ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2003-205

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Décision de radiodiffusion CRTC 2003-205

  Ottawa, le 2 juillet 2003
  Astral Media inc., au nom de 9122-8106 Québec inc., une société constituée de Groupe TVA inc. et de Radio Nord Communications inc.
Montréal, Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières, Shawinigan, Saguenay et Gatineau (Québec)
  Demandes 2002-0767-2, 2002-0768-0, 2002-0769-8, 2002-0770-6, 2002-0771-3, 2002-0772-1, 2002-0773-9, 2002-0774-7, 2002-0775-5, 2002-0776-3, 2002-0777-1, 2002-0778-9
Audience publique à Montréal (Québec)
3 février 2003
 

Acquisition d'actifs en radio au Québec

  Le Conseil refuse les demandes présentées par Astral Media inc. (Astral Média), au nom de 9122-8106 Québec inc., visant l'autorisation d'acquérir les actifs d'entreprises radiophoniques du Québec détenus indirectement par Astral Média, incluant huit stations AM, deux stations numériques et trois réseaux de radio, ainsi que l'actif de la station de radio CFOM-FM Lévis détenu par les Entreprises Radio Etchemin inc. La liste des entreprises de radio qui font l'objet de ces demandes se trouve en annexe.
  Les demandes soulevaient diverses préoccupations ayant trait en particulier à la concentration de la propriété et à la propriété croisée des médias. La requérante n'a pas convaincu le Conseil que les demandes telles que soumises représentent la meilleure proposition possible dans les circonstances. Le Conseil n'est pas convaincu que la stratégie de relance de la radio AM au Québec mise de l'avant par la requérante ainsi que ses avantages éventuels contrebalanceraient de manière significative les préoccupations rattachées à la concentration de la propriété et à la propriété croisée des médias.
 

Les parties en cause

1.

La titulaire proposée des entreprises de radiodiffusion faisant partie de la transaction serait la société constituée sous la dénomination 9122-8106 Québec inc. (TVA/RNC). Les actionnaires de TVA/RNC seraient le Groupe TVA inc. (TVA) avec 60 % des actions avec droit de vote et Radio Nord Communications inc. (RNC) avec 40 % des actions avec droit de vote. TVA détiendrait le contrôle de TVA/RNC.

2.

TVA est une société de communications intégrée qui jouit d'une présence significative à la télévision québécoise. TVA est la plus importante entreprise de radiodiffusion privée dans le secteur de la télévision traditionnelle de langue française au Québec, détenant six des dix stations du réseau TVA qui desservent Montréal, Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières, Rimouski et Saguenay.

3.

TVA est aussi active dans le secteur des services spécialisés de télévision. Elle est titulaire de Le Canal Nouvelles (LCN), un service d'information continue, en plus de détenir des participations dans d'autres services spécialisés de programmation ou de télévision à la carte, dont Canal Indigo, ainsi que dans des services spécialisés numériques de langues française et anglaise de catégories 1 et 2 récemment lancés ou devant être lancés, dont LCN Affaires.

4.

Le principal actionnaire de TVA, Quebecor Média inc. (QMI), joue un rôle significatif dans le secteur des journaux et des revues au Québec, notamment avec ses quotidiens tels que Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec, et ses magazines tels que Le Lundi, 7 Jours et Dernière Heure. En plus de ses diverses activités dans des maisons d'édition et un portail Internet, QMI contrôle le plus important câblodistributeur du Québec, Vidéotron ltée (Vidéotron) ainsi que Distribution Select et le Groupe Archambault inc.

5.

D'autre part, RNC est une entreprise contrôlée par la famille Gourd. Elle exploite cinq stations de télévision traditionnelle de langue française affiliées aux réseaux TVA, TQS ou de la Société Radio-Canada et six stations de radio FM desservant principalement les marchés de l'Abitibi-Témiscamingue et de l'Outaouais. RNC contrôle également une maison de production dans la région de Gatineau-Ottawa.
 

Contexte

6.

