Décision de télécom CRTC 2016-247

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Ottawa, le 29 juin 2016

Numéro de dossier : 8662-M50-201512145

Managed Network Systems, Inc. – Demande de révision et de modification de certaines conclusions énoncées dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 concernant l’élimination progressive de l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées

Le Conseil rejette la demande de Managed Network Systems, Inc. pour que le Conseil révise et modifie la décision qu’il a rendue dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 visant l’élimination de l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées, au terme d’une période d’élimination progressive de trois ans.

Contexte

Lignes locales dégroupées

  1. Les lignes locales dégroupées procurent des voies de transmissionFootnote 1 entre les locaux d’un utilisateur final et le central d’une entreprise de services locaux titulaire (ESLT) au moyen d’une installation d’accès par fil de cuivre. Ces voies de transmission peuvent être utilisées par les concurrents pour la prestation de services de téléphonie locale et d’accès Internet à des clients des services de résidence et d’affaires.
  2. Dans la décision de télécom 97-8, le Conseil a exigé que les ESLT visées dégroupent leurs installations d’accès locales afin de rendre les lignes locales dégroupées accessibles aux entreprises de services locaux concurrentes (ESLC) sous forme de services de gros afin de soutenir la concurrence.
  3. Dans la décision de télécom 2008-17, le Conseil a maintenu les obligations existantes imposées aux ESLT visées de fournir des lignes locales dégroupées. Les lignes locales dégroupées ont été désignées comme un service essentiel conditionnel, au motif qu’il n’existait pas, pour les concurrents, de solutions de rechange de gros viables pour le service et qu’il ne serait pas pratique ou faisable pour eux de reproduire la fonctionnalité de tels services.

Instance amorcée à la suite de l’avis de consultation de télécom 2013-551

  1. Dans l’avis de consultation de télécom 2013-551, le Conseil a amorcé une instance afin d’examiner les questions liées aux services de gros et aux politiques connexes. Dans cette instance, le Conseil a notamment examiné le bien-fondé des catégories de services de gros établies précédemment ainsi que les services qu’il faut rendre obligatoires ou pour lesquels l’obligation doit être maintenue, le cas échéant.
  2. Le Conseil a rendu ses décisions sur les services filaires de gros, y compris les lignes locales dégroupées, dans la politique réglementaire de télécom 2015-326. Ces décisions sur le choix des services qui doivent être obligatoires étaient fondées sur l’application du critère des services essentiels (ci-après l’évaluation du caractère essentiel)Footnote 2 et corroborées par un ensemble de considérations stratégiquesFootnote 3.
  3. Dans son évaluation des services filaires de gros en fonction des trois conditionsFootnote 4 de l’évaluation du caractère essentielFootnote 5, le Conseil a établi que, pour qu’un service de gros soit reconnu comme étant essentiel, il doit répondre aux trois conditions établissant son caractère essentiel. Le Conseil a conclu que les lignes locales dégroupées :
    • répondent à la condition relative à l’intrant de l’évaluation du caractère essentiel au sein des tranches tarifairesFootnote 6 A, B, C et D dans les provinces de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, de l’Ontario et du Québec, étant donné que les lignes locales dégroupées dans ces régions demeurent un intrant permettant aux concurrents de fournir des services de télécommunication vocale destinés aux marchés en aval des services locaux filaires de résidence et d’affaires;
    • répondent à la condition relative à la reproductibilité de l’évaluation du caractère essentiel, étant donné qu’il n’est ni pratique ni faisable pour les concurrents de reproduire la fonctionnalité des lignes locales dégroupées;
    • ne répondent pas à la condition relative à la concurrenceFootnote 7 de l’évaluation du caractère essentiel, étant donné que l’élimination de l’accès imposé aux lignes locales dégroupées n’aurait pas d’effet important, aujourd’hui et à l’avenir, sur la concurrence en matière de services téléphoniques locaux de résidence et d’affaires, et ce, peu importe la circonscription ou le territoire de desserte des ESLTFootnote 8.
  1. Étant donné que les lignes locales dégroupées ne répondent pas aux trois conditions de l’évaluation du caractère essentiel à l’échelle du pays, et puisqu’il n’y a aucune raison stratégique valable justifiant la nécessité de continuer à imposer la fourniture de ces installationsFootnote 9, le Conseil a conclu que les lignes locales dégroupées n’étaient pas essentielles et que leur fourniture ne serait plus imposée. Dans les circonscriptions où il n’y avait pas de lignes locales dégroupées en service, le Conseil a déterminé que les lignes locales dégroupées doivent faire l’objet d’une abstention de réglementation, entrant en vigueur le 22 juillet 2015.
  2. Cependant, dans les circonscriptions où il y a une demande pour des lignes locales dégroupées, le Conseil a conclu qu’une période d’élimination progressive de trois ans (c.-à-d. jusqu’au 22 juillet 2018) des lignes locales dégroupées permettrait aux concurrents de revoir leurs exigences en matière d’approvisionnement et de prendre les mesures nécessaires. Pendant la période d’élimination progressive, les lignes locales dégroupées devaient demeurer accessibles dans ces circonscriptions. On a offert deux options aux ESLT pour mettre en œuvre l’élimination progressive des lignes locales dégroupées :
    • si une ESLT envisage de continuer à rendre disponibles les lignes locales dégroupées après la fin de la période d’élimination progressive, l’ESLT peut choisir de présenter une demande d’abstention concernant la fourniture de ses lignes locales dégroupées. De telles demandes ne doivent pas être présentées plus tôt qu’un an avant la fin de la période d’élimination progressive;
    • si, toutefois, l’objectif d’une ESLT est de mettre fin à la disponibilité des lignes locales dégroupées, elle devra alors fournir un avis écrit aux clients existants et au Conseil, et ce, un an avant la fin de la période d’élimination progressive.

