ARCHIVÉ -  Décision Télécom CRTC 97-1

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Décision Télécom

Ottawa, le 13 janvier 1997
Décision Télécom CRTC 97-1
BELL CANADA ET BELL SYGMA INC. - MISE EN MARCHÉ CONJOINTE DES SERVICES INTERNET SYMPATICO
DÉCISION : Rejet de la requête visant à interdire à Bell Canada de mettre en marché le service Sympatico.
I LA REQUÊTE
Le 15 décembre 1995, M. Gary Reuter (M. Reuter), la Megatoon Station, la Metrix Interlink Corp., la Internet Communications Inc., Les Services en Ligne Infobahn, les Interlog Internet Services, la ComputerLink Online Inc., la Internet Direct Canada Inc., le Passport Online et le Toronto Freenet (les requérants) ont déposé, conformément aux Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications (les Règles), une requête en vertu de la partie VII demandant au Conseil d'interdire à Bell Canada (Bell) : (1) de s'adonner à la mise en marché ou à la publicité conjointes ou encore au groupement de compagnies de téléphone et de services Internet, y compris la mise en marché ou la distribution de Sympatico et d'autres services Internet fournis par des affiliées de Bell par l'intermédiaire de ses bureaux d'affaires, les Téléboutiques/Phonecentres; (2) d'utiliser ses contrats d'abonnés à ses bureaux d'affaires, à ses Téléboutiques/Phone-centres pour mettre en marché les services Internet de ses affiliées et renvoyer ces abonnés aux services Internet en question; et (3) de permettre à ses affiliées Internet d'avoir accès aux renseignements sur les abonnés de Bell ou d'utiliser ces renseignements pour aider à mettre en marché les services Internet de ses affiliées.
Les requérants ont en outre demandé une ordonnance obligeant Bell : (1) à divulguer la nature de son contrat de fourniture des installations et de services à ses affiliés, la Sygma Inc. (Sygma), la MediaLinx Interactive Inc. et la WorldLinx Telecommunications Inc. (la WorldLinx); et (2) à fournir des copies du Tarif général et des Tarifs des montages spéciaux (TMS) en vertu desquels les services et les installations sont fournis.
Sympatico est un service d'accès au réseau Internet offert par Sygma. Celle-ci a conclu un accord avec Bell, entre autres, pour distribuer et vendre le progiciel d'initialisation Sympatico qui comprend un fureteur et une période initiale fixe d'accès à Internet. En plus du progiciel, Sygma offrira l'interface de l'abonné, y compris la facturation et la perception, pour le service d'accès commuté et le site Web.
Les requérants ont fait valoir que la distribution par Bell du progiciel d'initialisation Sympatico conférerait à Sygma une préférence indue, ce qui est contraire au paragraphe 27(2) de la Loi sur les télécommunications (la Loi).
Les requérants ont ajouté que les garanties établies à l'égard de la mise en marché conjointe de services cellulaires dans les décisions Télécom CRTC 87-13 du 23 septembre 1987 intitulée Radio cellulaire - Opportunité des garanties structurelles et CRTC 92-13 du 29 juin 1992 intitulée Rogers Cantel Inc. c. Bell Canada - Mise en marché du service cellulaire, devraient s'appliquer à la mise en marché et à la promotion des produits et services Internet.
Les requérants ont fait remarquer que la décision du Conseil, dans la décision Télécom CRTC 95-16 du 15 août 1995 intitulée Association canadienne d'échange de messages Inc. c. Bell Canada - Mise en marché de services de téléappel, de ne pas appliquer les restrictions relatives à la mise en marché conjointe aux produits et aux services de téléappel ne concerne pas la question en rubrique parce que, contrairement au marché des services de téléappel, le marché Internet n'est ni développé ni concurrentiel et qu'il ne compte pas beaucoup de fournisseurs de services.
II HISTORIQUE
Dans une lettre datée du 23 novembre 1995, M. Reuter a demandé, en vertu du paragraphe 56(5) de la partie VI des Règles, une ordonnance provisoire interdisant à Bell de s'adonner à la mise en marché conjointe avec Sygma et, en particulier, dans ses Téléboutiques/Phone-centres et dans la mise à la poste de ses états de compte.
Dans une lettre du 30 novembre 1995, le Conseil a rejeté la requête, déclarant qu'à son avis, de prime abord du moins, la distribution des produits et services de Sygma par l'entremise des Téléboutiques de Bell ne signifierait pas conférer une préférence indue à Sygma, ce qui serait contraire au paragraphe 27(2) de la Loi pas plus qu'elle ne justifierait l'application des restrictions relatives à la mise en marché conjointe aux services Internet.