Les demandes en instance font suite à Transfert de contrôle de 3903206 Canada Inc., de Télémédia Radio Atlantique inc. et de 50 % de Radiomedia inc. à Astral Radio inc., décision de radiodiffusion CRTC 2002-90, 19 avril 2002 (la décision 2002-90). Par cette décision, le Conseil approuvait des demandes visant l'autorisation de transférer le contrôle effectif des entreprises de radiodiffusion détenues par Télémédia Radio inc. (Télémédia) au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse à Astral Radio inc., une filiale d'Astral Media inc. (Astral Média).
7. La décision 2002-90 était assujettie à deux conditions suspensives dont l'une portait sur la cession de la station CFOM-FM Lévis à une tierce partie sans liens avec Astral Média. Cette dernière s'était engagée à se départir de CFOM-FM afin de se conformer à la politique du Conseil relative à la propriété commune de stations de radio dans un même marché, exposée dans Politique de 1998 concernant la radio commerciale, avis public CRTC 1998-41, 30 avril 1998 (la Politique sur la radio commerciale).

8.

De plus, dans la décision 2002-90, le Conseil avait noté que le 21 décembre 2001, le Commissaire de la concurrence avait déposé une demande au Tribunal de la concurrence en vertu de l'article 92 de la Loi sur la concurrence afin de s'opposer à l'acquisition proposée des huit stations de radio de langue française de Télémédia situées au Québec et à l'acquisition de la participation de 50 % que détient Télémédia dans Radiomédia. Astral Média a présenté les demandes en instance en vue de se départir des entreprises de radio du Québec mentionnées en annexe suivant les termes d'une entente de consentement, en septembre 2002, entre le Commissaire de la concurrence, Astral Média et Télémédia, qui fut enregistrée au Tribunal de la concurrence. Cette entente mettait ainsi fin à la demande du Commissaire de la concurrence au Tribunal de la concurrence.
 

Interventions

9.

Le Conseil a annoncé les demandes en instance dans l'avis d'audience publique de radiodiffusion CRTC 2002-13 du 27 novembre 2002 (l'avis d'audience publique 2002-13). Il indiquait dans cet avis qu'il souhaitait discuter avec la requérante de certaines questions, dont notamment la concentration de la propriété et la propriété croisée, de la contribution proposée à la réalisation des objectifs de la Loi sur la radiodiffusion, en particulier de la production d'émissions locales et régionales, ainsi que de la valeur de la transaction et des avantages tangibles proposés. Le Conseil invitait également les personnes intéressées à lui soumettre leurs observations au sujet des demandes.

10.

Le Conseil a reçu 64 interventions en réponse à l'avis d'audience publique 2002-13. Alors que 54 interventions étaient favorables à l'approbation des demandes, 5 y étaient défavorables et les 5 autres contenaient diverses observations à leur sujet.

11.

Certains intervenants ont exprimé leurs craintes face à la situation de propriété croisée qui résulterait de la transaction proposée. Selon eux, l'ajout de stations de radio sous TVA/RNC, et du même coup sous QMI, aurait pour effet d'accentuer la situation de propriété croisée des médias au Québec dans les mains d'un seul groupe. Ils ont soutenu que cette situation privilégiée pourrait se traduire par une baisse de la diversité des voix éditoriales offertes par les différents médias et que les balises proposées à cet effet par TVA/RNC seraient insuffisantes pour assurer l'étanchéité véritable des salles de nouvelles des médias en cause.

12.

En ce qui a trait au plan de relance de la radio AM au Québec, des intervenants ont déclaré que la proposition de TVA/RNC ne se traduirait pas par une véritable relance des stations AM de langue française au Québec et que les investissements proposés ne seraient pas suffisants et seraient utilisés inadéquatement. Des intervenants ont également remis en question la valeur estimée des stations de radio qui font partie de la transaction et par conséquent le montant des avantages tangibles proposés par TVA/RNC.
 

Propriété croisée

 

Préoccupations des intervenants

13.