Demande

  1. Le Conseil a reçu une demande de Managed Network Systems, Inc. (MNSi), datée du 20 octobre 2015, dans laquelle l’entreprise demandait au Conseil de réviser et de modifier la décision qu’il a rendue dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 visant l’élimination progressive sur trois ans de l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées. MNSi a fait valoir que le Conseil a commis des erreurs de fait et des erreurs dans l’examen des principes fondamentaux soulevés dans l’instance initiale relativement à la prévalence des lignes locales dégroupées et à l’application de la considération relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel. MSNi a également indiqué, étant donné ces erreurs, qu’il existe un doute réel quant à la nature suffisante de la période établie pour l’élimination progressive des lignes locales dégroupées visant à atténuer les répercussions sur les consommateurs et les concurrents.
  2. MNSi a demandé au Conseil de modifier ses conclusions quant aux lignes locales dégroupées, afin que d’autres conditions soient imposées aux ESLT après la période d’élimination progressive des lignes locales dégroupées de trois ans, à savoir :
    • les ESLT ne devraient pas être autorisées à cesser de fournir un accès aux lignes locales dégroupées dans une circonscription avant qu’il ne reste moins de 1 % des services téléphoniques filaires locaux de résidence et d’affaires de détail fournis au moyen de lignes locales dégroupées dans cette circonscription;
    • dans les circonscriptions où les ESLT continuent de fournir un accès aux lignes locales dégroupées en vertu d’une abstention de réglementation, le tarif mensuel de ces lignes visées par une abstention de réglementation doit être limité par un prix plafond, équivalant au tarif en vigueur à la date où l’abstention de réglementation a été accordée, et ce, jusqu’à ce qu’il reste moins de 1 % des services téléphoniques locaux de résidence et d’affaires de détail fournis au moyen de lignes locales dégroupées dans la circonscription.
  1. Le Conseil a reçu des interventions de la part de Bell Canada et de la Société TELUS Communications (STC) concernant la demande de MNSi.
  2. On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de cette instance, lequel a été fermé le 15 janvier 2016. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca ou au moyen du numéro du dossier indiqué ci-dessus.