Dans sa lettre, le Conseil a souligné que le marché des services Internet connaît une rapide expansion, qu'il est concurrentiel et très dynamique, sans obstacles réglementaires apparents ou autres à l'entrée de concurrents, et que de nombreux fournisseurs de services Internet (FSI) y sont entrés en relativement peu de temps. Il a donc conclu que le marché des FSI est au moins aussi concurrentiel que celui des services de téléappel auquel il avait décidé antérieurement de ne pas appliquer les garanties de mise en marché conjointe du fait notamment, selon ses conclusions, que le marché était trop concurrentiel pour qu'une stratégie de ciblage ou de prix d'éviction pratiquée par Bell puisse être rentable.
Le Conseil a également estimé que, contrairement aux services cellulaires, le lien entre la fourniture de services téléphoniques monopolistiques et la fourniture de services Internet ne semble pas particulièrement fort. Il a finalement précisé que, comme les Téléboutiques ne sont qu'un des nombreux points de distribution du progiciel d'initialisation Sympatico, y interdire la mise en marché du produit Sympatico risque d'avoir peu d'effet.
Le Conseil a également prévu l'examen de la requête de M. Reuter visant un redressement définitif.
III POSITIONS DES PARTIES
Les requérants ont déclaré que le marché des services Internet est une industrie naissante et qu'il serait donc justifié d'exiger des garanties pour assurer que les compagnies membres de Stentor n'utilisent pas leur position dominante dans le marché des services téléphoniques locaux pour conférer une préférence indue et un avantage anticoncurrentiel à leurs affiliées Internet.
Bell a fait valoir qu'il ne conviendrait pas que le Conseil applique au marché des FSI les garanties établies à l'égard de la mise en marché conjointe. Elle a soutenu que le marché des FSI est très concurrentiel et qu'un grand nombre de fournisseurs de services Internet ont réussi à pénétrer le marché dans un délai relativement court.
Les requérants ont soutenu que, même si Sympatico est offert en principe par Sygma, c'est Bell qui en fait la promotion et qui le vend comme son service Internet, conférant ainsi une préférence indue à Sygma, ce qui est contraire au paragraphe 27(2) de la Loi.
Bell a déclaré que les conditions de mise en marché par Bell de Sympatico ne confèrent aucune préférence indue à Sygma par rapport à d'autres tiers dont Bell fait la promotion des produits dans ses Téléboutiques/Phonecentres. Elle a indiqué que les coûts associés à la mise en marché de Sympatico sont recouvrés auprès de Sygma.
Les requérants ont ajouté que Bell utilise ses bureaux d'affaires locaux et centres de commande pour intercepter les commandes d'abonnés de FSI concurrents et que Bell a pour politique de renvoyer les abonnés uniquement à Sympatico.
Les requérants ont soutenu que Bell abuse de son accès aux renseignements sur les abonnés des services locaux monopolistiques pour mettre en marché Sympatico et effectivement détourner les abonnés des FSI vers Sympatico.
Bell a répliqué qu'elle a pour politique de ne pas mettre en marché Sympatico en même temps que les demandes pour ses autres services et qu'elle a émis des directives de politique qu'elle a retransmises à tous les bureaux d'affaires.
Bell a indiqué qu'aucun renseignement confidentiel sur les abonnés n'est fourni à Sygma en ce qui a trait à la vente ou à la mise en marché de Sympatico, précisant que pour vendre et mettre en marché Sympatico, aucune obligation n'est faite de transférer ces renseignements.
Pour ce qui est de la question de la co-implantation, les requérants ont fait observer que Bell fournit les services et les installations pour Sympatico conformément à un TMS et que Bell a conclu un accord avec Sygma afin de permettre la co-implantation.
Les requérants ont déclaré que lorsque M. Reuter a demandé la co-implantation, Bell a rejeté sa demande puis, après avoir établi la co-implantation pour Sympatico, elle a rouvert les négociations.
Bell a nié offrir à Sygma des arrangements de services de co-implantation préférentiels. Elle a affirmé qu'elle fournit ses services en vertu de son Tarif de montage spécial 7396 et conformément à un contrat de distribution de service Internet Bell Sygma (le contrat de distribution), déposé auprès du Conseil à titre confidentiel.
Bell a affirmé que la co-implantation aux conditions semblables à celles qui sont données à Sygma est offerte aux FSI sous réserve de la disponibilité des installations dans le central de Bell dans lequel un FSI demande la co-implantation.
