a pu établir des variations annuelles du coût unitaire communes pour l’équipement d’accès et pour l’équipement lié à l’utilisation des entreprises de câblodistribution. À partir des éléments de preuve présentés par les entreprises de câblodistribution, il a établi des variations annuelles du coût unitaire communes pour l’équipement d’accès et celui lié à l’utilisation pour ces entreprises.

35. Le Conseil fait remarquer que le RCP n’a fourni aucun nouvel élément de preuve dans sa demande de révision et de modification, justifiant l’utilisation de variations annuelles du coût unitaire de l’équipement d’accès de -5 %.

36. En l’espèce, le Conseil conclut qu’il n’a pas commis d’erreur en fixant des variations annuelles du coût unitaire différentes à l’égard de l’équipement d’accès pour les entreprises de câblodistribution et les ESLT. Par conséquent, le Conseil conclut que le RCP n’a pas réussi à démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la présente décision.

VI.    Le Conseil a-t-il commis une erreur en rajustant les coûts des services AHV de gros en raison du changement de la date de début de la période visée par l’étude pour toutes les entreprises de câblodistribution?

37. Dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, le Conseil a décidé que la période visée par l’étude de coûts du RCP, et celle des autres fournisseurs de réseau, devait commencer le 1er juillet 2011, et non le 1er janvier 2011, comme le propose le RCP. Cette date a été retenue parce qu’elle correspond au mois de lancement du service. Le Conseil a donc rajusté les coûts inclus dans l’étude de coûts de chaque entreprise de câblodistribution de manière à tenir compte des diminutions prévues du coût unitaire de l’équipement pendant les six mois de retard. Ce rajustement était désigné changement de la date de début de l’étude.

38. Le RCP a fait remarquer que, dans une étude de coûts en bonne en due forme, toutes les variables sont évaluées au même moment afin d’assurer la cohérence interne, et donc que le Conseil a commis une erreur en réduisant les coûts liés à l’équipement sans changer les autres variables. Le RCP a précisé que si on rajuste le coût unitaire net en raison des six mois de retard, il faut alors apporter les rajustements nécessaires pour tenir compte de l’augmentation des coûts qui s’est effectivement maintenue (en raison de l’augmentation des volumes de trafic et de l’augmentation des dépenses liées à l’équipement et des dépenses d’exploitation) durant cette période. Le RCP a ajouté avoir connu une augmentation appréciable de son volume de trafic pendant cette période (environ 30 %). Autrement, le RCP a fait valoir que le Conseil devrait annuler le rajustement de la date de début de l’étude.

39. Cogeco et Shaw ont appuyé la demande du RCP.

40. Le CORC a fait valoir que la demande du RCP devrait être rejetée parce que les coûts unitaires à la baisse tiennent déjà compte de l’augmentation du volume de trafic.

Résultats de l’analyse du Conseil

41. Le Conseil fait remarquer que, dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, il a modifié les études de coûts des entreprises de câblodistribution afin de tenir compte des six mois de retard du lancement du nouveau service AHV de gros, et ce, en appliquant les réductions de coût de l’équipement prévues durant ces six mois. Toutefois, en effectuant ce rajustement, le Conseil n’a pas tenu compte des variations de coût attribuables à l’augmentation des volumes de trafic et de l’augmentation des dépenses d’exploitation durant cette période. Il fait remarquer que les variations de coût attribuables à l’augmentation des dépenses d’exploitation, excluant l’amélioration de la production, pendant cette période sont minimes.

42. Le Conseil estime que bien que l’étude de coûts devrait tenir compte de toutes les variations de coût, les entreprises de câblodistribution n’ont pas réussi à démontrer que l’approche retenue ne leur permettrait pas de recouvrer les coûts supplémentaires engagés durant les mois de retard. Plus précisément, il estime que même si les volumes de trafic augmentaient pendant ces six mois de retard et faisaient augmenter les coûts d’équipement par utilisateur final, il n’y aurait aucune incidence sur les coûts sous-jacents aux tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité de Cogeco, du RCP et de Vidéotron pour les raisons suivantes. Premièrement, la composante tarifaire de l’accès (sans égard à l’utilisation) ne sera pas touchée parce que les tarifs sont fixés de manière à recouvrer uniquement les coûts non liés à l’utilisation qui ne sont pas tributaires des volumes de trafic. Deuxièmement, la composante tarifaire mensuelle relative à la capacité est fixée de manière à recouvrer les coûts applicables à une capacité préétablie (c’est-à-dire 100 Mbps), quels que soient les volumes de trafic qu’utilisent les fournisseurs de services indépendants dans un mois donné.

43. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut qu’en ce qui concerne les entreprises de câblodistribution qui ont adopté le modèle de facturation fondé sur la capacité, en l’occurrence Cogeco, le RCP et Vidéotron, il n’a pas commis d’erreur en rajustant la date de début de l’étude sans inclure les augmentations de coût liées aux volumes de trafic accrus. Par conséquent, le Conseil conclut que le RCP n’a pas réussi à démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la présente décision13.

VII. Les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité définitifs révisés du service AHV de gros devraient-ils s’appliquer rétroactivement?

44. Le RCP a fait valoir que ses tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité du service AHV de gros sont provisoires et que s’ils sont révisés, ils devraient entrer en vigueur le 10 février 2012, date de sa demande de révision et de modification.

Résultats de l’analyse du Conseil

45. Les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité des services AHV de gros de Cogeco, du RCP et de Vidéotron sont actuellement approuvés provisoirement

46. Le Conseil fait remarquer avoir relevé, durant l’instance, des erreurs dans les coûts du service, sur lesquels reposent les tarifs initiaux. Le Conseil conclut que les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité, dans la mesure où ils sont fondés sur des coûts inexacts, ne sont ni justes ni raisonnables et qu’il doit effectuer des rajustements tarifaires afin que ces tarifs soient conformes à la Loi. De plus, le Conseil conclut qu’il est nécessaire et indiqué d’appliquer ces rajustements tarifaires rétroactivement à la date de mise en œuvre du service, c’est-à-dire le 1er février 2012, afin de garantir qu’en tout temps, les tarifs sont justes et raisonnables et contribuent à l’atteinte des objectifs de la politique de télécommunication énoncés dans la Loi.

Tarification et mise en œuvre des services AHV de gros

47. À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut que les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité des services AHV de gros de Cogeco, du RCP et de Vidéotron, établis à l’annexe de la présente décision, lesquels reflètent les décisions susmentionnées, sont justes et raisonnables. Le Conseil approuve ces tarifs de manière définitive, et ce, à compter 1er février 2012, date à laquelle les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité ont été mis en œuvre initialement et fixés de façon provisoire.

48. Le Conseil ordonne à Cogeco, au RCP et à Vidéotron de publier, d’ici le 25 mars 2013, des pages de tarif qui tiennent compte de la présente décision et des tarifs énoncés à l’annexe.

Instructions

49. Les Instructions mentionnent que, dans l’exercice des pouvoirs et fonctions que lui confère la Loi, le Conseil doit mettre en œuvre les objectifs de la politique énoncés à l’article 7 de la Loi, conformément aux alinéas 1a), 1b) et 1c) des Instructions.

50. Le Conseil estime que les conclusions tirées dans ladite décision contribuent à l’atteinte des objectifs de la politique énoncés à l’article 7 de la Loi, notamment aux alinéas 7a), 7b), 7c), 7f) et 7h)14. Le Conseil estime que les tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité approuvés dans la présente décision sont établis de façon à ce que les concurrents paient des tarifs équivalant aux coûts de la Phase II plus un supplément raisonnable et que les titulaires recouvrent de façon légitime les coûts engagés. Par conséquent, le Conseil estime que, conformément aux sous-alinéas 1a)(ii) et 1b)(ii) des Instructions15, les tarifs de ces services a) sont efficaces et proportionnels au but visé et ne font pas obstacle au libre jeu d’un marché concurrentiel que dans la mesure minimale nécessaire pour atteindre les objectifs de la politique susmentionnés; b) ne découragent pas un accès au marché qui est propice à la concurrence et qui est efficace économiquement, et n’encouragent pas un accès au marché qui est inefficace économiquement.

Secrétaire général

Documents connexes

Annexe

Tarifs du modèle de facturation fondé sur la capacité approuvés pour les services AHV de gros de Cogeco, du RCP et de Vidéotron

Tarif mensuel relatif à la capacité par 100 Mbps
Cogeco 2 556 $
RCP 1 400 $
Vidéotron 2 031 $

 

Vitesse Tarif mensuel d’accès par utilisateur final du RCP
(sans égard au volume d’utilisation)
0,5 Mbps 12,06 $
3 Mbps 12,44 $
10 Mbps 14,45 $
15 Mbps 19,51 $
25 Mbps 21,50 $
50 Mbps 23,32 $

 


Notes de bas de page :

[1]   Remplace la demande en vertu de la partie 1du RCP, datée du 10 février 2012.

