Décision de radiodiffusion CRTC 2016-144

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Référence : 2015-470

Ottawa, le 20 avril 2016

Said Afrajy, au nom d’une société sans but lucratif devant être constituée
Mississauga (Ontario)

Demande 2015-0476-2, reçue le 21 mai 2015
Audience publique dans la région de la Capitale nationale
17 décembre 2015

Station de radio AM communautaire en développement de faible puissance à Mississauga

Le Conseil refuse une demande en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une station de radio AM communautaire en développement de faible puissance à Mississauga.

Demande

  1. Said Afrajy, au nom d’une société sans but lucratif devant être constituée, a déposé une demande en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une station de radio AM communautaire en développement de faible puissance à Mississauga. La station serait exploitée à la fréquence 1 110 kHz avec une puissance d’émission de jour et de nuit de 5 watts.

  2. Le titulaire proposé, une société devant être constituée, serait entièrement détenu et contrôlé par M. Afrajy.

  3. Le demandeur indique que la station diffuserait 126 heures de programmation locale par semaine de radiodiffusion, dont l’ensemble serait consacré à de la programmation à caractère ethnique. La programmation mettrait en vedette des nouvelles, les arts, la musique et les événements multilingues, ainsi que de la programmation musicale tirée d’un éventail de pièces de musique populaire et de musique pour auditoire spécialisé.

  4. Le demandeur propose de diffuser, par condition de licence, de la programmation à caractère ethnique destinée à au moins six groupes culturels (Arabes, Égyptiens, Marocains, Libanais, Koweïtiens et Tunisiens) dans au moins trois langues différentes (arabe, français et anglais) au cours de chaque semaine de radiodiffusion. Plus précisément, la station desservirait principalement la communauté de langue arabe en arabe (71 heures par semaine de radiodiffusion). Il demande donc l’autorisation d’excéder le seuil maximal de programmation en langues tierces pouvant être diffusé par semaine de radiodiffusion par les stations non-ethniques, tel qu’établi dans le Règlement de 1986 sur la radio (le Règlement), afin de consacrer 57 % de la semaine de radiodiffusion à de telles émissions. Il propose également de diffuser, par condition de licence, de la programmation de langue française (31 heures par semaine de radiodiffusion) et de langue anglaise (24 heures par semaine de radiodiffusion).

  5. En ce qui concerne la participation de la communauté et des bénévoles, le demandeur indique qu’il y a déjà un grand intérêt pour la station de la part de bénévoles potentiels, dont plusieurs professionnels prêts à animer des émissions de counseling pour les adultes et les jeunes, des émissions au sujet de l’immigration et de l’intégration dans la collectivité. Il ajoute qu’un manuel de formation serait offert aux bénévoles et qu’un producteur en chef veillerait au respect des obligations de la station. De plus, il s’engage à établir un comité consultatif communautaire qui se réunirait au moins deux fois par année afin de faire le point sur les besoins de la communauté.

  6. Enfin, même si cela n’est pas obligatoire pour les stations communautaires en développement, le demandeur indique qu’il verserait une contribution de 109 000 $ au titre du développement du contenu canadien sur sept années de radiodiffusion consécutives.

  7. Le Conseil n’a reçu aucune intervention à l’égard de la présente demande.

Analyse du Conseil

  1. Après avoir examiné la présente demande à la lumière des politiques et des règlements applicables, le Conseil estime qu’il doit se pencher sur les questions suivantes :

    • La propriété et la structure de gouvernance de la station proposée respecteraient-elles les critères énoncés dans Politique relative à la radio de campus et à la radio communautaire, politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2010-499, 22 juillet 2010 (la Politique)?

    • La proposition du demandeur reflèterait-elle le mandat des stations communautaires énoncé dans la Politique, y compris le fait de contribuer à la diversité dans la programmation, le reflet de la communauté et le développement de bénévoles et du talent local?

Propriété et structure de gouvernance de la station proposée

  1. La Politique déclare qu’une entreprise de programmation de radio communautaire en développement doit être détenue, exploitée, gérée et contrôlée par un organisme sans but lucratif qui donne avant tout aux communautés qu’elle sert l’occasion d’adhérer et de participer à sa gestion, à son exploitation et à sa programmation.

  2. En réponse aux questions du personnel du Conseil, le demandeur a indiqué que le titulaire proposé serait Said Afrajy, au nom d’une société sans but lucratif devant être constituée, et a confirmé que M. Afrajy en serait le premier dirigeant et l’unique directeur. Il a toutefois déposé des règlements administratifs préliminaires qui prévoient des questions comme l’émission d’actions et le versement de dividendes et qui font de nombreuses références à la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario, laquelle s’applique aux sociétés avec capital-actions. Enfin, le demandeur a affirmé que M. Afrajy serait en contrôle selon une entente initiale, sans pour autant fournir une copie de l’entente.

