Décision de télécom CRTC 2016-183

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Ottawa, le 13 mai 2016

Numéro de dossier : 8662-D53-201510371

DiversityCanada Foundation et Fédération nationale des retraités – Demande de révision et de modification de l’ordonnance de télécom 2015-240 concernant les frais liés à leur participation à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2015-211

Le Conseil rejette la demande de la DiversityCanada Foundation (DiversityCanada) et de la Fédération nationale des retraités en vue de réviser et de modifier l’ordonnance de télécom 2015-240. Le Conseil estime qu’il n’a pas commis d’erreur dans son application ou interprétation des critères d’admissibilité pour l’attribution de frais. De plus, le Conseil estime que les demandeurs n’ont pas démontré un manquement à l’équité procédurale. Finalement, le Conseil estime qu’il est nécessaire de mettre en place des mesures procédurales supplémentaires afin de répondre aux multiples instances amorcées par DiversityCanada sur une seule question déjà réglée.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de la DiversityCanada Foundation (DiversityCanada), en son propre nom et au nom de la Fédération nationale des retraités (FNR) [collectivement DiversityCanada/FNR ou les demandeurs], datée du 2 septembre 2015, dans laquelle elles demandaient que le Conseil révise et modifie l’ordonnance de télécom 2015-240 ou, sinon, qu’il reporte l’examen de la demande jusqu’à ce que le résultat des demandes connexes soit connu.
  2. Le Conseil a reçu une intervention concernant la demande de DiversityCanada/FNR de la part de la Société TELUS Communications (STC). On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 5 octobre 2015. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca ou au moyen du numéro de dossier indiqué ci-dessus.

Contexte

  1. En octobre 2012, le Conseil a amorcé une instance publique en vue d’établir un code obligatoire pour les services sans fil mobiles.
  2. DiversityCanada est intervenue dans le cadre de l’instance et a soutenu que le Conseil ne devrait pas permettre l’expiration des soldes cumulés dans les comptes des clients de services prépayés.
  3. Le 3 juin 2013, le Conseil a publié la politique réglementaire de télécom 2013-271 (politique relative au Code sur les services sans fil). Dans cette décision, le Conseil a déterminé, entre autres choses, que même si les soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés peuvent expirer, les fournisseurs de services sans fil doivent maintenir les comptes des clients de services prépayés ouverts, sans frais, pendant au moins sept jours après l’expiration d’une carte activée, afin de donner plus de temps au client pour ajouter de l’argent dans son compte et lui permettre ainsi de conserver son solde de compte prépayé.
  4. Après l’entrée en vigueur de la politique relative au Code sur les services sans fil, DiversityCanada/FNR ont déposé une demande au Conseil afin qu’il révise et modifie ses conclusions concernant les soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés. Le Conseil a rejeté la demande de DiversityCanada/FNR dans la décision de télécom 2014-101, rappelant que la preuve au dossier de l’instance relative au Code sur les services sans fil corroborait la conclusion ultime du Conseil sur cette question et concluant que DiversityCanada/FNR n’avaient démontré aucune erreur.
  5. DiversityCanada/FNR ont subséquemment déposé une autre demande au sujet des soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés. Dans ce cas, les demandeurs ont contesté la légitimité de la politique de la Société TELUS Communications (STC) sur les soldes importants de comptes prépayés, au motif, entre autres, qu’elle contrevient au Code sur les services sans fil et à la Loi sur les télécommunications (Loi). Dans la décision de télécom 2015-211, le Conseil a rejeté la demande, dressant la liste des façons dont les arguments des demandeurs présentaient une mauvaise interprétation ou visaient une application erronée du Code sur les services sans fil et de la Loi.
  6. Dans chacune des instances susmentionnées, DiversityCanada a, seule en son propre nom ou autrement, soumis au Conseil une demande d’attribution de frais pour sa participation. Dans le cas de l’instance relative au Code sur les services sans fil, DiversityCanada s’est vu attribuer des frais, bien que le montant demandé ait été jugé excessif et qu’il ait été considérablement réduit.
  7. Quant à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2014-101, tous les frais ont été refusés à DiversityCanada/FNR.
  8. DiversityCanada/FNR ont déposé une demande de révision et de modification du rejet de la demande d’attribution de ces frais, laquelle a également été rejetée. Une demande distincte d’attribution de frais relatifs à la participation des demandeurs à l’instance de révision et de modification a subséquemment été rejetée.
  9. Dans l’ordonnance de télécom 2015-240, l’ordonnance faisant actuellement l’objet d’un examen, le Conseil a rejeté la demande de DiversityCanada/FNR pour l’attribution de frais liés à l’instance ayant mené à la décision de télécom 2015-211. Le Conseil a déterminé que DiversityCanada/FNR ne l’avaient pas aidé à mieux comprendre les questions examinées, ne répondant pas ainsi au critère de l’alinéa 68b) des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (Règles de procédure). Par conséquent, les demandeurs n’avaient pas droit à une attribution de frais.
  10. Le Conseil a indiqué clairement que les observations des demandeurs reposaient sur un manque de compréhension du cadre réglementaire du Conseil, surtout en ce qui concerne l’hypothèse des demandeurs selon laquelle les soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés devraient être traités comme des dépôts en espèces. Le Conseil a également noté qu’en amorçant plusieurs instances qui étaient toutes ultimement liées à la pertinence des politiques du Conseil en matière de soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés, DiversityCanada a miné sa crédibilité et a donc compromis sa capacité de représenter les abonnés.