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), la Fédération nationale des communications, le Conseil provincial du secteur des communications et le Syndicat des employés(ées) de TVA se sont opposés à la transaction en raison de l'augmentation des niveaux de concentration et de propriété croisée des médias qui en découlerait. Ces derniers sont d'avis que les synergies qui résulteraient de la transaction proposée accentueraient leurs inquiétudes face à la situation de propriété croisée déjà présente. Ils soutiennent que les synergies anticipées conduiraient à une certaine uniformisation de l'information et à une baisse de sa qualité résultant d'une réduction de la diversité des voix. Les intervenants ont aussi exprimé leur insatisfaction au sujet des engagements pris par TVA/RNC concernant l'autonomie des salles de nouvelles de la radio par rapport à celles de la télévision. De plus, selon eux, le réseau AM serait voué à devenir un véhicule promotionnel pour les autres fenêtres médiatiques de QMI, entre autres la télévision, les disques (via le Groupe Archambault inc.) et les journaux.
 

Réponse de TVA/RNC

14.

Dans sa réponse aux interventions, TVA/RNC a déclaré qu'elle ne nie pas que la transaction proposée entraînerait un certain accroissement de la concentration et de la propriété croisée. Cependant, elle a souligné que cet accroissement serait modeste, compte tenu de la taille de la transaction, et qu'il ne modifierait pas de façon significative les grands équilibres existants entre les nombreux groupes médiatiques en concurrence au Québec et a fortiori au Canada.

15.

En ce qui a trait aux préoccupations relatives à la diversité des voix et à l'indépendance éditoriale, TVA/RNC a déclaré que les balises proposées étaient au moins équivalentes et en général très supérieures à celles imposées à tout autre groupe de radiodiffusion canadien en situation de propriété croisée. Elle a proposé que la radio soit soumise aux mêmes conditions que celles contenues dans le code de déontologie qui régit présentement les activités en télévision de TVA, LCN, LCN Affaires et les journaux de QMI à la suite de Transfert du contrôle effectif de TVA à Quebecor Média inc., décision CRTC 2001-384, 5 juillet 2001. TVA/RNC a toutefois précisé que, pour l'application du code de déontologie, sa proposition se limite aux interactions entre la radio et les journaux de QMI, comme le code actuel se limite aux interactions entre la télévision et les journaux de QMI, mais qu'elle ne devait pas être élargie aux interactions entre la radio et la télévision. À cet effet, elle a proposé, comme autre balise, que chaque station de radio ait sa propre salle des nouvelles, un chef de pupitre distinct et ses propres journalistes de façon à assurer une indépendance des salles des nouvelles et des choix éditoriaux. TVA/RNC était aussi disposée à ce que la surveillance de l'application de ses engagements soit confiée à un comité de surveillance indépendant qui ferait rapport annuellement au Conseil.
 

Analyse du Conseil

16. La question de la propriété croisée des médias est abordée dans la Politique sur la radio commerciale. Le Conseil y note les préoccupations concernant l'impact sur la concurrence et la diversité des sources de nouvelles dans un marché que soulève la propriété croisée (ou propriété mixte). Le Conseil signale en particulier que le fait pour une personne de posséder ou de contrôler plusieurs médias dans un marché donné, dont des entreprises de radio, de télévision, de presse et de distribution, pourrait lui conférer une place dominante susceptible d'affecter le niveau de concurrence dans ce marché. Cette situation pourrait également susciter des préoccupations quant au contrôle possible de l'accès à l'information et à la concentration du marché de la publicité entre les mains d'un seul groupe. Le Conseil ajoute qu'il évaluera ces préoccupations lorsqu'il examinera des demandes de licence ou de transfert de la propriété ou du contrôle d'entreprises de radiodiffusion.
17. Le Conseil note qu'en raison de son association avec le groupe corporatif QMI, le partenariat TVA/RNC bénéficierait d'une situation particulière à la suite de la transaction proposée. Cependant, le Conseil note également que TVA obtient plus de 47 % des heures d'écoute télévisuelles des francophones (télévision traditionnelle et services spécialisés et payants analogiques) et que le partenariat TVA/RNC obtiendrait à la suite de la transaction plus de 25 % des heures d'écoute pour l'ensemble de la radiodiffusion du secteur privé au Québec francophone (incluant la télévision traditionnelle, les services spécialisés et la radio). De plus, QMI détient plus de 38 % de l'ensemble des tirages des quotidiens québécois alors que le Groupe Archambault inc. est numéro un dans la distribution de disques et que Vidéotron est le principal câblodistributeur du Québec. Dans tous les marchés visés par la transaction, le groupe QMI serait aussi présent dans le marché de la radio. Malgré que cette présence ne serait pas significative, le Conseil constate que le groupe QMI se retrouverait dans une situation privilégiée sans précédent où il serait le seul groupe corporatif, dans trois marchés spécifiques, soit Montréal, Québec et Saguenay, à détenir des intérêts à la fois dans la radio, la télévision, les journaux locaux, les services de télévision spécialisés et payants et les magazines, en plus d'avoir une présence via la télévision communautaire (le canal VOX de Vidéotron).
18. Pour être en mesure de vérifier si les avantages pouvant découler de l'approbation de ces demandes contrebalancent les préoccupations qu'elles soulèvent, le Conseil estime que les préoccupations relatives à la propriété croisée soulevées par les demandes en instance doivent être mesurées à l'aune de l'objectif principal qui est au cour de la proposition de TVA/RNC, soit la relance de la radio AM au Québec.
 

