ARCHIVÉ -  Avis Public CRTC 88-161

Cette page Web a été archivée dans le Web

Information archivée dans le Web à des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Les décisions, avis et ordonnances (DAO) archivés demeurent en vigueur pourvu qu'ils n'aient pas été modifiés ou annulés par le Conseil, une cour ou le gouvernement. Le texte de l'information archivée n'a pas été modifié ni mis à jour depuis sa date de mise en archive. Les modifications aux DAO sont indiquées au moyen de « tirets » ajoutés au numéro DAO original. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s'appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez obtenir cette information dans un autre format en communiquant avec nous.

Avis public

Ottawa, le 29 septembre 1988
Avis public CRTC 1988-161
L'ÉQUILIBRE EN MATIÈRE DE PROGRAMMATION DANS LES MÉDIAS D'ACCÈS COMMUNAUTAIRE
Documents connexes: Avis public portant sur l'émission intitulée "Air of Death" du 9 juillet 1970; avis public portant sur le Comité du "Miles for Millions" du 28 mars 1972; avis public intitulé "Politique relative aux entreprises de réception de radiodiffusion (télévision par câble)" du 16 décembre 1975; avis public intitulé "CFCF et la Loi 22" du 12 janvier 1976; avis public intitulé "Programmation portant à controverse dans le système de la radiodiffusion canadienne - Rapport sur les questions soulevées par la campagne de CFCF contre la Loi 22" du 24 février 1977; avis publics CRTC 1983-112 du 2 juin 1983, 1983-187 du 17 août 1983, 1985-194 du 26 août 1985, 1985-236 du 4 novembre 1985, 1987-196 du 1er septembre 1987 et 1988-121 du 29 juillet 1988; et la décision CRTC 88-694 du 29 septembre 1988.
La politique générale du Conseil en matière d'équilibre
La politique du Conseil en matière d'équilibre dans le système de la radiodiffusion canadienne repose sur le paragraphe 3d) de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi) qui stipule:
que la programmation offerte par le système de la radiodiffusion canadienne ... devrait fournir la possibilité raisonnable et équilibrée d'exprimer des vues différentes sur des sujets qui préoccupent le public .
Le Conseil a interprété cette exigence à plusieurs reprises. Dans l'avis public du 9 juillet 1970 intitulé "Air of Death", le Conseil a déclaré qu'il n'était pas nécessaire que chaque émission décrive tous les aspects d'une question, pourvu que les ques tions portant à controverse soient traitées de manière juste et honnête dans le cadre de l'ensemble de la programmation offerte par un titulaire.
Dans l'avis public du 28 mars 1972 intitulé "Miles For Millions", le Conseil a déclaré que la décision sur la question de savoir si un radiodiffuseur a manqué à son obligation d'assurer l'équilibre dans sa programmation dépendrait des circonstances de chaque cas.
Le Conseil s'est de nouveau penché sur la question de l'équilibre en 1976 et 1977, en réponse à des plaintes concernant une campagne menée par la station radiophonique CFCF Montréal en opposition au projet de loi 22 du Québec, intitulé Loi sur les langues officielles. Dans un avis en date du 24 février 1977, le Conseil a déclaré que chaque titulaire doit, dans sa propre programmation, assurer l'équilibre dans le traitement des questions d'intérêt public. Il a, dans cet avis, ajouté que le droit à la liberté d'expression n'a pas préséance sur le droit du public d'entendre des vues différentes, qu'il appartient aux radiodiffuseurs d'assurer l'équilibre, sous réserve d'une éventuelle évaluation publique par le Conseil, et que la nécessité pour les radiodiffuseurs d'assurer l'équilibre est la plus forte lorsque des questions très controversées sont en cause.
Dans son avis public CRTC 1983-112 du 2 juin 1983 concernant les émissions religieuses, le Conseil a réitéré sa position selon laquelle le moyen le plus efficace d'assurer l'équilibre dans la programmation qui porte à controverse consiste à exiger que chaque station individuelle atteigne cet équilibre dans la programmation qu'elle diffuse.
Enfin, le Conseil a affirmé que l'obligation d'assurer la possibilité équilibrée d'exprimer des vues différentes sur des sujets qui préoccupent le public ne s'applique pas dans le cas de propos offensants à l'égard de races ou d'autres groupes identifiables. De telles remarques vont à l'encontre des règlements du Conseil et ne doivent absolument pas être diffusés (les avis publics CRTC 1983-187 du 17 août 1983, 1985-236 du 4 novembre 1985, 1987-196 du 1er septembre 1987 et 1988-121 du 29 juillet 1988).