IV CONCLUSIONS
Le Conseil estime que, conformément aux critères d'évaluation de la concurrence établis dans la décision Télécom CRTC 94-19 du 16 septembre 1994 intitulée Examen du cadre de réglementation, le marché des services Internet possède bon nombre des caractéristiques d'un marché très dynamique et concurrentiel. À son avis, la concurrence des prix et la concurrence hors-prix existent; le marché comprend un grand nombre de FSI, allant de petites exploitations à de gros concurrents établis à l'étranger; il ne semble pas y avoir d'obstacles majeurs à l'entrée de concurrents comme le prouve le grand nombre de nouveaux venus dans le marché dans un délai relativement court. De l'avis du Conseil, Sygma n'est pas dominante dans le marché des FSI et de ce fait, elle ne détient pas de pouvoir de marché important.
Le Conseil fait remarquer qu'en plus des Téléboutiques de Bell, Sygma distribue et met en marché Sympatico de nombreuses façons comme par l'entremise de détaillants d'ordinateurs, de logiciels et de matériel électronique. Il juge donc que les garanties relatives à la mise en marché conjointe réclamées par les requérants ne modifieraient pas sensiblement l'incidence sur la concurrence de l'entrée de Sygma dans le marché des services Internet.
Pour ce qui est des allégations particulières de préférence indue, le Conseil est d'avis que la mise en marché et la distribution de Sympatico par Bell ne confèrent pas de préférence indue à Sygma. Bell représente seulement un des nombreux canaux de distribution des progiciels d'initialisation Internet, de sorte que toute préférence accordée à Sympatico n'est pas indue. Le Conseil souligne que le service Internet Sympatico en place et toutes les interfaces de l'abonné, y compris la facturation, la perception et la responsabilité, se font par l'entremise de Sygma. Il signale aussi que le contrat de distribution est non exclusif et qu'il n'est pas interdit à Bell de distribuer les services d'autres FSI. À son avis, les arrangements de distribution et de mise en marché contenus dans le contrat de distribution, conjugués à la déclaration de Bell selon laquelle Sygma paie tous les coûts associés à la mise en marché de Sympatico, prouvent que Bell n'interfinance pas les services concurrentiels de Sygma.
Quant à la question des renvois des abonnés, le Conseil fait remarquer que Bell a émis (et plus tard retransmis à ses employés) des directives interdisant la promotion de Sympatico auprès des abonnés qui s'informent au sujet d'autres services de Bell. Il estime que Bell ne confère pas de préférence indue à Sygma à cet égard.
En ce qui concerne la divulgation des renseignements sur les abonnés, le Conseil souligne que les requérants n'ont pas prouvé que Bell permet à Sygma ou à d'autres affiliées d'accéder à des renseignements sur les abonnés de Bell ou utilise son accès à des renseignements sur les abonnés des services locaux monopolistiques pour mettre en marché Sympatico ou pour détourner les abonnés de FSI vers Sympatico. Il estime qu'il n'y a pas lieu de rejeter la déclaration de Bell selon laquelle aucun renseignement confidentiel sur les abonnés n'est donné à Sygma à l'égard de la vente ou de la mise en marché de Sympatico. Il ne peut conclure non plus que Bell utilise des renseignements confidentiels sur les abonnés pour conférer un avantage à Sygma.
Quant à l'allégation des requérants selon laquelle Bell fournit des arrangements d'accès préférentiels à ses affiliées, le Conseil est convaincu qu'il existe une relation sans lien de dépendance entre Bell et Sygma et que tout ce dont Sygma a besoin et qu'elle demande à Bell est acheté à des taux tarifés.
Le Conseil signale également qu'aux dires de Bell, la co-implantation est offerte à d'autres FSI, à des conditions semblables à celles qu'elle offre à ses affiliées, sous réserve de la disponibilité d'installations dans le central dans lequel un FSI demande la co-implantation. Bell a fait savoir qu'elle soumettra à l'approbation du Conseil les tarifs additionnels qui peuvent être requis à cet égard.
À la lumière des considérations ci-dessus, le Conseil est d'avis que la fourniture par Bell de la co-implantation à Sygma ne confère pas à cette dernière de préférence indue. Il fait remarquer, cependant, que si Bell indique qu'aucune place n'est disponible pour un autre FSI qui demande la co-implantation, elle est tenue de justifier pourquoi et de trouver des solutions de rechange comparables.
En conclusion, le Conseil estime que les activités de Bell au chapitre de la mise en marché et de la distribution de Sympatico de Sygma par l'entremise de ses Téléboutiques/Phonecentres ne confèrent pas de préférence indue ou déraisonnable à Sygma, ce qui serait contraire au paragraphe 27(2) de la Loi. La requête est donc par la présente rejetée.

Le Secrétaire général
Allan J. Darling
DEC97-1_0
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