Critères de révision et de modification

  1. Dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, le Conseil a établi les critères qu’il utilise pour évaluer les demandes de révision et de modification déposées en vertu de l’article 62 de la Loi. Plus précisément, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale, résultant, par exemple :
    • d’une erreur de droit ou de fait;
    • d’un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision;
    • du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans l’instance initiale;
    • d’un nouveau principe découlant de la décision.

Questions

  1.  Le Conseil a établi qu’il devait se prononcer sur les questions suivantes dans la présente décision :
    • Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2015-240?
    • Y aurait-il lieu que le Conseil reporte l’examen de la présente demande?
    • D’autres mesures procédurales sont-elles nécessaires pour permettre au Conseil de répondre aux multiples instances amorcées par DiversityCanada sur une seule question déjà réglée?

Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2015-240?

Interprétation et application d’un critère d’attribution de frais
  1. DiversityCanada/FNR ont soutenu que le Conseil a mal interprété le critère d’attribution de frais énoncé à l’alinéa 68b) des Règles de procédure en présumant que le rejet des arguments des demandeurs dans le cadre de l’instance relative à la politique de la STC sur les soldes importants de comptes prépayés fait en sorte qu’elles n’ont pas aidé à mieux comprendre les questions examinées.
  2. Les demandeurs ont également soutenu que les Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais (Lignes directrices) du Conseil, telles qu’elles sont énoncées dans la politique réglementaire de télécom 2010-963, prévoient des normes objectives que le Conseil doit respecter au moment de déterminer l’attribution de frais.
  3. En outre, DiversityCanada/FNR ont fait valoir que le Conseil a commis une erreur en appliquant incorrectement le critère d’attribution de frais, plus précisément en concluant de manière déraisonnable que les arguments des demandeurs n’ont pas aidé à mieux comprendre les questions examinées du fait qu’ils n’ont pas soulevé de problèmes réels que le Conseil pourrait examiner.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Selon l’article 56 de la Loi, le Conseil dispose d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour déterminer s’il convient d’attribuer des frais et comment le faire. Le Conseil a adopté les Règles de procédure afin d’établir les critères qu’il utilisera pour examiner les demandes d’attribution de frais. Il a également publié les Lignes directrices, qui contiennent une liste de certains facteurs que le Conseil doit prendre en considération au moment d’appliquer les critères d’attribution de frais, bien que les Lignes directrices elles-mêmes reconnaissent explicitement que la liste n’est ni contraignante ni exhaustive.
  2. Comme il a été mentionné dans une décision précédente à laquelle DiversityCanada était partie, le Conseil examine chaque demande d’attribution de frais en fonction de leur bien­-fondé, sans égard au résultat de l’instance principaleRetour à la référence de la note de bas de page 1. Cette démarche a été appliquée dans l’affaire faisant l’objet de l’examen.
  3. Contrairement à la position des demandeurs, le Conseil n’a pas interprété ce critère comme signifiant qu’il doit être d’accord avec les observations d’un demandeur dans le cadre de l’instance principale.