Bref, le Conseil est d'avis que les titulaires se doivent de discuter d'un large éventail de sujets dans leur programmation, y compris des questions qui préoccupent le public puisqu'il estime que l'on doit fournir aux membres du public la possibilité de se faire une opinion sur des questions controversées en leur présentant divers points de vue sur ces questions.
Selon le Conseil, l'exigence en matière d'équilibre peut être atteinte de la façon suivante:
a) Chaque entreprise doit se conformer à l'exigence de la Loi en matière d'équilibre dans sa propre programmation.
b) Dans la programmation, seule la partie traitant de questions qui préoccupent le public doit être équilibrée.
c) En général, il est nécessaire d'atteindre l'équilibre non pas dans chaque émission ou série d'émission, mais plutôt dans la programmation globale qu'offre chaque entreprise au cours d'une période raisonnable.
d) Afin d'atteindre l'équilibre, une durée égale ne doit pas nécessaire ment être accordée pour chaque point de vue. On peut s'attendre à ce que divers points de vue soient par ailleurs présentés au cours de la programmation offerte par l'entreprise à un téléspectateur ou à un auditeur assez régulier au cours d'une période raisonnable.
Le Conseil estime qu'il incombe au titulaire de décider si une question préoccupe le public ainsi que la façon dont l'équilibre sera atteint. Que ce soit en réponse à des plaintes ou pour d'autres raisons, le Conseil peut toutefois par la suite examiner le traitement que le titulaire a fait des questions controversées.
Les titulaires de service d'accès communautaire et l'équilibre
Dans le passé, dans l'application de sa politique en matière d'équilibre, le Conseil n'a établi aucune distinction entre les radiodiffuseurs conventionnels et ceux dont la programmation repose sur l'accès communautaire. Des questions sur l'équilibre et la programmation d'accès ont, toutefois, été récemment soulevées, en particulier relativement à deux titulaires.
A l'audience portant sur le renouvellement de la licence de CFRO-FM, une station MF communautaire qui dessert Vancouver, on a présenté une intervention portant que la station n'as sure pas l'équilibre dans sa programmation qui traite de questions qui préoccupent le public. La titulaire a répondu que son rôle consistait à donner une [TRADUCTION] "voix aux sans parole", en offrant une programmation que d'autres médias de la radiodiffusion ne dispensent pas généralement. Elle a soutenu qu'en adoptant ce rôle, CFRO-FM a en fait équilibré les points de vue présentés par d'autres radiodiffuseurs et a permis aux auditeurs de bénéficier de perspectives qui au trement ne leur seraient pas offertes.
Dans la décision CRTC 88-694 publiée aujourd'hui, le Conseil a renouvelé la licence de CFRO-FM du 1er octobre 1988 au 31 août 1991 et il a exigé que la titulaire lui soumette dans les trois mois un rapport exposant en détail comment elle compte satisfaire à l'obligation qui lui est faite de fournir un équilibre dans sa programmation durant la nouvelle période d'application de sa licence.
En 1987, le Conseil a reçu une plainte de Mme Helen Smolack de la Canadian Holocaust Remembrance Association (l'Association), au sujet d'une entrevue avec le gendre de M. John Demjanjuk portant sur le procès de ce dernier, diffusée au canal communautaire de la Rogers Cable T.V. Limited (Rogers). Dans sa réponse à l'enquête menée par le Conseil à ce sujet, Rogers a déclaré qu'elle s'était acquittée de sa responsabilité en matière d'équilibre en offrant une possibilité à l'Association d'exprimer son opinion, possibilité que celle-ci a refusée. Le Conseil a informé Rogers qu'elle devrait faire d'autres efforts pour trouver quelqu'un ayant un autre point de vue. Rogers a répliqué que si c'est à elle qu'il appartient de le faire, il lui faudrait rajuster sensiblement sa politique en matière d'accès.
Par la suite, l'Association canadienne de télévision par câble (l'ACTC) a écrit au Conseil le 12 avril 1988 pour exprimer ses préoccupations au sujet des répercussions des exigences d'équilibre sur la programmation d'accès. L'ACTC a fait valoir que la politique de télédistribution du Conseil pour le canal communautaire, exposée dans des énoncés de politique de 1971 et 1975, a attribué un rôle sensiblement différent au canal communautaire qu'aux radiodiffuseurs en direct. Selon elle, l'accès au système de la radiodiffusion par les résidents d'une localité desservie par un télédistributeur était la prémisse de base qui régissait la politique du Conseil à l'égard du canal communautaire.