Questions

  1. Dans le bulletin d’information de télécom 2011-214, le Conseil a énoncé les critères qu’il utiliserait pour évaluer les demandes de révision et de modification déposées conformément à l’article 62 de la Loi sur les télécommunications (Loi). En particulier, le Conseil a déclaré que les demandeurs doivent démontrer qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la décision initiale résultant, par exemple, i) d’une erreur de droit ou de fait; ii) d’un changement fondamental survenu dans les circonstances ou les faits depuis la décision; iii) un défaut de tenir compte d’un principe fondamental soulevé lors de l’instance initiale ou iv) de l’existence d’un nouveau principe ayant découlé de la décision.
  2. Le Conseil a établi qu’il devait se prononcer sur les questions suivantes dans la présente décision :
    • Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé de la décision du Conseil portant que l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées doit être éliminé d’ici trois ans?
    • Dans l’affirmative, la solution proposée par MNSi, selon laquelle d’autres conditions devraient être imposées aux ESLT après la période d’élimination progressive de trois ans est-elle appropriée?

Existe-t-il un doute réel quant au bien-fondé de la décision du Conseil portant que l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées doit être éliminé d’ici trois ans?

Positions des parties
  1. MNSi a fait valoir que le Conseil a commis une erreur en examinant la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel sur le plan des tranches tarifairesFootnote 10 plutôt que sur le plan de la circonscription de l’ESLT. MNSi est d’avis que le Conseil n’a pas précisé, dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, les motifs administratifs qui l’ont mené à conclure qu’il convenait d’examiner la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel en fonction des tranches tarifaires. MNSi a soutenu que la prévalence des lignes locales dégroupées varie considérablement d’une circonscription à l’autre et que, même si la prévalence est en baisse dans certaines circonscriptions, elle est en hausse dans d’autres. Ainsi, l’examen de la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel en fonction de données nationales ou des tranches tarifaires dans chaque province ne permettrait pas d’obtenir une image exacte de la prévalence ou des tendances dans les différentes circonscriptions.
  2. MNSi a indiqué que les seules données sur la demande pour des lignes locales dégroupées citées dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 consistent en une opinion de Bell Canada selon laquelle moins de 1 % des clients de services téléphoniques locaux de détail reçoit ces services au moyen de lignes locales dégroupées. En outre, on ne sait pas si le Conseil s’est appuyé sur ces données, mais s’il l’a fait, il n’aurait pas dû, puisque la prévalence des lignes locales dégroupées est supérieure sur le marché en aval concernéFootnote 11.
  3. MNSi a précisé que les lignes locales dégroupées ne sont actuellement offertes que dans 140 circonscriptions, représentant moins de 5 % des circonscriptions au Canada. Étant donné le petit nombre de circonscriptions où des lignes locales dégroupées sont actuellement fournies, il n’aurait pas été très difficile, pour l’une ou l’autre des parties, d’examiner la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel au moyen de données propres aux circonscriptions. MNSi a également fait valoir qu’il n’y a aucun motif raisonnable justifiant l’examen en fonction des tranches tarifaires et l’application des mêmes conclusions générales à chaque circonscription. L’application de la condition relative à la concurrence selon les circonscriptions, avec des données propres aux circonscriptions, mènerait probablement à une conclusion différente.
  4. MSNi a également indiqué, étant donné les erreurs de fait et les erreurs liées à l’examen des principes fondamentaux, qu’il existe un doute réel quant au bien-fondé de la période établie pour l’élimination progressive visant à atténuer les répercussions sur les consommateurs et les concurrents. À cet égard, MSNi a argué que la période d’élimination progressive de trois ans, établie comme mesure visant à atténuer les répercussions sur les consommateurs et les concurrents, n’est pas adéquate, étant donné le nombre de consommateurs touchés et les investissements considérables des concurrents pour assurer l’offre de services au moyen de lignes locales dégroupées.