Le plan de relance de la radio AM

19. TVA/RNC a déclaré que sa stratégie de relance de la radio AM s'articulerait autour de quatre axes principaux :
 
  • la création d'un véritable réseau;
 
  • une présence locale et régionale;
 
  • le repositionnement et la valorisation des contenus;
 
  • l'établissement d'une marque forte.
20. La requérante a précisé que son objectif ultime serait de développer un véritable réseau radiophonique de contenu verbal de langue française qui soit dynamique, près des gens, incontournable et qui puisse regagner la faveur du public, attirer de nouveau les annonceurs, concurrencer plus efficacement les autres médias et renouer avec une rentabilité essentielle à sa survie.
21. En ce qui a trait à CFOM-FM, la requérante a déclaré que son plan de développement viserait à consolider sa position dans le marché de Québec et à améliorer sa programmation dans la formule actuelle. Elle a ajouté que les synergies anticipées entre CFOM-FM et CHRC à Québec constituent une composante très importante de la transaction étant donné que CHRC est de loin la station la plus lourdement déficitaire du groupe de stations AM visées par la transaction. Dans ce contexte, elle a déclaré que l'acquisition de CFOM-FM était indissociable du reste de la transaction.
 

Préoccupations des intervenants

22. Pour la FPJQ, la force de la radio AM c'est son information et c'est pourtant, à son avis, le secteur le plus gravement négligé et le plus sous-financé. La FPJQ soutient que les engagements minimums reliés au plan de relance proposé par TVA/RNC devraient consister à doter toutes les salles de nouvelles de la radio d'un budget accru par rapport à la situation présente. La FPJQ a ajouté à l'audience : « Le statu quo, c'est l'offre qui est devant vous et nous considérons que c'est insuffisant ».
23. Le Syndicat des employé(e)s CKRS-CJAB a déclaré pour sa part : « Nous sommes d'avis, comme le requérant, que la radio de contenu doit redevenir là où elle n'est plus, un incontournable. Mais, outre ces voux pieux, le requérant est étrangement silencieux sur la façon dont il entend atteindre cet objectif ». En se référant à la restructuration de la radio AM survenue au Québec dans les années 1994 et 1995, le Conseil provincial du secteur des communications a déclaré pour sa part : « Les promesses n'ont pas été réalisées après 1994 et c'est à peu près les mêmes joueurs qui nous repromettent la relance de la radio ». Plusieurs intervenants, dont entre autres la Fédération nationale des communications, ont également mis en doute le réalisme du plan d'affaires de TVA/RNC.
24. TVA/RNC n'a pas offert de commentaires spécifiques en réponse à ces interventions, autres que de maintenir ses engagements en matière de programmation.
 