L'ACTC a fait remarquer que l'exigence de l'accès signifie souvent que les personnes qui présentent des points de vue sur des questions préoccupant le public sont des "bénévoles" ou des personnes qui ont demandé l'accès aux installations afin d'exprimer leurs vues, tandis que pour les stations en direct, le personnel en ondes se compose habituellement d'employés. Elle estime donc [TRADUCTION] "qu'il serait à la fois raisonnable et opportun pour le CRTC, dans l'exercice de son rôle de surveillance, d'appliquer à la programmation communautaire une interprétation un peu moins lourde des mots de l'alinéa 3d) de la Loi relatifs à la programmation équilibrée, que celle qu'il applique à la programmation produite par ou pour le compte de radio diffuseurs en direct".
Le rôle des médias d'accès communautaire
Le Conseil a des attentes précises à l'égard de la radio communautaire et étudiante, et du canal communautaire du câble. Dans le cas de la radio communautaire, le Conseil a énoncé sa politique dans l'avis public CRTC 1985-194 du 26 août 1985 intitulé "L'examen de la radio communautaire". La définition d'une station de radio communautaire dans ce document se lit en partie comme suit:
Sa programmation doit être axée sur l'accessibilité de la collectivité et refléter les intérêts et les besoins spéciaux des auditeurs qu'elle est autorisée à desservir.
En discutant du rôle et du mandat de ces stations, le Conseil a ajouté qu'il s'attendait à ce qu'elles élaborent d'autres émissions innovatrices qui ajoutent à la diversité et à la variété des services radiophoniques offerts dans ces localités.
Un grand nombre de stations communautaires déploient des efforts par ticuliers pour rejoindre les groupes communautaires et les inviter à se pencher sur des questions qui les touchent. A cause de cette politique, les stations communautaires ont tendance à traiter un plus grand nombre de questions portant à controverse que la plupart des radiodiffuseurs conventionnels et, ainsi, elles doivent chercher à obtenir des vues différentes plus fréquemment, même si elles fonctionnent souvent avec des ressources limitées. Les stations de radio étudiantes doivent également consacrer beaucoup de temps aux émissions produites par les membres de la collectivité qu'elles desservent.
Quant au canal communautaire des entreprises de télédistribution, dans son document intitulé "Politique relative aux entreprises de réception de radiodiffusion (télévision par câble) en date du 16 décembre 1975, le Conseil a déclaré:
Bien que les titulaires de licence soient tenus responsables des émissions distribuées sur le canal communautaire, et qu'ils doivent permettre, de manière raisonnable et équilibrée, l'expression d'opinions divergentes sur des questions d'intérêt public, ils devraient aussi favoriser l'emploi du canal communautaire en vue de la diffusion d'idées et d'opinions originales sur un éventail de sujets et fournir à la communauté le plus d'occasions possible de s'exprimer.
Conclusion
Le Conseil continuera à interpréter l'alinéa 3d) de la Loi de sorte à imposer à tous les titulaires une responsabilité égale et identique, y compris les câblodistributeurs qui exploitent un canal communautaire et les titulaires des stations de radio communautaire et étudiante. D'après le Conseil, faire autrement serait injuste car cette responsabilité est nettement imposée à tous les titulaires par la Loi et elle est donc acceptée par ces derniers au cours du processus d'attribution de licences. Comme il a été précisé précédemment, seules les questions qui "préoccupent le public" doivent être équilibrées.
Le Conseil reconnaît que dans leur programmation, les stations communautaires et étudiantes et les canaux communautaires du câble incluent souvent des débats sur des sujets controversés qui ne sont pas traités dans les émissions d'autres titulaires. Il reconnaît aussi que le mandat spécial qu'ont les titulaires de stations communautaires et étudiantes et d'entreprises de télédistribution d'offrir l'accès à des groupes et à des personnes de la collectivité peut rendre plus difficile l'atteinte de l'équilibre sur des questions préoccupant le public. Néammoins, le Conseil ne veut d'aucune manière décourager l'accès au système de radiodiffusion par un large éventail de groupes et de particuliers de la collectivité, mais il désire préciser qu'il s'attend à ce que ces titulaires continuent de jouer un rôle important au chapitre de la disponibilité d'un forum pour l'expression de vues différentes sur des questions qui préoccupent le public.
Mécanimes en vue de répondre à l'exigence d'équilibre
Les titulaires, particulièrement ceux qui offrent des possibilités importantes d'accès aux membres des localités qu'ils desservent, trouvent par fois difficile d'assurer l'équilibre. Le Conseil a donc décidé de suggérer un certain nombre de mécanismes pour aider les titulaires à satisfaire à l'exigence de la Loi concernant la possibilité raisonnable et équilibrée d'exprimer des vues différentes sur des sujets qui préoccupent le public. Bien qu'ils soient destinés principalement aux titulaires dont la programmation repose sur l'accès communautaire, ils peuvent se révéler utiles à d'autres radiodiffuseurs qui traitent de questions portant à controverse dans leur programmation.