  5. Bell Canada a fait valoir que le Conseil n’a pas commis d’erreur concernant les lignes locales dégroupées, qu’il a conclu avec raison que les lignes locales dégroupées ne sont pas essentielles pour maintenir la concurrence en aval et donc, ne répondent pas aux conditions de l’évaluation du caractère essentiel. Bell Canada a également précisé qu’il n’y a aucune considération stratégique justifiant que l’on continue d’obliger la fourniture de lignes locales dégroupées au-delà de la période d’élimination progressive de trois ans prescrite dans la politique réglementaire de télécom 2015-326. Bell Canada a fait valoir qu’il n’existe aucun doute réel quant à la faiblesse de la prévalence nationale des lignes locales dégroupées pour les services téléphoniques locaux et que la demande de lignes locales dégroupées chez les concurrents diminue depuis quelque temps.
  6. La STC a indiqué que MNSi n’a pas démontré que le Conseil avait mal interprété ou appliqué à tort la preuve factuelle dont il était saisi ni qu’il a omis de tenir compte des principes fondamentaux soulevés dans l’instance initiale concernant la prévalence des lignes locales dégroupées dans son application de la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel.
  7. La STC a aussi précisé que, dans le cas des lignes locales dégroupées, le regroupement de données en fonction des tranches tarifaires était approprié parce que les circonscriptions comprises dans une tranche tarifaire partagent les mêmes caractéristiques, comme le nombre et la longueur des lignes.
  8. Dans sa réplique, MNSi a fait valoir que, bien que certaines caractéristiques soient partagées entre les circonscriptions d’une tranche tarifaire, d’autres caractéristiques très pertinentes diffèrent considérablement, comme la présence d’un concurrent qui utilise des lignes locales dégroupées, la prévalence des lignes locales dégroupées et l’augmentation ou la baisse de la demande pour des lignes locales dégroupées.
Résultats de l’analyse du Conseil
  1. Les conclusions du Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 relativement aux lignes locales dégroupées étaient fondées sur un dossier exhaustif et un grand nombre d’éléments de preuve fournis par plusieurs parties, y compris toutes les grandes ESLT et plusieurs concurrents utilisant des lignes locales dégroupées pour fournir leurs services. Ce dossier a été monté grâce à plusieurs rondes d’interventions et d’interrogatoires, et à la suite d’une audience; les lignes locales dégroupées y ont fait l’objet de longues discussions par les parties ayant pris part à cette instance.
  2. Le Conseil a déclaré au paragraphe 35 de la politique réglementaire de télécom 2015-326 qu’en appliquant l’évaluation du caractère essentiel, il conviendrait peut-être mieux de regrouper les données, du fait qu’il serait très onéreux de recueillir des données pour chaque marché de produits des services de gros et pour chaque région (p. ex. une collectivité ou une zone d’indicatif régional) au pays et du fait que certains marchés connaissent les mêmes conditions de marché concurrentielles. Le Conseil a ajouté qu’il faut trouver un équilibre entre l’utilisation de définitions utiles et pratiques pour les marchés de produits et les marchés géographiques ainsi que le fardeau administratif associé à la collecte et au traitement de grandes quantités de données.
  3. Il n’y avait pas suffisamment d’information au dossier de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2015-326 pour que le Conseil puisse examiner les lignes locales dégroupées en regard de l’évaluation du caractère essentiel en fonction des circonscriptions. Étant donné le nombre de circonscriptions au Canada (c.-à-d. environ 3 000) et la quantité d’information qui aurait été nécessaire pour examiner l’évaluation du caractère essentiel des lignes locales dégroupées dans chacune de ces circonscriptions, il était logique que le Conseil regroupe les circonscriptions en unités d’analyse plus vastes pour rendre sa décision dans la politique réglementaire de télécom 2015-326.
  4. Comme il est indiqué dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, une tranche tarifaire consiste en un groupe de circonscriptions ou de centres de commutation possédant des caractéristiques similaires telles que le nombre de lignes ou la longueur de celles-ci, et les lignes locales dégroupées sont fournies aux concurrents selon des tarifs conformes aux tranches tarifaires d’une ESLT. En outre, les circonscriptions comprises dans une tranche tarifaire partagent généralement des conditions comparables en termes de marché concurrentiel (p. ex. la présence de concurrents). Ces considérations viennent appuyer la décision du Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 d’utiliser les tranches tarifaires par territoire d’ESLT comme repère pour examiner les lignes locales dégroupées aux fins de l’évaluation du caractère essentiel.