Analyse du Conseil

25. Afin d'évaluer l'ampleur et le réalisme du plan de relance de la radio AM au Québec, le Conseil a examiné la proposition de TVA/RNC selon deux axes principaux :
 
  • la programmation proposée, afin de vérifier s'il y aurait bien un accroissement de service, une amélioration de la qualité et une diversité de voix éditoriale;
 
  • le plan d'affaires, afin de vérifier si les prévisions financières sont réalistes et supportent une relance de la radio AM.
  La programmation proposée
26. En ce qui a trait au nombre d'heures hebdomadaires de programmation locale, TVA/RNC s'est engagée dans un premier temps à maintenir les niveaux minimums actuels, soit une moyenne de 36 heures et 25 minutes. Elle a ajouté que son objectif était de viser à l'harmonisation des heures de programmation locale et d'atteindre un volume de 41 heures par semaine de programmation locale au terme des licences des stations de Trois-Rivières, de Sherbrooke, de Gatineau et de Saguenay. La requérante a toutefois précisé qu'elle ne souhaitait pas que cet objectif de programmation locale soit imposé comme condition de licence.
27. Au chapitre des nouvelles, TVA/RNC s'est engagée à maintenir les volumes hebdomadaires totaux de production, soit une moyenne de 13 heures et 41 minutes, ainsi qu'un minimum de 2 heures et 32 minutes de nouvelles locales par semaine à chaque station. Elle a aussi déclaré que la cueillette, le traitement et la diffusion des nouvelles se feraient avec l'effectif et les ressources qui sont déjà en place.
28. De plus, à la suite d'un examen des données historiques des stations visées par la transaction en ce qui a trait aux dépenses de programmation, le Conseil constate que le plan d'affaires de TVA/RNC propose essentiellement de maintenir les dépenses de programmation au même niveau qu'actuellement, compte tenu d'une croissance de 2 % par année aux fins de l'inflation. Il n'y a aucune preuve que des fonds nouveaux seraient investis. Les prévisions financières de la requérante semblent indiquer que TVA/RNC réinvestirait dans la programmation les économies découlant des synergies réalisées dans le secteur de la programmation, alors que celles découlant des synergies réalisées dans les autres secteurs seraient surtout affectées à l'amélioration de la rentabilité. Cependant, puisque TVA/RNC n'a pas présenté une ventilation des dépenses prévues en programmation pour chaque station, le Conseil n'a pas été en mesure d'évaluer l'affectation des dépenses, notamment dans le cas de CHRC où la requérante a déclaré qu'il lui faudrait investir davantage, sans toutefois spécifier de montant.
29. Le Conseil note également que les plans de TVA/RNC ne contiennent aucune indication que la radio AM serait distincte et ne deviendrait pas éventuellement un véhicule promotionnel additionnel pour les autres actifs de QMI. La requérante a déclaré qu'elle mise beaucoup sur les synergies avec ses autres médias pour assurer le succès de son projet, ce qui pourrait avoir pour conséquence une certaine uniformisation de la programmation, notamment dans les secteurs des émissions d'affaires publiques et d'intérêt général. TVA/RNC a précisé que certaines formules de programmation télévisuelle pourraient même être adaptées pour diffusion à la radio. Cette situation est particulièrement préoccupante à Québec où la requérante n'a pas présenté comme tel un plan de relance élaboré pour la station CHRC et mise plutôt sur les synergies prévues entre CHRC et CFOM-FM pour remettre sur pied la station AM, ce qui augmente le risque d'une intégration des services offerts par ces deux stations.
  Le plan d'affaires
30. Dans leur ensemble, les stations de radio AM visées par la transaction ont été non rentables au cours de la période 1997-2002, à l'exception de CKAC dont la situation financière est relativement saine. La station CHRC a subi des pertes importantes durant cette période.
31. Pour la période 2003-2007, TVA/RNC prévoit une croissance des recettes des stations AM de 3,4 millions de dollars, à des taux de croissance annuelle variant de 2,3 % à 6,2 %. La croissance proviendrait principalement des ventes locales alors que le reste proviendrait d'une augmentation des ventes nationales. Pour atteindre ses prévisions, la requérante compte sur la promotion croisée avec les autres médias sous la gouverne de QMI.
32. Le Conseil estime que les stations AM pourraient bénéficier de la promotion croisée pour générer des ventes de publicité nationale additionnelle. Considérant toutefois la tendance actuelle ayant trait à la progression des recettes publicitaires des stations de radio du Québec et de l'ensemble du Canada, le Conseil doute que cette croissance serait suffisante pour supporter les taux de croissance prévus par TVA/RNC. Le Conseil signale à cet effet que la radio est devenue un média axé principalement sur le local et que 80 % de ses recettes proviennent des ventes locales, pourcentage qui atteint 90 % dans le cas des stations oeuvrant hors des grandes agglomérations. Cette tendance a été confirmée à l'audience publique par le représentant de Carat Canada qui a affirmé que ce phénomène se vérifie non seulement en région mais également à Montréal. Il ajoutait que plus la télévision se fragmente avec les canaux spécialisés, plus la radio sera un médium local.
33. Le Conseil constate également que le plan de relance de la radio AM nécessitera des investissements considérables et que ceux-ci ne sont pas reflétés dans le plan d'affaires soumis par TVA/RNC. Ceci est particulièrement vrai pour le marché de Québec qui, selon la requérante, représente le véritable enjeu et constitue l'une des clés du succès de son plan de relance. Alors que les recettes de CHRC ont diminué de près de 80 % de 1997 à 2002, la requérante n'a fourni aucun détail concernant ses projets de relance de cette station, voulant se réserver le « maximum de flexibilité ».
 