  4. Le Conseil a plutôt pris en compte le fait qu’il a examiné et rejeté les opinions de DiversityCanada/FNR sur les soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés dans deux décisions antérieuresRetour à la référence de la note de bas de page 2, et que les autres observations de DiversityCanada/FNR formulées relativement aux soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés étaient clairement fondées sur une importante incompréhension du cadre juridique et réglementaire pertinent. Le Conseil n’était pas convaincu que ces observations, qui avaient une valeur juridique et politique négligeable, soulevaient un problème réel et nouveau. Par conséquent, le Conseil a exercé son pouvoir discrétionnaire pour déterminer que les demandeurs n’ont pas aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées.
  5. Par conséquent, DiversityCanada/FNR n’ont pas démontré que le Conseil a mal interprété ou appliqué incorrectement le critère d’attribution de frais énoncé à l’alinéa 68b) des Règles de procédure.
Devoir d’équité procédurale
  1. DiversityCanada/FNR ont indiqué que le Conseil avait manqué à son devoir d’équité procédurale en ne présentant pas de motifs suffisants justifiant son refus d’attribuer des frais. Plus particulièrement, les demandeurs ont soutenu que le Conseil aurait dû détailler chaque aspect de l’inadmissibilité des demandeurs à l’attribution de frais, plutôt que de se limiter à fournir des exemples illustrant en quoi ils n’ont pas soulevé de problèmes réels.
  2. DiversityCanada/FNR ont également soutenu que, en formulant une conclusion générale sur leur capacité de représenter les abonnés, le Conseil a compromis leur admissibilité à l’attribution de frais dans le cadre d’instances ultérieures, et ce, sans les en aviser ou leur offrir l’occasion de fournir des observations distinctes. En outre, les demandeurs ont soutenu que cette conclusion constituait de la censure et a nui à leur réputation et à celle de leur avocat, sans qu’ils aient reçu d’avis adéquat ni eu d’occasion de s’exprimer.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Bien que le Conseil doive présenter les motifs de ses conclusions concernant l’attribution de frais, ces motifs seront suffisants s’ils donnent à un organe d’examen, comme un tribunal, la capacité de déterminer si une décision a été dûment rendue. En effet, les demandeurs eux-mêmes ont reconnu ce principe dans leurs observations. Le Conseil a présenté ses motifs aux paragraphes 8 à 13 de l’ordonnance de télécom 2015-240, et ces motifs démontrent bien le fait que les demandeurs ne sont pas admissibles à l’attribution de frais parce qu’ils n’ont pas aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées.
  2. En ce qui concerne l’admissibilité des demandeurs à l’attribution de frais dans le cadre d’instances ultérieures, l’intention du Conseil n’était pas de trancher la question de savoir si les demandeurs représentaient un groupe ou une catégorie d’abonnés en particulier dans l’instance ayant mené à la décision de télécom 2015-211, ou si ce pourrait être le cas dans le cadre d’une instance ultérieure. Le Conseil a plutôt indiqué que le fait de lui demander de réexaminer la même question sans nouvelle preuve ou observation pertinente venait appuyer la perception selon laquelle les demandeurs n’ont pas compris le cadre réglementaire qu’ils cherchaient à modifier, minant ainsi leur crédibilité.
  3. Les demandeurs n’ont produit aucune preuve d’atteinte à la réputation. Dans la mesure où ils ont subi un tel préjudice, c’est parce qu’ils ont déposé de multiples demandes sur la même question, accompagnées de commentaires additionnels négligeables, après avoir été clairement informés, à plusieurs reprises, que la question était réglée.
  4. Par conséquent, le Conseil conclut que DiversityCanada/FNR n’ont pas démontré de manquement au devoir d’équité procédurale.
Conclusion
  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil conclut qu’il n’existe aucun doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2015-240.