[2]   Le modèle de facturation fondé sur la capacité a été défini auparavant comme le « modèle de capacité approuvé » (dans la politique réglementaire de télécom 2011-703 et la décision de télécom 2012-60). Le modèle de facturation fondé sur la capacité exige que chaque fournisseur de services indépendant paie un tarif mensuel, et ce, par tranche de 100 mégabits par seconde (Mbps) de capacité de réseau, pour le recouvrement des coûts de transport associés au réseau, et un tarif d’accès mensuel distinct par utilisateur final pour le recouvrement des coûts d’accès au réseau.

[3]   Les services AHV de gros des entreprises de câblodistribution sont également appelés services d’accès Internet de tiers de gros.

[4]    Dans le cadre de la présente instance, le RCP a effectivement formulé des observations concernant le supplément additionnel de 10 % accordé à l’égard des plus récents services AHV de gros des ESLT, mais elle n’a pas demandé spécifiquement que le Conseil se prononce sur la question. Le Conseil s’en tient donc à établir, dans le contexte de la décision de télécom 2013-77 concernant la demande de révision et de modification de Shaw, s’il a commis une erreur en n’accordant pas le même supplément additionnel de 10 % à l’égard des services AHV de gros des entreprises de câblodistribution.

[5]    L’équipement du STMC sert à fournir des services haute vitesse aux abonnés du câble et l’équipement de segmentation de nœuds sert à segmenter davantage les fibres optiques pour augmenter la bande passante mise à la disposition des abonnés d’Internet.

[6]    Dans la politique réglementaire de télécom 2009-274, le FU a été défini comme une mesure de l’utilisation d’une installation partagée qui sert à reconnaître la capacité autre que d’exploitation (par exemple, des unités de réserve, etc.) de l’installation partagée, et à répartir les coûts de cette capacité par rapport au coût unitaire de la capacité d’exploitation.

[7]    La méthode d’établissement des coûts de la Phase II est une approche d’établissement de coûts différentiels utilisée par le Conseil pour évaluer les coûts que doit assumer l’entreprise titulaire pour fournir des services de gros aux concurrents.

[8]    Dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, le Conseil a fixé le tarif mensuel relatif à la capacité par tranche de 100 Mbps pour toutes les entreprises de câblodistribution.

[9]    Le supplément approuvé par le Conseil est divulgué conformément à la politique réglementaire de télécom 2012-592.

[10]   Par exemple, dans la décision de télécom 2006-77 et l’ordonnance 2000-789

[11]   Les variations annuelles du coût unitaire correspondent aux variations prévues du prix de l’équipement sur douze mois, excluant l’amélioration de la productivité (c’est-à-dire les gains d’efficacité prévus en matière de fourniture d’équipement au fil du temps). Dans la politique réglementaire de télécom 2011-703, ces variations sont appelées facteurs d’augmentation des coûts nets en immobilisations.

[12]   L’équipement d’accès comprend l’équipement destiné à un utilisateur final (par exemple la trame du STMS), dont les coûts ne sont pas fonction de l’utilisation de chaque utilisateur final; l’équipement lié à l’utilisation comprend les commutateurs, les routeurs et la plupart des pièces du STMC, dont les coûts sont fonction de l’utilisation de chaque utilisateur final.

[13]   Le Conseil fait remarquer que Shaw a également soulevé la question du changement de la date de début de l’étude de coûts dans la demande qu’elle a présentée le 3 février 2012 en vue de faire réviser et modifier la politique réglementaire de télécom 2011-703. Dans la décision de télécom 2013-77, le Conseil a établi qu’il convenait d’annuler le changement de la date de début de l’étude apporté aux tarifs mensuels fixes de Shaw dans la politique réglementaire de télécom 2011-703.

[14] Les objectifs de la politique cités de la Loi sont les suivants :

7a) favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions;

7b) permettre l’accès aux Canadiens dans toutes les régions – rurales ou urbaines – du Canada à des services de télécommunications sûrs, abordables et de qualité;

7c) accroître l’efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;

7f) favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l’efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire;

7h) satisfaire les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunication.

[15] Décret donnant au CRTC des instructions relativement à la mise en œuvre de la politique canadienne de télécommunication, C.P. 2006-1534, 14 décembre 2006

 
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