Conclusion

34. Tel que déclaré dans Éléments dont le Conseil tient compte lorsqu'il étudie des demandes de transfert de propriété ou de contrôle d'entreprises de radiodiffusion, avis public CRTC 1989-109, 28 septembre 1989, puisque le Conseil ne sollicite pas de demandes de ce genre et qu'il n'y a donc qu'une seule proposition qui lui est soumise, c'est à la requérante qu'il incombe de prouver au Conseil que la demande soumise représente la meilleure proposition possible dans les circonstances, considérant les préoccupations d'ordre général du Conseil relativement à des transactions de ce genre.
35. De plus, lorsqu'une transaction comme celle en instance soulève des préoccupations particulières au sujet de la concentration de la propriété et de la propriété croisée, il incombe à la requérante de démontrer au Conseil que les avantages qui découlent de sa proposition l'emportent sur les préoccupations qu'elle soulève et que son approbation servirait l'intérêt public et bénéficierait au système de radiodiffusion dans son ensemble.
36. À la suite de son examen des propositions de TVA/RNC en matière de programmation et des divers éléments de son plan d'affaires, le Conseil conclut que le plan de relance proposé par la requérante n'est pas suffisamment détaillé, concret et tangible pour démontrer qu'il entraînerait une véritable relance de la radio AM au Québec. Le Conseil constate que le plan de relance s'avère très conservateur en ce qui a trait aux dépenses et très optimiste sur le plan des revenus prévus. De plus, il ne contient aucun détail pour chacune des stations en cause, en particulier pour la relance de la station CHRC, le maillon faible de l'ensemble des stations AM visées par la transaction.
37. En ce qui a trait à CFOM-FM, le Conseil constate que cette station offre une formule de programmation à prépondérance musicale qui est essentiellement différente de la formule à prédominance verbale des stations AM. Le Conseil estime que l'acquisition de CFOM-FM, qui n'est pas dans une situation financière précaire, n'est pas nécessaire au plan de relance des stations AM visées par la transaction proposée. De plus, le Conseil n'est pas convaincu que l'acquisition de CFOM-FM serait indissociable de celle de CHRC puisque les synergies devant provenir de la propriété commune de ces deux stations, telle que proposée par TVA/RNC, pourraient tout aussi bien se réaliser grâce à la propriété de CFCM-TV, la station locale de TVA. De plus, le Conseil constate que la propriété dans le même marché de CFOM-FM et de CHRC, combinée avec la station de télévision CFCM-TV, le quotidien Le Journal de Québec et l'hebdomadaire Le Peuple Tribune, aurait représenté un niveau très élevé de concentration de la propriété à Québec.
38. En raison de tout ce qui précède, le Conseil refuse les demandes présentées par Astral Média, au nom de TVA/RNC, en vue d'acquérir l'actif des entreprises de radiodiffusion mentionnées en annexe. La requérante n'a pas convaincu le Conseil que les demandes telles que soumises représentent la meilleure proposition possible dans les circonstances. Le Conseil n'est pas convaincu que la stratégie de relance de la radio AM au Québec mise de l'avant par la requérante ainsi que ses avantages éventuels contrebalanceraient de manière significative les préoccupations rattachées à la concentration de la propriété et à la propriété croisée des médias.
39. À la suite de la présente décision, les actifs des stations AM et de CFOM-FM continueront d'être détenus par un fiduciaire. Le Conseil s'attend à ce qu'Astral Média prenne toutes les mesures nécessaires afin de trouver le plus rapidement possible une solution permanente au sujet de la propriété de ces stations de radio. En ce qui a trait plus spécifiquement à la station CFOM-FM, Astral Média devra transmettre immédiatement un avis de vente au fiduciaire afin que celui-ci soit en mesure de déposer auprès du Conseil, dans les 90 jours de la date de la présente décision, une nouvelle demande visant le transfert de l'actif de CFOM-FM à une tierce partie sans liens avec Astral Média.
 