  5. Étant donné que les lignes locales dégroupées ne sont actuellement fournies que dans un sous-ensemble de circonscriptions, MNSi a soutenu que le Conseil devrait examiner la condition relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel en fonction des circonscriptions plutôt qu’en fonction des tranches tarifaires, et que cette analyse mènerait probablement à une conclusion différente. Cependant, le dossier de la présente instance ne permet pas de corroborer cette affirmation.
  6. Les circonscriptions dans lesquelles les lignes locales dégroupées sont toujours fournies se situent presque toujours à l’intérieur des tranches tarifaires A à D, qui sont des tranches tarifaires englobant des zones urbaines et suburbaines. Il existe une concurrence dans toutes ces circonscriptions, non seulement de la part des fournisseurs de services s’appuyant sur les lignes locales dégroupées, mais aussi de la part d’entreprises de câblodistribution et de fournisseurs de services sans fil. En ce qui concerne les circonscriptions où les lignes locales dégroupées sont toujours fournies et qui ne s’inscrivent pas dans les tranches tarifaires A à DFootnote 12, même s’il n’y a pas d’entreprises de câblodistribution offrant des services téléphoniques locaux dans toutes ces circonscriptions, les clients de ces circonscriptions ont accès à d’autres options, comme des services de communication vocale sur protocole Internet (VoIP) et les services sans fil. Ainsi, le Conseil n’est pas convaincu que la décision qu’il a rendue dans la politique réglementaire de télécom 2015-326, selon laquelle toute répercussion serait minime, est incorrecte. Cette conviction est davantage corroborée dans le dossier ayant mené à cette décision qui a révélé que la faible prévalence des lignes locales dégroupées et la tendance d’utilisation de ces lignes ont connu une baisse continue au fil des ans (c.-à-d. une diminution d’environ 50 % de 2009 à 2013) et que l’on s’attend à ce cette diminution se poursuiveFootnote 13.
  7. Le Conseil estime que, même si la demande de lignes locales dégroupées augmentait dans une circonscription donnée, l’élimination progressive de l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées n’aurait probablement pas une incidence négative importante sur le marché des services téléphoniques filaires locaux en aval. Comme il a été affirmé au paragraphe 185 de la politique réglementaire de télécom 2015-326, même si certains abonnés qui obtiennent leurs services locaux auprès de concurrents qui utilisent des lignes locales dégroupées devront changer de fournisseur de services locaux si les ESLT cessent de fournir des services au moyen de lignes locales dégroupées, ces abonnés auront toujours accès à plusieurs autres offres de services. Il en demeure ainsi même dans les circonscriptions où la prévalence des lignes locales dégroupées est plus importante.
  8. Les dossiers de la présente instance et de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2015-326 ne permettent pas d’établir que les lignes locales dégroupées sont utilisées pour desservir un groupe important d’utilisateurs finals sur le marché des services téléphoniques filaires locaux en aval dans l’une ou l’autre des circonscriptions où les lignes locales dégroupées sont toujours fournies. En outre, le dossier de la présente instance ne vient pas démontrer que l’élimination progressive de l’accès obligatoire des lignes locales dégroupées aurait une incidence négative considérable sur le marché des services téléphoniques filaires locaux en aval. Le dossier de l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2015-326 ne fournit pas non plus une telle preuve.
  9. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil estime qu’il n’a pas commis d’erreurs de fait ni d’erreurs dans l’examen des principes fondamentaux soulevés dans l’instance initiale relativement à la prévalence des lignes locales dégroupées et à l’application de la considération relative à la concurrence de l’évaluation du caractère essentiel.
  10. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que MNSi n’a pas démontré de doute réel quant au bien-fondé de sa décision selon laquelle l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées doit être éliminé progressivement d’ici trois ans.