Y aurait-il lieu que le Conseil reporte l’examen de la présente demande?

  1. DiversityCanada/FNR ont demandé que, à titre subsidiaire, le Conseil reporte l’examen de leur demande jusqu’à ce que les demandes connexes aient été examinées. Le Conseil a rendu sa décision au sujet de la demande soumise par DiversityCanada/FNR visant la révision et la modification de la décision de télécom 2015-211. Les demandeurs ont également présenté deux pétitions au gouverneur en conseil, dont l’une avait déjé été rejetée au moment où DiversityCanada/FNR ont présenté leur demandeRetour à la référence de la note de bas de page 3. Au moment de publier la présente décision, l’autre pétition avait également été rejetéeRetour à la référence de la note de bas de page 4.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Bien que les demandes connexes soient superficiellement liées à la question à trancher en l’espèce, en ce sens qu’elles ont trait à DiversityCanada/FNR et à l’attribution de frais, l’examen de la présente demande est fondé sur l’application des critères de révision et de modification aux circonstances particulières du cas. En outre, les pétitions ont maintenant été rejetées.
  2. Comme il n’y a aucun fondement justifiant le report de l’examen de la présente demande, le Conseil rejette la demande présentée par DiversityCanada/FNR.

D’autres mesures procédurales sont-elles nécessaires pour permettre au Conseil de répondre aux multiples instances amorcées par DiversityCanada sur une seule question déjà réglée?

  1. Malgré le libellé clair et catégorique des multiples décisions dans lesquelles les observations des demandeurs sur les soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés ont été rejetées, et le libellé tout aussi clair et catégorique des décisions correspondantes relatives à l’attribution des frais, les demandeurs ont continué de déposer des demandes, chacune mettant ultimement en doute les politiques du Conseil concernant les soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés.
  2. Dans l’ordonnance de télécom 2015-132, le Conseil a avisé les demandeurs que s’ils cherchaient à obtenir un résultat différent auprès du Conseil sur cette question, cela constituerait une utilisation déraisonnable des ressources du Conseil. Dans l’ordonnance de télécom 2015-240, le Conseil a réitéré sa déclaration, tout en indiquant également aux demandeurs les répercussions qu’a ce flux continu de demandes sur leur crédibilité en tant qu’intervenants dans les instances du Conseil. Nonobstant ces observations, les demandeurs ont depuis déposé deux autres demandes de révision et de modification, ainsi que des demandes d’attribution de frais connexes, relativement à la même question.
  3. Compte tenu de ce qui précède, si le Conseil reçoit une autre demande de la part de DiversityCanada, agissant seule en son propre nom ou autrement, qui ultimement concernerait la pertinence des politiques du Conseil relatives aux soldes de comptes liés aux services sans fil prépayés, le Conseil a l’intention de renvoyer sommairement la demande à DiversityCanada. Bien que le Conseil ait l’intention de présenter des motifs à DiversityCanada justifiant le renvoi de la demande, le Conseil n’a pas l’intention d’examiner le bien-fondé d’une telle demande.  
  4. Cette mesure est nécessaire pour contrer l’utilisation continue et déraisonnable des ressources du Conseil causée par les multiples instances amorcées par DiversityCanada sur cette question dûment réglée.

Conclusion

  1. Étant donné que le Conseil conclut qu’il n’existe aucun doute réel quant au bien-fondé de l’ordonnance de télécom 2015-240, et qu’il ne serait pas approprié de reporter l’examen de la demande, le Conseil rejette la demande de révision et de modification de cette ordonnance présentée par DiversityCanada/FNR.

Secrétaire générale

Documents connexes

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Voir la décision de télécom 2015-131.

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Note de bas de page 2

Voir la politique réglementaire de télécom 2013-271 et la décision de télécom 2014-101.

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Note de bas de page 3

Voir le décret C.P. 2015-0248.

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Note de bas de page 4

Voir le décret C.P. 2016-0200.

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