Autres questions

40. Tel qu'indiqué dans l'avis d'audience publique 2002-13, le Conseil a également discuté à l'audience publique des mesures additionnelles qui devraient être mises en place pour atténuer les préoccupations relatives à la propriété, de la valeur de la transaction telle que proposée par la requérante ainsi que de la pertinence de la valeur et de la nature des avantages tangibles proposés. Dans son intervention, l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) avait soulevé des préoccupations au sujet de ces questions, notamment en ce qui a trait au libre accès aux ondes de ces stations par tous les artistes, à la juste valeur marchande de l'actif vendu et à la base de calcul des avantages tangibles proposés par TVA/RNC. Étant donné que les demandes sont refusées, le Conseil estime qu'il n'y a pas lieu de se pencher davantage sur ces questions.
41. Le Conseil a pris note de l'intervention défavorable soumise par la Société pour la promotion de la relève musicale de l'espace francophone (SOPREF). L'opposition de la SOPREF était basée essentiellement sur des questions de procédure. Le Conseil signale que l'examen des demandes en instance a été conduit en conformité avec les Règles de procédure du CRTC (C.R.C., ch. 375) présentement en vigueur.
  Secrétaire général
  La présente décision est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consultée sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca

 

Annexe à la décision de radiodiffusion CRTC 2003-205

 

Liste des entreprises de radio du Québec visées par la transaction

 

Stations sous la propriété d'Astral Media inc.

 
  • 1 CKRS Saguenay*
 
  • 2 CJRC Gatineau*
 
  • 3 CKSM Shawinigan
 
  • 4 CFOM-FM Lévis*
 
  • 5 Radio numérique CJRC Gatineau
 

Stations sous la propriété de Télémédia Radio inc. et dont le contrôle a été transféré à Astral Media inc. dans le cadre de la décision CRTC 2002-90

 
  • 1 CKAC Montréal*
 
  • 2 CHRC Québec*
 
  • 3 CHLN Trois-Rivières*
 
  • 4 CHLT Sherbrooke*
 
  • 5 CKTS Sherbrooke
 
  • 6 Radio numérique CKAC Montréal
 
  • 7 Réseau d'information Radiomédia
 
  • 8 Réseau de hockey des Canadiens de Montréal
 
  • 9 Réseau de baseball des Expos de Montréal
  * Stations visées par l'Entente de consentement intervenue entre Astral Media inc., Télémédia Radio inc. et le Commissaire de la concurrence.

Mise à jour : 2003-07-02

Date de modification :