En premier lieu, le titulaire a la responsabilité de cerner, lorsque c'est possible, les questions préoccupant le public dans sa programmation et d'élaborer des émissions appropriées pour garantir à l'avance un traitement équilibré des questions. Le Conseil reconnaît, toutefois, qu'il se peut qu'un titulaire ne soit pas au courant du traitement non équilibré d'une de ses émissions sur une question préoccupant le public jusqu'à ce qu'il en soit informé soit par le Conseil, par une plainte d'un membre du public ou par d'autres moyens, après que l'émission ait été diffusée.
Les procédures et mécanismes suivants représentent des moyens pouvant assurer que l'équilibre est maintenu. Aucun d'eux, toutefois, lorsque considéré individuellement, ne peut relever complètement le titulaire de sa responsabilité à cet égard. Ils doivent être vus comme des exemples ou des suggestions, et d'autres démarches ou mesures peuvent être requises pour assurer le respect de l'exigence en matière d'équilibre, selon la situation particulière de chaque titulaire.
Avis
Un titulaire peut rappeler régulièrement au public le rôle d'accès de la station ou du canal par des avis indiquant ses responsabilités quant à l'accès aux membres de la collectivité, ainsi que les procédures et les modalités qui permettent aux auditeurs de participer à la programmation. La diffusion de ces avis doit être prévue à des moments où les auditoires sont susceptibles d'être à l'écoute en grands nombres.
Émission "plate-forme"
Le titulaire pourrait inscrire à l'horaire une émission "plate-forme" ou de "rétroaction du public" qui donnerait aux auditeurs et aux groupes l'occasion d'exprimer des opinions différentes sur des questions controversées traitées au cours d'autres émissions du titulaire. De cette façon, les groupes ou les individus seraient en mesure de discuter de questions qui préoccupent le public sans que le titulaire n'ait à engager les ressources pour préparer une émission sur un sujet en particulier, ou pour l'acquérir. En même temps, il est rappelé aux titulaires que, comme ils sont responsables du contenu de leur programmation, ils devraient élaborer des critères d'accès appropriés. Toutefois, dans le cas où les auditeurs ou les téléspectateurs ne profiteraient pas de ce moyen pour exprimer leurs opinions, le titulaire n'est pas pour autant dégagé de sa responsabilité à l'égard de l'équilibre et il doit trouver une autre manière de l'offrir.
Accès pour une personne qui porte plainte
Même si un titulaire n'est pas tenu d'accorder du temps d'antenne aux personnes qui portent plainte, il peut choisir de répondre à l'exigence d'équilibre en offrant à la personne qui porte plainte la possibilité de présenter une opinion différente à l'intérieur de l'horaire de diffusion. Dans de tels cas, la personne pourrait se voir offrir une possibilité raisonnable d'exposer son point de vue, à un moment qui donnerait à l'auditoire une possibilité raisonnable d'entendre ce point de vue. Toutefois, si la personne qui porte plainte refuse l'offre, le titulaire n'est pas pour autant dégagé de sa responsabilité à l'égard de l'équilibre et il doit trouver une autre manière de l'offrir.
Recherche d'autres points de vue
S'il s'agit d'une question qui préoccupe le public, il ne sera habituellement pas difficile d'identifier les groupes ou les personnes qui ont des points de vue différents de ceux exprimés lors de l'émission en question. Ainsi, pour fournir l'équilibre, il pourrait s'agir d'offrir à au moins un d'entre eux la possibilité d'exprimer son point de vue.
Production d'une émission
Dans le très petit nombre de cas où la prestation de l'accès se lon les mécanismes susmentionnés ne donnent pas lieu à un équilibre sur une question particulière, le titulaire devra peut-être recourir à ses propres ressources pour produire ou acheter de la programmation qui répondrait à l'exigence d'équilibre.
Le Conseil signale que ses attentes quant à la qualité des émissions dans ces circonstances tiendraient nécessairement compte des ressources qui s'offrent au titulaire en cause.
En conclusion, le Conseil rappelle aux titulaires, y compris ceux de stations de radio communautaire et étudiante ainsi que les câblodistributeurs qui offrent de la programmation communautaire, l'importance d'offrir une possibilité raisonnable et équilibrée d'exprimer des points de vue différents sur des questions qui préoccupent le public. Selon le Conseil, les titulaires se doivent d'offrir une tribune dynamique pour la discussion de ces questions de telle sorte que leurs auditoires aient la chance d'entendre un éventail de points de vue.
Le Secrétaire général Fernand Bélisle

Date de modification :