Dans l’affirmative, la solution proposée par MNSi, selon laquelle d’autres conditions devraient être imposées aux ESLT après la période d’élimination progressive de trois ans, est-elle appropriée?

  1. Comme il a été conclu ci-dessus qu’il n’existe aucun doute réel quant au bien-fondé de la décision du Conseil dans la politique réglementaire de télécom 2015-326 selon laquelle l’accès obligatoire aux lignes locales dégroupées doit être éliminé progressivement d’ici trois ans, le Conseil conclut qu’il est inutile d’examiner la solution proposée par MNSi relativement aux lignes locales dégroupées.

Conclusion

  1. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil rejette la demande de MNSi.

Secrétaire générale

Documents connexes

Footnotes

Footnote 1

De façon générale, il existe deux types de lignes locales (type A et type B). Une ligne locale de type A est un trajet de transmission analogique qui accepte la transmission d’un signal à fréquence vocale. Une ligne locale de type B est un trajet de transmission numérique qui accepte la transmission d’un signal de type d’interface à débit primaire pour réseau numérique à intégration de services.

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Footnote 2

Comme il est énoncé au paragraphe 36 de la décision de télécom 2008-17, le Conseil a déterminé que pour être jugé essentiel, une installation, une fonction ou un service doit satisfaire à l’ensemble des conditions suivantes : a) l’installation est nécessaire comme intrant pour que les concurrents puissent offrir des services de télécommunication dans un marché pertinent en aval (condition relative à l’intrant); b) l’installation est contrôlée par une entreprise qui occupe une position dominante sur le marché en amont de telle sorte que le retrait de l’accès obligatoire à l’installation serait susceptible de réduire ou d’empêcher sensiblement la concurrence dans le marché pertinent en aval (condition relative à la concurrence); et c) il n’est ni pratique ni faisable pour les concurrents de reproduire la fonctionnalité de l’installation (condition relative à la reproductibilité). Voir aussi les paragraphes 33 à 46 de la politique réglementaire de télécom 2015-326.

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Footnote 3

Au paragraphe 51 de la politique réglementaire de télécom 2015-326, le Conseil a déclaré qu’il appliquera les considérations stratégiques suivantes afin d’éclairer, de soutenir ou d’infirmer une décision de prescrire la prestation d’un service de gros : i) bien public; ii) interconnexion; et iii) innovation et investissement.

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Footnote 4

Voir la note de bas de page 2.

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Footnote 5

Voir les paragraphes 172 à 202 de la politique réglementaire de télécom 2015-326.

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Footnote 6

Une tranche tarifaire consiste en un groupe de circonscriptions ou de centres de commutation possédant des caractéristiques similaires telles que le nombre de lignes ou la longueur de celles-ci. Si les critères appliqués pour classer les circonscriptions en tranches sont uniformes à l’échelle du pays, les tarifs des tranches peuvent varier en fonction des ESLT visées ou des régions au sein des territoires de desserte de celles-ci.

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Footnote 7

Deux éléments sont examinés concernant la condition relative à la concurrence : i) les conditions du marché en amont; en particulier, il s’emploiera à déterminer si une entreprise ou un groupe d’entreprises possède un pouvoir de marché et ii) l’incidence de tout pouvoir de marché en amont sur la concurrence dans le marché des services de détail en aval connexe.

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Footnote 8

La politique réglementaire de télécom 2015-326 s’applique aux ESLT suivantes : Bell Canada, MTS Inc., Saskatchewan Telecommunications et la Société TELUS Communications.

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Footnote 9

Le Conseil a notamment fait remarquer que la décision de ne plus imposer la fourniture des lignes locales dégroupées pourrait favoriser l’adoption par les consommateurs de services évolués ou nouveaux. Par exemple, les concurrents qui font passer leurs utilisateurs finals des services d’accès Internet de détail fournis par l’intermédiaire de lignes locales dégroupées à des services d’accès Internet fournis grâce aux services AHV de gros permettraient à leurs utilisateurs finals d’accéder à de nouveaux contenus ou applications qui étaient auparavant inaccessibles.

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Footnote 10

Une tranche tarifaire consiste en un groupe de circonscriptions ou de centres de commutation possédant des caractéristiques similaires telles que le nombre de lignes ou la longueur de celles-ci. Si les critères appliqués pour classer les circonscriptions en tranches tarifaires sont uniformes à l’échelle du pays, les tarifs des tranches peuvent varier en fonction des ESLT visées ou des régions au sein des territoires de desserte de celles-ci.

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Footnote 11

MNSi a fait valoir que les données issues du Rapport de surveillance des communications de 2014 du Conseil laissent entendre une prévalence d’environ 318 000 lignes locales dégroupées sur 15,9 millions de lignes, soit environ 2 % sur le plan national. L’estimation de MNSi est fondée sur les revenus annuels de 2013 provenant des lignes locales dégroupées (44 millions de dollars), divisés par le tarif à l’égard des lignes locales dégroupées de Bell Canada dans la tranche tarifaire B, soit 11,52 $, comme tarif mensuel moyen.

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Footnote 12

Quatre circonscriptions dans lesquelles les lignes locales dégroupées sont fournies se trouvent dans la tranche tarifaire E.

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Footnote 13

Voir les paragraphes 175, 176 et 182 de la politique réglementaire de télécom 2015-326.

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