  3. L’une des principales méthodes utilisées par le Conseil pour déterminer si un demandeur satisfait aux exigences énoncées dans la Politique est l’analyse des documents constitutifs de l’organisme sans but lucratif (règlements administratifs, lettres patentes) et de toute autre entente qui ont une incidence sur sa gouvernance (participation, prise de décision et contrôle effectif). À cet égard, malgré les affirmations du demandeur qu’il satisferait aux exigences de la Politique, il n’a pas fourni au Conseil les renseignements pertinents décrivant comment le titulaire proposé respecterait ces exigences. Précisément, le demandeur n’a ni fourni de documents constitutifs conformes à un organisme sans but lucratif devant être enregistré en Ontario, ni d’autres ententes ou renseignements relatifs aux mécanismes de gouvernance de l’organisme sans but lucratif, y compris l’entente sur le contrôle initial. De plus, il n’a pas présenté un cadre de gouvernance qui permettrait principalement aux membres de la communauté desservie d’adhérer à la station et de participer à sa gestion, à son exploitation et à sa programmation.

  4. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil est d’avis que le demandeur n’a pas démontré que le titulaire proposé répondrait aux exigences en matière de propriété et de gouvernance énoncées dans la Politique.

Proposition du demandeur en lien avec le mandat des stations communautaires

  1. Tel qu’énoncé dans la Politique, le Conseil s’attend à ce que les stations de radio communautaire offrent des programmations différentes, par leur style et leur substance, de celles que fournissent les autres composantes du système de radiodiffusion et en particulier les stations de radio commerciale et la Société Radio-Canada. Cette programmation devrait être composée de musique, en particulier de musique canadienne, qui n’est généralement pas diffusée sur les ondes des stations commerciales (y compris de la musique pour auditoire spécialisé et des styles de musique populaire rarement diffusés), des émissions de fond de créations orales et des émissions s’adressant à des groupes communautaires précis. De plus, la Politique précise que la programmation locale doit être produite en partie par des bénévoles et que les stations de campus et communautaires doivent offrir une programmation basée sur les besoins et les intérêts de leurs collectivités et faire la promotion d’une relève artistique canadienne privilégiant les talents locaux dans les domaines de la musique et de la création orale.

  2. Le Conseil estime que le demandeur n’a pas démontré qu’il fournirait une diversité d’émissions, de créations orales et de reflet de la communauté, comme le prévoit la Politique. Plus précisément, lorsqu’on lui a demandé de préciser ses plans pour favoriser la diversité lors de la diffusion d’opinions, de contenu de créations orales et de musique, ainsi que la participation et la formation des bénévoles, le demandeur a indiqué qu’il a collaboré avec la communauté arabe et qu’il a une large grille horaire et compte 70 bénévoles, sans toutefois préciser de mesures concrètes pour faciliter l’accès de la collectivité à la programmation, promouvoir la disponibilité de la formation dans l’ensemble de la collectivité ou fournir une formation et une supervision continues aux membres de la collectivité qui désirent participer aux activités de radiodiffusion. De même, le demandeur n’a ni déposé de renseignements sur le développement des talents locaux, ni fourni de plans concrets relativement à la promotion et à la présentation de musique de la relève artistique canadienne, d’artistes locaux et d’artistes dont les œuvres sont rarement entendues sur les ondes d’autres stations.

  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que le demandeur n’a pas fourni suffisamment de renseignements pour permettre une évaluation appropriée de ses plans relatifs à la participation de bénévoles et au développement de talents locaux. Il  n’est donc pas convaincu que le demandeur comprend l’importance de ces éléments dans le cadre de l’exploitation d’une station de radio communautaire.

  4. De façon plus générale, les stations communautaires ont comme mandat de refléter la diversité des collectivités qu’elles desservent. Leur objectif n’est pas de cibler une seule communauté (linguistique, ethnique ou autre), mais plutôt d’offrir des émissions de créations orales qui reflètent les points de vue et les préoccupations de divers groupes culturels, y compris les communautés minoritaires de langue officielle et les communautés de langue tierce. À cet égard, le Conseil note que le demandeur souhaite consacrer 57 % de la semaine de radiodiffusion à des émissions en langues tierces. Étant donné que le marché radiophonique de Mississauga est desservi par plusieurs stations de radio à caractère ethnique, ceci exigerait une exception à l’article 7(4)b) du Règlement, lequel établit un seuil maximal de 15 % de toute semaine de radiodiffusion relativement à la diffusion d’émissions en langues tierces par les titulaires de radio AM ou FM autorisés à exploiter une station communautaire ou de campus dans un marché avec au moins une station à caractère ethnique. Le demandeur n’a pas fourni de justification à l’appui d’une telle exception.

  5. Le demandeur propose également de consacrer l’ensemble de sa programmation à des émissions à caractère ethnique. Par conséquent, même s’il confirme qu’il respecterait les autres exigences qui s’appliquent généralement aux stations de radio communautaires en développement, il appert au Conseil que la station serait exploitée comme une station de radio commerciale à caractère ethnique, exploitée principalement par des bénévoles, plutôt que comme une station de radio communautaire en développement au sens de la Politique. Le Conseil conclut donc que la proposition du demandeur ne reflèterait pas adéquatement le mandat des stations communautaires énoncé dans la Politique.

  6. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que le demandeur n’a pas déposé une demande de qualité ou démontré une compréhension approfondie de la Politique et d’autres politiques et règlements importants concernant l’exploitation d’entreprises de radio communautaire en développement.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil n’est pas convaincu que la présente demande est conforme aux dispositions propres aux stations de radio communautaire en développement énoncées dans la Politique.

  2. Par conséquent, le Conseil refuse la demande présentée par Said Afrajy, au nom d’une société sans but lucratif devant être constituée, en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une entreprise de programmation de radio AM communautaire en développement de faible puissance à Mississauga.

Secrétaire générale

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